Nuit des Témoins 2023 : le martyre aux loges (maçonniques)… pardon, le martyrologe


 

Le vendredi 27 janvier 2023 dernier, j’ai assisté en direct à l’église Saint Sulpice (Paris) à la Nuit desTémoins (la 14 édition). C’est tellement un scandale, cette soirée, que j’ai décidé d’écrire cet article pour dénoncer l’endormissement et la collaboration de la plupart des catholiques à cette mascarade en apparence louable et irréprochable – mais en réalité luciférienne et maçonnique.
 

Attention : À qui sera décernée la Palme d’or (du martyre) cette année ? Suspens…

Le concept de la Nuit des Témoins est simple : il s’agit d’une veillée de prière pour les chrétiens persécutés ou assassinés dans le Monde, supposément « à cause de leur Foi et de leur annonce de l’Évangile », organisée par une association caritative catholique appelée l’AED (Aide à l’Église en Détresse). Cette veillée annuelle est présidée en général par un évêque (cette année, le Jacques Pradel épiscopal était l’évêque de Saint Denis, Mgr Delannoy). Et elle consiste en une litanie : on nous dresse la liste des martyrs de l’année. Si vous préférez, ce sont un peu Les Oscars mais version éloge funèbre catholique. Sur un air de piano sentimental de l’Emmanuel. En gros, c’est la rubrique nécrologique ecclésiastique (meurtres, enlèvements, emprisonnements, tortures, déplacements de population, incendies d’églises, attentats, intimidations, pillages, etc.) de l’année écoulée. Tout comme le fait l’association S.O.S. Homophobie dans le cas homosexuel, avec des « Rapports annuels édités… sauf qu’avec les Nuits des Témoins, c’est pour les victimes de l’anticléricalisme, et non de l’homophobie. C’est ce qu’on appelle un « martyrologe », rituel originellement juif puis protestant, mais dans lequel les catholiques francs-maçonnisés sont récemment tombés eux aussi. En effet, comme l’Église Catholique actuelle se maçonnise et se protestantise à grands pas aujourd’hui, Elle reprend à son compte cette tradition du martyrologe comme si c’était un bien. Ensuite, une fois le listing des morts de l’année passé en revue, on écoute trois témoignages de « religieux du bout du Monde » de 15 minutes chacun, entrecoupés de chants méditatifs. Et à la fin, c’est l’adoration eucharistique (le Saint Sacrement est exposé) et la collecte des dons pour l’AED.
 

« Alors, me dira-t-on, pourquoi tirer sur une belle œuvre [l’AED et sa Nuit des Témoins], utile, et qui donne le micro aux ‘sans-voix’ au moins une fois dans l’année ? Nulle association n’est parfaite et ne vit d’amour et d’eau fraîche, n’échappe aux ambiguïtés et aux intérêts du ‘charity business’. Mais, comme avec les organismes ‘pro-Vie’, l’AED, malgré ses défauts, sauvent des vies, aident des gens, doit être encouragée plutôt que torpillée. » Mais, je vous le demande, au lieu de rester sur le terrain des bonnes intentions et des maigres résultats, pourquoi ne pas émettre l’hypothèse que ces mouvements, à force de compromissions, non seulement collaborent avec leur(s) ennemi(s) voire créent ce qu’ils pleurent/dénoncent (parce que ce n’est pas ce qu’ils dénoncent le problème mais COMMENT ils le dénoncent), et font partie des ennemis ? Je trouve que la réflexion mérite d’être posée.
 

Le problème majeur, à mon sens, de La Nuit des Témoins, c’est qu’on ne nous explique jamais pourquoi les prêtres sont persécutés. Le mal n’est pas nommé. C’est juste un étalage des conséquences factuelles de causes que l’on tait, ce qui fait basculer ce genre d’événements commémoratifs dans le fatalisme (d’impuissance) et la victimisation constative en même temps qu’émotionnelle et sensationnaliste. Tout ça sur la base du réel et de souffrances réelles. Mais il n’y a aucune analyse (ni politique ni surnaturelle) d’opérée. Le but n’est finalement pas d’enrayer le phénomène de persécutions tant regretté (puisqu’on n’explique pas les mécanismes, les ressorts, les forces profondes à l’œuvre ; ou parce que les persécuteurs ce seraient, nous dit-on, forcément « LES AUTRES », ces « autres » noyés en général dans un collectivisme institutionnel flou qui les transforme en légions nombreuses et anonymes d’une même constellation diabolique inhumaine et dépersonnalisée : « les djihadistes », « les assaillants », « le Gouvernement d’Untel », « la junte militaire », « une mauvaise gouvernance », « la violation des droits humains », « la situation d’injustice sociale », « les autorités », « un groupe armé islamiste », « le régime totalitaire », « le socialisme », « des lois injustes », « la violence », « l’armée », « la police », « des gangs armés », « une série d’événements obscurs », « des bandits », « des manifestants anti-gouvernementaux », « des rebelles », « des insurgés », « des adultes irresponsables et corrompus », etc.) mais de l’encourager par le misérabilisme de pleureuses appelé pompeusement « prière », « Espérance », « persévérance », « martyre », « Paix », « Solidarité, puis « don » (financier).
 

Les raisons profondes de ces conséquences dramatiques sont spectaculairement simplifiées par un christocentrisme et une victimisation/dramatisation exacerbés, un procès d’intentions censurant et infantilisant : « Ces témoins ont été persécutés. Et cela, tout simplement parce qu’ils ont voulu témoigner de l’Amour du Christ. » a dit textuellement Mgr Delannoy au micro. Ah bon ? Vous êtes sûr qu’il n’y a pas d’autres raisons que « Jésus », « l’Amour » et « la foi » ? qu’il n’y a pas d’autres acteurs responsables de ce qui se passe que « les autres » ? Qui parle de Satan? De la Franc-Maçonnerie ? Du Gouvernement de l’Antéchrist ? De la crise sanitaire mondiale (« Tout a changé en l’espace de deux ans. » a pourtant fait remarquer la religieuse haïtienne sœur Marjorie Boursiquot : personne ne fait le lien ?) ? Qui parle des Occidentaux responsables des crimes sacerdotaux de l’étranger qu’ils pleurent? Du mal fait par les cathos aux autres cathos? (Dans ses extases prophétiques, Maria Valtorta a vu des religieux – prêtres, nonnes – gifler, cracher et frapper Jésus lors de sa Passion : ce ne sont pas « les autres » !!). Qui parle de soi, de son propre cœur, de l’Église ? À entendre les participants ou concepteurs ou public des Nuits des Témoins, l’Église n’aurait absolument rien à se reprocher. Elle est automatiquement disculpée. Blanchie ! Les trois témoins de la soirée nous ont servi exactement le même discours stéréotypé : 1) D’abord ils font un constat géopolitique désastreux et accablant de leur situation nationale ; 2) Ensuite, ils parlent de l’Église sur place qu’ils présentent à la fois comme une blanche colombe innocente irréprochable, « proche des pauvres », tel « un Jean-Baptiste face à Hérode » (alors qu’on sait très bien que, par exemple, dans les pays d’Afrique, d’Amérique Latine, d’Europe, les Conférences épiscopales sont parfois corrompues et de mèche avec le pouvoir), et comme une victime impuissante et salie ; 3) Ils remercient l’AED qu’ils encensent comme leur unique bienfaitrice (plus encore que Jésus, et l’Esprit Saint), et appellent aux dons à celle-ci (remerciement-sponsoring, comme dans les spots publicitaires) ; 4) Ils récitent soit un Notre Père soit un Je vous salue Marie dans leur langue maternelle ou locale (et tout le monde s’émeut de l’exotisme de la beauté mondialiste d’entendre une prière qu’il comprend sans comprendre) ; 5) Ils déposent une bougie devant les portraits des religieux-martyrs de leur pays ; 6) Rideau.
 

On nous parle de « martyre », mais en réalité, ce dernier est étouffé. Car le sens plénier et universel de ces morts (à part le fait qu’ils aient été tués et qu’ils étaient catholiques – religieux ou laïcs) est complètement passé sous silence ! On se drape dans l’indignation ou l’offuscation muette et la « prière » ou dans la factualité des conséquences (dont on tait/chérit les causes), pour finir sur une touche forcée de « résurrection » et casser l’ambiance d’enterrement par un chant de louange dynamique sur la « confiance » et la « vie ». Mais la trame de fond reste le dolorisme, la martyrolâtrie (l’éclairage rouge-sang des voûtes de Saint Sulpice en témoignent !), la victimisation auto-disculpante.
 

Et pour que cette victimisation ne passe pas pour orgueilleuse et égocentrique, Mgr Delannoy l’a habillée in extremis de prière, de fausse humilité, de pardon magnanime, de Bible et de Jésus : « Il nous faut prier pour ceux qui persécutent les chrétiens, pour qu’ils passent des ténèbres à la lumière. ». Son discours franc et sirupeux m’a choqué. Il a même comparé les persécuteurs des chrétiens à des saint Paul qui peuvent connaître leur chemin de Damas. Il nous a invité à « prier pour leur conversion », en citant Jésus : « Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent. » (Mt 5, 44). J’ai trouvé ça détestable. Qui vous dit que ce n’est pas vous les persécuteurs ? J’ai toujours eu en moi l’intime conviction que la prière de conversion ne devait JAMAIS avoir les autres pour objets : sinon, ça signifie que c’est de l’orgueil déguisé et que c’est nous qui en réalité refusons de nous convertir. Car avant de demander que les autres changent, c’est à nous de changer ! Moi, quand j’entends un croyant catholique – ou que je m’entends moi-même – formuler ce genre de pseudo prière ou supplique « Seigneur, change le cœur d’untel [qui est très pécheur, très mauvais, et beaucoup plus mauvais et blessé que moi]. » (et non, « Seigneur, prie pour le plus grand des pécheurs que je suis ! et prends pitié de moi ! »), je tique tout de suite : « Oula… Ça ne va pas du tout. Là, c’est le Toto qui inspire ! ». Il faut toujours s’impliquer le premier dans ce que l’on dénonce, et s’identifier au plus grand pécheur. Au moins par solidarité d’Amour avec tous les pécheurs. Comme Jésus l’a fait sur la Croix, en « s’identifiant au péché » (2 Cor 5, 21). Sinon, ça pue du cul.
 

Et le pompon, c’est qu’après ce déni de responsabilité partagée avec les agresseurs (même pas nommés) des chrétiens persécutés, les organisateurs de la soirée, en citant saint Maximilien Kolbe, ont osé nous dire que « le poison le plus mortel était l’indifférence » et qu’heureusement que La Nuit des Témoins existait pour donner voix aux « sans-voix » et dévoiler la cruelle vérité (Dans son mot d’au revoir, Benoît de Blanpré, le directeur de l’AED, a lancé : « Merci d’être venus pour briser ce mur de l’indifférence, du silence. »). Et votre indifférence aux bourreaux, on en reparle (La seule qui ne leur a pas été indifférente, c’est la sœur haïtienne Marjorie Boursiquot, puisqu’elle a parlé des jeunes des quartiers pauvres qui intégraient les milices et les gangs armés devenant persécuteurs) ? Votre indifférence aux racines du mal et à vous-mêmes, on en reparle ? Et votre discours franc-maçon – fondé sur l’humanisme intégral – et luciférien hallucinant (puisqu’à la place du porteur de lumière, vous nous enjoignez à devenir des « porteurs d’Espérance »… mais au final ça revient au même ! C’est VOUS qui soi-disant apportez ! Mgr Delannoy – De la noix ? – a appelé de ses vœux que « le Monde devienne un peu plus lumineux, un peu plus humain », que nous soyons tous « éclairés par la lumière d’une Espérance », et s’est félicité de l’immense chaîne d’Union de « l’Espérance que les témoins de la soirée nous ont transmise » ; et le directeur de l’AED a aussi filé la métaphore lumineuse – « Merci à nos partenaires qui nous ont aidé à faire rayonner la Nuit des Témoins. » – et nous a encouragé à défendre l’un des deux socles – avec l’Unité – de la Gouvernance Mondiale antéchristique, à savoir « la Paix »… alors que le pacifisme devrait être idéalement notre principal ennemi), on en reparle, également ?
 

À part la récolte de fonds, quel est le but de ces soirées caritatives (même si une teinte forcée de joie appelée « Espérance » les parachève) ? Se faire peur, pleurer, s’émouvoir, avoir honte (… pour les autres), se sentir impuissant, créer des émotions fortes comme l’indignation, le désarroi, la consternation, l’empathie, l’effroi. Zéro remise en question personnelle ! Zéro action personnelle ! Démobilisation totale. La seule « action » proposée est en premier lieu « la prière », et en second lieu, le don d’argent (donc, grosso modo, l’action matérialiste par procuration) à l’AED. Pas d’action personnelle, de don entier de sa personne, de martyre. Pas de conversion personnelle du cœur. Le vrai martyre, ça ne concernerait finalement que les autres, et en particulier les lointains et les pauvres… ou bien ce n’est bon que pour se faire du fric sur le dos des vrais martyrs.
 

« Il est de notre devoir de dire la vérité. » a déclaré Monsieur le Directeur Benoît de Blanpré. Vous ne dites pas la Vérité. Vous la déformez pour en tirer profit ; ou bien vous n’en dévoilez qu’une seule facette (la plus sensationnaliste et la plus extérieure à vous-mêmes) pour en cacher une autre (celle qui vous éclabousserait davantage car elle concerne votre carriérisme franc-maçon). Et oui : l’AED, qu’on le veuille ou non, est un business avant d’être une noble cause : en fait, l’ONG compte une vingtaine de salariés. Y’a du fric à se faire sur le dos des martyrs ! La Nuits des Témoins, c’est l’événement émotionnel et lucratif de l’année. Comme le Téléthon, mais pour les cathos. Le gros des collectes se fait à ce moment-là. Les membres de l’AED Team (les « bénévoles » en rouge) passent dans les rangs pour distribuer des bougies et des prospectus, histoire de nous pousser aux dons et de faire vivre leur boutique. Ils nous attendent aussi à la sortie ! Et je ne parle même pas des médias « catholiques » que les chrétiens persécutés font tacitement vivre (les partenaires des Nuits des Témoins cachent une forêt de journalistes « chrétiens » vivant sur le dos de l’Église, de ses scandales et de ses réels martyrs !).
 

À cette Nuit des Témoins, je voyais les techniciens de KTO TV circuler dans les allées de l’église avec une mine défaite, une gravité de circonstance, comme les croque-morts des enterrements de personnes qu’ils ne connaissent pas, et qui du coup jouent super mal « les endeuillés » (parce qu’au fond, ils sont payés pour ça !). Ils ne regardent jamais personne dans les yeux. On se serait cru en pleine messe de Vendredi Saint (avec des chants comme « Mon Seigneur et mon Dieu », qui mettent en scène la lamentation : genre « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? », avec la contrition collective scénarisée). Dans l’assemblée, il y avait des bandes de prêtres ou bien des communautés religieuses qui étaient venus en délégation pour savoir à quelle sauce ils vont peut-être être bientôt mangés. Qu’est-ce qui les guide – à part une fraternité lointaine ou révolue avec des communautés du même ordre mais disséminées dans le Monde entier, et surtout un instinct morbide ? Franchement, je ne sais pas. Les attitudes du jeune prêtre assis à mes côtés étaient exactement à l’image de l’ambivalence de l’assistance : à la fois « à fond dedans », parce que par principe « il faut soutenir et être solidaires » (je pense que l’immense majorité des gens présents étaient comme envoûtés : ils chantaient les chants avec un faux entrain et une ferveur mécanique ; ils mordaient à l’hameçon de la nuit d’hommage et aux témoignages émotionnels – et il est vrai que par exemple lorsqu’on entend le témoignage de la sœur haïtienne, notre cœur humain ne peut pas rester insensible – sans réfléchir) et à la fois complètement à côté de leurs pompes (le jeune prêtre avait des moments d’absence, baillait, a même piqué du nez pendant quelques secondes… et on comprend pourquoi : c’est d’un chiant, ces soirées ! Le script est écrit d’avance. On sait déjà ce qu’on va y entendre. Sans compter que les curés actuels sont surmenés et n’ont plus la force de réfléchir, de dénoncer, d’exercer leur esprit critique. Il est plus confortable pour eux de trouver ce genre d’événements « indispensablement chiants » et de fermer leur cerveau et leur gueule, plutôt que d’avoir à remettre quoi que ce soit en cause…).
 

Face à une telle mascarade, que je n’ai pas trouvé du tout émouvante (Au contraire, elle m’a paru hypocrite, intéressée, révoltante et insultante pour la mémoire des victimes applaudies), je n’ai même pas le courage de chanter, de réciter les prières communes ni de me lever quand tout le monde le fait. J’étais juste affligé par l’aveuglement général, par la démission intellectuelle collective. Je me suis dit : « La plupart des catholiques sont devenus bêtes et ne savent plus réfléchir. On les chope à l’émotion et à la compassion et à la bonne intention rapidement christisée et martyrisée. Et ils perdent tout jugement critique. Qu’est-ce que l’Église terrestre va devenir dans les dix prochaines années qu’il lui reste à vivre ? ».
 
 
 

N.B. : Pour ceux qui veulent voir l’implantation de la Franc-Maçonnerie à Saint Sulpice, voir aussi cet article.