Refus de l’Harmattan et mépris du populaire

Lettre de refus d’édition pour mon livre Couples homosexuels : c’est quoi le problème ? envoyée par les éditions L’Harmattan :
 

 

« Cher Monsieur,
 

Je vous remercie de nous avoir proposé votre manuscrit : ‘Couples homosexuels : c’est quoi le problème ?’
 

Cependant, j’ai le regret de vous informer que notre comité de lecture ne l’a pas retenu pour publication dans notre collection : Questions Contemporaines.
 

Note du comité de lecture : Il s’agit d’un ouvrage de synthèse des débats autour de l’homosexualité. Il est très pertinent (comme les livres précédents de l’auteur), et la présentation en question-réponse fonctionne bien, mais le style de certaines parties relève plus du café du commerce que d’une véritable analyse. Un livre n’est pas une conversation de bistrot. Une réécriture s’impose qui éviterait les fausses intimités et les pseudo familiarités. Contrairement à la vulgat télévisuelle actuelle, le style relâché et faussement « popu » n’apporte rien ni du point de vue de la clarté des débats ni d’ailleurs sans doute de l’attention du public.
Avis défavorable en l’état.
 
Bien cordialement
 

Bruno Péquignot »

 

Voici ma réponse :
 

Merci pour votre réponse, Monsieur Péquignot, même si c’est un refus, et que je le regrette. Je trouve votre argument de la forme, ou votre mépris du ‘populaire’ (votre élitisme anti ‘vulgarités démagos’), injuste autant que violent pour ‘le peuple’, justement.
 

Car les arguments et le ton que j’emploie ratissent extrêmement large, en réalité : jeunes, vieux, croyants catholiques et musulmans, athées, familles, célibataires, hommes politiques, ouvriers, femmes, hommes, énormément de personnes homosexuelles, activistes gays et internautes lambda, toute la pègre et cour des miracles LGBT…
 

Dans mon livre, il n’y a pas qu’un seul ton, qu’un seul registre de langue, et qu’un seul avis : j’ose même dire que s’y trouvent tous les avis du Monde entier – et même des Églises – sur l’homosexualité. Des plus courants aux plus secrets. Ce sont beaucoup de vies et de pensées collectives que j’expose, et dont paradoxalement personne ne parle, alors que c’est la pensée commune universelle.
 

Je veux bien entendre que vous qualifiiez mon livre de ‘discussions de comptoir’ ou de ‘café du commerce’… mais uniquement dans la mesure où vous réalisez (ce dont je doute) que ce café a actuellement plus la taille du Stade de France que du petit troquet ‘Chez Ginette’, voire même du plateau d’Hanouna.
 

Et quand bien même mon essai aurait la tenue d’un débat ‘Touche pas à mon poste’, j’en serais très honoré. Car d’une part, c’est un jeu de rôles et théâtral assumé et finalement beaucoup plus convivial, ‘cool/popu’, vivant et parlant, que tous les (mauvais) livres académiques ou sociologiques sur la question de l’homosexualité, et qui ne parlent/rejoignent personne. Et d’autre part, je ne vois pas où serait le problème de la vulgarité bien maîtrisée (d’aucuns trouvent mon style d’écriture et mes arguments trop touffus, ‘religieux’ ou ‘intellos’ ! Il faut savoir !). Je n’ai, en ce qui me concerne, aucun mépris pour les discussions de marché, de cour de lycées, de gare, de plateau télé, de bar, et même de ‘bar à putes’ : c’est là-bas que j’y ai entendu le plus de vérités sur l’Humain et sur Dieu.
 

J’aime le peuple, j’aime les gens – intellos ou petites gens -, j’aime le populaire et la ‘culture poubelle’, et je ne m’en suis jamais caché. Comme tout intellectuel ou artiste homosexuel : le kitsch, le Pop Art, les subcultures sentimentales que tout le monde méprise, et même la familiarité provoc’/démago, c’est notre passion !
 

Voilà. Votre refus est une erreur. Votre mépris du populaire et de mon langage fleuri, regrettable. Je tenais à vous le dire. Triste époque. L’homophobie a encore de très (trop !) longs jours devant elle. Et je ne me victimise même pas en disant cela. C’est juste du constat.
 

Cordialement.
 

Philippe Ariño »