Archives de catégorie : Phil de l’Araignée

Déni de Réel

Déni de Réel

 

Nous le constatons tous les jours, à tout instant. Quand les êtres humains s’éloignent du Réel, ils s’éloignent aussi au bout du compte de l’humain, de ce que sont vraiment les personnes, de l’amour durable et heureux. C’est ce qui est précisément en train de se passer à l’heure actuelle en France avec le projet de loi sur « la proposition du mariage pour tous ceux qui le désirent ». Nos législateurs et gouvernants ont quitté intellectuellement le Réel et s’avancent pour Le gommer sous des prétextes paradoxalement humanistes et corporels. On les entend nous soutenir, avec une franchise confondante, que « L’amour n’a pas de sexe, n’a pas d’âge, n’a pas de frontière, n’a pas de règles, n’a pas d’autre maître que notre subjectivité humaine, nos sentiments, nos intentions individuelles, notre sensibilité, notre sincérité, notre tendresse, le désir de notre partenaire amoureux, etc. ». Mine de rien, ils nient l’existence des quatre « rocs » du Réel sur lesquels notre Humanité se fonde et peut rester concrètement aimante : la différence des sexes, la différence des générations, la différence des espaces, et la différence entre Créateur et créature(s). Dans l’idée, ils aiment tout le monde… mais pas leur prochain, là, présent, en chair et en os, nécessairement inégal à nous. Ils défendent la « vie » et la « liberté » sans en reconnaître les limites et le prix. Ils donnent corps à leurs fantasmes bien-intentionnés et à leurs pulsions sous couvert d’un humanisme athée, certes libertaire, sensitif et chargé d’émotions mais peu incarné et peu libre.

 

C’est cette fuite du Réel qui explique, à mon sens, la violence inouïe du projet de loi du « mariage pour tous ceux qui le désirent » que la France s’apprête à voter les yeux fermés. Une fois passé le joli discours sur les discriminations et la sincérité des couples homosexuels, nous réalisons et devinons tous que le couple homosexuel, aussi possible soit-il, n’est pas, par nature, ancré dans le Réel puisqu’il en éjecte purement et simplement le roc principal : la différence des sexes qui, je le rappelle, est le socle fondamental du Réel humain/humanisant, sans lequel nous ne serions même pas là pour en parler ! Notre société mesure également que la filiation que certains couples homosexuels souhaitant se marier défendent est conjugalement irréelle : l’union homosexuelle, par nature, n’est pas procréative. Par la légalisation du « mariage pour tous », l’adoption, la présomption de paternité, la PMA (Procréation Médicalement Assistée) et la GPA (Gestation Pour Autrui), ce sont maintenant les trois autres rocs du Réel qui secondaient la différence des sexes – à savoir la différence des générations, des espaces, et Créateur/créature – que nos idéologues-apprentis-sorciers veulent faire sauter. C’est très grave, leur éloignement du Réel, car il nous pousse collectivement vers l’inhumain, l’irraisonné, le désincarné, le manque d’amour, la négation des personnes. Et le rappeler n’est pas alarmiste ni religieux : c’est réaliste ! Il en va de la sauvegarde de l’Amour ! Cet Amour que socialement nous n’aimons plus assez et que nous ne voulons plus reconnaître !

 

Il est urgent (et il n’est pas trop tard) que nous sortions de nos spéculations sentimentalistes, victimisantes et législatives, pour revenir au Réel et aux personnes qui vont le plus pâtir de ce projet de loi sur le mariage – les enfants, certes, mais avant tout et surtout les personnes homosexuelles, qui sont les « dindons aux plumes roses » de cette farce sérieuse.

De quelle homophobie parle-t-on au juste ?

De quelle homophobie parle-t-on au juste ?

 

Dans les discussions actuelles sur les « droits des homos », visiblement, nos dirigeants politiques « gay friendly » et nous, ne combattons pas le même ennemi… Nous l’appelons pourtant pareil – l’homophobie – mais nous ne nous référons pas aux mêmes actes, réalités, et personnes. Alors je leur poserais volontiers dans ce court billet ces quelques questions de bon sens :

 

À quoi sert de parler d’homophobie si on ne l’analyse pas et si on ne dit pas explicitement les actes réels que ce mot-épouvantail recouvre, à savoir le viol ? (cf. je vous renvoie aux chiffres et à mon témoignage dans mon livre L’homosexualité en vérité, récemment paru) Comment en parler avec justesse si on la transforme en étiquette diabolique qui ne doit être collée que sur le front des personnes non-homosexuelles et non-gay friendly (… alors même qu’on constate dans les faits que les pires ennemis des personnes homosexuelles, ce sont elles-mêmes ainsi que ceux qui leur veulent a priori du bien sans chercher à les comprendre) ? À quoi bon dénoncer les actes homophobes si on nie les souffrances réelles des gens victimes d’homophobie/de viol, qu’on utilise leur drame intime comme effet visuel publicitaire pour choquer, déproblématiser les crimes sexuels. Comme si la victime d’homophobie ne pouvait pas changer de camp ! comme si l’agresseur n’avait jamais été victime de viol/d’homophobie par le passé, alors que c’est justement le contraire qui se produit ! Défendre des utopies identitaires et amoureuses – le coming out, le couple homosexuel, l’amour bisexuel asexué universel et « pas nécessairement homosexuel » – qui jouent précisément le jeu de l’homophobie ordinaire, puisque l’individu véritablement homophobe en actes est toujours homosexuel refoulé et/ou assumé ? Quel sens cela a de s’attaquer à l’homophobie si on traite systématiquement d’« homophobes » ceux qui osent faire lumière sur ce qui se cache derrière les faits divers télévisuels scabreux homosexualisés et les intentions « explicites » des agresseurs – ou même des victimes, dans le cas des suicides- qui osent faire, à juste titre, un lien non-causal entre homophobie et viol, ou entre viol et homosexualité ? Parce que ce lien existe véritablement !  Quel sens cela a de s’attaquer à l’homophobie si on traite systématiquement d’« homophobes » ceux qui défendent concrètement les personnes homosexuelles ? À quoi sert de mener une chasse aux sorcières « homophobes » à échelle mondiale, si on détourne le terme « homophobie » en matraque idéologique pour s’innocenter/se glorifier soi-même auprès des faibles – dont on nie les situations concrètes – et diaboliser – paradoxalement, avec la même violence qu’on leur attribue – toutes les personnes qui ne sont pas d’accord avec notre système manichéen de pensée. Ce système se résume aussi bêtement que cela : les homos = les gentils ; et les hétéros/les tièdes/les contradicteurs = les méchants. Comment peut-on combattre efficacement l’homophobie si on remplace la lutte contre le viol – une violence toujours universalisable, qui n’appartient pas qu’à la seule communauté LGBT- et contre les discriminations réelles dont pâtissent souvent les personnes homosexuelles (le viol, l’inceste, la dictature familiale ou scolaire, l’isolement amical, social et professionnel, la complexité des amours homosexuelles, la cruauté inouïe des relations entre individus homosexuels, le vol, la prostitution, la consommation des corps) par la lutte contre des petites discriminations, de surcroît souvent justifiées  par les limites du Réel, le scepticisme social vis à vis de l’authenticité de l’identité homosexuelle et de la force de l’amour homo, les résistances à la traque paranoïaque à « l’homophobe » et à la boulimie de droits attribués à la communauté homosexuelle, les critiques des comportements aberrants observables dans le « milieu », le refus de la demande de « mariage pour tous » et de la banalisation de la « famille homoparentale » en tant que modèle universel possible, etc.) ? Notre véritable ennemi doit être l’homophobie EN ACTES. Pas l’homophobie en personne(s), en insulte, en intentions, en présomption et en images fantasmées.

 

Le Kissing lesbien contre le Happening marseillais de VITA ou l’imposture bobo bisexuelle

Non non, vous ne vous trompez pas : on nage en pleine gaminerie. Sauf que maintenant, c’est sincère et agressif, ça se veut drôle, décomplexé, révolutionnaire, et que les gamins sont joués par des « adultes ».

 
 

 

 

Depuis hier (23 octobre 2012), une photo circule à fond de train sur les réseaux sociaux. Celle du « Baiser lesbien lors du Happening marseillais anti-mariage-pour-tous » organisé par l’Alliance VITA. Alors qu’elle est pourtant tout autant scénarisée et fabriquée que le « Baiser de l’Hôtel de Ville » de Robert Doisneau (désolé pour ceux qui croyaient encore au romantisme, à l’authenticité et à la spontanéité du fameux cliché…), elle sert d’étendard

 

soi-disant victorieux, touchant, sans parole, instantané, qui vaudrait tous les discours face à la « Bête homophobe » anti-égalité-des-droits et anti-mariage. Elle imposerait le silence et le respect par sa provocation « mignonne », son impact médiatique « simple » et néanmoins percutant, sa fraicheur juvénile. Belle illustration inconsciente de l’idolâtrie médiatique qui a capturé depuis bien longtemps le cœur et le cerveau lobotomisé des militants pro-mariage et de leurs suiveurs sociaux bisexuels/gay friendly

 

Je dis « lobotomisé » car ceux qui défendent la beauté et le caractère « ultra-subversif » de cette photo ne veulent pas l’analyser, parce qu’elle montrerait au grand jour leur naïveté, leur arrivisme adolescent, leur orgueil mal placé de militants-moutons (si politiquement corrects dans leur démarche anti-politiquement correcte !). À bien y regarder, cette image encensée par un certain nombre d’adolescents attardés homosexuels – et il est vrai que ça compose le gros des troupes LGBT ! – donne pourtant toutes les preuves qu’elle est une mascarade, une image mensongère de l’Amour. D’ailleurs, les deux filles qui ont posé pour ce kissing « improvisé » ne sont pas réellement en couple. Elles l’ont avoué elles-mêmes à la revue « Têtu » aujourd’hui. C’était une union de circonstance, un défi entre potes (Chiche, on le fait ! « Allez, on se met en plein milieu et on s’embrasse devant tout le monde! » a dit Auriane, 19 ans, à sa camarade Julia, 17 ans, juste avant de se lancer devant les photographes), un couple de l’instant (dans le sens du paraître, de l’artifice, d’« instantané photographique »), fabriqué de toutes pièces par un exhibitionnisme opportuniste et par une rébellion bon marché (deux étudiantes, très féminines, pas du tout marquées lesbiennes, se revendiquant « hétérosexuelles », venues à l’improviste perturber l’happening pour « rire tout en s’engageant », ça ne mange pas de pain !). Il n’en fallait pas moins pour flatter le militantisme pro-mariage en manque d’arguments dans les débats sur le projet de loi, et pour satisfaire les provocations adolescentes dont la plupart des mass media raffolent, tout soucieux qu’ils sont de choquer-pour-choquer plus que de défendre un Amour réel (étant donné que l’Amour vrai, même entre un homme et une femme, ne s’afficherait surtout pas comme ça pour défendre une cause, aussi juste soit-elle).

 

Le plus fascinant, c’est que la « photo-événement » porte en elle les marques objectives de sa propre vanité, superficialité, prétention et violence (eh bien oui : les pastiches d’amour, même rigolos, peuvent être violents !) :

 

1 – Concrètement, ce n’est pas l’homosexualité qui y est défendue (quelle naïveté des communautaires homosexuels que de croire le contraire !) mais une bisexualité adolescente, une immaturité sexuelle, un goût du scandale facile. Pussy Riot le Retour. Ou un peu comme les deux chanteuses russes du groupe Tatu, qui simulaient l’amour lesbien sulfureux dans leurs clips, et qui finalement se sont révélées lesbiennes juste le temps de la photo et pour vendre des disques. Bref, le couple lesbien trafiqué, mais dans sa version bobo complètement fade et indéterminée (cf. Clotilde, le personnage d’étudiante décervelée joué par l’humoriste Florence Floresti).

 

 

2 – Ce n’est pas l’amour homosexuel qui est défendu, mais une pulsion du moment, certes enveloppées de bonnes intentions (sensuelles, ultra-politisées, voire même humoristiques puisqu’une des deux Lolita bobos esquisse un sourire de complaisance en provoquant ceux qu’elles définissent intérieurement comme des «vieux cons homophobes»). En aucun cas nous avons affaire à une démarche libre et aimante. Paradoxal, surtout venant de ceux qui chantent « l’amour » à tue-tête…

 

3 – Ce n’est pas la liberté humaine qui est défendue ni un amour concret des différences qui est montré, étant donné que les deux filles ressemblent à des jumelles (même look, même sac à main, même coiffure, même visage à l’écran), qu’elles illustrent un rejet de la différence (non seulement des sexes, mais aussi de la différence des générations – le conflit générationnel est criant sur ce cliché – et des espaces – pudeur et interdits, out !), qu’elles rejouent en actes la violence de l’excès de similitudes, qu’elles sont le reflet de la société de consommation la plus banalisée et asservissante qui soit (cf. la cannette de Schweppes à la main).

 

4 – Enfin, ce geste du baiser est plus violent qu’il n’y paraît car il n’est pas un appel au dialogue avec les personnes auxquelles il s’oppose. Les filles, en s’embrassant à pleine bouche, se clouent le bec pour mieux clouer le bec aux autres, et mimer sur elles-mêmes la douce tyrannie de censure qu’elles leur imposent. C’est le baiser = scotch sur la bouche. Et si vous regardez bien, dans les articles de Têtu ou d’autres blogs exposant avec fierté leurs nouvelles égéries hétéros-friendly, il y a très peu de lignes de commentaires ou d’analyse.

 

Ceux qui la récupèrent affichent leur propre absence de pensée, de compréhension, ainsi que leur refus du dialogue.

 

Ça fait beaucoup de pièces à conviction à la décharge de cette photo, je trouve ! Incroyable retour du refoulé. Suprême contradiction des intentions. Ce baiser, en apparence beau, victorieux, et anodin (« Arrête ! Ça n’est rien, un p’tit kissou ! C’est mimi ! C’est culoté ! » me dira-t-on) ne fait que symboliser la superficialité, la prétention et l’homophobie de l’acte homosexuel en lui-même. Celui-ci, de par son éloignement du Réel et son expulsion de Son roc principal qu’est la différence des sexes (une différence qui concerne l’existence de toute l’Humanité), fait violence, et ce, universellement, car elle contredit la présence de n’importe quel être humain. Il est donc juste, non qu’il suscite l’offuscation et les réactions d’indignation excessives, mais qu’il fasse universellement violence, qu’il gêne. Depuis quelques années, j’ai vu bien des enfants, purs et sans préjugés homophobes dans la tête, très mal réagir à la vue d’un couple homosexuel qui s’embrassait – même sobrement – devant eux.

 

C’est bien que l’expulsion de la différence des sexes, expulsion que le couple homosexuel actualise dès qu’il se forme, n’est pas anodine et dénuée de brutalité. Là, je me place au-delà du débat manichéen sur le permis et le défendu, et pas sur le terrain de la simple accusation d’« exhibitionnisme » et des questions d’affichage « impudique » des gestes d’amour. Je parle au contraire de l’impossible forcé artificiellement à devenir concret par le possible de l’instant. J’évoque d’une part la violence des actes homosexuels, la violence des intentions sincérisées de ces mêmes actes, et d’autre part l’importance vitale de la différence des sexes pour l’incarnation de tout amour humain. Pour le coup, l’indignation que ce baiser lesbien marseillais a suscité hier me semble justifiée par la déshumanisation et le manque de liberté que le désir homosexuel crée et nourrit quand il s’actualise sous forme de gestes amoureux et sous forme de couple. Publics ou pas, visibles ou pas, là n’est pas d’abord la question. Le problème n’est pas dans l’existence du désir homosexuel, mais dans sa pratique, bien avant d’être aussi dans la visibilité de cette pratique.

 

C’est pour cette raison que j’aime et comprends l’offuscation des quelques mamies (pardon… « femmes d’un âge avancé ») que l’on voit en arrière-plan… même si je lui préfère de loin la réaction amusée et indifférente de la jeune femme qui se trouve devant et qui ferme les yeux tout en considérant la scène avec l’importance et la retenue qu’elle mérite. Oui, au final, je crois que l’acte « subversif » posé par ces deux femmes-enfants irréfléchies et pleines de bonnes/mauvaises intentions scandalisent plus les personnes pro-mariage que les personnes anti-mariage. Ce qui choque les secondes, c’est certainement la « prétention à offusquer » des premières. Alors que franchement, elles en ont certainement vu d’autres, et des bien pires !

 

L’instrumentalisation instantanée et fiévreuse de cette photo par la communauté homosexuelle est finalement le triomphe de la connerie conquérante de la société bisexuelle, gay friendly, et pas d’abord homosexuelle. Que ceux qui, parmi les personnes homos, ont encore échappé au lavage de cerveau social dont elles sont les joujoux, à la bien-pensance anti-conformiste, et qui ont encore des oreilles à l’écoute, entendent. Les autres, restez bien confortablement dans votre frétillante « indignation face à l’indignation » : c’est une attitude narcissique, donc logiquement, ça devrait vous plaire !

 

Les retombées homophobes de la loi du « mariage pour tous »

Les Français sont-ils devenus sourds et ont-ils perdu leur libre arbitre ? Pro ou anti « mariage pour tous », pour l’instant, pas un camp pour rattraper l’autre ! Nous avons un mal fou à comprendre que le projet de loi qui arrive en grande pompe dans notre pays n’est absolument pas porté par un « lobby gay », n’émane pas du tout « des » homos, mais que c’est plutôt l’ensemble de la société libertaire, hyper-libérale et bisexuelle – dont nous sommes tous héritiers et acteurs – qui veut faire porter le chapeau de sa conception à la fois sucrée et totalement désincarnée, désenchantée, matérialiste et désunie de l’Amour, aux personnes homosexuelles réelles. Cette société bobo, chantant un « amour libre » ouvert à tout type de sentiments (oublie-t-elle que la haine est aussi un sentiment ? ou bien que les sentiments sont l’autre nom donné aux pulsions par l’Homme qui a quitté le Réel ?) va se retourner contre elles une fois qu’elle leur aura donnée ce qu’elles n’ont jamais demandé. Quand prendrons-nous conscience que la communauté homosexuelle ne profitera absolument pas de ce changement sociétal mais qu’au contraire il le lui sera imputé, et que la note risque d’être salée ? Ce n’est pas moi qui l’invente. Toute loi universelle particulariste, inutile ou inadaptée à la réalité des personnes qu’elle est censée servir, s’est révélée historiquement catastrophique pour elles.

Pensons par exemple aux mouvements féministes, qui ont contribué encore plus à transformer les femmes en objets.

Dans les débats sur le modification du mariage, nos politiciens ne se focalisent que sur les rares couples homosexuels qui sont prêts à jouer temporairement le rôle de « sincères utiles » qui les confirmeront dans leurs promesses électorales démagogiques. Ce que sont vraiment les personnes homosexuelles, ce qu’elles vivent en couple, leur difficulté à trouver l’amour, les drames sociaux dont leur orientation homosexuelle est le reflet, nos gouvernants s’en contrefichent. Eux, ils aiment la personne homo sous forme de « droit » ou de « contrat » ou de faire-valoir politique. Non en tant que PERSONNES. La société gay friendly veut le bien des personnes homosexuelles sans le faire. C’est bien là tout le paradoxe de ces lois bien intentionnées !

Mais réveillons-nous ! Tout autant que les enfants, voire peut-être plus, la loi du « mariage pour tous », si elle est appliquée, portera un lourd préjudice aux personnes homosexuelles, même si la plupart d’entre elles ne s’en rend pas encore compte car elles se laissent flatter, infantiliser et applaudir pour un temps comme les reines du carnaval télévisuel… sans deviner l’immolation qui attend leur char. En effet : non seulement nos législateurs socialistes ne reconnaissent pas le désir homosexuel comme spécifique (la loi ne s’appelle pas « le mariage homosexuel » ou « le mariage pour les couples homosexuels », rappelons-le) mais ils placent le désir individuel (individualiste, au fond) comme unique critère de Vérité et d’Amour : il s’agit bien d’offrir le titre de « mariage » à TOUS CEUX QUI LE DÉSIRENT. Or, d’aucuns savent que si tous les désirs individuels priment sur le bien commun et le Réel du moment qu’ils se présentent comme « sincères » et « progressistes », c’est le début d’une belle anarchie de réclamations, d’une inflation ingérable des fantasmes. Et même les désirs homophobes auront dans ce cas-là droit de cité ! Logique ! N’oublions pas que la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres.

Le projet de loi sur le « mariage pour tous », qui dans un premier temps n’impactera la réalité de l’Amour et de la filiation que symboliquement et minoritairement (c’est pour cela qu’il a l’air banal et qu’il ne semble pas mérité, à première vue, de fortes oppositions), est avant tout une négation de l’existence humaine dans sa globalité (surtout en ce qui concerne sa  conception et son incarnation ; la différence des sexes étant la condition sine qua non de cette existence, que l’union entre deux personnes de même sexe à l’évidence ne remplit pas et éjecte). Mais plus gravement et invisiblement – car il prend l’apparence d’un bien –, il constitue une négation de la singularité des personnes homosexuelles, une négation de la spécificité de leurs unions, une négation de la fragilité de leur état de vie, une négation du désir homosexuel (qui n’est absolument pas analysé), bien avant de s’étendre à l’ensemble de la société et des enfants. Non seulement le « mariage pour tous » n’accueille pas concrètement les personnes homosexuelles – il ne les accepte que si elles sont prêtes à jouer pendant cinq minutes d’antenne télévisuelle le rôle de militants qu’on attend d’elles – mais en plus, il vient leur prendre le micro de la bouche, parler à leur place, car sur le terrain, une extrême minorité de couples homosexuels souhaite se marier. Les plus solides parmi eux sont justement ceux qui ne veulent pas du mariage ! C’est dire si ce « mariage pour tous » ne dit pas l’authenticité des unions homosexuelles, mais au contraire vient prouver/accentuer leur vanité !

Les menaces qui pèsent sur les personnes homosexuelles ne sont pas des vues de l’esprit.

À travers ce projet de loi, on constate en premier lieu que les personnes homosexuelles ne sont pas soutenues par ceux qui se présentent comme leurs défenseurs et leurs justiciers. Soit ils intercèdent pour elles avec une agressivité suspecte et inefficace, soit ils les exaucent dans leur soi-disant souhait d’« égalité de droits » par mollesse, dans un relativisme d’indifférence : « Après tout, s’ils s’aiment… Moi, ça ne me dérange pas qu’ils se marient. Ils ne feront pas pire que les couples hétéros, de toutes façons. » Mais quel mépris, quelle condescendance, quand on y pense, dans cette adhésion distante, ces jolies formules apprises et publicitaires sans fond ! Les sujets homosexuels sont les poubelles de table, les cautions morales de la société bisexuelle qui ne croit plus en l’Amour et qui leur donne le mariage précisément au moment où elle le dévalue le plus et où il ne veut plus rien dire pour elle. Elle ne se préoccupe pas d’eux : d’ailleurs, la loi qui risque de passer n’est même pas un mariage « pour les personnes homosexuelles » mais un mariage pour un « tous » anonyme, lisse, inconsistant, uniformisant, qui ne reconnaît pas la singularité et les inégalités de fait/ d’identités entre les individus qu’elle prétend télévisuellement accueillir à bras ouverts. C’est une législation d’indifférence et d’indifférenciation complètement déshumanisée et asexuée. Comment peut-on trouver ça beau et défendable ?

De plus, si la loi est promulguée, les législateurs français mettront les personnes homosexuelles dans une position très inconfortable d’« époux » et de « parents » (sans parler du bordel sans nom que sera la « co-parentalité » à rallonge en cas de divorce !), époux et parents qu’elles ne sont pas et qu’elles ne seront jamais en couple homo, non parce que la société le leur interdirait, mais parce que leur corps et leur amour ne peuvent objectivement pas les porter, et aussi parce que les réalités humaines de la conjugalité, de l’adoption, et de la filiation, ne tiennent pas à coup de bonnes intentions, ne sont pas uniquement affaire de sentiments ou d’éducation : elles concernent la Réalité anatomique et symbolique de l’être humain dans sa globalité ! N’oublions pas que par nature, le couple homosexuel n’est pas procréatif, et que concrètement, les couples homos réels sont dans leur grande majorité compliqués, usants, insatisfaisants, parfois même violents, en tous cas fragiles (et qu’on le veuille ou non, plus fragiles que beaucoup de couples femme-homme aimants : vous lirez mon livre L’homosexualité en vérité et les passages sur l’infidélité et le manque d’incarnation des unions homosexuelles si vous en doutez encore). Qui ose reconnaître les limites objectives de la structure conjugale homosexuelle, à part les couples homos les plus stables ? Quand je dis qu’à travers une loi pareille, la société fera porter aux personnes homosexuelles des réalités conjugales et filiatives qui sont trop lourdes pour leurs épaules, je pense non  seulement à la complexité du mariage (qui a dit que le mariage et les devoirs d’époux étaient faciles à tenir ?), à la complexité de l’adoption (rares sont les procédures d’adoption, puis les cas d’adoption réussis et simples, qu’on se le dise !), mais aussi aux risques réels de l’agencement de ces deux réalités « mariage + filiation » (infidélité, lourdeurs de l’union homosexuelle amplifiées par la paperasse et le matériel, enfants rebelles, complexité du partage de la garde de l’enfant en cas de divorce, ambiguïté de la co-parentalité, micmac de l’éducation d’enfant dont on prive des vraies origines, etc.). Pourquoi chercher à mentir aux personnes homosexuelles ?

Comme l’étiquetage « mariage » ne correspond pas à la réalité existentielle, conjugale et sociale des unions homosexuelles, il risque en plus, à long terme, d’être à la fois totalement banalisé, mais (pire encore) réclamé et retiré sous forme de dette aux personnes homosexuelles, dans un élan social d’homophobie qui va surprendre tout le monde, y compris les « friendly » (qui leur avaient fait jadis des courbettes) et les militants LGBT qui se verront cracher sur leurs jouets cassés et sur les membres de leur communauté qu’ils n’assument déjà pas du tout (la plupart d’entre eux se disent « hors milieu » et anti-communauté homosexuelle). Le monde découvrira les atteintes à la dignité humaine, aux vrais pauvres, aux enfants, à la société, aux personnes homosexuelles elles-mêmes, que des mythologies identitaristes et amoureuses (telles que le coming out, le « couple » homosexuel) et que des lois carnavalesques et irréalistes (telles que le mariage ou l’adoption) ont poussé les individus homos à commettre. Et le retour de boomerang homophobe ne se fera pas longtemps attendre ! Les personnes homosexuelles seront, comme au bon vieux temps du Berlin homosexuel des années 1930-1940, jetées en pâture à la vindicte populaire. On les suspectera d’opportunisme, d’arrivisme, d’avoir joué les victimes pour satisfaire des caprices qui ne rendent pas service à la société (parce qu’il y a quand même un monde entre la « discrimination » de se voir refuser un « droit à se marier » irréaliste et les discriminations sociales concrètes engendrées par la crise économique, par exemple !). Les communautés culturelles étrangères présentes en France, très centrées sur la perpétuation des générations, et culturellement pas du tout sensibles aux sentiments dans la composition des couples, verront d’un très mauvais œil l’impasse généalogique du couple homosexuel, le non-accomplissement de sa dette humaine sociale : certaines sont du genre à traîner la communauté homosexuelle en procès de Crime contre l’Humanité, contre la Nature et même contre Dieu ! Pour elles, l’union homosexuelle est un « individualisme à deux » qui joue le jeu des riches, des impies, de la débauche, des divorces, de la prostitution, de la société matérialiste, des dictatures humaines idolâtres à éradiquer.

L’homophobie qui s’abattra comme une foudre sur la communauté homosexuelle n’arrivera évidemment pas que de l’extérieur. Elle viendra précisément de l’intérieur, comme c’est déjà le cas actuellement dans le panier de crabes qu’est la communauté LGBT internationale. Leurs ex-amants traiteront les personnes homosexuelles de tous les noms, les maudiront, les ignoreront. Et le cortège d’agneaux carnivores bêlants (devenus adultes !) frappera violemment à la porte du Centre LGBT le plus proche pour se plaindre de l’irréalité de l’amour homosexuel, de la supercherie de l’homoparentalité (qui ne sera jamais une parenté), des nombreux manquements à l’Amour des personnes homosexuelles (viols, incestes, pédophilie, agressions homophobes entre personnes homosexuelles, suicides, prostitution, corruption, tourisme sexuel, marchandage des corps, mutilations chirurgicales, dictature et censure politiques, etc. : je renvoie les sceptiques ou les outrés à mon Dictionnaire des Codes homosexuels sur le site www.araigneedudesert.fr). « Vous nous avez trompés sur l’Amour, sur l’identité humaine, sur l’homophobie, sur la victimisation ! Ne vous plaignez pas, engeances d’hypocrites ! » vocifèrera la communauté hétérosexuelle. « Ne vous qualifiez plus  d’homosexuels ! Vous êtes comme nous : des amoureux indifférenciés, et même pas sexuels ! Vos gueules ! Ne rentrez pas dans le ghetto communautariste marchand gay ! » s’insurgera la société bisexuelle queer secrètement homophobe. « Vous m’avez menti sur la réalité de ma conception. Vous m’avez privé de la Réalité, de mon père, de ma mère, de l’amour dans la différence des sexes ! » incriminera l’enfant né dans un couple de même sexe. « Vous m’avez exploitée et volé mon bébé ! » dira la mère-porteuse qui, quelques années auparavant, avait pourtant accepté bon gré mal gré le chèque donné par le couple homosexuel pour entamer une GPA. « Vous m’avez utilisé et violé ! » s’exclamera le prostitué. « Vous avez détruit mon couple et ma famille ! » menacera le père de famille bisexuel. « Tu ne m’as jamais vraiment aimé tel que je suis ! » hurlera l’amant vexé et vengeur. Oui, le désir homosexuel pratiqué et banalisé par une civilisation en perte de repères n’engendre pas de petites frustrations ni de guerres mineures ! C’est un ouragan. Tenons-nous-le pour dit !

Nous devons donc protéger les personnes homosexuelles de cette loi inique et inadmissible du « mariage pour tous » qui rentre dans ce grand mouvement soixante-huitard de justification de la pratique homosexuelle (tout comme l’avait fait auparavant la propagande pro-coming- out, anti-Sida, pro-PaCS, etc.). Sans dramatisme, sans jouer les prophètes de malheur, mais avec fermeté et lucidité sur ses conséquences homophobes logiques. En ayant conscience que ce sont les sujets homosexuels les véritables individus menacés par elle.

À l’approche des manifestations françaises contre le projet de loi du « mariage pour tous » (la manif régionale du 17 novembre 2012, la manif nationale de janvier 2013), il nous faut réfléchir sur l’esprit de notre opposition, et sortir d’un conflit « hétéros VS homos », « anti-mariage VS pro-mariage », « fachos VS progressistes » pré-orchestré par une minorité de militants homosexuels et une majorité de médias malveillants qui cherchent à court-circuiter les débats et à imposer leur censure. Que les choses soient claires : nous devons défiler, il me semble, POUR les personnes homosexuelles, et non pas CONTRE elles. C’est mon principal appel et leitmotiv, en tant que personne homosexuelle déclarée.

Ne nous fions pas au discours paranoïaque « anti-lobby gay » de certains groupuscules familialistes pro-life et pseudo « cathos » (qui ne sont pas cathos du tout, en réalité : Civitas, si tu nous regardes…). Arrêtons avec ça. Les personnes homosexuelles ne sont pas les instigateurs de la loi sur le mariage inconditionnel, ni au fond ses bénéficiaires, ni des capricieux, ni des méchants, ni des destructeurs volontaires de la famille et du mariage, ni celles qui tirent souterrainement les ficelles de la propagande médiatique pour l’« ouverture » du mariage. Elles sont utilisées comme moyens de persuasion sentimentalo-électoralistes, tout au plus, et dans quelques années, sous la pression d’autres nations et civilisations beaucoup moins laxistes et « démocratiques » que la nôtre, les mêmes hommes de loi qui leur auront donné des bagues, confectionné leur tulle, lancé du riz, signé des faux diplômes et confié des enfants, les ignoreront, les mépriseront, retourneront leur veste, déchireront les preuves gênantes de leur collaboration gay friendly aux mythologies identitaires-amoureuses-filiatives bisexuelles sur l’Amour portées par leurs petits protégés homosexuels.

Suis-je un oiseau de mauvais augure, qui entrevoit dans cette loi du « mariage pour tous » un péril homophobe démesuré uniquement parce qu’il le rêverait, par homophobie inconsciente ? Tout le laisse croire puisque je suis l’une des rares personnes homosexuelles à crier haut et fort au risque de naufrage alors que la communauté homosexuelle va objectivement droit vers l’iceberg qui le coulera si elle ne réagit pas maintenant. Et pourtant, les risques que je soulève sont réels et imminents ! Ils n’ont rien d’une prophétie paranoïaque. Je ne suis pas en train de rêver le malheur des personnes homosexuelles, de sombrer dans un catastrophisme déplacé,  ou d’attiser un feu allumé davantage par mon alarmisme que par le réel. Seulement voilà, je ne peux pas ignorer les conclusions qui s’imposent sur les actes homophobes violents qui ont lieu partout dans le monde, et en particulier dans des pays gay friendly où on ne les attendait absolument pas. Les bars gay incendiés récemment par des islamistes à Rotterdam, ce n’est malheureusement pas du mythe : ça se passe aujourd’hui ! Je ne peux pas non plus garder pour moi les découvertes que j’ai faites sur les mécanismes paradoxaux de l’homophobie, et sur les crimes homophobes, si rarement analysés et problématisés.

Donc par pitié, au nom de mes frères homosexuels, dont beaucoup sont aveugles et ne voient pas le cadeau empoisonné qui leur est fait, protégez-nous de cette loi ! Nous en serons les premières victimes (consentantes) !

Erwann Binet : l’entêtement orgueilleux et populiste appelé « engagement »

En lisant les propos du député PS de l’Isère Erwann Binet dans le Journal du Dimanche du 3 novembre 2012, j’écarquille les yeux. Déjà, quand nous étions réunis tous les deux sur le même plateau-télé de la chaîne KTO il y a un mois de cela, ce père de famille de 39 ans m’avait sidéré par son refus d’écouter les arguments construits de ses détracteurs, par son déni de réalité, et par son mépris de ceux qui tentaient de le ramener à la réalité, aux personnes dont il se disait défenseur, aux situations humaines concrètes que son discours « anti-discriminations » niait. Mais là, j’avoue qu’il a atteint des sommets dans la lâcheté et le goût de l’image.

 

 

Il va falloir expliquer à ce rapporteur officiel du projet de loi du « mariage pour tous ceux qui le désirent » que l’engagement humble au service de l’État, cela implique d’être persévérant, certes, mais pas rigide, y compris quand on s’annonce sous les auspices de la « solidarité ». Socialiste ou pas, un homme politique démocratique digne de ce nom doit accepter parfois de se contredire, de sortir de l’image, de ne pas être toujours populaire, de tenir tête aux chantages affectifs qui risquent de nous faire oublier le bien commun, et de ne pas s’entêter dans un projet de loi qui ne fait pas l’unanimité, y compris dans les rangs de gauche. Un programme électoral n’est pas une table de la Loi, un diktat, une promesse rigide qui s’impose à nous et au reste du monde. Il n’est pas un jurement sur l’honneur dans lequel on joue notre personne : c’est une ligne d’horizon qui peut être affinée, voire même qu’on doit contourner si les actes qu’elle nous fera poser seront incertains, peu réalistes, inhumains, indifférents aux plus fragiles (les enfants et les personnes homosexuelles, entre autres) et à l’ensemble de la société. Car il faut bien percevoir une chose dans les mots de Monsieur Binet : le député PS ne s’intéresse ni aux enfants en tant que PERSONNES, ni aux sujets homosexuels en tant que tels non plus. Il ne les aime que sous forme de « droits LGBT », de « preuves de progrès », de « certificats de valeurs éducatives et d’amour », de « rôles sociaux », de « signes latents que le gouvernement tient ses promesses électorales », d’« arguments politiques », de « labels Solidarité et Émotivité », bref, de « preuves d’engagement ». Le Peuple réel et souverain, concrètement, il n’en a rien à cirer. D’ailleurs, sur les plateaux-télé et dans les articles de journaux dans lesquels il est interviewé, Erwann Binet ne nous parle pas des enfants ni des personnes homosexuelles : il reste dans l’émotionnel, la bonne intention, la victimisation et l’agressivité policée. Son but est de défendre son idée de « progrès » et d’« engagement », tout en méprisant les générations (ceux qui ne pensent pas comme lui, il laisse poliment entendre que ce sont des vieux cons : « La société bouge, les Français évoluent avec elle. Le clivage est surtout générationnel. »). Cela s’appelle diviser pour mieux régner (« Même les catholiques sont très partagés. » embraye-t-il).

 

Erwann Binet parle au nom d’un « tous » indéterminé, au nom d’un Peuple français qu’il n’écoute pas (car s’il l’écoutait vraiment, il tiendrait compte de sa diversité, il entendrait sa contestation croissante du projet de loi sur le mariage pour tous) : « Une majorité de Français est favorable au mariage et à l’adoption pour les couples de même sexe. » ; « Le texte qui est proposé aujourd’hui à l’Assemblée nationale et au Sénat est attendu par une majorité de Français. » Il reprend les bonnes vieilles méthodes traditionnelles du dictateur ou du censeur : il fait semblant d’écouter pour ensuite n’en faire qu’à sa tête, il se prend pour le Peuple (en toute bonne foi, générosité et « désintérêt » affiché, en plus !) et essaie de faire croire que tout le monde pense comme lui, pour finalement imposer son propre point de vue, un point de vue individualiste et particulariste que seule sa petite cour gay friendly – très bisexuelle et désenchantée de l’Amour et du mariage – applaudit : « C’est un texte qui a une dimension très personnel, intime même. » (Égocentrique et intentionnellement universelle, je dirais même…). Au lieu d’asséner franchement ses ordres, il les applique en douce, avec le sourire socialiste du « Cause toujours, tu m’intéresses ». En deux mots : Redoutable et despotique.

Au fond, sa seule motivation pour faire appliquer la loi du « mariage pour tous » obéit à un poncif intime qu’il impose à toute la France : celui de ne jamais se contredire et trahir ses promesses. Le poncif du paraître, en quelque sorte. « Il faut respecter les engagements pris devant les électeurs. » conclut Erwann Binet. Il ne développe pas pourquoi il faudrait absolument respecter les engagements, car en réalité, mis à part pour des questions d’image et d’égo personnel, il serait bien en peine de répondre. Et j’aurais envie de lui dire : Qu’est-ce qui, mis à part l’orgueil mal-placé et la soif de pouvoir, vous fait dire que tous les engagements humains doivent être tenus, et seraient irréprochables et justes en soi ? L’entêtement, appelé démagogiquement « engagement », n’a jamais été un dieu, un fétiche sacré qu’on brandit pour blanchir et innocenter toutes nos actions et pensées. Les êtres humains, on le voit bien au cours de l’Histoire, ne sont entêtés pour des belles causes, mais parfois aussi pour des Eldorado d’une violence inouïe, pour des chimères bien destructrices. Le jusque-boutisme de principe n’a jamais été une réussite et un gage de justice. Il n’y a pas de dictature humaine qui ne se soit pas avancée et imposée sous la bannière du « progrès », du « changement », de la « promesse », de l’« engagement » et de la « liberté ».

 

 

Amis gouvernants socialistes, vous est-il possible, de sortir des mots-slogans et des bonnes intentions pour appliquer l’Amour en conformité avec les réalités singulières des personnes ?

 

Polémique Guillebon/Van Gaver et Ariño sur NDF

Polémique Jacques de Guillebon/Falk Van Gaver avec Philippe Ariño sur « Nouvelles de France » en octobre 2012 (3 échanges)

 

Premier article de Fal Van Gaver et Jacques de Guillebon : « Voie sans issue »

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Réponse de Philippe Ariño : « Sortir de l’impasse grâce à la Croix »

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Second article de Fal Van Gaver et Jacques de Guillebon, en « réponse » à Philippe : « Le Bûcher des homophobes »

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Je suis une folle de Dieu !

(Questions initialement suggérées par une journaliste de l’1visible)

 

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Photo : Louvre, Paris, novembre 2012, par Jean-Baptiste Bonavia

 

 Philippe Ariño, vous vous dites ouvertement homosexuel et pourtant catho. Ça semble paradoxal, non ?

C’est sûr. Et ça serait en effet une parfaite hypocrisie si je n’étais pas continent (= abstinent pour Jésus), car la pratique homosexuelle et la fidélité concrète à l’Église-Institution catho, sans être opposées, me semblent déchirantes et inconciliables. On ne peut pas, en amour, servir deux maîtres. La continence, je le remarque dans ma vie et dans celle de mes amis homos cathos, est le seul choix de vie – quand le mariage femme-homme ou le célibat consacré ne sont pas envisageables – qui permet une totale réconciliation entre notre dimension homosexuelle et notre pratique religieuse. Beaucoup de cathos homos essaient de faire croire que le compromis entre l’homosexualité actualisée sous forme de couple (même dit « chaste », « hors milieu », « homophile » et « homo-sensible ») et la pleine fidélité à la foi ecclésiale serait idéal d’être « (à peu près) possible »… mais concrètement, ils sont en rupture avec la communauté homosexuelle et/ou en rupture avec l’Église-Institution. Et c’est logique : une fois que le désir homosexuel est pratiqué ou perçu comme fondamental, il n’est plus seulement expliqué mais justifié, et je remarque qu’il n’est alors pas identifié ni assumé. Il est vécu comme une honte. Je vérifie également que dès qu’une personne catholique décide de croire à l’amour homosexuel, même bien avant de franchir le cap de la composition d’un couple, elle prend progressivement ses distances avec l’Église-Institution. C’est quasi systématique. C’est donc qu’il y a bien une incompatibilité foncière entre pratique/croyance homosexuelle et foi catholique. En ce qui me concerne, j’ai découvert la grande liberté de parler ouvertement du désir homosexuel qui m’habite et d’être pleinement catho dans la continence et l’amour de l’Église catholique vaticane. Depuis que je suis continent (janvier 2011 : arrêt définitif du porno, de la drague homo et de la masturbation), je constate un rayonnement social, artistique, intellectuel, amical, spirituel, familial, ecclésial que je n’avais jamais connu. Et pourtant, avant, je n’avais déjà rien d’un asocial !

En vous présentant comme homosexuel et comme spécialiste de la culture homosexuelle, vous n’avez pas l’impression de vous enfermer dans un thème, et quelque part de vous contredire en justifiant l’homosexualité ?

Vous dites peut-être ça parce que vous croyez que dès que quelqu’un emploie le mot « homosexualité », il la justifie. Or moi, je ne fais qu’en parler et dire qu’elle est existante, pour précisément ne pas en justifier la pratique et pour laisser le désir homosexuel à sa juste place d’« élan parfois profond mais non fondamental. » Mes deux identités fondamentales sont celles de garçon d’une part et d’Enfant de Dieu d’autre part. C’est bien tout ! Je me définis aussi comme une personne homosexuelle, parce que l’attirance sexuelle que je ressens est bel et bien là dans mon corps, mais je ne me réduis pas définitivement à celle-ci. Je suis un mystère à moi-même. L’analyse du désir homosexuel m’apprend à la fois qui je suis et qui je ne suis pas.

Je reconnais que ma démarche d’appel à la valorisation de la culture homo peut sembler de l’extérieur paradoxale, voire dangereuse. Comme si je jouais avec le feu, ou que je m’enfermais dans une caricature de moi-même. Mais en réalité, je crois que plus on se voile la face par rapport à son désir homosexuel et on cherche à s’en éloigner théâtralement ou dans la révolte, plus on se donne des excuses et des risques pour l’actualiser : je le vois chez la grande majorité des individus homosexuels. Ils méprisent la culture homosexuelle et le « milieu », nient leur tendance ou au contraire la sacralise, pour, en douce, se justifier de pratiquer l’homosexualité soi-disant « pas comme le commun des homos ». Pour ma part, je préfère de loin m’approcher de mon désir homosexuel pour finalement mieux m’en distancer. C’est la liberté de l’approche distanciatrice, en quelque sorte : je ne nie pas la marque du mal dont je suis porteur et donc je ne risque pas de me confondre avec.

Enfin, il suffit de constater dans mes écrits à quel point je connecte l’homosexualité aux fractures les plus diverses de la société et à la violence universelle (divorces, non-rencontre entre l’homme et la femme, perte de vitesse de l’amitié, société matérialiste, prostitution, crise économique et morale, guerres, refus humain de Dieu, etc.) pour comprendre que mon travail d’identification du désir homosexuel n’est pas une tentative d’enfermement de l’homosexualité dans une espèce humaine particulière ou dans la justification voilée d’un « amour homosexuel formidable », mais bien un prétexte pour parler d’Humanité et de sexualité au sens large, pour faire comprendre aux non-croyants et aux croyants que l’Église catho a tout compris des blessures humaines de notre société.

Ça ne vous gêne pas d’être étiqueté « catho et homo » ? Vous n’avez pas peur d’être instrumentalisé par l’Église ?

La seule personne à qui j’accepte de m’offrir totalement, de qui je consens d’être l’objet et le sujet, c’est bien l’Église catho ! Alors allez-y, amis croyants pratiquants ! Servez-vous de mon témoignage, profitez-en ! Ceux qui ont peur que je serve de caution morale à mon Église sont finalement les mêmes qui méprisent les cathos et qui ne comprennent pas que stratégiquement, mon expérience ne peut absolument pas servir de matraque homophobe, de trophée ou de pommade pour se rassurer de ne pas être homo, car l’homosexualité est justement un miroir des relations homme-femme défectueuses, des divisions des êtres humains avec l’Église, et même au sein de l’Église catho, dont les personnes qui pourraient me récupérer sont responsables. Donc vouloir utiliser mon témoignage en vue de nier ses propres souffrances ou sa collaboration sociale aux pratiques homosexuelles, vraiment, c’est un mauvais calcul…

Vous considérez-vous comme un converti ?

Oui et non. Je veux bien qu’on parle de « conversion » à mon sujet, mais uniquement dans la mesure où mon choix de la continence n’est pas envisagé comme magique, volontariste, obligé, unique, par défaut, survenu après de grosses déceptions sentimentales. Au contraire, je le pose librement, positivement, progressivement, dans une continuité et l’incertitude. Ça, oui. Bref, ma conversion en est une parce qu’elle est non-spectaculaire. Au final, elle est comme le mystère de la Croix de Jésus : grave et joyeuse en même temps.

 Après, mis à part l’interview que j’ai faite en 2011 pour la revue La Croix avec la journaliste Joséphine Bataille ainsi que mon témoignage à l’aumônerie de la UCO à Angers (le premier témoignage où je parlais ouvertement du lien entre mon homosexualité et ma foi) qui ont agi comme de véritables déclics pour que je me mette à être vraiment continent et à me sentir responsable de ma cohérence, je ne peux pas dire qu’il y ait eu un avant et un après conversion. D’ailleurs, je ne me présente ni comme un « ex-gay », ni comme un « repenti de l’homosexualité ». Je n’ai pas de grand miracle paranormal à raconter. Je suis tous les jours converti par le Seigneur, et j’ai toujours été croyant pratiquant. Je n’ai rien d’un obsédé de la continence. Je ne fais qu’essayer d’aimer l’Église-Institution, et c’est ça qui me rend juste et bon, intègre et solide comme un roc dans l’abstinence. Même si je présente la continence et l’amitié désintéressée comme le chemin le meilleur pour les personnes homosexuelles, je ne dis pas pour autant que le reste (= le couple homosexuel), « c’est de la merde » ou « c’est mal ». Le meilleur n’est pas l’ennemi du bien. Il est juste… mieux !

Certains me demandent comment j’ai fait pour « m’imposer » la continence. Ils ne se doutent pas que le plus dur dans celle-ci, ce n’est pas de la vivre : c’est de savoir qu’on doit la pratiquer sans la pratiquer concrètement, parce qu’on négocie encore trop avec l’enfant capricieux qui est en nous. Le plus dur, c’est aussi de continuer à s’imposer le poids de la croyance en l’amour homosexuel. Ça, c’est le vrai boulet de l’histoire ! Mais sinon, une fois qu’on est vraiment continent, on se dit : « Ah bon ? Ce n’était que ça ? ». Le joug du Jésus est léger, je le rappelle ! Je n’ai jamais été aussi simple et heureux que depuis que je suis continent et que j’ai renoncé aux sentiments amoureux homosexuels !

Finalement, le miracle indéniable dont mon parcours homosexuel peut être le signe, c’est que la pétasse homosexuelle décervelée, le fan de Lorie et de Céline Dion que je suis, se met maintenant à être écouté passionnément des évêques ! Ça, oui, ça tient du surnaturel ! La pierre de l’homosexualité qui était le caillou dans la chaussure de certains ecclésiastiques devient la pierre d’angle actuelle de l’Église ! C’est à peine croyable… Je suis une folle de Dieu ! Et l’Église s’en réjouit avec moi !

Ari-Baba et les 40 violés

TOUT MAIS PAS L’INDIFFÉRENCE


 
 

Il était une fois, dans un Pays arc-en-ciel merveilleux, un jeune homme homosexuel appelé Ari-Baba (bon, moi, en fait) qui était entré innocemment dans la caverne du « milieu homosexuel » pour y rencontrer l’Amour et l’amitié. Il entendait dans la bouche de beaucoup de ses frères tellement d’horreurs et de drames, voyait dans les bars et les revues de la presse gay tellement de célébrations de la violence et des machos violeurs, observait tellement de femmes violées magnifiées par les œuvres de fiction homo-érotiques, qu’il s’est dit : comment est-ce possible qu’un tel enfer, présenté sous forme de trésor scintillant des mille et une nuits, puisse être à ce point caché par les personnes qui le connaissent et qui seraient logiquement censées le dénoncer ? comment se fait-il que socialement, on ait remplacé la réalité du VIOL pour le terme inexpliqué d’« HOMOPHOBIE ».

 
 

Comme certains censeurs gay friendly et preux défenseurs de la lutte contre l’homophobie ne veulent pas me croire, je vais vous présenter dans le détail le cortège de témoignages des personnes proches qui m’ont parlé tout simplement de ce qu’elles ont vécu et de ce qu’elles vivent encore. C’est pour vous, mes amis blessés, que j’écris ces lignes. Pour qu’on ne vous réduise pas au silence sous prétexte que « les homos ne souffriraient pas plus que les autres ». Pour qu’on ne vous oublie pas, et qu’on ne se serve pas de l’étiquette « Homophobie » pour nier ce que vous avez vraiment subi, et qui est ignoble. Pour que vous respectiez aussi votre liberté de ne pas reproduire ce viol.

 
 

1 ) HOMOSEXUALITÉ ET VIOL : UN LIEN HOMOPHOBE ?

 

 

Comment ça ? On ne vous a pas mis au courant ? On ne vous a pas dit pourquoi il faut « un peu » arrêter d’applaudir au coming out des personnes homosexuelles comme on le fait, arrêter de banaliser l’amour homosexuel comme s’il était équivalent à n’importe quel type de relations humaines à deux sous prétexte qu’on l’appelle « Amour », arrêter de vouloir faire signer à une nation entière le « mariage pour tous » comme s’il allait de soi ? Moi qui ai amorcé depuis 10 ans une étude (qui n’en est qu’à ses balbutiements, en plus) sur les liens non-causaux entre désir homosexuel et viol, moi qui suis parfois le dépositaire de confidences d’amis homos ayant été abusés sexuellement dans leur enfance (j’ai écrit « 40 » mais en réalité, à ce jour, j’en connais 70, ce qui commence à faire beaucoup ! … mais comme ces révélations sont soumises en général au secret amical, tous ceux qui « savent » se taisent !), je vous demande pour une fois de redescendre sur Terre et d’ouvrir bien grand vos oreilles au lieu de jouer aux hypocrites ou de vous satisfaire de l’ignorance.

 

 

Pour qui se prennent-ils, tous ces défenseurs des « droits des homos », partant en guerre contre l’homophobie, et qui osent me juger comme « un dangereux homophobe » et me regarder d’un œil torve comme si j’étais un criminel, pour la simple et bonne raison que j’ose parler de ce lien (évident mais mal connu) entre viol et homosexualité, un lien dont personne ne parle, pas même les victimes concernées !?! On marche sur la tête ! Ce sont ces militants homosexuels, hétéros, bisexuels et friendly, les vrais criminels et les vraies personnes homophobes ! puisqu’ils ne considèrent pas l’homophobie telle qu’elle est : un acte de viol ! Ils nient les faits pour les détourner en matraque identitaire diabolisante. Ils ont transformé l’ACTE violent à l’encontre des individus homosexuels et au nom de leur orientation sexuelle (= l’homophobie) en ACCUSATION DE PERSONNES (= les homophobes), en scotch à mettre sur la bouche de tout contradicteur. Ils sont capables d’une violence inouïe pour préserver leurs images de marque et leurs utopies amoureuses personnelles, pour censurer ces réalités violentes dont une minorité d’entre eux a été victime, et pour désigner comme « homophobe » tout individu qui révèlera au grand jour leur petite comédie de la croisade contre l’homophobie. Honte sur eux ! Et honte à ceux qui me conseillent, face à mes recherches, de « parler d’autre chose que d’homosexualité » (parce que ce thème m’enfermerait et qu’on en ferait vite le tour), ou de « parler d’autre chose que du viol » (parce que ça dévaluerait l’homosexualité) ! Honte à ceux qui me demandent de me taire parce que ce que je peux dire, « même si c’est juste, donne du grain à moudre » à ceux qui font l’amalgame entre homosexualité et pédophilie, ou homosexualité et criminalité ! Honte à ces censeurs qui me musèlent et qui me haïssent parce que je donnerais une mauvaise image des couples homos, des cathos homos, et que je pousserais même des jeunes en quête d’une image positive de l’homosexualité au suicide ! Honte à ces chroniqueurs-radio qui ricanent derrière mon dos et gloussent à propos de mes « codes » qu’ils ne comprennent pas ! Honte à ces critiques qui disent que mes livres sont mal écrits, qu’ils sont trop universitaires, « à la limite de la probité intellectuelle », et que je me sers du thème sensationnaliste du viol pour faire parler de moi ! Honte à tous ces gens ! Leurs actes parlent contre eux ! C’est leur silence sur l’homosexualité qui tue véritablement nos frères homosexuels, et non ce que je dis sur le viol ! Ras le bol de ceux qui inventent aux personnes homosexuelles des « discriminations » (= le refus de l’accès des couples homos au mariage, par exemple) pour ne pas traiter des vraies discriminations et violences qui leur sont faites/qu’elles reproduisent parfois (= le viol) !

 

Leur faut-il un dessin pour qu’ils comprennent ? Ne voient-ils pas qu’ils se servent du Sida, de l’« Homophobie », du soi-disant « devoir de cohésion communautaire », ou de la course aux « droits des homos », comme autant de cache-misère pour nourrir leur propre homophobie intériorisée et continuer à haïr leurs « amis » homosexuels dans un parfait semblant de camaraderie ? Par leur désinvolture, leur mollesse, leur ignorance, leur relativisme, ils cultivent le déni et le mensonge. Je suis en colère devant tant d’hypocrisie sociale sur le viol, hypocrisie qu’ils nourrissent en prétextant toujours que ce sont les autres les fautifs et eux les victimes ! Oublient-ils que tout violeur a été victime avant de violer (même si, heureusement, à l’inverse, toute victime ne violera pas) ???

 

Certains ne me croient pas, me disent obsédé morbidement/homophobiquement par le lien (non-causal) entre viol et homosexualité. D’aucun trouvent que j’extrapole, et soutiennent que je suis une voix extrêmement minoritaire dans le « milieu homosexuel », et peu représentative de ma communauté. Ils ne comprennent pas que mon étude ne vient pas de moi (je n’ai pas été violé dans mon enfance, en plus), n’est pas qu’un point de vue personnel et isolé : je ne fais que rapporter ce que mes nombreux amis m’ont dit. Ce n’est pas parce que je suis un des seuls à en parler ouvertement qu’il n’y a personne à mes côtés !

 

Le sociologue Daniel Welzer-Lang, dans ses recherches, s’en était lui-même étonné : « À les écouter, il n’est pas abusif de parler de TABOU. Il ne s’agit pas seulement de honte. […] Comment expliquer que des hommes – qui pour certains ont lutté des années ensemble, revendiquant le droit de disposer de leur corps, de leurs désirs, des hommes qui, contrairement à d’autres mâles, ont pris l’habitude de se rencontrer pour parler d’eux, de leur vie la plus intime…– n’aient jamais parlé de ces scènes de viol entre eux ? Énoncent même qu’ils n’en ont jamais discuté avec leurs compagnons après plusieurs années de vie commune… Quel est le sens de ce tabou ? » (Daniel Welzer-Lang, Le Viol au masculin, 1988)

 

 

Selon moi – et surtout selon les faits réels –, le désir homosexuel est le signe d’un viol réel, j’espère minoritairement vécu, et plus largement d’un fantasme de viol, partagé par l’ensemble des personnes homosexuelles, sans exception. À ce jour, je ne connais pas d’individu homosexuel qui n’ait pas choisi comme modèle d’identification la femme violée cinématographique (autrement dit la féminité fatale) et/ou le super-héros macho asexué (Superman). Plus une personnalité connaît un succès phénoménal mais paradoxalement une vie privée et amoureuse désastreuse (elle a perdu tous les hommes de sa vie autour d’elle, elle s’est fait avorter, elle est suicidaire, elle a connu l’inceste ou le viol, etc.), plus elle a des chances de devenir icône gay ! Judy Garland, La Callas, Barbara, Dalida, Madonna, Mylène Farmer, Lady Gaga, si vous m’entendez…

 

Après, je ne fais du viol ni une cause ni une généralité de l’homosexualité. Je cite prudemment les statistiques[1]. Pas de raison par conséquent, et j’insiste sur ce point, pour tenir ou me prêter ce genre de syllogismes absurdes : « Toute personne qui a été violée deviendra homosexuelle. » ou « Toute personne qui est homosexuelle a été violée et violera. » En revanche, au nom des drames réels dont le désir homosexuel est le signe, la société n’a pas à applaudir ou à banaliser l’homosexualité. Même les sujets homosexuels qui n’ont pas été objectivement violés – et ils sont heureusement nombreux ! – ont cependant tous connu un effondrement identitaire pendant l’enfance (la psychanalyse parle parfois d’« effondrement narcissique du Moi ») qui présage, s’il n’est pas identifié, d’une recherche de violence. L’énonciation d’une homosexualité a été pour eux la résolution de leur peur d’exister, ou bien de leur sentiment d’être méprisés/peu considérés par leur milieu familial, scolaire, amical, social, vécu comme une dictature.

 

Dans le vécu des personnes homosexuelles, le viol n’est pas forcément un fait réel au départ. Il peut être le fruit d’une peur d’être aimé, d’un fantasme enfantin face à l’« enjeu de vie » de la génitalité, d’un rapport complexé à son corps… que quelques médias malveillants se sont accaparés. Par exemple, je sais combien le dégoût des hommes homosexuels pour le corps de la femme s’origine souvent dans les icônes cinématographiques de la féminité fatale, du danger sexuel. J’entends dans la bouche de pas mal de femmes lesbiennes cette peur-panique de la génitalité avec les hommes : elles parlent de « se faire prendre par les mecs » comme si tous les mâles étaient des violeurs en puissance. La plupart, avant de s’être dit « lesbiennes », ont un passé hétéro assez lourd.

 

 

Je tiens enfin à préciser que le désir de viol, même s’il est particulièrement marqué dans le désir homosexuel, n’est pas non plus spécifique au désir homosexuel ; il est humain, également partagé par les personnes hétérosexuelles (mais pas les couples femme-homme aimants) et tous les individus à la sexualité blessée. Il n’y a pas lieu d’homosexualiser le viol (l’homosexualité n’est que le signe particularisé de viols sociaux que s’infligent les hommes et les femmes) ni de totalement dissocier viol et homosexualité.

 

Dans les débats sur l’homophobie, n’ayez pas peur d’appeler un chat « un chat ». Vous devez oser prononcer l’impressionnant mot « viol », toujours en lui préférant la périphrase « fantasme de viol » (elle causalise et diabolise moins notre discours) car parfois, ce sont vraiment des viols qui ont été perpétrés. Être attachés aux faits réels nous permettra d’être véritablement aimants, quand bien même il s’agisse parfois d’approcher une réalité souffrante et des contextes dramatiques. Parler du viol en lien avec l’homosexualité ne revient certainement pas à « violer à nouveau », à « désirer le viol », à « (le) provoquer » ou à « en suggérer l’idée aux autres ». Pas plus que ce n’est « s’haïr soi-même », « juger les personnes », « vouloir le mal des homos », « voir le mal partout » et être « homophobe » ! Quand il y a souffrance objective, il est plus que nécessaire de la dénoncer et de la juger/condamner sans détour. Ceux qui m’accusent actuellement d’être un exemple typique d’« homophobie intériorisée » et de « non-amour de moi-même » parce que je dénonce les viols vécus par un nombre beaucoup trop important de personnes homosexuelles (on a tenu le même procès à Frédéric Martel quand il a sorti Le Rose et le Noir en 1996… donc ça va, je le prends bien !), avouent à leur insu leur déni : ils essaient de cacher l’homophobie (leur propre homophobie) à l’intérieur de moi, comme une boulette de papier froissée qu’on glisse de force dans une bouteille pour ne surtout pas la lire, la comprendre, la rendre publique, la faire leur. Oui, en effet, cette homophobie est bien intériorisée. Mais ils oublient de dire par qui ! Moi, je ne demande qu’à ce que leur papyrus, où est inscrit leur haine d’eux-mêmes illustrée par leur désir homosexuel pratiqué (et parfois par le viol qu’ils ont réellement vécu !), sorte de moi et soit lu à haute voix ! Je suis fier d’être « homophobe » tel qu’ils l’entendent… car être « homosexuels » comme eux, cela reviendrait à être véritablement homophobe !

 
 

2 ) TÉMOIGNAGES VIVANTS D’AMIS

 

Peu de temps après la création de mon site L’Araignée du Désert fin 2008, alors que j’étais l’un des pionniers du traitement public de la relation non-causale entre l’homosexualité-hétérosexualité et le viol, j’ai reçu un mail très long d’un pédopsychiatre, maintenant ami, qui est tombé par hasard sur mes écrits, et qui m’encourageait à continuer d’écrire sur le viol, à diffuser mon message, parce qu’il suit beaucoup de jeunes patients homosexuels ; et il m’assure que la plupart d’entre eux ont été violés ou ont subi des attouchements sexuels dans leur jeunesse. Quand je lis ce genre de témoignages, qui viennent à moi sans que j’aie eu à les réclamer, je respire, parce que le vent de censure sur la souffrance est tel dans la communauté homosexuelle actuelle qu’à certains moments, j’en arriverais à douter de moi-même, à me dire que j’y vais un peu trop fort en parlant du viol en lien avec l’homosexualité, même si j’ai toujours veillé à minoriser cette coïncidence à une poignée de personnes homosexuelles pour ne pas le transformer en généralité sur « les » homos.

 

Ce n’est pas la première fois qu’un professionnel de l’enfance et de l’adolescence m’interpelle vivement à ce sujet. Déjà, en 2010, dans un hôpital public de Paris, lors d’une prise de sang « de contrôle », j’avais sympathisé avec une infirmière spécialisée dans les maladies infectieuses, qui m’avait confié qu’elle voyait défiler une flopée de personnes homosexuelles dans son cabinet. Dès qu’elle a entendu le thème que je traite dans mes livres, elle m’a coupé la parole : « Vous ne pouvez pas vous imaginer le nombre de patients homosexuels que je rencontre ici et qui me racontent leur viol ! C’est hallucinant ! » Quand je me suis retrouvé à témoigner à Lille en septembre 2012, une autre femme, psychologue cette fois, présente dans l’assistance où je parlais, m’a donné raison à propos du lien entre viol et homosexualité : 3 des 5 jeunes homosexuels qu’elle suit en thérapie ont été violés. Dans cette même ville, j’ai eu l’occasion de rencontrer en vrai le psychanalyste Jacques Arènes : il m’a confessé en privé qu’il avait lui-même observé chez ses patients homosexuels un forcing dans l’initiation à l’homosexualité ou dans le passage à l’acte, un manque de liberté… mais que s’il en parlait ouvertement, il se ferait lyncher en place publique ! Cette peur des thérapeutes de dévoiler le viol homosexuel (ou viol sur personnes homosexuelles), bien logique puisqu’ils sont soumis au secret professionnel, avait déjà été similaire à celle de Freud qui, en son temps, avait préféré (parce qu’il sentait la patate chaude que constituait ce dossier !) remplacer, concernant l’homosexualité et ses patientes autrichiennes souffrant d’hystérie, la thèse du viol par celle du complexe oedipien !

 

Mais pas besoin de trouver ses sources nécessairement bien loin, du côté uniquement scientifique, ni de chercher les petites bêtes, pour tomber nez à nez avec le viol. De ma propre expérience, ça s’est toujours fait dans des contextes banaux et amicaux. Dernièrement, une amie de 45 ans, qui vit en couple depuis 10 ans avec une femme de 20 ans de plus qu’elle, me faisait la réflexion : « C’est incroyable, parmi mes amies lesbiennes, le nombre de femmes qui ont été violées… ». Un jour, un ami homosexuel quarantenaire, un brin provocateur, et tout à fait d’accord avec ma théorie du viol homosexuel, a voulu tester mes dires sur un forum de discussion gay sur NRJ. Il a balancé sur ce dial Internet la question « Qui a déjà été violé ? ». Sur les 400 connectés, il a reçu en quelques minutes au moins une dizaine de réponses positives !

 

À chaque fois qu’un ami souscrit à mes découvertes, je tombe des nues. J’ai beau y être préparé, je n’arrive jamais à m’y faire. C’est quand même fou. Entendre le mot « viol » est toujours violent. Je suis pris entre la révolte de devoir taire ces révélations par respect de la confidentialité, et l’immense joie de recevoir le cadeau de la confiance que je n’attendais absolument pas et qui m’est spécialement offert, même s’il concerne un sujet très grave. Alors au fur et à mesure que j’avance dans la vie, j’emmagasine les preuves d’amour, j’emmagasine… (dans mon coffret à araignées étincelantes)… et à un moment donné, je n’en peux plus de garder tous ces bijoux pour moi ! Il n’y a plus de place. Ça déborde ! J’en détiens, des secrets lourds, qui bien souvent sont ignorés du conjoint de ces mêmes amis (qui ne lui ont rien dit du viol qu’ils ont vécu !), au point que je passe parfois aux yeux de leur « partenaire » pour un dangereux « briseur de couples » ou un « fouteur de merde » si je tente ne serait-ce que de soulever un peu le couvercle de leur tambouille conjugale explosive ! Mais je sais de quoi je parle, puisque j’ai entendu les faits de mes propres oreilles, vu en cachette des amis me parler du drame de leur vie (que parfois ils banalisent pour « aller de l’avant », pour « croire en l’amour homo quand même »). Et ça, ça ne s’oublie jamais.

 

 

J’ai en tête cet ami de l’Île de la Réunion, qui m’a révélé qu’un de ses moniteurs l’avait attouché sexuellement, alors qu’il était encore adolescent. Je repense à cette amie non-homosexuelle qui me raconte qu’elle est sous le choc car sa meilleure amie d’enfance vient de lui révéler qu’elle est lesbienne : quand elles avaient 9 ans toutes les deux, elles se sont fait agresser sexuellement alors qu’elles jouaient ensemble dans leur immeuble. Je me souviens de cet ami homo, la trentaine, qui m’a dit qu’il a été violé par son entraîneur de sport à l’âge de 12 ans… et les faits n’ont jamais été prouvés. Il a craché le morceau au moment où, terrassé par le sommeil, je m’apprêtais à clôturer précipitamment notre dialogue informel sur Facebook. Quand on voit ce beau jeune homme de l’extérieur, personne ne peut se douter qu’il a été violé : il est drôle, masculin, apparemment bien dans ses baskets ; il m’a expliqué que s’il a mis autant de temps à lire mon livre, ce n’était pas parce qu’il était dur à parcourir, mais uniquement parce que « … ben voilà… ». Je garde en mémoire ce dîner en tête à tête avec un autre ami homo de mon âge, qui, pareil, me lâche sa bombe : il a été violé et abusé par son oncle quand il était petit (rebelote !). S’en suit le père d’une très bonne amie à moi, particulièrement efféminé, et qui a été abusé par un homme pédophile de son entourage familial proche : cette amie a découvert à l’adolescence l’homosexualité cachée de son père quand elle est tombée sur un numéro de Têtu planqué dans son bureau… Dans ce cas précis, l’agresseur a également nié le viol et n’a jamais été inculpé. J’ai le souvenir de cette femme lesbienne de quarante ans, qui m’a remercié d’avoir écrit mon livre, et qui est venue spécialement de Belgique pour me rencontrer à Paris : elle m’a révélé qu’elle a été abusée étant jeune par un oncle, puis violée par son propre mari quelques années plus tard. Je connais un ami prêtre dont le frère est homosexuel et a une amie lesbienne qui leur a révélé qu’elle avait été violée dans son adolescence. On m’a également présenté le frère d’un ami, homosexuel, qui est sorti avec un jeune homme violé. Je me souviens de ce récent dîner intime avec un autre ami homo de mon âge, un grand artiste, et fin psychologue : lui aussi m’a raconté qu’il s’est fait violer à l’âge de 11 ans : il tenait pourtant la main de sa mère dans le métro, mais un inconnu a quand même réussi à le masturber sans que personne s’en aperçoive. Je me rappelle de cet ami de mon âge, originaire des DOM-TOM, qui est l’exubérance et l’humour même… mais qui m’a révélé aussi qu’il avait été abusé par un moniteur de centre aéré quand il était jeune. Je me remémore ce groupe de parole sur la « prévention suicide » lors d’un grand rassemblement national de l’association David et Jonathan (JAR) durant lequel j’avais proposé qu’on réfléchisse sur les liens probables entre désir homosexuel et viol. Le responsable du débat m’avait sèchement demandé de me taire… mais à la toute fin de l’échange, quand tout le monde est parti, une jeune femme lesbienne est venue me remercier chaleureusement d’avoir osé dire tout haut son drame personnel : « Quand tu as parlé des personnes homos violées, j’ai failli lever la main et crier fort : ‘Moi ! Moi ! C’est ce qui m’est arrivé ! Il a raison !!’ ». J’ai encore en mémoire ce garçon de mon âge, rencontré sur Internet, et qui, alors qu’on dînait tranquillement dans un McDo d’Orléans (sur un air de Star Academy…), a fondu en larmes devant moi pour me raconter le viol social qu’il avait subi dans son enfance. C’était une vraie fontaine de pleurs, surprenante mais pourtant magnifique : « Au collège, on se foutait de ma gueule parce que j’avais les oreilles en parabole… On m’appelait Dumbo… » Je me souviens aussi de ce garçon homo de 26 ans que j’ai rencontré en 2011 dans un RER parisien de la ligne C qui me conduisait à une soirée entre amis en banlieue. Ce jeune homme, particulièrement maniéré, venait de changer de train et avait l’air complètement paniqué quand je l’ai vu débarquer dans mon wagon vide. Il n’a pas tardé à se confier à moi en pleurant. En fait, il venait juste de se faire violer dans une précédent train du RER B par un type qui l’avait immédiatement identifié comme homo, qui l’avait frappé, volé, et forcé à faire une fellation. Et face à l’horreur de la situation, la première chose que nous avons été capables de faire tous les deux – avant d’aller au commissariat –, c’est de pleurer ensemble un bon coup ! Il n’en était pas à son premier viol. Il les enchaîne, et est connu des services de police. Je garde aussi en tête le témoignage hallucinant de mon ami Brahim Naït-Balk, l’animateur en chef de l’émission « Homo Micro » sur Radio Paris Plurielle, auteur d’Un Homo dans la cité (2010), une autobiographie où il raconte comment il s’est fait violer à l’âge adulte par les jeunes caïds qu’il encadrait en tant qu’éducateur. Je me rappelle aussi de cet homme de trente-cinq ans qui était mon voisin inattendu de sièges d’une pièce de théâtre que nous regardions ensemble au Festival de Théâtre Gay et Lesbien de Paris. Quand je lui ai parlé du titre de mon livre, qui devait initialement être Désir homosexuel et viol, il m’a sorti d’un air jovial : « Tiens ! C’est exactement ce qui m’est arrivé ! » Cet homme vit depuis très longtemps en couple avec son compagnon, et s’était effectivement fait violer quand il était jeune. Un autre ami homo de mon âge, qui a dévoré tous mes livres, m’a révélé qu’il s’est fait violer quand il était ado : son premier coït homosexuel forcé s’est déroulé dans les toilettes d’un bar. Un autre pote homo m’a confié que deux de ses amis à lui (dont son propre petit copain) ont été violés. Sinon, un ami homo m’a fait connaître, lors d’un apéritif, un jeune homme homosexuel, un peu androgyne, qu’il avait vu faire le tapin au Bois de Boulogne à Paris, et qu’il avait gentiment hébergé le temps d’une nuit. Ce garçon portait encore les traces de maquillage de la veille, et dès qu’il a entendu le thème de mon livre – les liens entre désir homo et viol –, il a sorti précipitamment un papier et un crayon pour noter les références. J’ai compris qu’il vivait le viol de près, et quotidiennement… Je me rappelle de cet autre ami homo quarantenaire, que j’ai connu dans la ville d’Angers, qui a été battu par son père quand il était petit, et abusé par son médecin de famille. Il m’a avoué qu’une fois, il s’était même fait violer par son amant régulier. Je me souviens encore de cet « ami d’ami », également homosexuel, qui a été violé et qui tombe dans l’enfer de la prostitution. Par ailleurs, j’ai reçu plusieurs mails d’hommes homosexuels m’annonçant qu’ils ont été violés : un homme d’âge mûr et catho venant de région parisienne, un autre de quarante ans domicilié au Canada, un autre de mon âge et libanais qui a été abusé dans son adolescence. Je viens également d’entendre dernièrement le récit du viol d’un ami ecclésiastique qui a découvert son homosexualité sur le tard, et qui a été abusé sexuellement à l’âge de 8 puis 12 ans : il m’a confié cela en tête à tête dans un petit salon de son monastère. J’ai eu l’occasion également de déjeuner avec un homme un peu plus âgé que moi, qui m’a été présenté par un pote, et qui m’a révélé qu’il avait été victime d’un homme pédophile dans son adolescence. Sinon, un ami journaliste sexagénaire m’a laissé clairement entendre qu’il avait été violé étant enfant par un homme plus âgé que lui. Il y a aussi cet ami martiniquais noir de 60 ans, Jean-Claude Janvier-Modeste, qui m’a dit qu’il avait été violé à trois reprises dans sa jeunesse, à 7 ans, puis 10 ans, puis 14 ans, par différents adultes (un copain de son grand frère, un entraîneur, puis un inconnu). Il m’a expliqué que les viols pédophiles étaient pratique courante en Martinique à son époque. Et le plus ahurissant, c’est que lorsque je lui ai demandé, devant témoins (c’était à la soirée « Négritude et Homosexualité » organisée au Théâtre du Temps le 11 octobre 2011 et consacrée à la sortie de son roman semi-autobiographique Un Fils différent), s’il voyait un quelconque lien entre la découverte de son homosexualité et les viols d’enfance qu’il avait subis, il m’a répondu catégoriquement que « non ». Que faire face à un tel déni de réalité… ? Dans la série des amis jadis abusés par des prêtres (qui ne font, à mes yeux, pourtant pas office de généralité sur le clergé catholique, puisque les prêtres abuseurs, anciens abusés, sont extrêmement minoritaires), j’ai aussi cet ami quinquagénaire qui a été violé par surprise par son confesseur. Autrement, je me souviens de ce garçon de mon âge, à présent séminariste catholique, qui m’a écrit tout de suite après mon passage à l’émission Dieu Merci ! (du 20 mai 2011) pour me dire qu’il voulait volontiers faire partie de ma bande d’amis homos pour m’accompagner à la messe dominicale. Par la même occasion, alors que nous prenions un bain de soleil aux Jardins du Luxembourg, il m’a appris qu’il a été violé par un prêtre de 40 ans alors qu’il venait juste de passer à l’âge adulte et qu’il ne se savait pas encore homo… J’ai en tête cet ami de 26 ans (encore séminariste) qui m’a dit qu’il s’était fait violer et sodomiser à l’âge de 14 ans par un prêtre de 30 ans complètement saoul (aujourd’hui incarcéré). Je repense aussi à cet ami – maintenant marié et qui garde son homosexualité secrète – et qui m’a avoué qu’il a été abusé par un prêtre dans sa jeunesse.

 

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, le viol peut venir également de la personne dite « passive », qui se place en victime, qui est parfois plus jeune que la personne qu’elle force au viol, qui dit explicitement vouloir être violée. N’oublions pas que le viol est un acte qui a lieu dans le cadre d’une RELATION de personnes (plus ou moins) libres (plutôt moins que plus, d’ailleurs) : il n’est pas des PERSONNES à isoler d’une relation, à diaboliser ou à innocenter totalement. Par exemple, un ami de mon âge, né au Brésil, m’a confié qu’il avait été abusé par un petit cousin très efféminé qui avait insisté pour qu’il le sodomise (l’inceste étant une pratique assez courante et banalisée dans son pays) : ce cousin était pourtant plus jeune que lui. L’acte pédophile n’est pas nécessairement opéré par un adulte sur un enfant : il peut se perpétrer entre deux adolescents du même âge qui, avec angoisse et maladresse, se sont masturber ensemble. Parmi mes amis qui ont été violés, deux insistent sur les images de sexes drus de leurs camarades qu’ils ont vus se masturber devant eux, et qui les ont fortement marqués. Par la suite, ils ont cherché à violer à leur tour, pour retrouver cet acte d’impudeur qui a blessé leurs yeux d’enfants.

 

Le désir de viol existe, et n’est pas qu’une invention/projection du violeur qu’il faut à tout prix mépriser. Un ami homo quarantenaire m’a dit un jour que parmi ses « plans sexe » réguliers, il s’était retrouvé face à un amant beaucoup plus jeune que lui, et qui le forçait à lui faire revivre des scenari où il le violerait (genre « Prends-moi ! Piège-moi ! ») Et oui ! Le violeur peut être aussi le soi-disant « passif » du couple. Je me souviens de cet autre ami gay, écrivain à ses heures perdues, fils de bonne famille, qui s’est fait agresser dans le métro parisien (un homme s’est masturbé devant lui), qui s’est fait caillasser dans la rue en présence de son copain parce qu’ils se tenaient à lui de manière ultra-hautaine, ou encore qui s’est fait piquer son bel appareil photo dans un train par un groupe de trois garçons – blancs, je précise – qui l’ont traité de « sale pédé ! ». En discutant avec lui de son attitude provocante et de son déhanché de mannequin dans la rue, j’ai appris qu’il « recherchait explicitement le viol ». Plus tard, il a même accepté de se prostituer sur Internet et de faire des fellations à des bureaucrates bossant à la Défense. J’ai également un ami trentenaire qui a si peu de volonté et qui s’auto-victimise tellement qu’il ne voit pas qu’il s’offre comme la pute de son quartier en libre : n’importe quel internaute qui passe chez lui et qui insiste pour coucher arrive à son but. Il n’a aucune résistance. Et quand, avec mes amis, nous allions avec lui dans un bar gay, nous lui découvrions à chaque fois plein de nouveaux « ex » ! Je me rappelle également, en 2002-2003, de tous ces garçons que je croisais en première partie de soirées dans le bar homo angevin du Cargo, qui étaient là d’abord pour des « plans soft » avec des clients… et qui, s’ils n’avaient pas trouvé chaussures à leurs pieds, passaient la deuxième partie de soirée à « tapiner » dans la nuit glaciale du grand parking de la Rochefoucault : ni moi ni eux n’osions nous regarder dans les yeux tellement le choc des soirées était glauque. Je me souviens enfin de cet homme du Québec, qui a été abusé parce qu’il est tombé dans un guet-apens, et qui m’a écrit ces quelques lignes le 4 avril 2011 dernier (prouvant qu’on peut très bien être violé tout en se retrouvant en apparences dans la position de « l’actif ») : « La question sur l’homosexualité me secoue depuis plus de 14 ans aujourd’hui. Depuis bien longtemps, j’ai voulu comprendre cela. Je n’en savais pas grand-chose, jusqu’au moment ou par faiblesse, peur, – je ne sais pas comment le dire – je suis tombé, je dis bien, je suis tombé dans un piège. Une personne adulte, de plus de dix ans que moi, m’a introduit dans ce monde d’homosexualité. La personne m’a violé, bien que ce soit moi qui jouais le rôle de l’homme… »

 

Pour ce qui est de mon vécu personnel, même si je n’ai pas été violé à proprement parler dans mon enfance, je pense avoir subi une agression perturbante en 5e au collège (tous les garçons de ma classe m’ont encerclé dans un coin de la cour). Et plus tard, à l’âge adulte, je sais que dans ma recherche amoureuse, les hommes qui m’attiraient physiquement étaient des hommes mûrs, virils et poilus, qui allaient me dominer. Des bad boys paramilitaires de films pornos, en somme. Je me suis fait prendre d’ailleurs à mon propre jeu dans la période 2009-2011, puisqu’avec un des garçons avec qui je suis sorti, et qui était aussi passif que moi, j’ai été forcé d’être actif génitalement (= scénario connu de « l’arroseur arrosé »… ou plutôt ici, du « violeur violé »). Lors d’un de nos ébats amoureux, il m’a obligé, sans rien dire, à le pénétrer analement sans que la situation me laisse trop le choix (« Si ! T’as envie ! » me disait-il). Et une fois que je l’avais sodomisé (alors que ce n’était pas du tout mon truc), j’ai vu qu’il essayait absolument de me/se persuader que j’étais « 100 % actif », que « j’avais bien caché mon jeu » (coquinou, va !) et que « j’avais adoré ça ». Mouaif… Toujours pas convaincu…

Enfin, il existe d’autres types de viols qui ne s’appellent pas ainsi, parce qu’ils ne concernent qu’indirectement le viol par pénétration génitale, le viol-délit. Ils ne cessent pas pour autant d’être des viols, même s’ils méritent plutôt de s’appeler « violences » : je pense au visionnage d’images érotiques à la télé, au chantage psychologique, à la pression ou l’absence de liberté, à l’abus de confiance, à la maltraitance physique familiale, aux vols, au harcèlement moral, à l’isolement amical, aux tentatives de meurtre, ou carrément aux assassinats. J’inclus dans le tableau des violences l’inceste et les rapports incestuels : même si ça fait cliché, de nombreux amis homos me racontent les assauts violents et inquisiteurs de leur mère possessive. Concernant tous les chantages soumis à la tyrannie du consentement mutuel, je voudrais mentionner aussi tous ses amis qu’on a acculé à sortir avec des mecs qu’ils n’aimaient pas vraiment, ou qui vont au sauna pour s’oublier dans des étreintes semi-forcées, semi-consenties. Le viol démarre souvent par la banalité, et prend en compte non seulement l’acte posé, mais le ressenti de la personne qui le pose/le reçoit. Je me remémore par exemple ce jeune scout zozoteux à qui un camarade a mis une main au cul, geste anodin qui l’a pourtant beaucoup perturbé.

 

Toute la violence « innocente » et les atteintes à l’Amour que peut créer le porno dans le cœur d’un enfant sont parfois très présentes dans l’émergence du désir homosexuel. Je repense à cette amie lesbienne de 23 ans, me racontant l’impact démesuré et désastreux d’un film porno qu’elle avait vu avec ses deux grands frères à l’âge de 4 ans, en cachette des parents (qui possédaient ce genre de vidéos…). Je garde aussi en mémoire cet ami homo de mon âge, qui s’entêtait à me dire qu’il ne comprenait vraiment pas pourquoi je faisais autant le lien entre viol et désir homosexuel (il n’y mettait absolument pas de mauvaise volonté, pourtant !). Il estimait en toute bonne foi qu’il n’avait pas été violé, qu’il n’avait connu aucun traumatisme et que tout allait très bien dans son vie. Pourtant, récemment, un souvenir d’enfance – d’une violence grosse comme une maison – lui est revenu en tête, et lui a fait dire que « peut-être » il avait été l’objet d’un viol : en effet, quand il était pré-adolescent, avec son grand frère, ils avaient visionné des K7 VHS où leurs parents s’étaient filmés dans des scènes sado-masochistes. Et après ça, il osait encore me soutenir que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes !

 

 

Beaucoup plus graves sont les violences physiques populairement appelées « homophobie ». Par exemple, en 2003, à Angers, un de mes amis sexagénaires, Jacques, a été retrouvé mort étranglé dans son appartement. Après enquête de la police (qui est même allée interroger les locaux associatifs LGBT angevins), il fut prouvé que le meurtre est survenu au cours d’un jeu amoureux qui a mal tourné. J’ai aussi rencontré des amis qui ont été victimes d’actes homophobes, et qui à chaque fois endossaient une part de responsabilité dans l’agression, puisque soit ils avaient dragué par leur agresseur (par exemple, une de mes connaissances, assez allumeur, s’est fait balancer du haut d’un pont dans le fleuve de la Maine à Angers par un passant qui lui avait demandé du feu), soit ils sortaient d’un lieu de drague homo (ils se faisaient choper par des inconnus qui les avaient guettés à la sortie des bars gay), soit ils affichaient une fragilité suspecte qui, loin d’avoir provoqué le viol, l’a indirectement appelé car elle a fait écho à la fragilité sexuelle de leur violeur. Par ailleurs, un bon nombre de potes m’ont raconté aussi les vols d’objets que leurs amants de passage ont perpétrés à leur domicile… sans parler de ceux qui se sont fait harceler par téléphone par leur « ex » (qui se faisait passer pour un flic auprès de leurs parents pour leur soutirer des informations), ou bien ceux qui se sont fait courser en bagnole par lui ou suivre en filature. Les vrais scenari de films !

 

 

Je pense enfin à tous ceux qui, comme moi, au départ, n’étaient pas pré-destinés à violer/désirer être violés parce qu’ils n’ont effectivement pas été violés dans leur enfance, parce qu’ils ont grandi dans des draps de soie, parce qu’ils sont connus pour être des crèmes de garçons, et que l’idée même d’être dominés en « amour » ne leur effleure pas l’esprit… mais qui, de par leur fuite du Réel, leur manque de confiance en eux, leur idolâtrie des médias, se mettent, une fois arrivés à l’âge adulte, à rechercher des modèles amoureux de type « violeurs », qui pallieront à leur manque-à-être ou à leur fuite d’eux-mêmes. C’est exactement mon cas. Et je le vois aussi autour de moi. Par exemple, j’ai un ami homo de mon âge qui se salit dans des lieux de baise, et qui m’a avoué qu’il se reconnaissait exactement dans ma description du discours intérieur de l’homme qui s’auto-persuade que finalement « il l’a bien cherché et qu’il a aimé ça ». J’ai en mémoire un de mes anciens élèves de terminale, un garçon très efféminé, qui a sûrement grandi dans du coton (comme moi), qui était très ami des filles de sa classe, et qui, à défaut d’avoir été violé dans son enfance, se lançait pourtant dans une recherche amoureuse de type violent. Quand j’ai lu son « post » Facebook, son cri de révolte (« Mais pourquoi est-ce qu’ils me prennent tous pour une pute ? »), j’ai compris que si le viol n’avait pas précédé son coming out, il l’avait à coup sûr succédé. J’ai aussi parmi mes potes homosexuels un garçon particulièrement maniéré, qui s’offusquait dès que je parlais du viol en lien avec l’homosexualité : il ricanait… jusqu’au jour où j’ai deviné, sans qu’il m’en parle, qu’il avait été maltraité à l’école et que dans ses « plans cul » il mettait en scène des viols. Un jour que je me trouvais à la librairie parisienne LGBT Les Mots à la bouche, un jeune prof de lettres de mon âge, d’apparence fragile et sophistiquée, est venu m’accoster pour me draguer ouvertement : j’ai découvert que ce garçon bien sous tous rapports, était adepte des plan SM (Sado-Maso) où il était violé, dominé, maltraité. Il m’a même montré fièrement le collier piquant et la laisse canine que venait de lui offrir son copain du moment ! Voyez-vous, il ne suffit pas de faire son coming out ou bien d’avoir été nécessairement violé pour désirer le viol : c’est parfois l’effondrement identitaire, la panne de personnalité, ou le manque de liberté, qui sont à l’origine du fantasme de viol homosexuel.

 

 

Pourquoi ne sait-on pas tous ces liens entre homosexualité et viol ? Parce que le viol n’est pas un acte totalement subi, totalement dénué de liberté. Tous les cas que j’ai cités sont peu connus et reconnus par les victimes elles-mêmes (qui parfois n’ont même pas parlé du viol à leur propre compagnon de vie !) pour des raisons diverses. La dénonciation du viol a toujours été très difficile à faire car d’une part le viol est un fait caché et honteux prenant l’apparence d’un bien, et d’autre part sa dénonciation peut foutre un bordel-monstre dans les familles, les cercles amicaux et la société. N’oublions pas que le violeur n’est en général pas un étranger, mais un proche parent. Parler du viol demande une énergie phénoménale à la victime qui veut le dénoncer. De plus, le viol a du mal à être prouvé tant il est nié par l’agresseur et justifié par les bonnes intentions. En effet, la victime du viol a pu, par stratégie de survie, banaliser l’agression et ré-écrire les faits sous forme de jolie romance, en donnant crédit aux sentiments et aux cadeaux de son bourreau, ou en lui attribuant au moins la découverte de son homosexualité (« Si j’ai joui, c’est que j’ai quand même aimé ça, quelque part… L’homme qui m’a initié à la génitalité m’a révélé mon attrait pour les garçons, finalement. »). Et puis humainement il n’a jamais été facile, a fortiori à un âge où on a peu de recul, de remettre en cause une violence ou un manque de liberté, surtout quand socialement ces derniers sont remplacés par les mythes sucrés et politisés de « l’identité homosexuelle », de « l’amour homosexuel merveilleux » et de « l’homophobie » (le mot-épouvantail qui renvoie au viol sans même le dénoncer !).

 

Alors s’il vous plaît, amis lecteurs, concernant le désir homosexuel, ne causalisons pas le viol en l’homosexualisant, mais n’ignorons pas non plus son existence, minoritairement en tant que fait réel, majoritairement en tant que fantasme. C’est la plus belle assistance et amitié que vous nous offrirez à nous, personnes homosexuelles. Votre indifférence bienveillante et gay friendly qui nie nos souffrances et nos drames intimes, nous n’en voulons pas ! Que lumière soit faite sur la caverne de nos viols, fantasmés et parfois réels ! Foi d’Araignée.

 
 

N.B. : Cet article est étroitement lié aux codes « viol » et « homosexuel homophobe » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels. Je vous suggère de compléter votre lecture par ces deux articles capitaux.


 

[1] Par exemple, le chercheur américain David Finkelhor affirme que les garçons agressés avant l’âge de 13 ans auraient quatre fois plus tendance que les autres à revivre des expériences homosexuelles (David Finkelhor, « Four Pre conditions : A Model », dans Child Sexual Abuse : New Theory and Research, 1984). D’après une enquête menée par le magazine gay The Advocate (n° 661-662, 23 août 1994) auprès de ses lecteurs (2500 questionnaires en retour), 21 % des répondants considéraient en effet avoir été victimes d’abus sexuels avant l’âge de 16 ans. « Les personnes ayant déjà eu des pratiques homo-bisexuelles ont beaucoup plus souvent que les autres subi des rapports sexuels contraints (tentatives ou rapports imposés) : 45,4 % des femmes homo-bisexuelles contre 14,9 % des femmes hétérosexuelles, 23,9 % des hommes homo-bisexuels contre 3,9 % des hommes hétérosexuels. » (Enquête sur la sexualité en France (2008) de Nathalie Bajos et Michel Bozon, p. 262) ; « Les personnes qui ont eu des partenaires du même sexe déclarent beaucoup plus de rapports forcés que les personnes qui n’ont eu que des partenaires de l’autre sexe. Ainsi, 44 % des femmes ayant eu des rapports homosexuels dans leur vie déclarent avoir subi des rapports forcés ou des tentatives (contre 15 % des hétérosexuelles), dont 31 % avaient moins de 18 ans la première fois ; c’est le cas de 23 % des hommes qui ont eu des rapports homosexuels (contre 4,5 % des hétérosexuels), dont 15 % avaient moins de 18 ans la première fois. » (idem, pp. 385-389)

 

VADE RETRO CIVITAS !!! (« Débat » au Sénat le 11 septembre 2012)

COMPTE-RENDU DU DÉBAT DU 11 SEPTEMBRE 2012 AU SÉNAT (Paris) SUR LA PROPOSITION DU PRÉ-PROJET DE LOI SUR « L’OUVERTURE DU MARIAGE À TOUS LES COUPLES QUI LE DÉSIRENT » (DÉBAT MENÉ PAR LA SÉNATRICE ESTHER BENBASSA, ENTOURÉE DE DIDIER ÉRIBON, CAROLINE MÉCARY ET DANIEL BORRILLO)

 
 

(N.B. : Je précise que tous les propos que j’ai cités en italiques et entre guillemets ont été entendus sur le vif, et ont été prononcés vraiment tel quel.)

 

« Vous ne faites pas partie du débat !! Vous êtes hors débat !!! » (Édouard, le jeune activiste « pro-mariage pour tous », s’adressant pendant le temps d’« échange » à tous les opposants du pré-projet de loi de la salle)

 


Daniel Borillo, Esther Benbassa, Caroline Mécary et Didier Éribon
 

C’était mardi dernier. Il y a quatre jours. Une après-midi pluvieuse. Même le Ciel était triste et consterné par ce qui se passait ! Je me suis rendu au Sénat pour assister au « débat » concernant la proposition de loi sur l’ouverture du mariage aux couples de même sexe. Pour une fois qu’on nous proposait de discuter publiquement sur des questions sociales aussi cruciales pour notre avenir, il ne fallait pas que je manque au rendez-vous !… surtout à l’heure actuelle où beaucoup de médias nous présentent cette loi comme « déjà votée », et que ses promoteurs zélés nous interdisent purement et simplement tout débat sur le sujet ! (J’écoutais, en juillet dernier sur France Inter, à l’émission Le Débat de midi de Thomas Chauvineau, Dominique Boren, le co-président de l’APGLAssociation des Parents Gays et Lesbiens – décréter, avec la commission de censure gay friendly qui l’entourait, qu’« il ne pensait pas qu’un débat contradictoire ait de l’intérêt pour les questions d’homoparentalité. » Le chemin du dialogue est barré, tenons-nous-le pour dit ! Scotch marron sur la bouche ! Vooooilà !) En plus, ce débat au Palais du Luxembourg tombait à point nommé (… et à deux jours près !) avec la déclaration « officielle » de la ministre de la Justice Christiane Taubira dans le journal La Croix, qui stipulait que « les homosexuels allaient bénéficier des mêmes conditions d’adoption que les hétérosexuels. » Une raison supplémentaire, à mes yeux, pour faire le déplacement !

 

Et les propos tenus pendant cette réunion m’ont paru tellement hallucinants que j’ai décidé non pas de m’offusquer et de ruminer ma rancœur dans mon coin, en passant vite à autre chose, mais de vraiment faire un article, un compte-rendu précis de ce qui s’est dit salle René Coty ce jour-là, pour que vous mesuriez l’inquiétant déni de Réel vers lequel la France toute entière s’engouffre sans même s’en rendre compte. Au lieu d’intervenir directement dans la conférence et de me faire aboyer dessus (je n’exagère pas : les quelques rares contradicteurs qui ont essayé de s’exprimer se sont fait lyncher sur place !), j’ai préféré sur le moment faire profil bas, chauffer le crayon, prendre un maximum de notes, pour que vous sachiez ce qui s’est vraiment dit, et surtout pour que ces législateurs médiatiques (j’ai nommé les « sociologues » Daniel Borrillo et Didier Éribon, l’avocate Caroline Mécary, et bien sûr la sénatrice d’Europe Écologie Madame Esther Benbassa… qui nous a tous laissés « verts », il faut le dire) s’entendent parler, puissent se lire et se relire blanc sur noir. Je veux qu’ils comprennent le mal qu’ils nous construisent (avec les meilleures intentions du monde, en plus !).

 

Cet article ne sera pas une démonstration de mes opinions sur le projet de loi sur le mariage ou l’adoption. Celle-ci aura toute sa place dans mon prochain livre Homosexualité en vérité, qui verra le jour le 13 octobre prochain. Dans ce nouveau numéro du Phil de l’Araignée, je me contente simplement de décrypter un événement public (ambiance générale, discours des intervenants, réactions du public, etc.) en tant que témoin oculaire, et ne rentrerai pas dans le débat d’idées. Cela m’intéressait de sortir des considérations purement théoriques et argumentatives pour aller vers le témoignage constatif et jouer le rôle du photographe qui vous commente son instantané, « comme si vous y étiez ».

 

La rencontre aura duré trois heures. Trois longues heures pour se rendre compte du degré d’inconséquence et d’inconscience de certains de nos dirigeants et de leurs idéologues, qui nous préparent une soupe – la loi sur l’ouverture du mariage aux couples homosexuels – sans l’avoir goûtée, sans même avoir idée de son goût et des indigestions violentes qu’elle va engendrer (et qu’elle engendre déjà !). La seule qui semblait en avoir conscience, c’est Caroline Mécary (c’est pour ça qu’elle tirait la tronche et qu’elle n’est quasiment pas intervenue…).

 

Vous savez, un débat démocratique, idéalement, c’est un moment où qu’on réfléchit, où qu’on apprend des choses, où qu’on s’écoute, où qu’on parle avec les autres autour de nous en vue du bien commun (même si qu’on n’est pas toujours d’accord avec qu’est-ce qui disent), où qu’on dégage les grandes orientations communes en se basant sur des cas concrets pour être au plus proche de l’Humain et spécialement au service des plus fragiles, où qu’on recherche ensemble la Vérité sans jamais chercher à La posséder à soi seul et à L’imposer aux autres (car la Vérité n’est Une et Vraie qu’en partage ! c’est Sa règle d’Amour). Encore faut-il croire humblement en l’existence de cette Vérité-Amour-Chemin collectif… En tous cas, ce n’est pas une foi et une confiance qu’ont démontrées Benbassa, Mécary, Borrillo et Éribon, il y a quatre jours au Sénat. C’est le moins qu’on puisse dire !

 

A-t-on assisté à un débat digne de ce nom ? À l’évidence, non. C’était plutôt le prototype de l’anti-débat !

 
 

1 – Le fond (sans fond) du débat

 

 

Déjà, les exposés des intervenants ont rasé tout le monde, y compris ceux qui les ont applaudis docilement. Un détail : ma voisine lesbienne, visiblement militante et « pro-mariage pour tous ceux qui le demandent », se faisait chier royal. Du début jusqu’à la fin de la conférence, je l’ai vue et entendue bailler… Elle avait commencé à prendre des notes sur son superbe ordi portable, puis, face à la nullité des propos tenus, elle a écrit cinq lignes, pour ensuite se résoudre à refermer définitivement son engin et écouter la messe avec un œil bovin.

 

Ensuite, le contenu des démonstrations rasait vraiment les pâquerettes. Sans rire. Je suis toujours épaté de voir comment ceux qu’on nous présente comme des « chercheurs », des « intellectuels » et des « hommes de loi » de renom sont capables de nous pondre des démonstrations, certes avec le jargon sophiste qui « fait bien », mais dignes d’un mauvais exposé scolaire de lycéen qui recrache du concept sans comprendre l’incohérence et le manque de sérieux de son propos. N’importe quel prof d’université un peu sérieux aurait eu Borrillo, Benbassa, Éribon et Mécary comme étudiants sans savoir qu’ils étaient médiatiques ou politiques, je suis sûr qu’il les aurait recalés à l’examen !

 

Daniel Borrillo, par exemple, parlait beaucoup trop vite (subtile technique, soit dit en passant, pour ne pas être reconnu comme cancre, pour ne pas être contredit, et que l’auditoire n’ait pas le temps de prendre des notes ni de réagir !). Il employait des métaphores pseudo scientifiques pour asseoir en réalité un manichéisme de bas étage (cf. son histoire de la « courbe d’horizontalité », jugée irréfutable – figurant le couple homosexuel demandant une égalité des droits « naturelle » et revendiquant l’expérience d’un amour « naturel » –, censée, selon Borrillo, commander à la vacillante « courbe de verticalité » – les devoirs d’État de ce couple indiscuté, les conséquences sociales du « mariage », l’adoption, l’accès à la procréation, etc.). Et toute cette fastidieuse démonstration « imagée et mathématique » s’articulait sur un seul fil rouge : l’« approche critique ». La nouvelle marotte du sociologue. Le problème, c’est qu’il n’a pris le mot « critique » que dans son sens populaire négatif… Ce que semble ignorer Borrillo, et qui apparaît pourtant comme une évidence pour tout individu un minimum lettré, c’est que la « critique » n’est pas en soi destruction ou négation : elle peut aussi être positive. Le mot « critique » n’a jamais été un bâton rhétorique pour taper de manière « clean et scientifique » sur son ennemi… Je pensais que les intellectuels dignes de ce nom avaient compris la nuance et l’écueil de cette expression depuis bien longtemps… Il faut croire que non.

 

Quant à Caroline Mécary, qui sait apparemment contenir à merveille sa révolte « militante » derrière un vernis intellectuel d’apparat et un faux calme (aurait-elle pris des cours chez Caroline Fourest ? ça se pourrait bien…), elle versait en réalité dans le chantage émotionnel ultra-politisé. Elle n’a pas parlé longtemps, certes, mais en dix minutes, elle a quand même eu le temps de 1 – nous indigner en faisant un hommage-express ému à Sébastien Nouchet, victime d’une attaque « homophobe odieuse » en 2004 juste avant le mariage de Bègles (A-t-on informé Caroline que l’homme en question s’est en fait immolé lui-même par le feu et qu’il était suicidaire ?) ; 2 – nous foutre les boules en brandissant le pantin du « méchant Vanneste » ; 3 – nous faire pleurer pour mieux justifier ses appétits prosélytes et le bien-fondé de la politisation des sentiments (« Le mariage de Bègles a été un moment extrêmement fort, extrêmement puissant… Mais aussi capital d’un point de vue politique… ») ; 4 – nous menacer et menacer son propre camp politique par la même occasion, en mettant Hollande au pied du mur de sa prétendue « promesse » politique ; 5 – nous mépriser en définissant l’union femme-homme comme une « violation » de l’Amour et des Droits de l’Homme (car c’est vrai : tous les couples femme-homme qui nous ont conçus sont des violeurs et des tortionnaires, c’est bien connu). Caroline Mécary a parlé. Ce fut court, bref et… pas intense.

 

Pas mieux avec Didier Éribon. Plutôt pire, même ! L’« universitaire » s’exprimait de manière très confuse dès qu’il a commencé à ouvrir la bouche. Son argumentaire n’était pas construit et partait dans tous les sens (j’y reviens en détail dans la partie 4 de mon article, ne vous inquiétez pas). Et alors, dans les propos, c’est certainement celui qui est allé le plus loin dans la passion déraisonnée, dans la frénésie surréaliste, dans la boulimie : « Le maximum de droits possibles pour le maximum de gens possibles ! » vociférait-il. Le discours de Didier Éribon incarnait l’apothéose du flou artistique (et violent !) socialiste et du moralisme laïcard. Figurez-vous qu’en parlant du projet de loi, le sociologue programme à plus ou moins long terme la dissolution en bonne et due forme du mariage, et plus particulièrement du mariage religieux. En fait, il veut dévaluer le mariage pour en faire un PaCs. En d’autres termes, il cherche à « pacser le mariage » (même si ce n’est pas dit explicitement comme ça ; mais dans les faits, cela revient à ça), en retirant à ce dernier le devoir de fidélité entre conjoints, l’encouragement à la communauté de vie (en gros, pas besoin à l’avenir de cohabiter ensemble quand on sera « mariés »), la solidarité entre « époux », l’obligation de passer devant un juge pour divorcer, etc. Didier Éribon s’est choisi depuis des années un cerbère invisible et tentaculaire contre lequel s’acharner, que lui croit réel mais qui n’est pas réel au fond (… sauf quand lui essaie de l’incarner), un monstre qui s’appelle le « psychiatre chrétien » ou le « conservateur réactionnaire ». Pendant tout le débat, le sociologue, d’une main tremblante, fustigeait ce qu’il a coutume d’appeler le « vieux discours réactionnaire », et soutenait que « les conservateurs sont ceux qui pensent qu’un mariage c’est un homme et une femme ». Dans sa paranoïa laïciste, il voyait de la pensée chrétienne exprimée partout, surtout quand il voulait discréditer rapidement le discours d’un de ses détracteurs sans avoir à argumenter (… comme s’il fallait être nécessairement croyant pour trouver par exemple la Gestation Pour Autrui, les manipulations génétiques, les PMA, les risques de l’adoption, et la marchandisation des corps, choquants !… on croit rêver…). Et, de surcroît, puisque dans tout bon discours idéologique manichéen qui se respecte la diabolisation ne se sépare jamais de la sacralisation excessive d’un autre concept tout aussi abstrait, Monsieur Éribon s’est empressé, pour donner une touche positive et une assise solide à sa phobie mégalomaniaque de l’Église-Institution, de présenter la Justice (dans le sens de « Ministère de la Justice »), la politique (dans le sens de « pouvoir totalitaire »), le droit (dans le sens de « non-devoir ») et les lois (dans le sens de « tables de la loi » en marbre froid) comme la panacée, comme le Messie profane qui règlera tous les problèmes et qui transformera le Réel et les soucis de la vie en carrosse de Cendrillon ! Faut-il rappeler à ce cher « intellectuel » que c’est par la voie du juridisme effréné et de l’anti-catholicisme que le nazisme s’est imposé en Europe il y a quelques décennies de cela ?

 

Et pour achever le prestigieux tour de table, il y avait (la meilleure pour la fin, toujours) la Maîtresse de cérémonie de ce « débat », Rika Zaraï… pardon… Esther Benbassa, la sénatrice des Verts (vous savez, le parti des « pas mûrs », dont beaucoup imitent en tous points les dérives matérialistes et capitalistes qu’ils condamnent chez les autres). Cette nouvelle pasionaria « hétérosexuelle et gay friendly » s’est d’office présentée comme la « Mère Courage des Homos » (« Depuis des années, je lutte contre les discriminations. »), celle qui les comprend, celle qui a peur de les contrarier (comme les mères faibles et possessives), celle qui « ne veut surtout pas qu’on la remercie » pour son travail (c’est bien elle qui est à l’initiative, avec quelques amis, de la rédaction du nouveau projet de loi)… mais qui fait un tel cinéma pour qu’on la remercie quand même qu’on finit par douter de son désintérêt dans l’histoire. « Je suis un peu fière d’être allée jusque-là ! » a-t-elle dit en imitant Roselyne Bachelot. Dans son discours Bisounours (« On est dans la tolérance bienveillante. » a-t-elle quand même osé sortir), Esther Benbassa se gargarisait de bonnes intentions sans évaluer les moyens techniques pour les concrétiser, sans considérer les faits et les conséquences à long terme du projet de loi qu’elle défend avec une fausse assurance et beaucoup de comédie sensibleriste. Le parfait Ponce Pilate au féminin (si vous me permettez cette comparaison « judéo-chrétienne » qui ne manquera pas de ravir Didier Éribon…), cette femme de loi faible mais capable d’être têtue et jusque-boutiste par fierté mal placée. Benbassa a démarré le poids lourd sans avoir le permis. Elle sent que l’engrenage qu’elle a lancé peut aller trop loin, que les rêves et les promesses que sa famille politique a imposés aux personnes homos la dépassent, mais pour l’instant, elle n’a pas l’honnêteté de faire machine arrière, l’humilité de se contredire, le courage de renoncer à son trophée de bonne samaritaine. Pendant le débat, je l’entendais relativiser, dans un optimisme d’indifférence totalement déplacé, les effets pourtant désastreux qu’aura l’adoption de la nouvelle loi sur le mariage (je connais suffisamment de cas concrets de couples homos qui se sont lancés dans la GPA ou la PMA, ou dans des projets de co-parentalité abracadabrantesques, pour le dire !). Mais Madame Benbassa s’en lave les mains : elle est TOLÉRANTE : « Je n’ai pas envie d’imposer à qui que ce soit le mariage. Ça m’est égal. Chacun fait comme il veut… » Loin de rester dans le Réel, la sénatrice s’est focalisée sur l’intention (le « changement », le « progrès », la « modernité », la « compassion », la « solidarité », etc. : les poncifs socialistes classiques). Par exemple, il faudrait, selon elle, accepter la GPA ainsi que la présomption de paternité pour que la France soit « au diapason de la société et de son évolution ». Au lieu d’enjoindre ses troupes à la prudence et au réalisme, au contraire elle les excitait, les poussait à avoir les yeux plus gros que le ventre, quitte à être excessifs et culottés, quitte à « gêner » (encore l’argument de l’image…), quitte à demander beaucoup trop pour réussir à obtenir (à l’usure) un maximum de droits (technique de l’enfant capricieux s’il en est) : « Je suis pour qu’on en demande beaucoup pour en avoir un minimum ! » Rentrez tous dans les locaux du Ministère de la Justice et prenez tout ce que vous voulez tant que la porte est ouverte : c’est « open bar » ! « Gay Happy Hours » ! C’est Taubira qui régale ! Pendant qu’elle avait le micro, la Esther Benbassa tenait le double discours de la lâcheté : celui qui exprime déjà à la fois le remord lucide/inquiet, et l’entêtement orgueilleux/rassurant. Ponce Pilate qui se lave les mains, comme je vous disais… Elle affirmait par exemple que « des lois comme celles-là ne sont jamais anodines… » et deux secondes après, elle se contredisait : « Il faut banaliser l’adoption par les couples homosexuels. » Elle niait la complexité et la souffrance de certaines situations humaines qu’on sait objectivement douloureuses (« Les femmes ont recours à la PMA avec beaucoup de simplicité. »). Au lieu de parler de la GPA en elle-même (qui n’est pas autre chose qu’un business des corps, une instrumentalisation de la femme, et un vol d’enfants consenti, planifié, rappelons-le !), elle enchaînait – par une pirouette rhétorique victimisante – sur une des conséquences secondaires de la Gestation Pour Autrui : le fait qu’il était « impensable et « odieux », selon elle, qu’une Nation refuse l’enregistrement sur les registres d’État Civil des enfants qui naîtraient par GPA. Là encore, Madame Benbassa a fait diversion dans le dolorisme, a quitté le Réel dans la victimisation matinée de solidarité, dans le catastrophisme (« Autant choisir le moins pire… ») saturé de légalisme « tranquillisant ». Puis, écartelée entre sa conscience de mal faire/mal dire et ses bonnes intentions, elle esquissera à la fin du débat un semblant d’étonnement abasourdi (… classique de l’apprentie sorcière…) : « On ne pensait pas qu’aller si loin [législativement] susciterait autant d’oppositions venant de 63% des Français favorables au mariage pour les personnes de même sexe. »)… avant de se masquer à nouveau les yeux, de s’étiqueter démagogiquement « vieille conne réactionnaire qui a encore des principes » et de s’acharner dans l’erreur : « Il y a un côté marchandisation qui me gêne… Peut-être que je suis d’une autre génération, d’un autre temps… » Non Madame, malheureusement, ce que vous projeter de faire voter, est plus que jamais dans l’ère du temps… sachant que notre temps est arrivé à un stade avancé de la régression infantile !

 

 

Points communs dans l’« argumentaire » de nos quatre intervenants de choc : exactement comme dans les mauvais exposés d’élèves (qui ont tout pompé sur Wikipedia), ils faisaient parfois naïvement référence à des souvenirs de conversations qu’ils venaient d’avoir avant la conférence avec leurs « groupes de travail » ; et pour soutenir leurs thèses farfelues, ils prenaient appui sur des comparaisons très imagées (très enfantines, en fait !) qu’ils n’expliquaient même pas, qui n’apportaient rien, et qui brouillaient l’analyse concrète des faits. Par exemple, Daniel Borrillo tenta de justifier sa démarche de « critique de la norme familiale » en employant l’image de la « recette du gâteau » qu’il faut remettre en cause (franchement brillante et utile pour comprendre son propos, cette métaphore culinaire… LOL). Et Esther Benbassa nous a expliqué, de manière aussi fort didactique (et inquiétante quand on interprète l’image jusqu’au bout), que s’attaquer à la transformation du Code Civil, c’est comme tirer sur une bobine de fil et voir arriver la pelote (« Quelqu’un m’a donné l’image de la pelote… ») Merci Esther. C’est du Einstein.

 

Visiblement, ces « chercheurs », en plus de nous livrer un discours d’une pauvreté intellectuelle hallucinante, ont un rapport plus qu’ambigu à la LOI (étant entendu le mot et la chose). On pourrait qualifier ce rapport à la Loi d’« idolâtre » (et d’aucun savent que l’idolâtrie est toujours moteur de violences inconscientes). Car en fait, dans les mots, ils font fusionner la « Loi-Réel » et la « loi-bout-de-papier », ou bien, ce qui revient au même, ils les opposent totalement… alors qu’elles ne sont ni la même chose, ni en opposition : la « loi-registre » a pour devoir d’accueillir la « Loi-Réel », de La comprendre et de La servir, pour ensuite L’orienter humblement vers la vie et le bien commun. Le problème est que nos amis « pro-mariage pour tous ceux qui le désirent » font le chemin contraire : ils veulent mettre le papier et la bonne intention avant le Réel. Ils inversent les choses parce qu’ils se prennent pour Dieu, un dieu athée égoïste qui installe la conscience individuelle humaine comme unique énonciatrice du bien et du mal, sans idée de transcendance pour le coup. Ce n’est pas un hasard si, par exemple, Daniel Borrillo défend l’idée de « droit subjectif » et qu’il articule la demande d’adoption pour les couples de même sexe sur la notion de « filiation fondée sur la volonté individuelle » (« La volonté n’a pas de sexe. » dira-t-il en grand tribun qui remet sa toge).

 

Finalement, ces législateurs de pacotille envisagent la Loi (= la « Loi naturelle et divine » + la « loi humaine en tant que système législatif ») comme un sceptre magnifique qui règlera tous leurs problèmes ET comme une poupée vaudou qui les déçoit, qui porte malheur, qu’il faut faire disparaître ou faire fondre pour en récolter l’or. C’est tout le paradoxe de l’idolâtrie ! Entre attraction et répulsion, fusion et rupture, c’est un même processus de violence qui s’exprime. Par exemple, Esther Benbassa adopte le discours jargonnant du savant fou qui prépare dans son laboratoire une entorse à la Loi (elle a dit que son projet de loi « exige une refonte du Code Civil ») après avoir présentée Celle-ci comme démodée (à deux reprises, elle a insisté sur la nécessité de « dépoussiérer le Code Civil »). Elle citait un de ses amis (qu’elle a présenté au passage comme un « réac’ de gauche ») qui, selon elle, « avait tout faux ! » pour la simple raison qu’il lui avait rétorqué que « la Loi ne devait pas suivre la société ». Mon Dieu, il a osé dire que le Peuple n’était pas toujours souverain ni juste tout le temps, et qu’il existe même parfois des utopies/tyrannies collectives (ça s’appelle notamment des sectes, des idéologies, des communismes, des « démocraties ») !!! Oh le vilain…

 

 

Concernant nos quatre orateurs (… et leurs suiveurs), je crois qu’on peut vraiment parler d’idolâtrie par rapport aux mots « loi », « droit », « égalité », « progrès », « science », « culture », « justice » (et tous leurs croisements lexicaux : « égalité des droits » surtout), mots jugés comme sacrés et inattaquables, en même temps que redoutables et dangereux. Car il faut bien comprendre une chose : les idolâtres « pro-mariage pour tous ceux qui le désirent » cherchent à détruire ce qu’ils adorent, étant donné qu’ils ne l’aiment pas et ne le comprennent pas. Même l’égalité, même la loi (à commencer par la loi naturelle), même le mariage, ils ne les aiment pas dans les faits ! Par exemple, ils n’ont jamais réalisé que la « tolérance » et l’« égalité » n’étaient pas bonnes en soi, et qu’il y a des tolérances très réactionnaires (l’abnégation, le relativisme, la lâcheté, le déni de Réel et de souffrance, etc.), qu’il existe des inégalités très justes (elles s’appellent différences, singularité des êtres humains et des situations, diversité culturelle, etc.) tout comme des égalités très injustes (conformisme, uniformité, refus des différences, pensée unique, etc.). Ce n’est pas en luttant aveuglement en faveur de la « Déesse Égalité » qu’on favorise la reconnaissance des personnes, l’équité, autrement dit la juste égalité, celle qui s’adapte au Réel et non celle qui Lui commande. Je pense vraiment que ces extrémistes du progressisme n’aiment pas l’égalité : ils la réduisent à un simple instrument ou à un prétexte verbal pour donner corps à leurs fantasmes identitaires et amoureux les plus désincarnés et les plus égoïstes, au final.

 

Et pour exécuter le travail de sape de leur idole « La Loi », nos idéologues gays friendly louvoient et minaudent avec Elle, L’habillent, L’enrobent (et L’étouffent !) de mille et une « bonnes » intentions, Lui donnent souvent une apparence artistique, législative, amoureuse, voire sacramentelle (version athée). Les penseurs queer et camp (ne surtout pas les appeler « hétéros », « homos », « gays », « lesbiennes », « bis » et « trans » : tout ça, ce sont déjà des étiquettes marchandes et communautaristes datées, vous comprenez… Et en plus, dans « homosexuel », il y a le mot « sexuel », alors c’est encore plus « réducteur » ! Eux, ils sont juste « amoureux », « sensuels », « expérimentateurs » et « artistes militants »… Ne pas les nommer, c’est même mieux ! disent-ils) défendent notamment les concepts théoriques de « devenir », de « déconstruction », de « reconstruction », de « déplacement », de « transcendance », de « sentiments », de « contournement de la norme », de « créativité », de « lutte contre les discriminations »). Leur plus belle victoire sur la Loi, c’est d’abord celle qu’ils ont apparemment remportée sur le terrain de la Parole, à travers le triomphe actuel du nominalisme (philosophie médiévale sur laquelle se fonde nos civilisations post-modernes actuelles, et qui défend l’idée que c’est la subjectivité humaine qui commande au Réel : l’être humain n’aurait qu’à recréer le monde et nommer les choses comme il veut, sans Dieu, pour changer leur réalité) et du sophisme (notre quotidien envahi par les slogans, les images, les machines et la pub en fournit un parfait exemple). Et on peut dire qu’ils l’ont plutôt bien gagnée, cette bataille des mots, vu que 63% des Français se disent/diraient actuellement favorables à la loi sur le mariage pour les couples de même sexe, sans savoir trop pourquoi. D’ailleurs, pendant le débat, notre quatuor de législateurs s’amusait à inventer des nouveaux mots, à déformer les anciens. Par exemple, dans leur projet de loi, il est déjà question de remplacer les expressions (jugées « sexistes et hétéro-patriarcalo-centrées ») « mari et femme » ou « père et mère » par celles (bisexualisées et asexualisées) d’« époux », de « conjoints », de « co-parent », de « parent de fait », de « parent social »). Bref, ils s’enlisent dans la bonne intention déréalisée, dans la pensée magique et schizoïde que les mots vont modifier les choses. Par exemple, Caroline Mécary s’est donnée pour objectif de « faire bouger les lignes de la loi ». Didier Éribon, de son côté, nourrit la même superstition à l’égard de la Loi : « Le droit, c’est l’enregistrement de la norme. Transformer le droit, c’est transformer la norme. » Pour ce savant post-moderne « constructionniste », il s’agit, par l’intermédiaire du « droit », de « défaire… ou en tous cas de déplacer les frontières » du Réel et du vrai Droit (… le Second était pourtant inféodé au Premier, dans l’idéal). Concernant les conséquences sérieuses qu’implique la destruction/reconstruction hasardeuse de la Loi, Éribon s’est contenté de noyer astucieusement le poisson dans un discours poétique vaguement législatif et surtout sincèrement élancé, proposant, « participatif » (comme dirait avec bravitude notre amie Ségolène). Et concrètement, ça donne ça : « Je sais qu’il y a des problèmes… Mais c’est au droit de régler le problème. Faisons preuve d’imagination juridique, culturelle, législative… » Il n’y a que Maille qui m’aille.

 
 

2 – Nulle intention de débattre

 

Quand je dis qu’il n’y a pas eu de vrai débat, ce n’est pas seulement par rapport au fond (ou plutôt, en l’occurrence, l’absence de fond). C’est aussi dans l’esprit de la rencontre. L’ambition de proposer un débat, et tant qu’à faire un débat de qualité, n’était absolument pas au rendez-vous, je peux vous l’assurer. Ce qui m’a marqué, c’est que, dans une fausse humilité (j’ai pouffé intérieurement de rire quand Madame Benbassa a sorti qu’« élaborer cette loi sur le mariage obligeait à beaucoup d’humilité » !) et une décontraction inappropriée à la gravité des enjeux du débat (« Dans la bonne humeur et la réflexion, nous ferons avancer ces lois ! »), nos quatre intervenants s’excusaient à tour de rôle de penser par eux-mêmes, affichaient leur incompétence ou leur déni sans s’en rendre compte, n’entraient pas dans le vif du sujet (sous prétexte que ce serait trop fastidieux de rentrer dans les détails, ou que ça ennuierait tout le monde), fermaient la discussion, ou se cloîtraient dans un silence contrarié (Suivez mon regard… il atterrit sur Caroline Macaron). La couardise dans toute sa splendeur ! Écoutez plutôt nos valeureux « intellectuels » et « législateurs » conclurent presque chacune de leur prise de parole par ces mots vigoureux : « Franchement, je n’ai pas d’idées… Je ne suis pas une juriste aguerrie. » (Esther Benbassa en conclusion du débat) ; « Je ne vais pas rentrer dans tous les aspects juridiques… » (Daniel Borrillo, après avoir survolé la question du statut flou du « co-parent ») ; « La question est réglée d’avance… » (Didier Éribon concernant la loi sur le mariage entre couples de même sexe) ; « On laisse la partie technique… » (Esther Benbassa, esquivant la discussion sur les retombées concrètes de la substitution de l’expression « mari et femme » par « époux » ou « conjoints » dans le cas de la validation de la loi sur le mariage) ; « Je ne suis pas un expert du symbolique… » (Daniel Borrillo) ; « On n’est pas là pour dire ce qui est souhaitable ou non ! » (Esther Benbassa face au pédopsychiatre qui critiquait chez elle le discours relativiste et fuyant) ; « On ne règlera pas maintenant tous les problèmes psychologiques qui se posent. » (Esther Benbassa, niant les constats médicaux des professionnels de la santé).

 

Caroline Mécary, pour ne pas s’enfoncer davantage dans le déni de Réel, est restée particulièrement muette et concise pendant la seconde moitié de la conférence. Elle a dû sentir l’accumulation de bourdes de ses camarades, et a préféré s’éclipser peu à peu après sa première intervention. Et à sa place, j’aurais fait pareil ! : je me serais caché six pieds sous terre (… de honte !).

 

Didier Éribon, lui, n’a pas eu les mêmes états d’âme et la même distance. Tant qu’à être de mauvaise foi et à afficher la lâcheté, autant le faire en grand et avec du bruit ! Son relativisme sentait la démission intellectuelle et le désenchantement existentiel/amoureux à plein nez : À quoi bon débattre, disait-il, puisque « les arguments sont toujours réversibles » et qu’il n’y a pas d’« évidences » (sauf si on les rabaisse, comme lui le fait, au rang de « points de vue », de méprisables « opinions » subjectives, de « constructions culturelles patriarcales, hétérosexistes et judéo-chrétiennes ») ? « Qui peut définir ce qu’est une famille ? » lança-t-il orgueilleusement à la foule, sans attendre de réponse. L’Amour, messieurs dames. L’Amour. Mais c’est sûr que quand on connaît un peu ton histoire familiale, et surtout ton rapport blessé à celle-ci – j’ai lu en entier Retour à Reims (2009) –, on comprend que tu ne veuilles pas t’étendre sur cette question, que tu n’autorises personne à s’y étendre, d’ailleurs…

 

Au lieu d’apporter une parole forte et juste, et comme pour pallier le vide de prétention à débattre, nos quatre conférenciers s’appesantissaient à se faire des courbettes (j’aime beaucoup ta robe ; ton dernier livre, j’ai a-do-ré ; faut absssolument que tu me refiles la recette), à se congratuler entre eux, à se citer mutuellement. Par exemple, Esther Benbassa n’a pas boudé son plaisir en définissant, avec une audace frétillante, le Dictionnaire des cultures gaies et lesbiennes (2003) de Didier Éribon comme « une Bible… une grande Bible même » qui servait encore aujourd’hui à « réformer nos esprits » (au moins ça !… même si personnellement, j’aurais plutôt employé le verbe « formater », mais bon…).

 

Quant à l’issue du tour de table qu’elle était censée conclure, Madame le Sénateur a affiché un contentement forcé, alors même que les dossiers de fond avaient tous été survolés : « Bon… Tout le monde a dit presque tout, je crois… » Visiblement, le public d’anesthésiés (ou d’indignés muets !) n’a vu que du feu à cette mollesse et cette démission collective. On le roulait dans la farine et on lui servait de la soupe idéologique sans contenu, mais ça lui allait très bien, c’était ça le pire…

 

Sans le faire visiblement exprès, car ça se voulait à la base un compliment poli, l’intervention conclusive et convenue de Stéphane Corbin (le porte parole de la fédération Lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) a fini de convaincre l’assistance qu’on venait de passer trois heures avec de faux intellectuels qui se défilaient sur les sujets qu’ils s’étaient initialement proposés de traiter : « Merci pour vos réponses… et vos non-réponses qui ont finalement été des ouvertures… »

 

Le débat, dans sa globalité, était en grande partie scénarisé. Par exemple, c’était gros comme une maison que Didier Éribon avait prévu de laisser le mot de la fin à un de ses potes homos présent au deuxième rang, vivant en Angleterre avec son copain, et censé par conséquent offrir un regard « pro-mariage » neuf, distancé, efficace (parce que minoritaire : qui, dans l’assistance, pouvait le contredire et lui parler du traitement de l’homosexualité en Grande-Bretagne en connaissance de cause?), exotique, rafraîchissant, beaucoup plus juste que toutes nos pauvres considérations de Français franco-centrés sur le mariage.

 

Tout le monde est ressorti de la salle sans orientation précise (et je doute que le « pot de l’amitié » final ait clarifié davantage les affaires…), sans même une date pour les États Généraux de la famille qu’Esther Benbassa a pourtant encouragé à organiser (« S’il n’y a pas d’États Généraux de la famille, on ne pourra pas avancer. »), plus par urgence et par pression sociale pour éviter le scandale que parce qu’elle désire véritablement un débat de fond sur le mariage en lui-même. D’ailleurs, concernant ces États Généraux, nous aussi, les opposants au projet de loi sur le « mariage pour tous ceux qui le désirent », nous les demandons (bien avant de passer à l’étape du référendum, ou même à celle de la manif’ dans la rue). Mais je crois, pour être tout à fait lucide, qu’Esther Benbassa et ses collaborateurs ne souhaitent pas ce temps de concertation pour les mêmes raisons que nous et pour poser les bonnes questions. À les entendre, ils veulent des États Généraux non pas consacrés au mariage ni au projet de son « ouverture » (pour eux, les dés sont déjà jetés, la promesse socialiste est irrévocable, et le mariage pour les couples homosexuels ne se discutera pas !) mais uniquement des États Généraux orientés sur les conséquences pratiques du mariage entre couples de même sexe (présomption de parentalité, examen des nouveaux devoirs conjugaux entre « conjoints » de même sexe, PMA, GPA, adoption, mise en place des droits de succession, etc. ; Exemples de fausses problématiques qui prennent le vrai débat sur le « mariage » à l’envers, et enserrent les États Généraux dans la voie du compromis et de la logique par défaut : « Facilitons la coparentalité pour garantir à l’enfant adopté un père et une mère ! » ; « Permettons aux enfants issus des GPA d’être inscrits sur les registres d’État Civil ! », etc.). Nous, nous voulons au contraire que le projet de loi en lui-même soit remis en cause et abandonné ! Je crois qu’il faut bien qu’on se mette d’accord ensemble sur les buts concrets de ces États Généraux, car ils sont pour l’instant très équivoques et divergents.

 
 

3 – Le mauvais traitement de l’auditoire

 

Quand je dis que l’esprit de cette réunion au Sénat n’était pas au débat, c’est qu’on sentait clairement (et sans paranoïa aucune de ma part) que certaines interventions orales étaient placées sous haute surveillance, que des personnes dans le public avaient été préalablement désignées pour poser telle question à tel moment, qu’une brigade spéciale de militants parsemés çà et là guettait, extincteur en main, le « subversif anti-loi-sur-le-mariage » pour l’encercler au plus vite et le mettre hors d’état d’incendier toute la salle. Si la discussion s’échauffait, les membres gays friendly de l’auditoire étaient prévus pour maîtriser les « gêneurs » en posant des questions inutiles et limite hors-sujet, en vue de détourner les conversations des sujets cruciaux. Devant moi, par exemple, un homme a volé la parole du pédopsychiatre Vincent Rouyer qui était en train de s’exprimer fort à propos sur les désastres concrets qu’impliquerait le « mariage pour tous », en lui emboîtant le pas (« On va changer de sujet! » a-t-il lancé précipitamment) ; puis il s’est chargé de faire diversion en interrogeant Esther Benbassa sur l’historique de l’élaboration du projet de loi (passionnant…). Le but de la manœuvre était claire : faire taire les opposants.

 

Globalement, pendant le « débat », j’ai été impressionné par la hargne des militants LGBT et friendly à l’encontre de ceux qui, comme moi, aspiraient à un échange serein et consistant. Ils préféraient maintenir leurs détracteurs dans des réactions que ces derniers n’ont jamais eues (le catastrophisme, l’énervement, le trouble, la peur, la rigidité, la superstition religieuse, etc.) plutôt que de reconnaître que celles-ci provenaient majoritairement d’eux (je les ai d’ailleurs sentis hyper nerveux, irritables, pas du tout à l’écoute, paniqués, pendant tout le temps des questions). Il n’y avait qu’à voir l’accueil qui a été réservé à l’emploi de l’expression « J’exige » (« exiger », c’est un verbe « nazi », il est vrai…) par l’une des personnes du public (le philosophe Gaultier Bès de Berc), pour comprendre la paranoïa anti-fasciste qui pesait dans la salle : « Il faut aller au-delà des conservatismes ! » a rappelé Esther Benbassa. Et il suffisait aussi d’écouter deux secondes Didier Éribon pour comprendre que le vrai homme superstitieux dans l’histoire, qui parle d’« Apocalypse » sans arrêt, qui use et abuse d’un lexique religieux anachronique qu’il attribue fiévreusement à ses « opposants », c’est lui ! Pendant le débat, il n’avait que le mot « conservateur » en bouche : « Il ne faudrait pas que notre pays des Droits de l’Homme devienne le pays le plus conservateur du monde ! »

 

Le respect de l’auditoire convié ce jour-là (auditoire qui avait pourtant des questions vraiment pertinentes à poser, des intentions pas du tout belliqueuses ni alarmistes, des témoignages de terrain intéressants à prendre en compte) n’a pas été au rendez-vous. C’est quand même embêtant pour un « débat », ce manque de fair play et d’écoute…

 

Les partisans du projet de loi ont préféré maintenir leurs « opposants » dans des schémas de pensée extrémistes et caricaturaux pour mieux se justifier de ne pas les laisser parler, et de répliquer avec la même violence que celle qu’ils leur attribuaient. [Moi, par exemple, je n’emploie pas l’expression « mariage homosexuel »… puisque c’est le « mariage » tout court que demandent la plupart des militants homosexuels. Je n’ai jamais dit que la différence des sexes était l’unique fondement solide du mariage… puisqu’il y a des couples qui intègrent la différence des sexes, qui se marient dans les règles, mais qui ne s’aiment pas pour autant. Je ne pense pas non plus que la condition sine qua non pour qu’il y ait mariage, c’est la procréation ou la présence physique des enfants, étant donné qu’il y a des familles qui peuvent procréer naturellement sans que l’enfant soit nécessairement aimé et bien élevé, et qu’il y a des couples femme-homme stériles qui s’aiment vraiment. De même, ce ne sont pas les évolutions du mariage ou de la famille qui m’inquiètent en soi : il existe des changements au sein des couples femme-homme qui sont salutaires, novateurs, qui ne remettent pas en cause la structure malléable du mariage et qui n’impactent pas l’équilibre d’une société, bien au contraire.] Mais je crois que cela arrange le totalitarisme et le réductionnisme intellectuel de ces orateurs que d’enfermer leurs contradicteurs dans une pensée simpliste et sans nuance. Derrière leur revendication agressive du droit au mariage ou à l’enfant, on lit une revanche à prendre et une jalousie mal dissimulée à l’encontre des couples femme-homme, voire des croyants en Dieu. Daniel Borrillo, par exemple, demande à ce que les unions femme-homme soient passées au crible des mêmes examens scrupuleux et odieux que les cruels sociologues et psychanalyses auraient infligés à la communauté homosexuelle depuis des siècles, « et on verrait, selon lui, que peu d’entre elles auraient l’accréditation et la légitimité pour élever/adopter des enfants et se marier aujourd’hui » ! Pour prouver que les personnes non-homosexuelles sont mal placées pour faire la leçon aux couples homosexuels en matière d’amour, de mariage, de fidélité, de procréation, de filiation et d’éducation, l’un des amis homos de Didier Éribon, présent dans la salle, a pris énergiquement la parole pour asséner que les familles classiques, de tout temps, n’avaient fait qu’engendrer malheur sur malheur (« Quand on pense à toutes les perversités qu’ils ont infligées à leurs enfants ! »). Et Éribon s’est contenté d’acquiescer ironiquement : « … et on va essayer de faire mieux ! »

 

Il faut savoir, pour ceux d’entre vous qui ne connaissent pas bien Didier Éribon, que son disque anticlérical, anti-scientifique et victimisant, nourri par les philosophes structuralistes soixante-huitards (Michel Foucault en tête), tourne en boucle depuis trente ans… Il n’a pas l’air de s’en lasser, visiblement (nous, si…) : « La psychanalyse a joué un rôle terrible dans toute cette histoire. » ; « Il faut lutter contre la psychiatrisation de l’homosexualité ! » ; « Dieu soit loué, l’Église ne fait pas régner sa loi en France ! » ; etc. Didier Éribon voit du « discours chrétien » partout, même là où il n’apparaît pas explicitement. Je ne pense pas, par exemple, que les croyants chrétiens aient le monopole de la défense de la famille naturelle traditionnelle et aimante, ou bien que tous les opposants à l’« ouverture » du mariage, à la PMA ou à la GPA soient catholiques ou le fassent pour des raisons strictement religieuses (j’en connais même un grand nombre qui sont athées !). Il faut arrêter qu’il arrête son délire. Ce que les promoteurs du « mariage pour tous » ont du mal à comprendre, c’est que c’est juste humain de s’insurger contre les conséquences graves de certaines lois déconnectées du Réel, de certaines pratiques et manipulations génétiques qui concernent la vie et les êtres humains les plus fragiles. Cela relève du bon sens. Mais non ! Didier Éribon, en bon paranoïaque, refuse d’entendre raison ! La confiance, c’est la soumission ! Son ennemi de toujours, celui auquel il tient énormément, c’est et ce sera le discours « christiano-psychiatrique » (je n’avais jamais entendu cette expression avant… personnellement, j’ai adoré…). De toute éternité ! Comme son ami Daniel Borrillo, il lance sa croisade athée contre les intellectuels, les savants et les psychiatres. Il a même poussé le cri-qui-tue devant toute l’assistance : « Je ne veux pas être pathologisé !! » Du savoir scientifiques, des faits réels, de l’apport des sciences humaines, de l’expérience clinique, du témoignage de terrain à propos de l’encadrement de la petite enfance, nos quatre intervenants font table rase ! « Halte aux études !! » s’est écrié à un moment donné Daniel Borrillo au sujet de la légitimité des statistiques sur l’homoparentalité. Voilà ce qui s’appelle tout simplement de la censure.

 


Civitas, qui se présente comme « chrétien » et maintenant comme « catholique »
 

Néanmoins, le pompon de paranoïa « anti-fasciste » du débat n’est pas venu, comme je l’attendais, de notre quatuor à cordes dissonant préféré, mais d’un de ses alliés, un certain Édouard, jeune homme de 20 ans de l’ENS, placé tout devant, au look paradoxalement très catho intégriste (genre militaire Waffen-SS), que je voyais déjà ricaner pendant la seconde moitié de la conférence dès qu’il entendait un soubresaut de lexique « familialo-judéo-christiano-maçonnique » de la part du public, et dont l’esprit s’est échaudé rapidement suite aux interventions contestataires dans l’auditoire. On l’a vu se lever promptement de son siège, pour faire un esclandre qui restera, j’espère, dans les annales ! Non seulement il s’est mis à bannir purement et simplement tous les gens de la salle qui voulaient juste débattre (les mots de censure qu’ils employaient étaient clairs mais ne se dirigeaient pas à quelqu’un en particulier : « Vous ne faites pas partie du débat !! Vous êtes hors débat !!! »). Le plus drôle, c’est que dans son pétage de plombs tonitruant, il s’est mis à voir des gens de l’Institut Civitas partout (« On voit que Civitas est bien représenté dans la salle !!! »), limite en les pointant du doigt (Pour ceux d’entre vous qui ne connaissent pas, Civitas est une communauté chrétienne dissidente de l’Église, lefevriste, anti-catholique, qui n’obéit ni au Pape ni à Rome). Mes amis présents dans la salle et moi, des catholiques ordinaires (et extraordinaires quand on se laisse habiter par Dieu), on était pris entre rire et consternation. Il était évident qu’il n’y avait pas un seul membre de Civitas présent parmi nous tous (s’il y en avait eu un, on l’aurait déjà entendu au début du temps d’échange !). L’unique individu de l’assistance qui, à la rigueur, aurait eu le look et l’attitude pour faire partie de Civitas (coupe saint Cyr, chemise à carreaux, boy scout blondinet agressif…), c’était bien Édouard (cf. mon N.B. final) ! C’est dur d’être un catho refoulé, quand même…

 

L’amalgame (recherché ?) entre les membres de Civitas (adeptes d’un prosélytisme religieux musclé et ultra-politisé) et les vrais catholiques (pas toujours fins, mais au moins appelés à l’être) arrange deux camps : ceux qui diabolisent l’homosexualité (Civitas en première ligne) en se centrant sur quelques ennemis grossiers – le « relativisme laïcard » et « l’accusation d’homophobie », plutôt que sur « l’homophobie » elle-même – ; puis ceux qui à l’inverse sacralisent l’homosexualité et qui, en invitant Civitas sur les plateaux télé par exemple, ont trouvé leur épouvantail à moineaux idéal, leur proie facile sur qui taper sans passer pour des fachos eux-mêmes, leur « caricature de ‘cathos’ » vivante qui justifiera aux yeux du monde que leur combat pour les droits LGBT est juste, et qu’à l’inverse le discours « ecclésial » sur l’homosexualité est totalement archaïque, inique, bête et méchant. En plus, la communauté homosexuelle a tout à gagner à inviter les chrétiens fondamentalistes intégristes à parler d’homosexualité : au moins, comme ça, le sujet (et toutes les souffrances/violences qu’il recèle) n’est pas traité ; on rigole bien et on s’offusque bien, aussi ; et en plus, ça fait d’excellents audimat ! Bingo ! Vive ces cons du FN et de Civitas ! On va organiser un dîner friendly avec eux !

 

Le pire, c’est que pendant ce « débat », la chasse à l’homme diabolique ne s’est pas limitée à « l’ennemi extérieur ». Selon la logique paranoïaque, l’ennemi extérieur se mute toujours en ennemi interne, deux fois plus traître et plus pernicieux encore que le premier ! D’ailleurs, ne croyez pas que nos quatre théoriciens de l’Amour soient venus la fleur au fusil et qu’ils marchaient main dans la main avec leurs chefs politiques, leurs juges, leurs législateurs, leur président, et même leurs sympathisants. Au contraire ! Ils n’ont pas arrêté, du début à la fin de la conférence, de torpiller « discrètement » leur propre camp politique (= la gauche), de présenter le projet sur le mariage comme une loi-sanction qui lui était destiné, une revanche à prendre face à « l’incompétence » des socialistes qui les ont précédés, un ultimatum, une menace qu’ils n’hésiteront pas à mettre à exécution si par malheur ils ne voyaient pas tous leurs vœux exaucés à la lettre ! Le président Hollande a/aurait promis un cadeau : il n’a plus le choix ! Pistolet dans la tempe, il doit le donner. Et interdit de se rétracter ! : « Il s’est engagé. Sans ambiguïté aucune. Il a réitéré son engagement. » rappelle fermement Caroline Mécary en début de débat. Dans le discours d’Éribon, Benbassa, Mécary et Borrillo, on sentait aussi une pression et un mépris assumés du président et de tous ses ministres : « Il existe du conservatisme à gauche ! […] Qu’on stimule le gouvernement, c’est notre rôle ! Les socialistes avant ne l’ont pas fait ! » (Esther Benbassa) Ils les aimeront tant qu’ils leur seront soumis. Moi, à la place de nos gouvernants, je ne tolèrerai pas un tel chantage.

 


 
 

4 – Le mépris des bénéficiaires officiels du débat

 

Enfin, pour terminer ce compte-rendu d’un « débat qui n’a pas eu lieu », je vous parlerai du point le plus important. Celui qui, à mes yeux, saute aux yeux, qui est le plus choquant. Je veux parler du mépris des « victimes » que ces idéologues-magistrats prétendent aider, mais qu’ils enfoncent encore davantage par des propositions de loi comme celles-ci. Comme dans tout système sectaire et propagandiste de censure, le « débat » proposé au Sénat ce mardi 11 septembre n’avait rien d’un échange démocratique. Et en effet, comment pouvait-il en être autrement, quand même les sujets qu’il s’était proposé d’honorer (les personnes homosexuelles en première ligne ; les enfants dans un deuxième temps) n’ont pas eu le droit à l’expression, à la reconnaissance, n’ont pas été consultés, ou bien ont été sommés d’adopter le discours policé du déni de souffrance et du déni de Réel ? Les rares témoins dans la salle qui ont parlé publiquement des enfants se sont fait renvoyer sévèrement paître. Et les rares personnes homosexuelles qui ont pu s’exprimer devant tout le monde n’ont pas pu/voulu parler de leur homosexualité, de leur mode de vie, des situations complexes que vivent les couples homosexuels en général : elles se sont axées uniquement sur « l’avancée légale de leurs droits » et sur leur « capacité indéniable à se marier et à adopter ». Bref, elles ont joué le rôle qu’on attendait d’elles : celui des victimes « agressivement heureuses d’aimer » et « éternellement insatisfaites ».

 

Pour rentrer dans le détail, j’ai compris avec tristesse en ressortant du Sénat, que les grands oubliés du « débat », les vrais exclus de nos « considérations d’adultes entre adultes », avaient bien été les enfants. Voilà pourquoi les échanges m’avaient paru sur le coup d’une violence objectivement révoltante. En vérité, je peux témoigner que les militants pro-mariage présents dans la salle empêchaient de parler concrètement des enfants. Dès qu’il était question de ces derniers dans la bouche d’une personne du public, cela déclenchait systématiquement chez eux des éclats de rire forcés, une hilarité hystérique, des sarcasmes, des échanges de regards hallucinés, une agressivité incontrôlée, des mystérieuses extinctions de micro. Rien de d’entendre le mot « enfant » (et surtout la périphrase « souffrance de l’enfant ») les insupportait au plus haut point, arrivait à leurs oreilles comme une insulte, même si ensuite, ils lui faisaient les yeux doux dès que celui-ci prenait la forme abstraite du « droit en faveur des homos » : « En tant que législateurs, nous faisons de notre mieux pour que l’enfant soit protégé. » (Esther Benbassa…). C’est le sort réservé à l’enfance qui m’a, je dois l’avouer, le plus choqué lors de cette conférence. C’est le peu de place laissé au traitement des souffrances (paradoxal venant de ceux qui s’en déclarent les ennemis et qui se présentent comme des justiciers sociaux) qui m’a le plus ébahi.

 

Il est extrêmement difficile d’avoir un dialogue raisonnable et constructif avec des gens qui ont quitté à ce point le Réel, qui tournent en dérision des évidences anthropologiques, qui se moquent même du bon sens, qui foncent tête baissée dans le déni de souffrances (parce qu’en réalité, ils ont beaucoup de comptes à régler avec leur propre famille). Par exemple, le fait qu’une personne de l’assistance ose affirmer que le couple homosexuel n’est pas procréatif par nature et qu’il faut nécessairement une gamète mâle et une gamète femelle pour concevoir un enfant, cela déclenchait le sarcasme forcé des « pro-mariage-pour-tous » ; quand on leur rappelait que les divorces créent des dommages dramatiques sur les enfants qui les subissaient sans avoir rien demandé, ils pouffaient de rire (y compris Benbassa et Éribon !) ; et lorsqu’il leur était rappelé que la pluri-parentalité, dans les cas de séparations, risquait à coup sûr d’amplifier chez l’enfant éduqué par deux « papas » et deux « mamans » le drame du divorce, ils tournaient l’exagération de leur détracteur – en réalité, leur propre excès inconscient – en remarque grotesque et « apocalyptique » (Didier Éribon). Bienvenue dans la quatrième dimension… Vous comprenez pourquoi, en ressortant de la salle René Coty, il y avait de quoi avoir les crocs ?

 

Même les professionnels de l’accompagnement de l’enfance ont été la risée de la salle. Quand une intervenante extérieure a osé affirmer, avec une gravité de circonstance, concernant le fait qu’un enfant naisse au sein d’un couple homosexuel, que : « Croyez-moi : les enfants vivent très mal ça… », Didier Éribon s’est contenté de lui répondre cyniquement : « … ça, c’est leur problème ! » Lorsqu’une autre jeune femme de l’assistance, faisant partie de l’association Le Droit de te connaître et travaillant depuis deux ans auprès d’enfants à Paris, a pris la parole pour souligner les graves troubles du langage qu’elle rencontrait quotidiennement chez les jeunes élevés dans des familles « homoparentales » (« Je tire la sonnette d’alarme… », s’est-elle permise de dire), un tonnerre de grommellements bougons et sceptiques l’a accueillie. Allô ? Y avait-il une conscience dans la salle ?

 

Les militants « pro-mariage pour tous ceux qui le désirent » détournent les yeux des vrais problèmes (crise, pauvreté, maladie, souffrance, injustices, deuil, guerres, etc.), pour les remplacer par des soucis annexes qui tiennent majoritairement du caprice, de la plainte déplacée, de l’hypocrisie, de la réclamation « universaliste en intention/particulariste dans les faits ». Concrètement, peu de couples homos auraient voulu se marier, car pour eux, le mariage, c’est le summum de l’institution bourgeoise, du carcan social destructeur, de l’hypocrisie religieuse. Et les rares militants qui le recevront (si la loi vient, par malheur, à passer) le réclament plus par prosélytisme agressif et par sincérité, que par vérité, par conviction personnelle et par respect de la réalité du mariage. Il ne s’agit absolument pas pour eux d’honorer et de perpétuer des traditions qu’ils respecteraient : il s’agit plutôt de travestir et d’affadir les traditions en les substituant par leurs parodies sincérisées.

 

Pourquoi le projet de loi sur le mariage et l’adoption est non seulement inadapté mais en plus dangereux pour les individus directement concernés par lui (= les personnes homosexuelles et les enfants) ? Pour une vulgaire histoire d’attachement angoissé et infondé à des petites représentations mentales figées de la morale, de la vie, de la famille, du bien-être de l’enfant ?? Pas du tout ! Moi, je pense d’abord à la sécurité et à la liberté des personnes homosexuelles elles-mêmes ! Car, à n’importe quelle époque que ce soit, il a toujours été dangereux et dramatique de jouer au jeu de la victimisation, surtout quand nos souffrances tiennent autant de la douleur réellement subie que de l’exagération pour se rendre plus malheureux qu’on ne l’est déjà. Je regrette, mais quand Madame Benbassa annonce comme une évidence que « le refus du droit au mariage est une vraie discrimination », j’ai envie qu’elle aille faire un tour en Haïti, ou dans un pays en guerre, ou même tout simplement qu’elle regarde la France en pleine crise économique, l’Europe du chômage… et après, on verra si elle classe le droit au mariage pour les couples homosexuels qui le « voudraient » (splendide conditionnel employé accidentellement par Didier Éribon… j’adore les lapsus révélateurs…) au rang des priorités et des urgences de la Nation ! Nous rendons-nous compte des priorités, justement ? Il a l’air de quoi, le pataquès autour de ce pauvre projet de loi sur le mariage, loi ne concernant objectivement qu’une poignée d’intéressés, qui, il y a dix ans de cela, ne souffraient absolument pas de ne pas pouvoir se marier et de ne pas avoir d’enfants, avant que le phénomène ne devienne à la mode et ne se radicalise en slogan politique pro-gay, en plainte singée de la « discrimination homophobe » ? Mais dans quel monde virtualisé vivons-nous ?

 

Quand on se pose en victimes alors qu’il y a largement plus malheureux et nécessiteux que nous, et que nous sommes bien souvent les artisans de notre propre malheur (la communauté homosexuelle en est le parfait exemple : cf. je vous renvoie aux codes « milieu homosexuel infernal » et « homosexuel homophobe » de mon Dictionnaire des codes homosexuels), quand on prend la place des vrais pauvres de la société, des sans-voix, on s’expose sur le long terme non seulement au ridicule mais aussi (beaucoup plus grave) aux jalousies, aux critiques, à la dette, à la soif de vengeance de ceux qu’on a écrasés pour que notre dossier soit placé sur le haut de la pile dans le bureau du magistrat (magistrat qu’on a préalablement soudoyé par nos larmes de crocodile, qu’on a menacé en brandissant sur lui le spectre de l’« homophobie »), à la vindicte populaire, à un retour de bâton sans précédent sur la communauté homosexuelle. Comprenez bien que c’est d’abord au nom de la menace grandissante d’homophobie qui pèse sur les personnes homosexuelles (la vraie, celle qui tue vraiment des personnes homosexuelles au fin fond d’une cave ou dans coin de jardin public, celle qui est portée par exemple par des courants fondamentalistes islamistes, entre autres ; pas « l’homophobie catholique » qu’on nous montre bêtement à la télé), et non au nom d’un attachement arbitraire à de « jolis » principes familialistes et religieux ancestraux, que je m’oppose fermement à ce projet d’« ouverture » du mariage à toutes les personnes qui le désirent (y compris aux personnes non-homosexuelles irresponsables !). Car si nous fuyons le Réel et nions les souffrances humaines – ce que fait concrètement ce pré-projet de loi de Madame Taubira, il faut le dire –, l’écrin d’Amour qu’aurait dû être (et qu’est dans certains cas de couples femme-homme qui s’aiment vraiment) le mariage, se métamorphosera en boîte de Pandore. Par la violence déraisonnée qui s’est déchaînée lors de ce débat au Sénat mardi (et qui s’est conclue par la rigolade sinistre d’un « verre de l’amitié »…), nous en avons l’illustration. Ne laissons pas nos législateurs jouer par « compassion » aux savants fous flattant les intérêts particularistes d’une minorité de la population qu’ils manipulent et qui ne travaille pas assez au bien commun. C’est l’avenir de l’Humanité dont il est question.

 

(Et je rappelle à ceux qui trouveraient ma dernière phrase risible, grandiloquente, alarmiste, millénariste, que le mot « Humanité » n’est pas référencé comme un gros mot ou une insulte dans nos Dictionnaires de langue française. En tous cas pas encore…)

 
 

N.B. daté du 14 janvier 2014 : Un peu plus d’un an et demi après, je découvre que celui qui s’était hystérisé contre les Civitas et que j’avais totalement par hasard rebaptisé « Édouard » pour cet article n’était autre que le véritable Eddy Bellegueule, le jeune romancier qui a écrit le roman En finir avec Eddy Bellegueule, et qui s’est choisi comme pseudonyme d’auteur « Édouard Louis ». Incroyable intuition ou ironie du sort, non ?

Faut-il être nécessairement antipathique pour « être » lesbienne ?

(Je précise avant de commencer que cet article ne traite pas uniquement des femmes lesbiennes « butch« , c’est-à-dire cultivant un genre masculin : il parle et s’adresse justement aussi aux femmes lesbiennes féminines. J’apporte cette précision au cas où certains voudraient se désolidariser de mes propos du simple fait qu’ils s’imaginent que l’antipathie lesbienne serait exclusive aux femmes lesbiennes camionneuses et proportionnelle au degré de masculinité que les femmes lesbiennes cultivent. On peut être une femme lesbienne féminine ET antipathique : si si)

 

 

Rien qu’avec un titre pareil, je risque de me faire taxer de connard lesbophobe et misogyne d’office. Et j’en frétille d’avance !… car par son aspect caricatural et volontairement absurde, il est tellement une fausse question qu’il mérite à peine qu’on y réponde. Cette interrogation est plutôt faite pour qu’on l’encadre dans les toilettes afin d’amuser ceux qui tomberont par hasard dessus, pour qu’on la soumette en tête à tête à chaque femme qui se dit lesbienne pratiquante, comme une « grosse blague pas drôle » permettant de s’afficher mutuellement nos dentitions qu’on croyait à tort catastrophiques et laides, comme une réelle occasion amicale de démasquer un rôle, des peurs, des complexes, une blessure, une fausse assurance, la théâtralité de notre misandrie (= la haine des mecs) et de notre misanthropie (= la haine des humains en général). Oui, ce titre, tout provocant et piquant qu’il semble être, s’il est accueilli sans révolte et compris dans son second degré, peut dérider, mine de rien, beaucoup de gens qui se prennent trop au sérieux, et desserrer bien des string ! Moi, j’y crois !

 

 

Rassurez-vous, je ne pense pas qu’il faille être obligatoirement désagréable pour se dire lesbienne. Je connais suffisamment de femmes lesbiennes délicieuses, sympathiques, et ayant du recul sur la « Goudou Attitude », pour en être persuadé, et oser avec elles la correction fraternelle. En revanche, que ma question, sans être une affirmation, induise aussi un coup de gueule sérieux, une dénonciation face à une tendance comportementale inadmissible que j’ai observée à diverses reprises, et qui ne stigmatisera pas pour autant une catégorie de personnes précise (« les » lesbiennes, en l’occurrence), pas plus qu’elle ne dressera de généralités sur le lesbianisme, je ne peux pas le nier ! J’ai des choses à dire à mes camarades lesbiennes. Qu’elles le prennent mal ou non, j’ai des choses à leur dire.

 

 

Mal baisées, celles qui s’autodésignent parfois comme « gouines » ? Pas baisables ? Disgracieuses (voire carrément moches) ? Féministes radicales ? Vulgaires ? Crades ? Sans gêne ? Chiennes de garde ? Percées et tatouées de partout ? Croqueuses d’hommes et de femmes ? Putes ? Prostituées ? Rebelles ? Bûcheronnes ? Pas super drôles et affables ? Peu féminines ? Rondouillardes ? Droguées ? Alcooliques ? Brutales (voire criminelles) ? Mythomanes ? Possessives et psychopathes en amour ? Sadomasos ? Sauvages et indépendantes ? Bobos ? Bisexuelles ? Mal dans leur peau ? Autoritaires ? Femmes à poigne « ayant réussi l’amalgame de l’autorité et du charme » ? Ni oui ni non. Comme tout cliché attribué à des êtres humains, il contient une part de réalité qui ne sera jamais personnifiable, généralisable, absolue, mais juste probable, actualisable selon qu’on l’affronte ou pas. En revanche, trouillardes, bourrées de complexes, crispées, et pour le coup, possiblement agressives, là, je dis oui. Comme pour toute personne humaine qui joue la fière et la dure pour nier ses souffrances.

 

 

Les femmes lesbiennes, à l’instar des féministes et des prostituées, sont une catégorie de femmes qui nous prouve qu’on peut tout à fait être machiste sans être un mec. Le machisme, ce n’est pas fondamentalement une question de genre sexué. Il est humain, et peut être porté aussi bien par des hommes que par des femmes, d’autant plus les femmes lesbiennes, qui sont connues pour cacher leurs fragilités sous une carapace d’assurance cinématographique machiste. Le machisme n’est pas autre chose que la négation/diabolisation de ses limites et de ses faiblesses humaines, qui se résout généralement en refus de l’altérité sexuelle et en viol. Si l’accouplement lesbien ne dégageait aucune violence, il n’aurait pas envahi à ce point-là l’univers machiste du porno. Si les couples lesbiennes étaient vraiment aimantes et douces, elles auraient accueilli la différence des sexes ; elles favoriseraient davantage la mixité dans leurs cercles relationnels amicaux et amoureux, ce qui n’est franchement pas le cas. Minorité dans la minorité, elles jouent de leur double statut d’« exclues » (en tant que femmes et en tant que lesbiennes) pour s’isoler encore plus des hommes non-homosexuels (et des hommes gay en particulier), et pour radicaliser/consolider leur sexisme. Beaucoup d’entre elles n’ont aucune sympathie pour les « folles », ni pour les hommes que les personnes gay représentent. En général, ces derniers ne gardent de la femme lesbienne que l’image d’une Josiane Balasko qui les bouscule dans les bars sans même s’excuser, qui ne leur adresse pas la parole quand elle débarque dans leur groupe d’amis, qui ne fait la bise qu’aux filles (véridique ! C’est du vécu), qui les chasse de leurs universités, colloques, week-end « entre filles », festivals de cinéma, réseaux de rencontres, … sans parler de leur sexualité (cela va de soi !).

 

 

Que les choses soient claires. Si le couple lesbien (tout comme le couple gay) et les femmes lesbiennes ont du mal à être acceptés socialement, et font violence à beaucoup de monde, ce n’est pas pour des prunes. Le couple lesbien est le signe d’une exclusion radicale : une exclusion non de la féminité (il y a des femmes lesbiennes très féminines, baptisées fem), non de la maternité (il existe des femmes lesbiennes qui sont mères), mais de la différence des sexes désirante, autrement dit de LA condition de notre existence et de notre bonheur sur Terre. Une exclusion de l’autre moitié de l’Humanité, excusez du peu ! Et ça, c’est objectivement violent et discriminant, que les femmes lesbiennes le reconnaissent ou non. Par conséquent, que les héritières des belliqueuses amazones ne s’étonnent pas de susciter ensuite l’indignation autour de leurs couples, de s’attirer les foudres de leurs contemporains, et de passer pour violentes, iniques et antipathiques !

 

À leur décharge, il faut bien reconnaître aux femmes lesbiennes une inégalité de traitement et de nature avec les hommes, et au lesbianisme une précarité qui peut rendre les couples lesbiens objectivement plus fragiles, moins crédibles, et par conséquent plus volontaristes et plus agressifs que les couples gay (… encore que, au bout du compte, cette inégalité est une illusion d’optique, car la violence vécue dans les couples d’hommes sera tout aussi présente, sauf que cette fois, elle ne viendra pas de l’autre sexe : elle s’effectuera entre amants de même sexe. Dans les cas gay comme lesbien, on voit que ce n’est pas la différence des sexes qui fait violence, mais le rejet de celle-ci par l’homosexualité pratiquée). Mais en effet, à priori, comparé aux couples lesbiens, les couples d’hommes ont moins à subir de sollicitations à changer de bord (ils sont par exemple peu exposés aux viols correctifs de la part des membres de l’autre sexe : s’ils se violent, ce ne sera qu’entre eux ; par ailleurs, ils ne se font pas lourdement draguer en boîte), moins à prouver leur homosexualité (du fait de la soi-disant « passivité » des femmes par rapport à la soi-disant « activité » des hommes lors des coïts humains classiques ; du fait aussi de la plus grande capacité des femmes à simuler pendant l’acte sexuel – un homme qui ne bande pas devant la femme avec qui il couche, c’est plus décisif et problématique !), moins un passé « hétéro » à porter (contrairement aux filles lesbiennes, la plupart des garçons gay n’ont jamais goûté à une fille avant de se lancer tête baissée dans des relations amoureuses exclusives avec leurs semblables). De plus, on considèrera davantage le lesbianisme comme une passade, un entêtement gratuit, un caprice, une ignorance des plaisirs de la sexualité dite « naturelle », que l’homosexualité masculine. Socialement, on accorde aux couples d’hommes, à tort j’en conviens (c’est juste qu’ils sont anatomiquement plus armés pour cacher/justifier leur fuite de la différence des sexes), plus de crédit qu’aux couples de femmes parce que les accouplements des femmes entre elles sont par nature moins excluants que les accouplements d’hommes (par exemple, dans les films pornos, les ébats lesbiens ne sont en général qu’un gentil préliminaire pour laisser place à l’achèvement de l’orgasme par l’homme ; à l’inverse, on imagine mal le coït entre hommes conclu par l’arrivée d’une femme ! : en cela, l’homosexualité masculine donne l’illusion, dans l’inconscient collectif, d’être beaucoup plus achevée, irréprochable, indiscutable, que l’homosexualité féminine). Cela dit, la fragilité du lesbianisme, même si elle est plus visible, et apparemment plus disqualifiée socialement que l’homosexualité masculine (qui sera autrement plus fragile et qui se disqualifiera d’elle-même), n’excuse en rien l’agressivité misandre et sexiste de certaines femmes lesbiennes : les hommes n’ont pas choisi d’être homme, pas plus que les femmes n’ont choisi de naître femmes, jusqu’à preuve du contraire ! Je ferme ici la parenthèse de la victimisation des unions saphiques.

 

 

Même si les femmes lesbiennes ne sont bien évidemment pas toutes infectes du point de vue de l’attitude et du comportement (d’ailleurs, au final, je constate qu’elles ne deviennent désagréables que lorsqu’elles pratiquent leur homosexualité ; alors que prises individuellement, elles sont des filles géniales, agréables, drôles, libres, beaucoup plus épanouies que lorsqu’elles se forcent à vivre en couple lesbien), j’en connais un paquet qui sont râleuses, agressives, pessimistes, amères, grognonnes, mécontentes, rarement joyeuses (vous avez déjà réussi à voir un sourire radieux sur le visage d’une Caroline Fourest, par exemple ? Le jour où ça arrive, téléphonez-moi : 06 84 26 15 58), sexistes, misandres, racistes, franchement hautaines, désagréables, parfois hystériques et brutales, sans humour, opportunistes (souvent, elles se rapprochent des garçons uniquement quand ils peuvent leur servir d’appât pour draguer une fille en soirée, ou bien par intérêt matériel, législatif, professionnel, ponctuel). Il n’est absolument pas question ici de jugement de personnes, de considérations de nature ou de beauté physique (un laideron peut être beau uniquement parce qu’il est aimable) : je ne parle que de laideur d’attitude, que de mauvais usage de sa liberté, et de comportements. Quand je me retrouve face à une femme lesbienne désagréable, au bout d’un moment, j’ai juste envie de la regarder dans le blanc des yeux (quand c’est possible… car c’est souvent un bel exploit d’arriver à capter un regard aussi fuyant que le sien !), et de lui dire : « C’est QUOI, ton problème ? Est-ce qu’il faut que la Terre entière, et les méchants ‘mâles’ que je représente visiblement à tes yeux, paient pour ta mauvaise humeur, et surtout ton mépris de toi-même parce que tu diabolises tes fragilités ? Ça va durer combien de temps, ta comédie, ta peur des hommes, ta sacralisation des femmes, ton jeu de « fausse dure » que rien ne touche ? »

 

L’antipathie d’indifférence que l’on retrouve chez beaucoup de femmes lesbiennes (même si elle n’est pas propre au lesbianisme : faut pas exagérer non plus) s’explique assez bien : l’attirance amicale qu’aurait créée l’attraction sexuelle avec les membres de l’autre sexe n’est plus là. On se rend vite compte qu’entre femmes lesbiennes et hommes gay, ce manque de complémentarité symbolique des désirs sexuels influe même dans la qualité des relations simplement amicales. Chacune des parties a l’impression de passer bien après la recherche d’amant(e)s de l’autre, et de servir de « bouche-trou » lors des soirées. Pour le coup, la déférence gay envers les femmes lesbiennes vire souvent à une parodie de galanterie ou de copinage, qui indique parfois l’existence des braises d’un incendie qui ne demande qu’à s’étendre. La femme lesbienne et l’homme homosexuel simulent l’harmonie parfaite. En réalité, ils ne font que différer le moment de leur affrontement réel. Tant que leurs conquêtes pour les « droits sociaux des homos » ne cesseront de s’accumuler, ils joueront la comédie de l’amitié. Une fois qu’ils n’auront plus besoin l’un de l’autre et qu’ils auront souri ensemble pour la photo, ils risquent de se jeter/s’anéantir mutuellement s’ils ne travaillent pas ensemble à démasquer les ambiguïtés violentes de leur désir homosexuel. C’est déjà ce qui est en train de se produire, rien qu’en observant le fossé grandissant qui s’est creusé en seulement dix ans entre la communauté gay et la communauté lesbienne, qui passent de moins en moins de temps ensemble, dans des lieux communs.

 

 

« Quel gâchis ! » serais-je alors tenté de dire. Pas dans le sens génital ou conjugal de l’expression, mais déjà simplement amical et humain. Car l’agressivité réciproque entre femmes lesbiennes et hommes gay, ou même l’indifférence mal lunée/apathique de beaucoup de femmes lesbiennes à l’égard de leur entourage, signent toujours un constat d’échec de l’amitié, une victoire de l’isolement, de la misanthropie, et de la peur… et ça, c’est un peu désespérant. Pourtant, à de rares occasions, et dans le privé, il arrive que quelques femmes lesbiennes expriment le besoin d’avoir une bande d’amis garçons, même si elles soupirent à chaque fois qu’elles voient débarquer les groupes de « mâles » dans « leurs » bars.

Alors, oui, même si l’exclusion qui sévit dans le milieu lesbien, et qui surgit du milieu lesbien, ne m’empêche pas de dormir, j’ai envie de croire en cette « fausse indifférence » à l’encontre de la différence des sexes dont parlent la psychanalyste Virginie Mouseler, ou encore l’écrivain Philippe Besson dans son roman Un Garçon d’Italie (2003).

 

Et je finirai mon papier par une « spéciale dédicace » à nos amies lesbiennes qui me lisent à présent et qui auront eu le courage surhumain (l’humour surtout !) d’arriver jusqu’au bout de ce Phil de l’Araignée :

 

Les filles, ne vous sentez pas obligées d’être antipathiques et de jouer les bad girls pour (vous) plaire : ce n’est ni esthétique, ni séduisant. Je vous dis cela à la fois ironiquement et très sérieusement, parce que, aussi paradoxal que celui puisse paraître, beaucoup d’entre vous nourrissez l’illusion que le mal/mâle sur votre corps de femme est magnifique (comme moi j’ai longtemps imaginé que l’imitation de la femme-objet fatale et hautaine sur mon corps d’homme était beaucoup plus attrayante que ma propre sexuation, et qu’elle sublimait cette dernière). Cessez de croire que la noirceur de la courtisane saphique, du cow-boy statique et glacial, est la plus belle déclaration d’attraction qui puisse exister entre filles (« Les lesbiennes font la gueule pour draguer. », cf. la revue Têtu, n° 127, novembre 2007, p. 108), que la méchanceté machiste est d’un esthétisme ravageur. Je vous assure que tout cela est une illusion d’amour et de séduction : pour plaire et aimer vraiment, la grâce et la gentillesse, ça marche tout aussi bien (… voire mieux !). Il paraît même que ça facilite et adoucit la vie 😉 Alors si on n’arrêtait, au moins un court instant, tous ensemble, la comédie de la condescendance sexiste ?