Mon copain ou mon fiancé ou mon mari m’aime mais passe à l’acte homo : Que faire ? Je me sens impuissante

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Deux impuissances qui se font miroir…

 

En accompagnement personnel d’hommes et de femmes touchés dans leur couple par l’homosexualité, je croise parmi la population homo-bisexuelle souvent le même profil de personnes : des garçons très intelligents, sociables, parfois engagés en Église et vivant en maisonnée, parfois mariés avec une femme qu’ils prétendent sincèrement aimer, pères de famille ayant un boulot dans lequel ils se donnent à fond mais où le moindre temps mort les entraîne dans des tentations charnelles et un isolement extrêmement puissants qu’ils n’arrivent pas toujours à contrôler sur la durée (rassurez-vous, j’en connais qui contrôlent très bien « la bête intérieure » quand même, et beaucoup plus souvent qu’on ne le croit).
 

Perfectionnistes, grands idéalistes, ils mettent un point d’honneur à se maîtriser, à ne pas décevoir, à plaire à Dieu, aux hommes, à leur femme, à leurs amis, à leur communauté religieuse. Ils incarnent l’archétype du gendre ou du prêtre idéal. Certains sont même prêtres en vrai, ou continuent d’être taraudés toute leur vie par la vocation religieuse. C’est la raison pour laquelle, quand ils chutent, ils ne se le pardonnent pas facilement et sentent que « quelque chose les dépasse ». Ils ne savent plus par quel bout prendre leur tentation/addiction.
 

L’homosexualité, ils ont bien compris que ce n’était pas pour eux, que ce n’était ni leur identité profonde, ni un couple à vivre, ni un chemin à suivre. Ça, au moins, ça a le mérite d’être clair. Mais l’ont-ils accueillie vraiment ? Tolérée ? Supportée ? Non. Ils la vivent comme une profonde vexation, une injustice, une honte monumentale, une défaite cuisante qu’ils n’ont pas digérée. Le rejet de celle-ci reste pour eux une intuition et un devoir moral abstrait plus qu’un pas réconciliateur émanant du cœur, qu’un acte libre et concret. Du coup, leur sortie de l’homosexualité se transforme en projection, même s’ils se persuadent du contraire. Et factuellement, leur homosexualité devient un fantasme et une pulsion, et quand ils se sentent débordés par elle et qu’ils s’y adonnent, elle se mute en défouloir, en aberration dans leur existence : comment eux, les rois du self control, les enfants de chœur, les héros bien-aimés de Jésus, peuvent-ils être capables, sur un coup de tête, de mater du porno en grande quantité ou bien de vivre des « plans cul » dont ils n’attendent absolument rien et qu’ils vivent dans un anonymat frisant la schizophrénie ? Ils sont les premiers navrés que la psychothérapie, la prière, leurs efforts pour satisfaire leur « épouse en Dieu », les retraites spirituelles, les Sessions Agapê , n’aient pas réussi à faire disparaître complètement leurs tendances.

 

Ce que je décris là, c’est un type d’homosexualité que je regarde, intrigué, car il m’est en partie étranger, j’avoue. Sans doute parce que je l’ai en partie résolu par le Verbe ( = témoignage), par l’action de sainte Marie et des sacrements en moi, et par l’expérience concrète de la continence. Mon homosexualité tient davantage de l’impuissance – et de la peur de l’impuissance – que d’une libido débordante, assaillante, conquérante, active (parce que refoulée)… même si moi aussi, à la base, j’ai une grosse libido, je suis un grand charnel et des fantasmes sexuels qui peuvent se révéler forts. Je n’ai pourtant pas le profil comportemental de l’obsessionnel addictif ni de l’homme alcoolique. Quelque part, mon travail d’analyse sur l’homosexualité et ma visibilité homo-catholique m’aident énormément à ne pas vivre les affres de la double vie ou du dilemme crucifiant qu’est le passage à l’acte homo.
 

En revanche, l’homosexualité de ces hommes-là, qui ne se disent pas homosexuels mais qui pratiquent par à-coup l’homosexualité dans des moments ponctuels et dans des sphères anonymes, est très instinctive, compulsive, animale, machiste, dépressionnaire, bipolaire. Chez eux, ce n’est pas vraiment la peur de ne pas pouvoir assurer techniquement la pénétration génitale avec la femme avec qui ils essaient d’être en couple stable, qui les malmène intérieurement (d’ailleurs, s’ils veulent « faire l’amour », ça marche souvent). C’est autre chose. Sans doute qu’ils canalisent mal leur énergie et ne s’acceptent pas vulnérables. Et leur manière de s’auto-punir de se découvrir faibles et imparfaits, c’est de foncer dans le rideau rouge qu’ils feignent de refuser, quitte à tout gâcher de ce qu’ils ont construit auparavant. On voit à travers eux que l’homosexualité est bien une blessure d’orgueil, et de refoulement combattif (fantasmé) des souffrances !
 

Ce sont des gars super sensibles, capables de dissimuler extrêmement bien, et qui, malgré les apparences, se laissent débordés par leurs pulsions du moment et surtout par leur imaginaire. Ils croient d’ailleurs n’avoir aucune emprise sur leur imaginaire (croyance fausse, car le travail de prise de conscience du Réel s’apprend : il y a des techniques pour ça. Avant de cliquer, de tomber amoureux, ou de se retrouver nu dans un sauna, il y a un laps de temps, quand même…). Un mail, un lien internet, une opportunité physique, un garçon qui passe sur un lieu abandonné, un instant de vide dans leur journée de travail ou dans leur temps de respectabilité sociale, un moment d’isolement… et la peur de se confronter à leur espace psychique intérieur ressurgit soi-disant « en un fragment de seconde ». Orgueil de vouloir tout contrôler, peur de se retrouver face à soi-même, précipitation et absence de vie intérieure : voilà ce qui explique techniquement la (re)chute. En réalité, ils sont plus libres qu’ils ne l’imaginent. Ils ne se laissent juste pas le temps de le réaliser. Ils s’engouffrent dans un mutisme et un isolement programmés. Ils s’extériorisent fiévreusement parce qu’ils ne se sont jamais vraiment intérioriser.

 

Alors, comment on fait quand on est comme ce que je viens de décrire ? Et comment on fait quand on est une femme qui vit avec ce genre d’hommes homo-bisexuels ? Déjà, dans un premier temps, on voit bien qu’il ne suffit pas de savoir, de comprendre, de « communiquer », d’intellectualiser, de verbaliser le problème, de vouloir que ça change, ni même de croire en Dieu et de vivre de Ses sacrements, pour pouvoir s’en sortir. Ce qui touche au cœur, aux pulsions et aux blessures de l’affectif ne se résout pas toujours par l’intellect ou la prière sincère. Et cela crève les yeux : ça turbine cérébralement très bien chez ce genre d’hommes ; et à les écouter, ce sont des champions de la prière, de la méditation et de la lectio divina. Donc le problème est ailleurs : dans la gestion émotionnelle. De plus, le spirituel mal compris peut être une extériorisation de soi, une échappatoire de plus qui n’aide pas du tout à affronter sa propre réalité, sa propre unicité, sa propre inactivité, son propre vide intérieur. Et l’amour d’une femme, même compréhensive, l’accompagnement d’un père spirituel, même intelligent et avisé, la fréquentation régulière des sacrements, ne résoudront pas le problème et ne combleront pas toujours ce vide affectif béant ressenti.

 

Je crois que, pour ce type de profils d’homosexualité, à l’instar des personnes alcooliques ou porno-dépendantes, tant que ces hommes homosexuels n’auront pas rencontré en face à face un groupe de frères qui, comme eux, ressent dans sa chair ces pulsions qui leur apparaissent indépassables, tant qu’ils ne les voient pas évoluer positivement avec, ils ne croiront pas en eux et seront longtemps habités par la même peur et croyance qu’ils sont les marionnettes de leurs appétits corporels, qu’ils sont des faux prophètes, des maris indignes, des menteurs qui ne méritent que le suicide.

 

C’est étrange de penser, surtout par les temps qui courent où l’on mise tout sur le Couple ou sur Dieu, qu’un lien comme la fraternité ou l’amitié (de misères), qui est objectivement moins entier que l’amour conjugal ou l’amour spirituel, puisse dans ces cas-là très précis être temporairement plus efficace que le lien conjugal ou le lien spirituel. Mais j’ai croisé des gars alcooliques qui ont lâché la bouteille grâce aux Alcooliques Anonymes et à leurs jumeaux de « condition » ; des personnes droguées, qui avaient touché le fond, et qui se sont miraculeusement relevées au contact d’autres amis drogués, au Cenacolo ; et des gars homosexuels qui, grâce à des groupes comme Courage (calqués sur les méthodes des A. A. , qui ont de vrais résultats), sont parvenus, sinon à ne plus ressentir un désir homosexuel, du moins à dompter la soi-disant « pulsion indomptable » en devenant continents. Je crois énormément en l’Incarnation et en l’Amitié. Une femme ayant un copain/mari homosexuel, ou un père accompagnateur suivant un homme pieux homosexuel, n’est pas toujours la personne la mieux placée pour convaincre par toute sa personne que la condition homosexuelle est réelle, incarnée, intérieure, prégnante, oppressante, et donc corporellement sublimable ou dépassable. En revanche, un ami à notre hauteur, qui nous comprend non seulement intellectuellement, compassionnellement, mais aussi corporellement et émotionnellement, a parfois plus de chances de nous délivrer de notre combat intérieur charnel et de nous élever, qu’une personne extérieure, aussi qualifiée soit-elle.

 
 

P.S. : Je vous rappelle la date du « Parcours homosexualité » à la dernière session de Paray-le-Monial cette année, pour toutes personnes intéressées par l’accompagnement des personnes homosexuelles : 15-20 août 2015.