La pauvre-type attitude : une de mes grandes préoccupations

Maintenant que je me retrouve à nouveau, de par mon métier de prof, sur le chemin des écoliers, je suis particulièrement attentif aux élèves qui se retrouvent à part dans les groupes, rejetés de tous, qu’on abandonne sur la cour parce qu’on s’imagine qu’ils ne sont pas intéressants, qu’ils sont cons, pas drôles, et qu’ils le resteront toute leur vie. Parce que moi aussi, quand j’avais leur âge, j’étais cet adolescent-là, transparent, peu digne d’intérêt, qui ne faisait pas rire, qui ne plaisait pas, qui se faisait traiter de « fille », dont on se moquait sans vergogne. Et j’essaie, quand je peux, de montrer à ces adolescents isolés (…et, au fond, à tous les autres, car même les leaders de groupe, apparemment très populaires, vivent des moments de profonde solitude puisqu’ils sont entourés de faux amis, et qu’au bout du compte on a tous été, au moins une fois dans sa vie, cet enfant abandonné…) que toutes ces images de « pauvre type » ou de « pauvre fille » sont fausses, et qu’un jour, ceux à qui on a injustement collé ces étiquettes montreront à la face de tous ces frimeurs qui ont eu leurs heures de gloire pendant le collège que la pierre qui était rejetée est devenue pierre d’angle, qu’être efféminé et pédé n’est pas une tare mais une chance pour être plus proche de la fragilité et de la détresse des autres, que celui qu’on croyait faible et dont on a méprisé les talents peut finalement se révéler le plus fort.