Moment

SIGNIFICATION SOCIALE, MONDIALE ET ESCHATOLOGIQUE DU CODE

 
 

LE CULTE MONDIAL ET ANTÉCHRISTIQUE DU MOMENT
 

On entend souvent, dans notre Monde matérialiste, libertin et relativiste, ayant placé le bonheur, le bien-être personnel et les plaisirs bien avant la joie grave et contraignante de la Croix de Jésus, une idéalisation du Moment. « C’est le (bon) moment. », nous dit-Il. « Il faut profiter de chaque moment comme si c’était le dernier : on n’a qu’une vie ! » « C’est pas le moment. J’ai pas envie. Je le sens pas… ». En plus de sentir l’alibi de mauvaise foi à plein nez, cette invocation du Moment nous enjoint à suivre le baromètre de nos envies, de nos humeurs, qu’on sera encouragés à rebaptiser, pour redorer leur blason et ne pas passer pour d’égoïstes hédonistes instinctifs et bestiaux, « Instant présent », « petits plaisirs », « déclic », « coup de cœur », « inspiration »… Il y a par exemple dans la bouche de certains dirigeants politiques carriéristes une connotation de conquête dans leur usage du mot « Moment » : par exemple, « C’est le moment ou jamais. ». Ils passent à l’offensive, à l’action, présentent le « moment » comme la chance unique qui ne se représentera jamais. Ils confèrent donc à ce dernier un caractère fatal, inéluctable, puissant autant que fugace et impitoyable. Un saut de l’ange.
 

En fait, l’insistance mondiale sur le dieu « Moment », si celui-ci est déconnecté de l’éternité de Jésus-Dieu dans laquelle il devrait idéalement s’inscrire (auquel cas ce moment s’appellerait « Kaïros » ou « Apocalypse »), se convertit en un appel à l’hédonisme (jouissance des plaisirs), à l’orgueil (qui érige la volonté personnelle de l’instant, la soi-disant « intuition », sur un piédestal, comme s’il s’agissait d’une révélation impérieuse), et à l’abandon à ses pulsions. Ce « moment » là n’est pas bon ni à idéaliser/cautionner. Même s’il est annoncé comme « propice », « grand », « fort », « énergisant », « unique » ou « historique ». Nous, en tant que catholiques, nous n’idéalisons pas tous les instants. Nous ne sommes pas obsédés ou dépendants de tous les moments comme s’ils étaient des dieux totalitaires auxquels nous soumettre. Non. Nous, nous n’attendons que le Moment du Règne éternel de Dieu.
 

 

DANS LA SÉRIE JOSÉPHINE ANGE GARDIEN

 

Épisode 78 – « Carpe Diem »

LE MOMENT : ALIBI DE LA SINCÉRITÉ ET DE LA FRANCHISE
 

Dans mon adolescence, j’ai eu la chance d’être initié à cette Momentolâtrie, d’être assez tôt alerté sur les dangers de cette « idéologie du Moment » : à chaque fois que mon frère jumeau allait sortir une connerie, ou être de mauvaise foi, qu’il devenait intransigeant, obsessionnel ou péremptoire, il utilisait de manière automatique le mot « moment » comme un mantra. Quand sa phrase commençait pas « Y’a un moment donné… » ou « c’est pas le moment », c’est que son cœur s’enfermait dans une certitude radicalisée, une auto-persuasion verrouillée et verrouillante.
 

C’est pareil avec Joséphine. Cet ange gardien passe pour l’ange providentiel, tombant toujours à pic : « Comment tu fais pour être toujours là au bon moment ? » s’interroge Nicolas, dans l’épisode 46 « Police Blues ». Au mieux, le « moment » qu’évoquent les personnages est synonyme d’« actualité », de « circonstance », d’« événement ». Mais il arrive qu’il se réfère à la « mode », à la « tendance » : « On n’y pense pas assez mais la famille, c’est à la mode en ce moment. » (c.f. l’épisode 26 « Enfin des vacances ! ») ; « La famille, en ce moment, c’est tellement tendance. » (Jean-Claude, idem). Et d’aucun savent que la « mode », c’est neutre (ça dépend qui elle sert) et bien souvent elle n’est pas bon signe et s’oriente plutôt vers une soumission au paraître, à la masse, au politiquement correct, aux intentions, plus qu’à la Réalité-Confiance.
 

La série Joséphine ange gardien est un hymne à la franchise, base intentionnelle et idéologique de la Franc-Maçonnerie (dans « Franc-Maçonnerie », il y a « franc »…). Et le mot « moment » sert beaucoup cette franchise : « La sincérité, ça paye, à un moment ! » (Mimie Mathy commentant le succès lucratif de son personnage de Joséphine, dans l’émission 7 à 8 sur TF1 diffusée le dimanche 12 août 2018) ; « Même moi, à un moment, j’ai cru que vous étiez sincère. » (Joséphine s’adressant à Charles, dans l’épisode 38) ; etc. Et j’irais même plus loin : dans l’imaginaire collectif, le moment est inconsciemment associé à une illumination d’illuminati maçonniques et carriéristes : « C’est une copine, la Belle au bois dormant. Ça fait un moment que je n’ai pas eu de nouvelles d’elle. » (c.f. l’épisode 20 « Le Stagiaire ») ; « Parfois, il suffit d’une bonne idée. » (Roger) « C’est ça : la bonne idée au bon moment. C’est le secret de la réussite ! » (Gilles, dans l’épisode 61 « Un Monde de douceur ») ; « Ça fait un moment qu’on s’est pas vus. On travaille trop. » (Joséphine en parlant de Bill Francker, son boss factice de Montréal, dans l’épisode 62 « Yasmina ») ; « On travaille beaucoup en ce moment. On est débordés de boulot. » (Joséphine gérant la comptabilité de la société de vente en ligne Atlante.com, dans l’épisode 78 « Carpe Diem ») ; « Maintenant, à chaque fois que t’auras un instant de panique, repense à ce moment. » (Joséphine s’adressant à Chloé après l’avoir replongée dans sa bulle d’enfance pour lui redonner la passion de la cuisine et gagner son concours, dans l’épisode 89 « Graines de chef ») ; « Alors Boss, j’suis admis ? Y’a même un moment où j’ai frôlé l’excellence ! » (Gabriel, ange-stagiaire de Joséphine, dans l’épisode 86 « Le Mystère des pierres qui chantent »).
 

Quand le mot « moment » sort de la bouche de Joséphine, en général, ça pue : « Je tombe toujours au mauvais moment. Ça doit être une vocation. » (c.f. l’épisode 3 « Le Tableau noir ») ; « C’est pas le moment d’être fragile. » (Joséphine s’adressant à Charles, dans l’épisode 13 « La Tête dans les étoiles ») ; « Un moment de honte, ça se digère vite. » (c.f. l’épisode 14 « La Fautive ») ; « C’est pas le moment de se décourager. » (c.f. l’épisode 34 « Un Passé pour l’avenir ») ; « Avec l’autre névropathe qu’ils m’ont collé sur le dos, c’est pas le moment de déraper ! » (Joséphine en parlant de l’Archange Matthias, dans l’épisode 41 « Les deux font la paire ») ; « Je ne prends que ça parce que je fais un petit peu attention en ce moment. » (Joséphine devant des petits fours, dans l’épisode 50 « Le Frère que je n’ai jamais eu ») ; « Il ne faut pas que je fasse trop de sport, parce qu’à un moment, je vais tellement maigrir qu’on ne va pas me reconnaître. » (c.f. l’épisode 51 « Ennemis jurés ») ; « Oh non, c’est pas le moment de faire des erreurs d’atterrissages ! » (idem) ; « On a cru qu’il était mort, à un moment, parce qu’il était très ahjaja… mais maintenant, il va beaucoup mieux. » (Joséphine évoquant l’état critique de Victor, dans l’épisode 66 « De père en fille ») ; « En ce moment, t’es un tout petit peu chéiiiin… » (Joséphine s’adressant à Bastien qu’elle trouve « bizarre », dans l’épisode « Restons zen ») ; « Je comprends que vous voyiez un peu tout en noir en ce moment. » (Joséphine s’adressant à François, dans l’épisode 78 « Carpe Diem ») ; « En tout cas, merci d’accueillir Sandra. Elle a vraiment besoin d’un coup de main en ce moment. » (Joséphine s’adressant à Clémence, dans l’épisode 82 « La Parenthèse enchantée ») ; « Y’a des moments pas faciles dans la vie. » (c.f. l’épisode 88 « Trois campeurs et un mariage ») ; « Tu crois vraiment que c’est le moment de lire ses textos ? » (Joséphine paniquant en voyant Chloé se déconcentrer lors de son concours de cuisine parce que cette dernière reçoit des messages de son amant-dealer Alexis, dans l’épisode 89 « Graines de chef ») ; « Elle n’a pas besoin de ça en ce moment. » (Joséphine volant puis jetant les anti-dépresseurs et les somnifères de sa cliente Suzanne, dans l’épisode 97 « Mon Fils de la Lune ») ; etc. Par exemple, dans l’épisode 90 « 1998-2018 : Retour vers le futur », c’est lorsque l’ange gardien Ismaël prend en selfie le jeune Maxime avec lui (« Et là, c’est le moment important. » signale-t-il à Joséphine) et l’immortalise sur son téléphone portable (« Eh bien souris ! ») que le garçon de 12 ans se désagrège sous ses yeux. Le moment est donc en général associé dans Joséphine à une catastrophe.
 

Si Joséphine parle du « moment », c’est presque systématiquement parce qu’elle est sur le point de justifier l’injustifiable. Par exemple, dans l’épisode 1 « Le Miroir aux enfants », elle s’invente un faux amant : « J’ai un fiancé-ange, mais je ne le vois pas très souvent en ce moment car il est en Afrique. ». Dans l’épisode 35 « Coupée du Monde », dans un centre d’accueil de sans-logis, Joséphine fait apparaître son nom et celui de Geneviève sur un écran d’ordinateur indiquant une liste d’attente pour des hébergements d’urgence (« Ma collègue et moi sommes inscrites depuis un bon moment. Regardez. » dit-elle à la réceptionniste), passant ainsi devant des gens plus nécessiteux qu’elle. Dans l’épisode 69 « Double Foyer », pour justifier le divorce, notre héroïne s’appuie sur le « moment » en soutenant que l’amitié serait un substitut marital. En effet, Julie quitte son mari Franck. Zoé, une de leur filles, regrette la séparation de ses parents. Et Joséphine se met à plaider auprès d’elle la nécessité du divorce : « Eh ben voilà. Tu vois, les histoires d’amour, c’est un peu comme les histoires d’amitié : au début, on partage tout, on est d’accord sur tout… et puis à un moment, eh beh voilà, y’en a un qui part dans une direction, et puis l’autre qui part dans l’autre. C’est ce qui se passe pour vos parents en ce moment. ». Dans l’épisode 58 « Liouba », quand Joséphine parle de « moment », c’est pour justifier la GPA (Gestation Pour Autrui) : « C’est peut-être ça, ma mission : aider Anna à passer ce moment douloureux… » déclare-t-elle face à sa cliente mère porteuse. Dans l’épisode 68 « Restons zen », c’est lorsque l’ange gardien va forcer au outing qu’elle emploie le mot « moment » : « Maintenant, c’est le moment de dire la Vérité. » dit-elle à la jeune Romane pour qu’elle fasse son coming out. Dans l’épisode cross-over avec Camping Paradis intitulé « Un Ange au camping », Joséphine se drape derrière l’excuse du moment pour picoler : « Hey dis donc, j’espère qu’à un moment, on a le droit de boire un coup ! ». Dans l’épisode 90 « 1998-2018 : Retour vers le futur », l’héroïne et son ange gardien stagiaire Ismaël forcent le couple Stan/Nina à se former : « Allez, vas-y, Stan, dis-lui que tu l’aimes et embrasse-la ! » (Joséphine) « Allez ! C’est le moment ! Faut y aller, là ! » (Ismaël). Dans l’épisode 95 « Disparition au lycée », les deux anges gardiens espionnent cette fois la soirée d’Océane en mode flicage-camouflage : « Bon eh bien c’est le moment de devenir invisibles. » (Joséphine).
 

Quand Joséphine parle du « moment », c’est aussi dans le sens de « Moment de Vérité ». Autrement dit, c’est pour inciter aux aveux, menacer, ou foutre la pression aux gens, solenniser un chantage qu’elle leur impose : « Faites gaffe, parce qu’à un moment donné, tout se paye ! » (Joséphine s’adressant à Renaud le harceleur, idem) ; « Qu’est-ce qui vous mine ? Quel est votre secret ? […] Vous ne pensez pas que c’est le moment de parler ? » (Joséphine s’adressant à Lucie, dans l’épisode 27 « Sauver Princesse ») ; « Justement, c’est pas le moment de baisser les bras ! » (Joséphine s’adressant à Manon, dans l’épisode 63 « Le Cirque Borelli ») ; « Tu penses pas que ce serait le moment de dire tout ce que tu as sur le cœur ? » (Joséphine s’adressant à Camille, dans l’épisode 65 « Pour la vie ») ; « À un moment donné, il faudra que tu lui dises. » (Joséphine s’adressant à Yann à propos des sentiments qu’il éprouve pour Jeanne, dans l’épisode 72 « Les Boloss ») ; « Ça, c’est l’effet cocotte minute : on garde tout, on garde tout, et après, ça explose. À un moment donné, faut se jeter à l’eau. Bon, je sais que c’est pas la bonne expression. » (c.f. l’épisode 88 « Trois anges et un campeurs ») ; « Mesdemoiselles, si vous savez quelque chose, c’est le moment de le dire, là ! » (Joséphine s’adressant aux trois filles Maëva, Lou et Amel, dans l’épisode 95 « Disparition au lycée ») ; etc. Il y a même dans l’usage du mot « moment » en bouche des personnages joséphiniens un côté couperet fatidique, explosif et impitoyable du Justicier : « La vérité va forcément éclater. C’est comme une cocotte minute sous-pression. À un moment, ça explose ! » (Joséphine s’adressant à Pauline, dans l’épisode 23 « Sens dessus dessous ») ; « C’est normal que tu sois agressive. Tu gardes tout pour toi. Tu veux tout contrôler. […] C’est normal. À un moment, t’es comme une cocotte-minute, y’a trop de pression, et pchhh ! » (Joséphine s’adressant à Charline, dans l’épisode 83 « Sur le cœur ») ; « Ça, c’est l’effet cocotte-minute : on garde tout, on garde tout, et après, ça explose ! À un moment donner, faut se jeter à l’eau ! Bon, je sais que c’est pas la bonne expression. » (Joséphine s’adressant à Tom, dans l’épisode 88 « Trois campeurs et un mariage ») ; « C’est le moment de vérité, messieurs ! » (Joséphine autour d’une table de poker de saloon, dans l’épisode 92 « L’Incroyable Destin de Rose Clifton »).
 

Dans Joséphine (et ça risque de vous surprendre), la dialectique du Moment, c’est la Bête (de l’Apocalypse). Par l’entremise du « Moment », l’héroïne veut (se) rendre pulsionnel(-le), instinctif(/-ve), bestial(-e) et démoniaque : « Oui, à un moment, j’ai fait partie des Paradise Angels, c’est un groupe dissident des Hell’s Angels. » (c.f. l’épisode 15 « La Comédie du Bonheur »). Par exemple, dans l’épisode 79 « Je ne vous oublierai jamais », elle fait tout pour caser Anne avec Cyril, et emploie une métaphore animalière explicite : « À un moment faut que tu remontes à cheval… Non, c’est pas ce que je veux dire. C’est une image. ». La béquille du « Moment » sert à faire du forcing. Dans l’épisode 86 « Le Mystère des pierres qui chantent », idem : Gabriel, l’ange-stagiaire de Joséphine, s’inquiète d’avoir mal maîtrisé son tour de magie sur deux adolescents Max et Louison : « Tu me rassures ! J’ai cru que je les avais fait disparaître. À un moment, je me suis même demandé si je les avais pas transformés en rongeurs ! » avoue-t-il à sa maîtresse. Dans la série Joséphine ange gardien, c’est la Bête elle-même qui parle du moment. Par exemple, dans l’épisode 52 « L’Homme invisible », pendant toute l’intrigue, un boa constrictor nommé « Oscar », installé dans un grand bocal fermé à l’intérieur de la chambre de Joséphine, s’adresse à notre ange gardien avec une mystérieuse voix électrique. Cette Bête a l’air démoniaque. Mais très vite, Joséphine s’y habitue et s’en fait un ami… sans doute parce que tous les deux se reconnaissent comme des jumeaux, mais aussi parce qu’Oscar semble être la petite voix de la conscience de Joséphine. Et Oscar le boa expose sa philosophie du Moment : « Le Sage utilise son savoir quand le moment est venu. » (Oscar) ; « Je parie que c’est un proverbe inca. T’as raison. Je vais le mettre en pratique. » (Joséphine). Voilà voilà : le « Moment », c’est la Bête apocalyptique.
 
 

DANS D’AUTRES ŒUVRES DE FICTION

 

Dans les fictions, l’acception du mot « moment » va dans les extrêmes : soit ce « moment » annonce quelque chose d’impératif (comme si c’était grave, brutal, accidentel, solennel, émotionnellement intense et/ou spectaculaire : je pense à toutes les émissions qui proposent leurs « meilleurs moments », mais aussi à la chanson romantique « In a Moment like this » de Chanée et N’Evergreen, ou encore à la chanson insurrectionnelle « À tout moment la rue » du groupe Eiffel), soit au contraire il annonce quelque chose d’aléatoire (comme si rien n’était grave et que tout était relatif : c.f. la chanson bobo « Ça dépend [des moments] » de Claire Keim). Mais dans les 2 cas, ce moment n’est pas du tout aimant ni éternel.
 
 

LE CATHO-CON (progressiste ou conservateur) FAIT PAREIL…

 

Le « Moment » est un mot que l’on peut retrouver dans la Bible. D’où l’importance de ne pas le diaboliser non plus. C’est une certaine instrumentalisation du terme que je condamne. « En tant que coopérateurs de Dieu, nous vous exhortons encore à ne pas laisser sans effet la grâce reçue de lui. Car il dit dans l’Écriture : Au moment favorable je t’ai exaucé, au jour du salut je t’ai secouru. Le voici maintenant le moment favorable, le voici maintenant le jour du salut. » (2 Cor 6, 1-2). Nous, en tant que catholiques, nous croyons aussi au moment dès lors que c’est « le Moment de Dieu », donné par Lui, et non pas le moment que nous Lui attribuons parce que ça nous arrange ou nous sécurise (en mode « Cardinal Sarah » qui ritualise et codifie les moments consacrés à Dieu : « Les grands moments d’une vie, ce sont les heures de prière et d’adoration. » écrit-il dans son livre Dieu ou rien, publié en 2015) ! Il nous faut faire très attention à ne pas instantanéiser Dieu, à ne pas le figer sous forme d’événement furtif, trop ritualisé, circonscrit à nos lois humaines, révélateur, miraculeux, pour mieux Le posséder, ou à ne pas choisir nos occasions/événements fondateurs à sa place. J’ai entendu assez fréquemment des amis juifs parler du concept de « Kaïros » comme le climax de l’arrivée du Messie… alors même qu’ils sont précisément passés à côté du vrai Messie, Jésus. C’est dire s’il faut faire très attention à ne pas privilégier/sacraliser le Moment/l’Événement au détriment de la Personne qui le crée ! Par ailleurs, dans la pensée mondialiste d’inspiration juive, le « Kaïros » à savoir le « Moment » est entendu comme une chance à saisir, une action à poser, une rencontre à provoquer, le signe d’un accomplissement voire même de l’arrivée soudaine d’un dieu. Mais ce dieu a tout l’air d’être luciférien. En effet, le concept de Kaïros apparaît chez les Grecs sous les traits d’un petit dieu ailé de l’opportunité, qu’il faut saisir quand il passe.
 

Pour nous catholiques, le Règne de Dieu à la fois s’inscrit dans une chronologie, à un instant T, à la fois n’a pas de moment privilégié puisque il est éternel : Dieu règne ici et maintenant ; c’est à tout moment le bon moment, le moment favorable, et chaque instant et événement que nous vivons, du fait d’être au mieux voulu au pire permis par Lui, est idéal et parfait. Il n’y a pas de « Kaïros » particulier, si ce n’est que toute fraction de seconde et tout événement (même rasoir, même peccamineux) est occasion d’expérience de la rencontre avec Jésus, est manifestation de Sa Présence et de Sa Gloire. Le fait de « choisir Ses Moments », au gré de ses humeurs ou de son excitation, ce n’est pas catholique. Ce qui est catholique, c’est d’accueillir tout moment comme le Règne de Jésus-Dieu. Et c’est d’ailleurs cette vérité qui a fait sortir les pharisiens et les Juifs de leurs gonds : lorsque Jésus, dans la synagogue, après avoir refermé le livre sacré de la Torah (c.f. à 1h41 du « Jésus de Nazareth » de Zeffirelli) , a dit qu’il était Le Moment en personne, l’accomplissement entier et présent du Règne de Dieu : « Cette Parole de l’Écriture que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit. » (Lc 4, 21). Autrement dit, Jésus a osé se définir lui-même comme le Moment. Tout ce que les prophètes ont annoncé se réalise concrètement et présentement en sa Personne. Je ne sais pas si nous imaginons le scandale que ça a réveillé ! Bref, tout ça pour dire que, même s’il y aura un Moment où tous les Hommes le connaîtront, seul le Père le connaît ; et nous, catholiques, de notre côté, savons que tout instant est le Moment de Jésus, et que le Temps appartient à Dieu.
 
 

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