Pour la « petite » histoire (qui finit par être une grande !), la comédienne qui joue brillamment le personnage de l’adolescente Lilou dans mon podcast Singularity is Devil, a changé de nom et m’a demandé de se faire appeler « Pauline Réage » afin de me permettre in extremis d’utiliser quand même sa voix.
Au départ, et très naïvement, j’ai cru qu’elle avait tiré ce pseudonyme de son chapeau, surtout en réaction sanguine et animale de défense… car elle a pris peur de ma réputation internétique catastrophique, et a failli se retirer intégralement du projet. Elle a gentiment accepté de rester malgré tout dans le podcast à la condition que je modifie sa voix, en plus de ne pas dévoiler son vrai nom. Sur le coup, je m’étais dit : « Pauline Réage… RÉAGIT! Logique! C’est son mode de défense et de résistance. Elle sort les griffes, pour finalement se laisser quand même apprivoiser. »
Mais sa couverture s’est révélée plus subtile, érudite, inventive, sulfureuse, que je ne l’avais soupçonné. Pauline Réage est – je ne l’ai découvert qu’avant-hier – un nom d’emprunt ! Donc il constitue un choix politique autant qu’artistique. Et historique.
De surcroît, et à son insu, cette comédienne est un génie, car elle a choisi (très certainement sans le faire exprès) un pseudonyme indirectement lié à la singularité en tant que duplicité hybride résistante : Pauline Réage est en effet le masque que l’auteure d’Histoire d’O, roman érotique à scandale de 1954, a choisi pour passer inaperçue. Et la singularité m’a conduit à Pauline Réage ! C’est en écoutant le psychanalyste et philosophe Pierre Bayard, auteur du livre Je sommes plusieurs (2025) sur les personnalités multiples et la singularité, raconter sa rencontre impromptue avec Dominique Aury (alias « Pauline Réage » ), que j’ai ouvert les yeux !
Sacrée Lilou !
Et je citerai pour finir Dominique Aury, à la page 108 de Je sommes plusieurs, parler de son autre-elle-même (Pauline Réage), par rapport à Histoire d’O : « C’est le livre d’une inconnue dont je suis stupéfaite à la limite qu’elle ait été moi. »

