Code n°8 – Amour ambigu du pauvre

Amour ambigu de l'étranger

Amour ambigu du pauvre

 

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

La solidarité, comme tout don humain, n’est pas positive en soi. Cela dépend de comment elle s’exerce, et surtout si l’identité et la liberté de la personne assistée ont été honorées suite à l’échange, justement. Dans le cas des personnages homosexuels des fictions (et parfois des personnes homosexuelles réelles), on peut constater que la juste distance entre le bienfaiteur et l’étranger/le pauvre n’a pas été clairement observée, et que l’un comme l’autre ont cherché à empiéter sur le terrain de l’autre sans se respecter. Le plus riche s’est laissé attendrir par un élan de solidarité fusionnelle, un sincère désir de communion amoureuse avec son petit protégé, tandis que le nécessiteux profite de la situation, vit dans l’assistanat, et considère le sexe, le vol et le meurtre, comme des moyens de venger sa propre classe sociale ou race. C’est précisément cet amour excessif, passionnel, sacrificiel, peu distant, que l’on observe dans les œuvres homos, et chez les personnes homos réelles en mal d’exotisme, d’âmes à sauver. Il est fréquent en effet de voir que l’élan solidaire du héros gay, apparemment pétri de bonnes intentions et d’amour du prochain, rime le plus souvent avec usurpation d’identité, prostitution, tourisme sexuel, narcissisme bobo, indifférence aux vraies personnes dans le besoin, opportunisme petit-bourgeois. L’étranger n’est pas tant aimé pour lui-même que pour son image d’Épinal fantasmée, et l’occasion en or qu’il fournit de s’acheter un diadème de victime innocente, de preux défenseur des Droits de l’Homme, tout en déchaînant en toute légitimité sa jalousie sur les Puissants dont on rêve de ravir discrètement la place.

 
 

N.B. : Je vous renvoie également les codes « Putain béatifiée », « Mère Teresa », « Témoin silencieux d’un crime », « Méchant Pauvre », « Bobo », « Prostitution », « L’homosexuel riche/L’homosexuel pauvre », « Voyage », « Homosexuel homophobe », « Liaisons dangereuses », « Amant modèle photographique », « Poupées », et à la partie « Je suis une (plus grande) victime (que les autres) » du code « Homosexualité noire et glorieuse », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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FICTION

 

Le personnage homosexuel aime le pauvre d’un amour ambigu, à la fois condescendant et fou :

a) Le pauvre-objet, exotique et lointain :

Salim Kechiouche

Salim Kechiouche


 

Beaucoup d’œuvres homo-érotiques chantent la charme discret et « involontaire » de l’étranger ou de l’indigent, le fameux Beatus Ille. « La transfiguration d’un état de misère » comme l’a écrit un jour un ami romancier angevin en 2003 : cf. le roman Aziyadé (1879) de Pierre Loti (avec le jeune Samuel), le téléfilm Fiertés (2018) de Philippe Faucon (Victor et Selim l’ouvrier arabe), la toile Noa-Noa (1901) de Paul Gauguin, le roman Les Civilisés (1905) de Claude Farrère, le roman Malaisie (1930) d’Henri Fauconnier, le roman Prostitution (1975) de Pierre Guyotat, les romans L’Immoraliste (1902) et Si le grain ne meurt (1925) d’André Gide, le roman Incidents (1987) de Roland Barthes, le film « Caravaggio » (1986) de Derek Jarman, les romans La Sombra Del Humo En El Espejo (1924) et Pasión Y Muerte Del Cura Deusto (1924) d’Augusto d’Halmar, le tableau Robinson et Vendredi (2007) d’Éric Raspaut, le roman Cet Arabe qui t’excite (2000) de Djallil Djellad, le film « Grande École » (2004) de Robert Salis (avec Salim Kechiouche), le court-métrage « Alger la blanche » (1986) de Cyril Collard, les films « Les Corps ouverts » (1997) et « Wild Side » (2003) de Sébastien Lifshitz (avec Yasmine Belmadi), la comédie musicale À voix et à vapeur (2011) de Christian Dupouy (avec les beaux Turcs à Istanbul), les films « Underground » (2007) et « Love Kills » (2007) de Tor Iben, le film « Fronteras » (« A Escondidas », 2016) de Mikel Rueda (avec Rafa et Ibrahim l’immigré), etc. Dans la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert, Yves regarde avec envie par la fenêtre le beau et jeune travailleur d’Oran au service de sa famille de colons. Dans le roman L’Autre Dracula (1997) de Tony Mark, le narrateur homosexuel dit être attiré par un « superbe et ténébreux gitan » (p. 35). Dans le roman La Cité des Rats (1979) de Copi, la clocharde Berthe est surnommée « la Reine des Hommes » (p. 61). Dans l’épisode 68 « Restons zen ! » (2013-2014) de la série Joséphine Ange gardien, Romane est lesbienne, et se prend de passion pour Yindee, une jeune femme thaï qui travaille avec elle en tant que vétérinaire. Dans le film « The Cakemaker » (2018) d’Ofir Raul Graizer, les deux amants Tomas (Allemand) et Oren (Israëlien, marié à une femme et avec un enfant) incarnent tour à tour la figure de l’étranger fascinant.

 

Au départ, le personnage homosexuel nous offre son hommage larmoyant au Tiers-monde. « J’me sens très proche de ces gens-là. Les gens qui n’ont rien. » (Benigno à Marcos, dans le film « Hable Con Ella », « Parle avec elle » (2001) de Pedro Almodóvar) ; « Et tous ces enfants qui meurent de faim chaque jour… et nous qui allons passer un repas somptueux… » (Jules, le héros homosexuel dandy, dans la pièce Les Sex Friends de Quentin (2013) de Cyrille Étourneau) ; « Y’a plein de p’tits nouveaux. Ils sont mignons tout plein. Y’a pas beaucoup de Français… mais ça ne me dérange pas. Au contraire. » (Fabien Tucci, homosexuel, parlant de son boulot à Pôle Emploi depuis deux ans, dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch, 2015) ; etc. Mais peu à peu, on constate que ce ne sont chez lui bien souvent que des mots. Dans les fictions, par exemple, un certain nombre de personnages homosexuels se désintéressent totalement du sort du monde : Aschenbach dans le film « Mort à Venise » (1971) de Luchino Visconti, ou Sébastien dans « Suddenly Last Summer » (« Soudain l’été dernier », 1960) de Joseph Mankiewicz, constituent de bons exemples de cette compassion homosexuelle qui pleure sur la victime sans lui venir en aide. Dans le roman Para Doxa (2011) de Laure Migliore, le cadre humanitaire en Namibie sert de prétexte à la romance lesbienne entre Ambre/Helena. Dans le film « A Moment in the Reeds » (« Entre les roseaux », 2019) de Mikko Makela, Leevi, Finlandais, tombe amoureux de Tareq, un bel ouvrier syrien qui ne peut pas vivre son homosexualité dans son pays et qui a fui la guerre.

 

Le pauvre est considéré comme une poupée sacrée ; non comme un être vivant et libre. Par exemple, dans la pièce La Tour de la Défense (1974) de Copi, le miséreux est un objet qu’on se dispute et qu’on s’arrache : « Ah, mes chéries […] Je vous ai invité un Arabe sublime comme cadeau du nouvel an. Ahmed rentre ! » (Micheline, le trans M to F) ; « Il est à moi, cet Arabe. Voleuse ! » (Daphnée s’adressant à Micheline) ; etc. Dans le film « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway, Sergueï Eisenstein, homosexuel, sort avec son guide mexicain, Palomino : « Je me conduis en seigneur colonial. » Le pauvre est réduit à un double spéculaire narcissique, comme le jeune Franck dans le roman Le Crabaudeur (2000) de Quentin Lamotta : « Quand on entre dans la cour, le garçon de la DDASS sort le premier. Il s’approche de la voiture, colle son nez à la vitre, me regarde, une main en visière de casquette. » (p. 49)

 

B.D. "Rocky & Hudson, les cow-boys gays" d'Adão Iturrusgarai

B.D. « Rocky & Hudson, les cow-boys gays » d’Adão Iturrusgarai


 

Dans les films homosexuels, le mélange inter-classes sociales n’est quasiment placé que sous le signe de la mort, de l’absence, du sexe, et de l’argent : cf. le film « Du sang pour Dracula » (1972) de Paul Morrissey, le film « My Beautiful Laundrette » (1985) de Stephen Frears, le film « Mein Süsser, Kleiner Arsch » (« Mon beau petit cul », 1998) de Simon Bischoff, le film « L’Amant bulgare » (2003) d’Eloy de la Iglesia, etc. C’est le corps de l’ouvrier, et non le travail, qui est glorifié : cf. le film « Acla » (1992) d’Aurelio Grimaldi (avec les ouvriers musclés travaillant dans les mines), le vidéo-clip de la chanson « Cargo de nuit » d’Axel Bauer (réalisé par Jean-Baptiste Mondino), le film « Far West » (2003) de Pascal-Alex Vincent (avec l’assistant agricole musclé du grand-père), etc. « Ô mon bel étranger, on ne se reverra plus. » (cf. la chanson « Étrange » de Nicolas Bacchus)

 

Film "Avant que j'oublie" de Jacques Nolot

Film « Avant que j’oublie » de Jacques Nolot


 

Dans les nouvelles d’Essobal Lenoir, on voit bien que le goût pour le monde ouvrier et la population issue de l’immigration n’a rien à voir avec un réel militantisme, mais qu’il est plutôt focalisé sur un fantasme égoïste de spectateur de films pornos obnubilé par son bas-ventre : « Je ne sais quoi m’attirait irrésistiblement vers la rivière. » (le narrateur homosexuel fasciné par les ouvriers de la fabrique de tuiles qui se baignent et pissent, dans la nouvelle « La Carapace » (2010), p. 15) ; « Tous ces Slaves trouvaient ma petite chambre tellement grande, et ils avaient tant besoin de tendresse… » (cf. la dernière phrase de la nouvelle « La Chambre de bonne » (2010), p. 61) ; « Majid rapplique et s’enferme avec moi. Il ouvre au maximum la fermeture éclair de son bleu sous lequel il ne porte aucun sous-vêtement. Il sort son tuyau, active sa pompe et me lèche consciencieusement toutes les coulures encore tièdes, en compressant sa queue brûlante contre le marbre froid de mes cloisons. » (cf. la nouvelle « Mémoires d’un chiotte public » (2010), p. 83) ; « On engagea donc un carreleur, un peintre et un plombier. […] Quelle jouissance que de voir les muscles sous la peau tendre des fesses du carreleur accroupi, d’autant plus que le plombier, en triturant mon système de chasse d’eau, me masturbait involontairement sans rien comprendre à mes dérèglements. » (idem, p. 92) ; « Le satyre qui ne sommeille jamais en moi cherchait des yeux un joli prolétaire contre la chaleur duquel je pusse plaquer ma libido, afin d’emporter à la maison une image pour mes travaux pratiques vespéraux. Hélas ! le prolo se fait denrée rare à Paname… » (cf. la nouvelle « La Queue du diable » (2010), p. 113) ; « Ce jardinier, on le dirait sorti d’un calendrier des Dieux du Stade. » (Tom, le héros homosexuel en parlant de son futur amant qui le fait fantasmer, Louis, le jardinier sexy de la pièce La Famille est dans le pré (2014) de Franck Le Hen) ; « Si tu veux faire le potager tout nu, tu le fais. » (Graziella s’adressant à Louis, idem) ; etc.

 

L’attrait pour le pauvre est parfois purement sexuel et autodestructeur. « J’aime les p’tits délinquants ! » (Didier Bénureau dans son spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons, 2012) ; « Cody cherche des Arabes. Il est obnubilé, il dit ‘Je sens que je pourrais être une femme avec eux parce qu’ils se servent de ton corps comme celui d’une femelle, tu vois, comme si t’étais une objet de plaisir et que tu n’existais pas comme personne. » (Cody, le héros gay efféminé dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 91) ; « Le chauffeur de taxi râle. Il a joui. Toujours la même histoire avec les Arabes. Il va se laver sans dire un mot, se savonne bien la bite sans oser me regarder dans le miroir qu’il a en face. Ça t’a plu ? Je lui demande appuyé sur le rebord de la porte. Moi je me vois bien dans le miroir, j’ai les cheveux longs éméchés, la robe déchirée, on dirait une pute qu’on vient de violer. » (le narrateur homosexuel du roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, p. 44) ; etc.

 

Par exemple, dans le film « Le Rebelle » (1980) de Gérard Blain, Beaufils explique son attirance pour la « racaille », la marginalité et la violence : « Il n’y a que cela qui me fait bander. » Ici, on est bien loin de la pensée humanitaire et humaniste en action ! Dans énormément d’œuvres homosexuelles, l’amitié de l’étranger est salie par le sexe et la prostitution, même si le personnage homosexuel continue de nous faire croire (et de se faire croire à lui-même) que c’est de l’amour vrai : « Noeli, un jeune Métis. C’est pour moi le début d’un amour, même s’il repose sur l’argent. » (le héros du roman Les Dollars des sables (2006) de Jean-Noël Pancrazi) Dans la comédie musicale Encore un tour de pédalos (2011) d’Alain Marcel, par exemple, « le banlieusard, beauté exotique » est invité comme gigolo par la Jet Set homosexuelle. Cela ressemble à de l’ouverture (… mais le souci, c’est qu’on ne dit pas de quelle ouverture il s’agit…). Dans le roman At Swim, Two Boys (Deux garçons, la mer, 2001) de Jamie O’Neill, Anthony baise des « chauffeurs mécaniciens » et des jeunes prostitués. Dans la pièce Commentaire d’amour (2016) de Jean-Marie Besset, Grégory sort avec Gérard, un fils d’immigré italien. Et il se dit attiré par Michael, l’homme marié : « Son côté bière, son côté working-class. »

 
 

b) Le pauvre est aimé pour son malheur et comme substitut d’identité :

On constate souvent que l’amour homosexuel du miséreux implique de conserver le pauvre à terre plutôt que debout : il est question, comme le chante Catherine Lara dans la chanson « Les Secrets du Monde » du spectacle musical Graal, d’« aimer les faibles à genoux ». Il ne faudrait surtout pas que le nécessiteux se relève ou qu’il soit l’égal du héros homo ! : « C’est pourquoi il [Tanguy] aimait Misha : parce qu’il était le plus malheureux. » (Michel del Castillo, Tanguy (1957), p. 95) ; « Zohr incarnait à mes yeux toute la misère de la nature humaine, je voyais en elle mon sombre destin. » (la narratrice lesbienne du roman La Voyeuse interdite (1991) de Nina Bouraoui, p. 29) ; « Monsieur Goudron était un bienfaiteur. Il m’a pris chez lui quand je n’avais aucun moyen de subsistance. » (Pawel Tarnowski, homosexuel continent, se défendant d’avoir eu une quelconque liaison avec l’écrivain âgé Goudron, dans le roman Sophia House, La Librairie Sophia (2005), p. 290) ; etc. Par exemple, dans la pièce Chroniques des temps de Sida (2009) de Bruno Dairou, le héros désire « cette humanité pouilleuse » du haut de la terrasse de son père (une sorte de mélange Blacks/Blancs/Beurs)… mais « finalement, il n’en est jamais descendu, de sa terrasse ». Dans le one-man-show Au sol et en vol (2014) de Jean-Philippe Janssens, Jeanfi, le steward homo, raconte comment il est sorti avec un certain Fabrice, un « escroc qui l’a ruiné après lui avoir fait vivre une vie de « princesse » : « Il s’est tiré avec la caisse. Plus rien. Une princesse déchue. » (idem). Puis il se retrouve entouré par des Roumains que sa situation de précarité l’a amené à connaître, et se prend pour la quintessence de la pauvreté roumaine : « J’étais comme une mendiante, une Roumaine… »

 

Dans le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus, une association LGBT d’une dizaine de membres prennent d’assaut un village de mineurs gallois pour les défendre contre les pressions gouvernementales à l’encontre des syndicats ouvriers… Ça part d’un bon sentiment. « On a subi les mêmes épreuves que vous. » leur soutiennent les militants homosexuels, dirigé par le jeune Mark. « Solidarité pour toujours ! » En réalité, ces bons samaritains s’imposent à une population qui ne leur a rien demandé (« Pourquoi viennent-ils ? On leur a écrit pour les remercier. » s’indigne Maureen, l’une des syndicalistes) Ça sent la course à la victime, l’instrumentalisation de la misère des autres pour qu’ils servent d’alibi à l’imposition des droits LGBT sous la forme de droits universels et de lutte des classes. Finalement, on lit derrière la démarche de ces héros homosexuels une forme de jalousie : « Les forces de l’ordre s’en prennent à ces pauvres gars plutôt qu’à nous ! » (Mark)

 

Dans la pièce Géométrie du triangle isocèle (2016) de Franck d’Ascanio, Vera, la sournoise héroïne lesbienne, joue d’abord les saint Bernard :« Tu connais mon penchant naturel à venir au secours des désespérés. » Mais son amante Lola, qui connaît ses calculs, la remet à sa place : « Tu es incapable d’une vraie générosité. Tu reprends d’une main ce que tu donnes de l’autre. »
 

Cela arrive très fréquemment que le protagoniste homosexuel ravisse l’identité de son amant étranger : « Je me suis mis à la place de mon prochain. » (Emmanuel Fruges, dans le roman Si j’étais vous (1947) de Julien Green, p. 147) ; « Moi je me sens papou bizarrement certains matins… » (le héros de la pièce La Fesse cachée (2011) de Jérémy Patinier) ; « J’ignorais tout des ‘clochards célestes’ alors que j’en étais un moi-même, dans toute l’acception du terme, et me considérais comme un pèlerin errant. » (Ray Smith, dans le roman Les Clochards célestes (1963) de Jack Kerouac, p. 14) ; « Maintenant clochardisé, installé assis dans la marge, non seulement Vincent Garbo n’effraie plus ni ne dérange, mais chacun et chacune semble lui reconnaître comme un droit à l’existence. Comme si sur ce mètre carré de bitume, j’avais enfin trouvé ma juste place. » (Vincent Garbo, le narrateur homosexuel du roman éponyme (2010) de Quentin Lamotta, p. 93) ; « Tu partages le sang de Pablo, Doris, Roger, Hilaire, Esteban et les autres. Tu ne t’appelles plus Félix Perlman mais Vincent Braconnier. » (Félix, le héros homosexuel du roman La Synthèse du camphre (2010) d’Arthur Dreyfus, p. 59) ; « Tu ne sais pas résister aux étrangers » (Teja, l’amant allemand et danseur, de Rudolf Noureev, dans le film « Noureev, le Corbeau blanc » (2019) de Ralph Fiennes) ; etc.

 

Dans son one-woman-show Free, The One Woman Funky Show (2014), Shirley Souagnon, pourtant née en France, s’identifie aux esclaves noirs chantant le blues, aux enfants faméliques des pubs d’Action Contre la Faim : « Moi, si je me mets à nue, je peux faire une pub pour Action Contre la Faim. Avec des mouches autour des yeux. » Dans le film « Love Is Strange » (2014) d’Ira Sachs, Ian demande à George, le héros homosexuel pas du tout clochard, s’il est SDF et celui-ci confirme. Dans son one-woman-show Chaton violents (2015) d’Océane Rose-Marie, Océane, l’héroïne lesbienne, fait référence à sa soi-disant « sœur adoptive cambodgienne ».
 

Certains personnages homos se définissent volontiers comme les vrais pauvres (cf. je vous renvoie à la partie « Je suis la plus grande victime » du code « Homosexualité noire et glorieuse » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) : c’est le cas des Miséreuses (2011) de Christian Dupouy, de l’association Les Gouines sans domicile fixe dans le one-woman-show La Lesbienne invisible (2009) d’Océane Rose Marie, des faux SDF homosexuels dans la pièce Jeffrey (1993) de Paul Rudnick, des « 2 travestis clochards » Mimi et Fifi dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi, des clochards homos du bâti Lars Norén (2011) d’Antonia Malinova, etc. Dans le film « Harvey Milk » (2009) de Gus Van Sant, Harvey Milk se qualifie lui-même d’« immigré ». Dans ses élans identificatoires, le personnage homosexuel réagit comme la bourgeoise qui a peur de toujours manquer, qui semble inconsolable, qui parle sans arrêt des effets de la crise économique dont elle pâtirait plus que les autres (comme la Marquise du film « Dans les ténèbres » (1983) de Pedro Almodóvar), ou en tout cas autant que les vrais pauvres : « Nous sommes pauvres, nous n’arrivons plus à soutenir notre train de vie. […] Je me vois obligé de monter une affaire de tricot, Michael et moi nous tricotons des ponchos toute la journée, les enfants nous aident parfois. Mais enfin, je ne me plains pas, c’était une vie plutôt agréable. » (le narrateur homosexuel dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 96) Dans le roman Babyji (2005) d’Abha Dawesar, on voit parfaitement la violence condescendante de l’attrait sexuel de l’héroïne lesbienne Anamika pour sa future servante et amante Rani qu’elle a repérée dans un bidonville : « J’aurais voulu que la femme du bidonville [Rani] soit à mon entière disposition. Des images de films hindis dans lesquels le brahmin de la caste supérieure s’éprend de la domestique de la caste inférieure et lui fait passionnément l’amour ne cessaient de tournoyer dans ma tête. » (p. 20.) Parfois, les chiasmes employés indiquent à la fois la substitution aux pauvres et leur instrumentalisation via la prostitution : « Salam Aleikoum ! Aleikoum Salam ! Attendez-moi au fond, dans la chambre de droite. » (Jarry dans son one-man-show Entre fous émois (2008) de Gilles Tourman) Dans la pièce Les Babas cadres (2008) de Christian Dob, le couple gay Jeff et Mimil aiment le monde entier… du fin fond de leur Cantal ! La substitution avec les pauvres tant adorés de loin est vite opérée : « On est vachement solidaires avec le Tiers-Monde. C’est nous, le Tiers-Monde ! » L’aide proposée aux vrais pauvres prend l’allure de la fuite : « Les mal-aimés, qui les venge ? […] Sauf qui peut. Sauve c’est mieux ! Sauf qu’ici, loin sont les cieux. » (cf. la chanson « C’est dans l’air » de Mylène Farmer) L’aide « humanitaire » que l’homosexuel veut mettre en œuvre est finalement narcissique : à force de s’identifier aux victimes, il s’imagine qu’il est sa première victime à sauver, comme le personnage de Sébastien dans la pièce Un Barbu sur le net (2007) de Louis Julien, qui veut créer S.O.S. Homosexuels pour secourir les internautes gays en détresse. Et le vrai pauvre voit clair dans la comédie de son faux ami homosexuel, puisqu’il lui reproche de s’être servi de lui sans l’avoir véritablement aidé à s’en sortir : « Enfant de la rue, tu m’as cueillie comme un fruit défendu. Enfant de misère, moi qui voulais te donner mon amour, toi qui venais aller-retour, tu n’m’as jamais dit : ‘Viens je t’emmène et je t’offre une autre vie.’ » (cf. la chanson « La Fille du soleil » de Candela dans le spectacle musical Cindy (2002) de Luc Plamondon). Cependant, comme il est lui-même rentré dans le jeu de sa propre exploitation, au pire il jouera de cynisme dénégateur face au snobisme puant de son mac protecteur (comme le personnage d’Omar avec son riche amant Khalid, dans le roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa : « Il aimait ça, Khalid, ma force, mon côté mauvais garçon. Il aimait que je vienne d’un autre monde. Les pauvres. Ça le changeait, disait-il souvent. Il trouvait ça exotique. », p. 25), au mieux il sera plus direct dans la dénonciation de l’exploitation mutuelle : « Je vais te dire un grand secret : finalement, tu détestes le monde. » (cf. une femme s’adressant au personnage homosexuel d’Emmanuel dans le film « Homme au bain » (2010) de Christophe Honoré)

 

Le pauvre dont le héros homosexuel se réclame peut également être l’enfant approprié en cas de « mariage pour tous » (et tout ce qui va avec : adoption, PMA, GPA). « C’est le dossier de Tchang. Il a trois ans. Et on va le chercher dans 2 semaines. » (François annonçant par surprise à son compagnon Thomas la nouvelle de leur voyage en Thaïlande pour l’adoption d’un enfant, dans la pièce L’un dans l’autre (2015) de François Bondu et Thomas Angelvy) Par exemple, dans la pièce Le Mariage (2014) de Jean-Luc Jeener, quand le père de Claire la met en garde, elle et sa copine Suzanne, à propos de leur projet de mariage et d’enfant (« Vous jouez à la poupée avec un petit être vivant. »), elle s’entête dans une solidarité agressive : « Je veux un enfant et je l’aurai ! »

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

Les personnes homosexuelles qui pratiquent leur homosexualité ont tendance à aimer le pauvre d’un amour ambigu, à la fois condescendant et fou

 

AMOUR AMBIGU BD

 

Beaucoup de personnes homosexuelles se désirent Hommes du Peuple engagés contre la misère. Et pourtant, concrètement, elles restent souvent éloignées des réalités humaines désagréables : dans les faits, les cadres de la rencontre entre les personnes homosexuelles et les pauvres qu’elles défendent ont presque toujours un rapport à la prostitution masculine, à la domesticité, à l’anarchisme, au militantisme politique, au populisme, bref, à une solidarité intéressée. « J’aime utiliser ma judaïté. » (Steven Cohen, le performer transgenre M to F, dans le documentaire « Let’s Dance – Part I » diffusé le 20 octobre 2014 sur la chaîne Arte) ; « Le roi est généreux. Il veut que ses sujets gardent un bon souvenir de lui, car il ne connaît que trop bien le côté obscur de son âme. Louis II voudrait être un roi bienveillant, mais il sait que ce n’est pas le cas. » (cf. le documentaire « Louis II de Bavière, la mort du Roi » (2004) de Ray Müller et Matthias Unterburg) ; « J’eus affaire à un monsieur habitant une belle villa dans le Val de Marne, qui me désirait fortement vêtu comme l’homme de ménage du film ‘La Cage aux folles’. J’avais halluciné, concluant que ce fantasme me rabaissait complètement. Et puis, non sans gêne, il s’était plu à me dire que son sexe était un petit biscuit qui devenait grand comme une baguette. » (Berthrand Nguyen Matoko, Le Flamant noir (2004), p. 113) ; etc.

 

Il arrive à certaines personnes homosexuelles de s’émouvoir pour la condition précaire d’un misérable garçon qu’elles tentent de sauver de la galère, et celui-ci se laisse entretenir par elles, mais le contrat unit quand même deux égoïsmes cherchant à se substituer l’un à l’autre. « J’aime les petits Arabes. En effet. Pour une fois qu’on aime les p’tits Arabes pour autre chose que pour leur pétrole. » (Pierre Démeron, homosexuel de 37 ans, au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 3 avril 1969) Beaucoup de personnes homosexuelles ne désirent plus simplement compatir au sort du pauvre : après lui avoir écrit son holocauste, elles veulent se substituer à lui pour dire qu’elles sont les plus grandes victimes de tous les temps. Faire mémoire devient très souvent dans leur cas un prétexte pour pleurer sur soi. Elles aiment davantage le pauvre pour l’esthétique révolutionnaire qu’il incarne que pour lui-même, et dans la mesure où il justifie « en gros » leurs combats personnels. C’est le glissement de la révolution à l’anarchisme/rébellion dont parle Patrick Bougon concernant l’engagement politique de Jean Genet : « La position politique de Genet est moins propalestinienne qu’anarchiste. […] Ce qui intéresse Genet chez les Black Panthers et les Feddayin, c’est qu’ils sont des vecteurs de déstabilisation du pouvoir et de l’État. » (Patrick Bougon, « Politique et Autobiographie », dans le Magazine littéraire, n°313, 1993, p. 69) Leur soutien au pauvre est une adhésion de principe, non prioritairement de personne. Elles ne s’intéressent pas tant à la victime en elle-même qu’à l’occasion qu’elle leur fournit de s’attaquer aux mécanismes de pouvoir qui la rendent/rendraient victime. Concernant par exemple l’univers carcéral, les paroles de Michel Foucault sont assez claires : « En fait, je ne m’intéresse pas au détenu comme personne. Je m’intéresse aux tactiques et aux stratégies de pouvoir qui sous-tendent cette institution paradoxale qu’est la prison. » (Michel Foucault, « Michel Foucault, l’illégalisme et l’art de punir », entretien avec G. Tarrab en 1976, p. 87) En choisissant de défendre « la différence qui gêne(rait) », elles ont l’impression d’être ultra-révolutionnaires et dangereuses, mais elles se cachent ainsi à elles-mêmes le jugement dépréciatif qu’elles ont porté sur les porte-drapeaux de leur révolution : en simulant la fausse camaraderie, elles s’entourent d’individus que la société juge/jugerait peu fréquentables, parce que ce sont souvent elles-mêmes qui ont projeté sur elle leurs propres jugements sur les pauvres, alors que ce qui devrait présider à l’ordre de la solidarité, c’est la lutte pour les exclus contre l’exclusion, il semble que pour elles, c’est la lutte grâce aux exclus contre ladite « majorité » (… il serait plus juste de dire ceux de leur propre classe) qui l’emporte. Elles veulent sauver le Peuple sans Lui, en lui arrachant le haut-parleur des mains. « Nous devons dire que nous sommes plus frappés pour que les Arabes le soient moins. Nous devons crier pour les Arabes qui, eux, ne peuvent pas se faire entendre. » (Michel Foucault, Le Temps immobile, t. III, p. 430, cité dans Dits et écrits I (2001), p. 57) En quelque sorte, elles s’identifient aux victimes à défendre pour prendre leur place et reprocher ensuite à ceux qui ne les suivraient pas dans leur élan de solidarité universelle de ne pas agir comme elles. Elles sont les prophètes d’« une nouvelle orthodoxie dont le contenu importe finalement moins que le partage manichéen qu’elle établit entre amis et ennemis du genre humain, l’obligation qu’elle fait aux premiers de se ranger, sous prétexte de défendre les opprimés, du côté des puissants. » (Élisabeth Lévy, Les Maîtres Censeurs (2002), p. 13)

 

En règle générale, la solidarité homosexuelle est à entendre dans son sens passionnel, à savoir d’altruisme agressif, de « générosité dingue » (Karin Bernfeld, Apologie de la passivité (1999), p. 221). Touche pas à pote ! Mon pauvre est à moâ ! Bien souvent paniquées par les nouvelles du journal, meurtries par le sort des populations télévisuelles, beaucoup de personnes homosexuelles, en mal de combat ou en panne d’identité, ont un besoin cannibale de se rendre utiles et d’aller vers les autres. Il leur arrive de crier dans leur salon de thé : « Je dois et j’ai besoin de faire ma vie avec les masses et les travailleurs manuels ! » (Edward Carpenter sur le site Isla de la Ternura, consulté en janvier 2003) Elles s’inscrivent parfois dans les associations caritatives, parlent de voyages « humanitaires » et de « solidarité » à tout bout de champ, se persuadent qu’elles sont indispensables au bonheur de celui qui se trouve dans la détresse… alors que par ailleurs, elles ont tendance à voir la vie en noir, à peu s’occuper d’elles, de leur voisinage, de l’entraide à échelle humaine. Elles veulent pour les vraies victimes ce qu’elles refusent pour elles-mêmes. « Comme vous savez, je suis du côté de ceux qui cherchent à avoir un territoire, mais je refuse d’en avoir un » avoue Jean Genet (Jean Genet dans l’article « Une Crépusculaire odeur l’isole » de Tahar Ben Jelloun, dans le Magazine littéraire, n°313, 1993, p. 30). Le paradoxe de leur passion du pauvre se situe dans le fait que nous pourrions définir la plupart des personnes homosexuelles à la fois comme des amis de la Terre entière et des ennemis du genre humain. C’est par exemple ce qui peut expliquer que Michel Larivière décrive dans une même phrase Michel Simon comme un individu « misanthrope, anarchiste, toujours proche des exclus, des marginaux, mais vivant en solitaire, entourés de ses animaux familiers » (Michel Larivière, Dictionnaire des Homosexuels et Bisexuels célèbres (1997), p. 311).

 

À force d’avoir le cœur sur la main, elles ont tendance à ne plus le laisser à sa juste place ! Peu de personnes homosexuelles ont la notion de la vraie générosité : pour elles, elle se limite à tout donner matériellement sans donner de sa personne, à s’émouvoir dans la mélancolie démissionnaire. Or, comme l’explique Mère Teresa, on aura beau donner tout son argent aux pauvres sans nous donner NOUS, notre don aura la froideur d’un chèque ou d’une pièce de monnaie.

 
 

a) Le pauvre-objet, exotique et lointain :

Beaucoup de personnes homosexuelles sont séduites par le jeune amant étranger : dans les cas les plus connus, il y a André Gide, Jean Genet, François Augiéras, Jean Sénac, Arthur Rimbaud, Pierre Herbart, Rachid O., Robert Lalonde, Claude Farrère, Daniel Guérin, Pierre Guyotat, Paul Bowles, Alberto Cardín, etc. Par exemple, pour leurs créations artistiques, Gilbert et George utilisent beaucoup de jeunes marginaux (cf. Patriots en 1980). Andy Warhol a fait de même. Juan Goytisolo dit être attiré par le « méridional sans cravate » (Alberto Mira, De Sodoma A Chueca (2004), p. 391). En Espagne, le Marquis de Campo est connu pour sa passion pour les jeunes hommes prolétaires. Eloy de la Iglesia a toujours été attiré par les jeunes ouvriers pauvres. Le réalisateur italien Pier Paolo Pasolini a trempé dans une affaire de détournement de mineurs à l’âge de 27 ans, et a fini par être assassiné par les voyous banlieusards qui l’attiraient tant : « Pasolini développait de vraies amitiés avec ses garçons : il jouait au foot avec eux, fait des virées nocturnes avec eux, danse et va à la plage avec eux. » (Kammerer dans le documentaire « L’Affaire Pasolini » d’Andreas Pichler) Je vous renvoie également à la vie du colonisateur anglais Sir James Brook (racontée par Nigel Barley dans Un Rajah blanc à Bornéo, 2002). Certains auteurs homosexuels, issus de la bourgeoisie et dits « engagés », aiment à décrire par un « ultra-réalisme de pissotières » l’émergence inespérée de l’amour homo dans les bas-fonds des milieux défavorisés qu’on leur a/aurait cachés pendant leur jeunesse dorée : cf. les films « Orestie africaine » (1969) et « Le Père sauvage » (1980) de Pier Paolo Pasolini, le roman Le Garçon qui pleurait des larmes d’amour (2007) d’Alexandre Delmar, le roman The Servant (1948) de Robin Maugham, la pièce Quai Ouest (1985) de Patrice Chéreau, les films « The Last Days » (2005) et « Mala Noche » (1985) de Gus Van Sant, le documentaire « Les Mille et un soleils de Pigalle » (2006) de Marcel Mazé (avec le portrait de deux jeunes Maghrébins témoignant de leur quotidien dans des sex-shops parisiens), etc. Daniel Guérin, notamment, parle de sa « conversion » au monde des garçons prolétaires. En 1962, il publie Eux et Lui, livre autobiographique dans lequel il se met en scène à la troisième personne aux côtés des exclus, comme sur une jolie carte postale de la rencontre pacifique des peuples que tout (selon lui) opposerait.

 

Dans son autobiographie Une Mélancolie arabe (2008), Abdellah Taïa raconte comment il tombe amoureux de Karabiino, un domestique inaccessible, qu’il n’arrivera pas à acheter, ni par l’argent, nu par la séduction, ni par l’émotionnel : « J’ai allumé la télévision. Sur Melody Hits, il y avait le clip de la chanson de Sabah. Karabiino connaissait le tube mais ignorait tout de la chanteuse. Il s’est arrêté de travailler. Je l’ai invité à venir s’asseoir sur le lit à côté de moi. Et on a regardé le clip ensemble. C’était joyeux. Triste. Bouleversant. Loin de tout. […] J’avais soudain envie de pleurer, mais je ne savais pas pourquoi. Karabiino, lui, avait les yeux fixés sur l’écran. Était-il heureux ? Avait-il oublié pour un moment son malheur ? À quoi pensait-il ? Qui, au fond, était-il ? Je n’avais pas de réponses. Je n’en avais pas besoin. Karabiino était un garçon offert à mes yeux, à ma mémoire, parfaitement lisible et complètement mystérieux. Je savais un bout de son histoire, de son rêve. Mais là, à côté de moi, il était comme un petit prince, un petit roi. Un petit Sphinx. Insaisissable. Ailleurs. Ailleurs en permanence. » (pp. 76-77)

 

AMOUR AMBIGU Ouvrier

 

L’ouvrier ou l’étranger pauvre-jeune-et-musclé à qui la communauté homo fait les yeux doux correspond davantage à un cliché publicitaire digne des Dieux du Stade qu’à une rencontre réelle avec le monde du prolétariat : « Il est par exemple frappant de noter qu’une image qui a longtemps été (et qui est toujours) une icône gay représente un (très beau) mécanicien portant deux pneus alors que la population gay vit dans des milieux sociaux autrement plus raffinés ou intellectuels. » (Hugo sur le site suivant consulté en octobre 2003) ; « Pendant que mon cousin prenait possession de mon corps, Bruno faisait de même avec Fabien, à quelques centimètres de nous. Je sentais l’odeur des corps nus et j’aurais voulu rendre palpable cette odeur, pouvoir la manger pour la rendre plus réelle. J’aurais voulu qu’elle soit un poison qui m’aurait enivré et fait disparaître, avec comme ultime souvenir celui de l’odeur de ces corps, déjà marqués par leur classe sociale, laissant déjà apparaître sous une peau fine et laiteuse d’enfants leur musculature d’adultes en devenir, aussi développée à force d’aider les pères à couper et stocker le bois, à force d’activité physique, des parties de football interminables et recommencées chaque jour. » (Eddy Bellegueule simulant des films pornos avec ses cousins dans un hangar, dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 153) ; etc. Chez le photographe Orion Delain, par exemple, on constate de manière palpable que l’élan vers l’étranger tend plus vers l’esthétisme que vers l’amour réel. La séduction, l’obsession pour la beauté des corps, et la drague, court-circuitent les échanges relationnels qui promettaient d’être beaux, gâchent la gratuité de la rencontre (pourtant concrète) avec les habitants du monde de la pauvreté matérielle.

 

Il ne suffit pas, par exemple, qu’un individu devienne objet de désir sexuel applaudi pour sa plastique et ses charmes physiques/culturels par toute une communauté, pour qu’il soit véritablement aimé et respecté. Je pense par exemple au fantasme homosexuel de plus en plus répandu du Maghrébin dans l’industrie cinématographique du porno, fantasme interprété à juste raison par Maxime Cervulle et Nick Rees-Roberts dans Homo Exoticus (2010) comme un racisme positif ou une forme nouvelle de néocolonialisme contemporain. Ilmann Bell, dans Un Mauvais Fils (2010), analyse très bien le phénomène : « L’Arabe est aux homos ce que la Blonde est aux hétéros. » Et ce n’est pas parce que, de surcroît, l’étranger prend le rôle du dominateur (sexuel) dans un scénario où il serait montré à son avantage, et qu’il laisse apparemment au placard son ancestrale activité d’esclave passif pour endosser la casquette du violeur qui va « régler son compte » à l’Occidental dans l’obscurité d’une cave de « té-ci » miteuse, que la revanche des pauvres sur les riches est effective sur le terrain, que la communauté gay lutte efficacement en faveur de l’émancipation des étrangers, et que le film porno en devient pour le coup justicier, révolutionnaire, humanitaire. Le pauvre, même magnifié corporellement par la caméra et dans sa performance génitale, n’en est pas moins utilisé comme objet sexuel, et vu uniquement sous le prisme d’un regard machiste (que le caméraman soit une femme ou un homme, un Blanc ou un Beur, ne change rien à la violence de l’acte enregistré).

 

AMOUR AMBIGU Homo Exoticus

 

Enfin, il ne suffit pas non plus de s’annoncer sous les hospices de la fraternité et de la solidarité pour être concrètement aimant. L’amour du pauvre peut être agressif, exclusif et excluant, s’il est un prétexte pour haïr les soi-disant « opposants » à notre entreprise humaniste. On retrouve ce partage manichéen et paradoxal dans le discours « solidaire » et « républicain » d’un Federico García Lorca, prononcé le 6 juin 1936 : « Je suis frère de tous et j’exècre l’homme qui se sacrifie pour une idée nationaliste abstraite. » (Lorca cité dans l’essai La Littérature espagnole au XXe Siècle (1998) de Nicole Réda-Euvremer, p. 37)

 
 

b) Le pauvre est aimé pour son malheur et comme substitut d’identité :

Le regard porté par beaucoup de personnes homosexuelles sur la pauvreté est beaucoup trop compassionnel et inondé de larmes pour être authentique. « J’ai un amour malheureux pour le monde » déclare Pier Paolo Pasolini (cf. le reportage « Les Fioretti de Pier Paolo Pasolini, 1922-1975 » (1997) d’Alain Bergada). Jean Genet dit bien que ce qui l’a attiré chez le jeune Abdallah, son amant arabe, ce sont les « images d’une enfance misérable, inoubliable, où il se savait abandonné » (cf. l’article « L’Éthique de l’Art », de Thierry Dufrêne dans le Magazine littéraire, n°313, 1993, p. 64) plus que sa personne. On observe également cet éloignement du pauvre réel chez l’écrivain anglais Forster : « On se retrouve soudain sur les terres de E. M. Forster, où les classes inférieures (mâles) sont à la fois vénérées et totalement incomprises. » (Gore Vidal dans Palimpseste – Mémoires (1995), p. 231) Paul Julian Smith, dans son essai Laws Of Desire (1992), souligne que le regard soi-disant aimant et humaniste de Juan Goytisolo sur les jeunes hommes arabes est en fait lié à la réification et à la domination : dans les écrits du romancier espagnol, « les Arabes sont toujours observés, et l’homme occidental est celui qui écrit et pense à leur place. » (Alberto Mira, De Sodoma A Chueca (2004), p. 392)

 

Film "Le Fil" de Mehdi Ben Attia

Film « Le Fil » de Mehdi Ben Attia


 

L’homme pauvre est très souvent réifié par les individus homosexuels. Par exemple, l’acteur Brüno transforme les Mexicains en fauteuils de luxe (en l’honneur de la chanteuse Paula Abdul) dans le film « Brüno » (2009) de Larry Charles. Le plasticien homosexuel Michel Journiac a réalisé en 1973 un moulage d’après son propre visage : Journiac Travesti en voyou. Le pauvre de Jean Genet n’est pas un être humain de chair et de sang mais une marionnette de bois : « C’était le plus triste des mendiants. Son visage avait la qualité de la sciure de bois et presque sa matière. » (Jean Genet, Le Journal du voleur (1949), p. 35) Frédéric Mitterrand, dans La Mauvaise Vie (2005), ne fait guère mieux quand il décrit ses amants du bout du monde : « Il était le vrai petit chérubin des cartes postales. » (idem, p. 13) ; Mitterrand présente à juste titre sa frénésie de solidarité comme une folie incontrôlée, une pathologie personnelle proche de la fièvre acheteuse du panier percé : « C’était une de ces idées folles qui m’assaillent à chaque fois que je rencontre un enfant perdu au cours de mes voyages. » (idem, p. 15) Cet amour du jeune éphèbe avec un « air de gosse des rues » (idem, p. 31) est souvent lié à l’argent, à une tentative de possession : « Je le bombardais de cadeaux : l’entreprise de corruption était à l’œuvre sans même que j’en ai pleinement conscience. » (idem, p. 17) Dans son récit autobiographique Parloir (2002), Christian Giudicelli, prof de 50 ans, considère le pauvre étranger comme un fétiche dont on peut faire collection : « Au lieu d’étudiants ou d’artistes en herbe, j’ai collectionné un nombre impressionnant de paumés en crise de croissance auprès desquels je me sentais embarqué dans un voyage salutaire loin du monde des lettres. » (p. 21) Sa générosité s’annonce très égocentrée : « Amour bien ordonné commence par soi-même. Je prends avant d’offrir. Une fois rassasié, plein d’une nouvelle énergie, je me découvre généreux. » (idem, p. 100) Il s’amourache d’un jeune délinquant maghrébin (qui se sert de lui, de son narcissisme de donateur, et de son compte en banque) qu’il aime d’un amour fusionnel très distancé et immatériel (narcissique, donc) : « Cette fois, je suis de l’autre côté et lui se retrouve du côté d’où je viens, le bon côté. […] Je suis allongé sur mon lit et je tente de m’allonger sur le lit de Kamel, là-bas, à Fleury-Mérogis, de m’oublier, de n’être plus moi mais lui, afin de souffrir à sa place. » (idem, p. 120)

 

Film "My Beautiful Laundrette" de Stephen Frears

Film « My Beautiful Laundrette » de Stephen Frears


 

Il y a deux visages contradictoires en la personne homosexuelle (et en beaucoup de personnes non-homosexuelles d’ailleurs) : celui de la Mère Teresa et celui du profiteur concupiscent. Et le trait d’union entre ces deux masques, c’est la sincérité. Par exemple, Michael Jackson défend la forêt amazonienne, les peuples meurtris et les enfants abandonnés (cf. les chansons « They Don’t Care About Us », « Earth’s Song », et « Heal The World »)… mais par ailleurs pratique des actes pédophiles. Dans son autobiographie Retour à Reims (2010), Didier Éribon marque bien ses distances avec un monde prolétaire dont il est issu, qu’il est censé défendre, mais dont il se sert à des fins vengeresses personnelles : « Mon marxisme de jeunesse constitua pour moi le vecteur d’une désidentification sociale : exalter la ‘classe ouvrière’ pour mieux m’éloigner des ouvriers réels. En lisant Marx et Trotski, je me croyais à l’avant-garde du peuple. Je détestais la classe ouvrière dans laquelle j’étais immergé, l’environnement ouvrier qui limitait mon horizon. » (pp. 88-89) ; « Ainsi, quand je manifestais contre les succès électoraux de l’extrême droite, ou quand je soutenais les immigrés et les sans-papiers, c’est contre ma famille que je protestais ! » (p. 117) ; « J’étais politiquement du côté des ouvriers, mais je détestais mon ancrage dans leur monde. » (p. 73) Ces propos me font penser à ce que décrit Bruce Benderson dans Pour un nouvel art dégéréné (1998) : les Hommes bobos sont attirés (intellectuellement) par la misère, mais seulement pour la côtoyer de très très loin.

 

Vidéo-clip "Le Premier Jour" d'Étienne Daho

Vidéo-clip « Le Premier Jour » d’Étienne Daho


 

Certaines personnalités homosexuelles semblent être les maîtresses du Charity Business le plus odieux et le plus intéressé : « Les œuvres caritatives, c’était super pour devenir célèbres ! » déclare fièrement l’acteur Brüno, dans le film éponyme de Larry Charles (et malheureusement, ce n’est pas du second degré…). L’approche du pauvre par Federico García Lorca est également ambiguë : à la fois attendrie et moqueuse, comme l’explique son frère Francisco. « Il aimait déguiser les servantes, à qui il faisait jouer parfois de petits pantomimes. […] La servante jouait avec un accent très marqué de la Vega, et imitait dans ses mimiques la grande actrice Maria Guerrero. Federico l’avait déguisée avec un ornement ‘oriental’. Elle avait la peau très bronzée et il avait peinturlurée son visage de poudre de riz.  La pauvre femme ne se rendait pas compte, dans son ineffable simplicité, du comique de son jeu de scène, qui nous apprécions énormément, avec parfois la cruauté puérile des adolescents. » (Francisco García Lorca, Federico Y Su Mundo (1980), p. 74) On entend de la part d’un certain nombre de personnes homosexuelles la défense du tourisme sexuel au nom de la « solidarité envers le Tiers-Monde » : entretenir les jeunes gigolos, « n’est-ce pas un juste rééquilibrage entre le riche Nord et le Sud pauvre ? » (p. 138) écrit sans honte Denis Daniel dans son autobiographie Mon Théâtre à corps perdu (2006). Dans le cas de Marcel Proust, on observe la même dualité : à la fois l’écrivain sait mieux que personne que l’amour vrai ne se monnaie pas… mais cela ne l’empêche pas d’« aimer particulièrement le milieu des domestiques : il avait besoin de ce monde que l’on pouvait acheter ». (cf. l’article « La Douleur pour destin » de Pietro Citati, dans le Magazine littéraire, n°350, 1997, p. 25)

 

Beaucoup de personnes homosexuelles aiment les pauvres non pour eux-mêmes mais pour l’occasion qu’ils leur fournissent de se mettre à leur place : « Les homosexuels sont souvent des immigrés d’un nouveau genre. » (p. 78) déclare Jean Le Bitoux dans son essai Citoyen de seconde zone (2003) ; « Nous sommes tous des Arabes gays. » (Éric, le chroniqueur « littéraire » de l’émission radiophonique Homo Micro sur Paris Plurielle, 106.3 FM, à Paris, le 22 juin 2006) ; « C’était mieux d’être un lépreux que de se sentir attiré par les hommes. » (Dan, homme homosexuel, dans le documentaire « Desire Of The Everlasting Hills » (2014) de Paul Check) ; etc. Sur le terrain associatif LGBT, l’éloignement du pauvre réel et l’arrivisme gagnent également une grande part du tableau idyllique du militantisme homosexuel : « Act Up est l’association de lutte contre le Sida dont la composition fait la plus grande part aux malades, alors même qu’elle ne s’investit alors aucunement dans l’aide directe. » (cf. l’article « Mobilisation gay en temps de Sida » d’Olivier Fillieule, cité dans l’essai Les Études gay et lesbiennes (1998) de Didier Éribon, p. 91) Certains groupes militants homosexuels agressifs, tels que le FHAR (visible dans les années 1970), Act Up, Les Panthères roses (association dont la première « action » a été lancée le 14 décembre 2002 à Paris, lors d’une manifestation contre la guerre en Irak), ou Les Sœurs de la Perpétuelles Indulgence, naissent précisément dans les moments où le gâteau des pauvres est partagés, où la lutte en faveur des réelles injustices sociales (pandémie du Sida, conflit armé, crise économique…) est à son zénith, où il y a de la souffrance et de la pauvreté à récupérer, des couvertures de victimes à tirer à soi, plus ou moins légitimement d’ailleurs.

 

Angela Davis et Jean Genet

Angela Davis et Jean Genet


 

L’identification injurieuse à l’étranger/au pauvre est pourtant faite avec le sourire, et passerait presque pour belle tellement elle « swingue » à l’unisson de la pensée politiquement correcte actuelle déroulant le tapis rouge à la « Tolérance », ce concept idéologique fumeux qui ne signifie rien (tout dépend de ce qu’on tolère). Je pense par exemple au final très World et United-Colour-of-Bande-de-Cons du concert d’Oshen (Océane Rose-Marie, la fameuse « Lesbienne invisible »), le 6 juin 2011 à l’Européen de Paris, avec la brochette de femmes étrangères débarquant sur scène comme un cheveu sur la soupe, pour pousser la chansonnette en l’honneur de la « diversité [des ‘genres’] et des différences », au rythme des tambourins orientaux. Certains militants homosexuels se servent du visage pluri-ethnique d’une communauté homo internationale fantôme, ou de la « femme lesbienne du bout du monde » (de préférence afghane, incarcérée, et violée), pour obtenir des droits LGBT nationaux, et envoyer ses commissionnaires prêcher la Bonne Nouvelle de l’Amour homo à leur place jusqu’aux extrémités de la Terre (comme on peut le voir ci-dessous pour le cas de l’Espagne) : « Dans d’autres villes apparaîtront des groupes d’immigrés LGBT. Conjointement à leurs problèmes d’insertion, ces activistes peuvent jouer un rôle primordial en ouvrant la question homosexuelle et transsexuelle à leurs communautés d’origine en Espagne. Qui mieux qu’un gay maghrébin ou qu’une lesbienne péruvienne pour parler à ses semblables ? » (Jordi Petit, cité dans l’essai Primera Plana (2007) de Juan A. Herrero Brasas, p. 58) Cette identification excessive à « l’homosexuel persécuté aux 4 coins de la Planète » donne parfois lieu à de grotesques méprises, limite insultantes pour les nations ainsi récupérées et diabolisées une fois que le pot aux roses est découvert. Ce fut le cas tout récemment avec la blogueuse syrienne qui tenait le site « A Gay Girl In Damascus » (= Une Fille Gay à Damas)… mais qui n’était en fait ni syrienne, ni lesbienne, ni une femme ! Un post annonçait début juin 2011 qu’elle avait été kidnappée par les forces de sécurité syriennes : on a découvert que cette « Amina Arraf », qu’on s’apprêtait à couronner mondialement de la Palme du Martyr de l’Homophobie, se trouvait être un personnage inventé par Tom MacMaster, un étudiant américain en Écosse… Well well well… On passe. Concernant la récupération des pauvres à des fins politiques égoïstes, le problème se pose de manière beaucoup plus locale et nationale dans le cadre par exemple des banlieues. L’« enfer » qu’endurent/qu’endureraient les quelques rares personnes homosexuelles qui habitent dans les tours – et que la grande majorité des membres de la communauté LGBT méconnaît, même si elle se plaît à les imaginer très nombreuses ET invisibles – constitue un prétexte en or pour prouver à l’ensemble de la population française que la sainte et affreuse déesse Homophobia existe, et pour convaincre nos politiques de l’urgence de la législation sur les « droits des homos ». Vanda Gautier, la metteur en scène, s’oppose justement à l’entreprise stigmatisante d’instrumentalisation de la souffrance du « pauvre homosexuel des cités », menée par certains militants homosexuels, spécifiquement au sujet des banlieues. « L’homophobie, ce n’est un ‘problème de banlieue’. Il n’y a pas plus de violence homophobe en banlieue qu’ailleurs. Elle s’exprime d’une manière particulière en banlieue, mais elle n’est pas des banlieues. » (Vanda Gautier lors de la remise du Prix Toleranz à la comédie musicale Place des Mythos de Catherine Regula, SIGL, Carrousel du Louvre, Paris, le samedi 3 novembre 2007)

 

Arthur Rimbaud à Aden

Arthur Rimbaud à Aden


 

La recherche parfois fiévreuse du pauvre homosexuel martyrisé peut dans certaines situations traduire tout simplement un désir de mort (« De nombreuses fois je me suis demandé s’il n’y avait pas une pointe de morbidité dans la fascination que le fait juif exerce sur moi » déclare par exemple Juan A. Herrero Brasas dans l’essai Primera Plana (2007), p. 25), ou bien une haine de soi très profonde (comme l’écrit Gilles William Goldnadel : « Les martyrocrates, ce sont tous ceux qui, par passion ou par intérêt, exploitent, magnifient ou fabriquent la souffrance de celui qui, a priori, présente le profil idéal de l’innocente victime à protéger » pour combler leur propre mal-être : cf. l’essai Les Martyrocrates (2004), p. 7). Inutile de dire que ces deux sentiments sont des moteurs puissants d’homophobie…

 
 

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