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Code n°11 – Animaux empaillés (sous-codes : Taxidermiste homo / Bestiaire / Homme-animal / Zoophilie)

animaux empaillés

Animaux empaillés

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

J’ouvre ici le dossier surprenant des animaux empaillés et des taxidermistes dans les créations artistiques parlant d’homosexualité. Comment se fait-il qu’on en voie autant dans les films et les romans ? Y a-t-il un lien entre homosexualité et animalité, ce lien qui fait tant peur à la communauté homosexuelle – puisque le spectre de la zoophilie refait surface –, mais auquel elle tient beaucoup parce qu’elle cherche à prouver que le désir homosexuel est naturel et que l’amour homo est bon, instinctif, évident ?

 

Ce qui est sûr, c’est que le fait de vouloir figer ainsi Mère-Nature pour s’en rendre créateur, comme le fait le taxidermiste avec ses animaux morts, c’est un projet osé, qui n’apparaît pas d’emblée comme particulièrement scandaleux ou violent aux yeux de celui qui l’entreprend. En effet, par l’art, l’audiovisuel, les progrès techniques, et les bonnes intentions, on croit magnifier la Nature, L’immortaliser, Lui donner un second souffle, en Lui enlevant de surcroît ses aspérités et ses finitudes. Ceci n’est vrai que sur le terrain des intentions, car concrètement parlant, il se trouve qu’en La réifiant, on La dévitalise vraiment, on La tue. Mettez la Nature sous verre ou en cage, et Elle meurt de ne pas être libre. Nous ne sommes que des créatures et non Créateur. Comme nous n’avons pas ce pouvoir divin d’insuffler la vie aux êtres vivants, notre entreprise de possession de la Nature se révèle bien souvent désastreuse et monstrueuse. Il n’y a qu’à se fier aux visages grimaçants et effrayants (dignes des plus célèbres films d’épouvante !) qu’affichent les animaux empaillés du taxidermiste des fictions homosexuelles, pour en avoir la confirmation ! Il n’y a qu’à voir l’effet refroidissant et déshumanisant des animalisations d’êtres humains, pour comprendre que c’est quand l’Homme rejoint l’animal qu’il devient le plus inconsciemment machinal et violent.

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Cannibalisme », « Coït homosexuel = viol », « Désir désordonné », « Entre-deux-guerres », « « Plus que naturel » », « Jardins synthétiques », « Chiens », « Chat », « Aigle noir », « Araignée », « Femme-Araignée », « Corrida amoureuse », « Cheval », « Poupées », « Adeptes des pratiques SM », « Clown et Masques blancs », « Ennemi de la Nature » et « Fantasmagorie de l’épouvante », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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FICTION

 

a) Le taxidermiste homosexuel est un personnage habituel des fictions homo-érotiques :

Norman Bates dans le film "Psychose" d'Alfred Hitchcock

Norman Bates dans le film « Psychose » d’Alfred Hitchcock


 

On retrouve des taxidermistes ou des animaux empaillés dans le film « Exotica » (1994) d’Atom Egoyan, les films « Psychose » (1960), « L’Homme qui en savait trop » (1955), et « Les Oiseaux » (1963) d’Alfred Hitchcock, la pièce Jerk (2008) de Dennis Cooper, le film « L’Étrange Monsieur Peppino » (2003) de Matteo Garrone, la chanson « Tigre de porcelaine » de Jean Guidoni, la pièce La Ménagerie de verre (1944) de Tennessee Williams, la chanson « Des gens stricts » du groupe Animo (où la discothèque ressemble à un Muséum d’Histoire Naturelle), le one-man-show Chroniques d’un homo ordinaire (2008) de Yann Galodé (avec le moineau statufié), le vidéo-clip de la chanson « Sobreviveré » de Mónica Naranjo, le film « Le Génie du mal » (1959) de Richard Fleischer, la pièce String Paradise (2008) de Patrick Hernandez et Marie-Laetitia Bettencourt, le film « Insatisfaites poupées érotiques du professeur Hitchcock » (1971) de Fernando Di Leo, le film « Cher Disparu » (1965) de Tony Richardson (avec l’embaumeur), le film « Sex Revelations » (2000) de Jane Anderson (avec la passion du couple lesbien pour les oiseaux), le téléfilm « Marie Besnard, l’Empoisonneuse » (2006) de Christian Faure (avec Monsieur Leclerc et son salon rempli d’animaux empaillés), la pochette de l’album Bijoux et babioles de la chanteuse Juliette, la pièce Les Fugueuses (2007) de Pierre Palmade et Christophe Duthuron (avec le chien empaillé), le roman Deux femmes (1975) d’Harry Muslisch (avec la chouette-bijou), le film « Hush ! » (2002) de Ryosuke Hashiguchi (avec le coiffeur animalier homo), le film « Un autre homme » (2008) de Lionel Baier (avec le renard mort tué par François), le film « Harvey Milk » (2009) de Gus Van Sant (avec la passion pour les oiseaux et les chats), le film « Les Biches » (1967) de Claude Chabrol (Jacqueline Sassard dessine des biches sur le Pont des Arts), le film « Hôtel Woodstock » (2009) d’Ang Lee (avec la biche en bois), le film « Dans le village » (2009) de Patricia Godal (avec les cochons sauvages), le roman The Well Of Loneliness (Le Puits de solitude, 1928) de Marguerite Radclyffe Hall (avec le renard empaillé du Colonel Antrim, ainsi que l’énorme peau d’ours polaire surplombée d’une tête empaillée appartenant à Stephen), la pièce Les Oiseaux (2010) d’Alfredo Arias, le concert Le Cirque des mirages (2009) de Yanowski et Fred Parker (avec le Dr Lebrun, taxidermiste), le film « Monster Butler » (2013) de Doug Rath (avec Wiggy, le taxidermiste, qui aidera Roy Fontaine, le criminel homosexuel, à effectuer ses meurtres), le film « Lilting » (« La Délicatesse », 2014) de Hong Khaou (dans la déco de la maison des amants Richard et Kai), la pièce La Belle et la Bière (2010) d’Emmanuel Pallas (avec Léo, le taxidermiste homo), le film « La Vie privée de Sherlock Holmes » (1970) de Billy Wilder (et l’oiseleur avec des canaris), le film « L’Ornithologue » (2016) de João Pedro Rodrigues, la chanson « Monsieur Vénus » de Juliette (avec l’amante lesbienne empaillée) ; etc.

 

Par exemple, dans la pièce « Copains navrants » (2011) de Patrick Hernandez, Grégoire, le cousin homosexuel de Vivien vivant à la campagne, est taxidermiste : « Il empaille les animaux. Il a toutes sortes de bêtes dans sa maison. » explique Vivien. Il est suspecté d’être un « Rural Killer » par Stéphane, un des amis homos de Vivien. Dans le film « Serial Mother » (1994) de John Waters, Madame Sutphin est fanatique des oiseaux et lit des ouvrages ornithologiques. Dans la comédie musicale La Nuit d’Elliot Fall (2010) de Vincent Daenen, la grande folle cruelle, le Baron Lovejoy, vit entouré de ses « camarades empaillés ». Théron est collectionneur d’oiseaux dans le film « Celui par qui le scandale arrive » (1960) de Vincente Minnelli. Dans la pièce Le Clan des divorcées (2008) d’Alil Vardar, Brigitte, l’homme travesti, parle d’empailler des hommes. Dans la pièce Coming out (2007) de Patrick Hernandez, Jeannot affirme que « Les Oiseaux » d’Hitchcock est son film préféré. Brian, dans le film « Mysterious Skin » (2004) de Gregg Araki, se retrouve face au cadavre pétrifié d’une vache morte. Dans le film « Prisonnier » (2004) d’Étienne Faure, la maison de Julien est remplie d’oiseaux empaillés. Dans le roman Deux Femmes (1975) d’Harry Muslisch, Laura et Sylvia décident d’aller au zoo exprès pour « se prendre en photo avec les animaux » (p. 43) : Laura choisit les oiseaux ; Sylvia, les reptiles. Dans le one-woman-show Vierge et rebelle (2008) de Camille Broquet, Camille, l’héroïne lesbienne, « a l’impression d’être un oiseau ivre ou mort ». Dans le one-man-show Entre fous émois (2008) de Gilles Tourman, Jarry ne se remet pas de la mort son animal de compagnie : « J’ai retrouvé Canardo sur le buffet du salon. Il avait été empaillé ! » Dans le roman À ta place (2006), Cécile, l’héroïne lesbienne, a, elle aussi, une drôle de surprise quand elle revient dans la domicile familial : « Je retournais de temps en temps chez mes parents, ils essayaient de rattraper les choses. La perruche morte, ils avaient acheté des oiseaux postiches, de cire et de plumes, c’était macabre. » (p. 78) Dans le one-woman-show La folle parenthèse (2008) de Liane Foly, c’est précisément au moment où la figure de Jeanne Moreau tient une conversation avec son ami homosexuel Pedro qu’elle lui parle de taxidermie : « Pedro, qu’en pensez-vous ? Je vais me faire empailler. » Dans le roman Le Crabaudeur (2000) de Quentin Lamotta, le jeune narrateur fait un drôle de cauchemar : « Une fois, j’ai réveillé tout le monde tellement j’ai crié fort. Je me rappelle que c’était à cause d’une pluie d’oiseaux morts qui tombaient sur moi. » (p. 14) Dans le film « New York City Inferno » (1978) de Marvin Merkins, Paul se rend chez un amant taxidermiste, un peu marabout, possédant chez lui des animaux empaillés, des têtes de sanglier, de cerf, d’oiseaux inquiétants. Dans le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha, on voit Gabriel courir comme une folle perdue dans la forêt autrichienne : il tombe nez à nez sur une sculpture de cerf transpercée de flèches. Dans la pièce La Famille est dans le pré (2014) de Franck Le Hen, la mère de Tom (le héros homo) possède un canard en plastique. Tom a enterré son lapin, sa poule, son chien. Et la mamie a continué le trafic d’animaux : « Pour le chien, j’ai revendu ses vêtements et fait un cerf-volant avec sa peau. »… même si elle conclut : « On n’est pas au Musée Grévin ! » Dans la pièce Les Faux British (2015) d’Henry Lewis, Jonathan Sayer et Henry Shields, Thomas, le héros homosexuel, se retrouve à un moment prisonnier de deux animaux empaillés censés être fixés au mur du manoir. Dans le film « Les Crevettes pailletées » (2019) de Cédric le Gallo et Maxime Govare, l’équipe de water-polo gay mange dans un restaurant autrichien avec plein d’animaux empaillés, et loge dans une auberge également remplie d’animaux morts. Jean, le capitaine, se réveille même en serrant une tête de cerf empaillée contre lui. « La queue du crocodile est très recherchée dans le commerce de luxe. » Dans la pièce Drôle de mariage pour tous (2019) de Henry Guybet, Raymond, le personnage homo refoulé, fait du « commerce de peaux » avec l’Australie. Dans le film « See How They Run » (« Coup de théâtre », 2022) de Tom George, le très homosexuel Mervyn fait passer son amant italien pour son « neveu » pour cacher leur homosexualité. Et ce Gio est taxidermiste.

 

Appliqués au couple homo, les animaux empaillés peuvent signifier deux choses : d’une part, le désir de fusion et de possession de l’autre (… qui se traduira souvent par une infidélité entre partenaires) : « Exactement comme les chats portent leurs chatons, tu t’occupes de moi comme un animal de compagnie » (Judy Minx dans son one-woman-show au 3e Festigay au Théâtre Côté Cour en avril 2009) ; « Il [Adrien] considérait la fidélité sous un jour nouveau. La sexualité masculine conservait toujours quelque chose d’animal. Ni la tendresse ni l’amour – ce que transmettent les femmes – ne parvenaient totalement à dompter la puissance d’un désir brut, primitif, captivant. Ce désir de pénétrer et d’envahir la différence de l’autre ; de ne pas laisser la proie s’échapper. Car c’est elle, la proie, qui donne l’impression d’exister mieux. Elle est comme une extension de soi, un poids ajouté au sien. Certains ont le goût de l’argent, d’autres du pouvoir et d’autres encore de conquérir les corps et parfois les âmes avec. » (Hugues Pouyé, Par d’autres chemins (2009), p. 51) ; et d’autre part, la bestialité dans les rapports charnels : « C’est un masochiste anal ! Il baise comme un animal ! » (Mimi en parlant de Pédé dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) Par exemple, dans la pièce Le Fils du comique (2013) de Pierre Palmade, Pierre s’avoue animal avec son amant Benjamin : « S’il y en a qui connaît l’animal qui est en moi, c’est bien toi, non ? » Et il dira de lui : « Il n’est gentil qu’avec les animaux, j’ai remarqué. » Même si le fait de se faire empailler ressemble à un élan fétichiste valorisant et positif – le protagoniste s’embaume et se dorlote comme une momie –, il exprime souvent un sentiment d’abandon et un désir de mort : « À moins que je finisse dans un musée et que je me fasse empailler. » (Didier Bénureau dans son spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons, 2012)

 

Jean Marais et son chien

Jean Marais et son chien


 

L’animal empaillé est cet amant que le personnage homosexuel fait parler, sur qui il projette ses fantasmes amoureux les plus narcissiques, les plus réifiants : « Stephen commençait à s’abandonner à des rêveries kaléidoscopiques […]. Des chiens de porcelaine… Il y a, chez Langley, de jolis chiens de porcelaine… Cela fait penser à quelqu’un… oh, oui, à Collins, naturellement. » (Stephen la lesbienne parlant de sa nourrice Collins, dans le roman The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928) de Marguerite Radclyffe Hall, p. 47) ; « Quand je l’ai vu dans sa cage à l’animalerie, j’ai eu envie de le rendre heureux. Ce qui m’a le plus retourné, c’était son regard de mendiant. Il avait l’air tellement triste… Il était immobile. Il n’aboyait pas mais il me suppliait. Enfin, c’est ce que j’ai cru. » (Bryan, le héros homosexuel, en parlant de son chien Nicky, dans le roman Si tu avais été…(2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 68 ; d’ailleurs, quelques pages plus loin, Bryan dira cette fois à son amant humain Kévin : « Tu es irréel et moi animal. », p. 212) ; « Et puis après, il va l’empailler. » (Bernard, le héros homosexuel, en parlant de la « bite » du trans M to F Géraldine, dans la pièce Nous deux (2012) de Pascal Rocher et Sandra Colombo) ; « Mon p’tit doigt me dit que t’étais branché nounours… » (Martin, hétéro, s’adressant à son pote gay Simon, dans le film « Love, Simon » (2017) de Greg Berlanti) ; etc.

 

Les animaux empaillés – mais ce que je vais dire est une évidence – indiquent également que le désir homosexuel est un élan infantilisant/puéril. Par exemple, dans le film « Guillaume et les garçons, à table ! » (2013) de Guillaume Gallienne, lorsque le psychiatre présente à Guillaume, le héros bisexuel, un dessin d’un papillon, ce dernier y voit « deux rats qui se mangent »… restant ainsi sur le registre de la fusion infantile. Dans le film « Toute première fois » (2015) de Noémie Saglio et Maxime Govare, l’un des héros homosexuels, le peintre d’art contemporain, se fait surnommer « Nounours ». Il est fréquent dans les œuvres homosexuelles que les héros parlent à leur peluche comme si elle était leur amoureux (comme Steevy Boulay avec son Bourriquet !) : cf. la chanson « Parler tout bas » d’Alizée (« Je voudrais dire, pas pour de rire, même si c’est con, ‘Je l’aime lui. »), le vidéo-clip de la chanson « Je suis gay » de Samy Messaoud (avec les peluches), etc. Ils symbolisent à mon sens le désir d’être objet. Par exemple, dans la nouvelle « La Carapace » d’Essobal Lenoir (publiée dans le recueil Le Mariage de Bertrand, 2010), le protagoniste homo rêve d’un vieillard qui le fixe du regard comme s’il faisait partie d’une collection d’animaux empaillés : « La nuit, je m’imaginais hypnotisé, épinglé dans ses collections, entre un papillon et une mygale. » (p. 14) ; « Tu es peut-être tout simplement dans ta chambre, avec cet ours stupide qui te regarde. Il ne connaît pas son bonheur ! Il veille sur toi depuis si longtemps. J’aimerais tellement être à sa place. » (Bryan s’adressant à son amant Kévin dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 303) ; etc.

 
 

b) Les animaux sont mis sous verre dans un musée, ou exposés sous forme de bestiaire dans la collection du personnage homosexuel :

Dany dans le film "Xenia" de Koutras

Dany dans le film « Xenia » de Koutras


 

Même si cela peut paraître très étonnant, il est souvent question de bestiaires et d’animaleries quand le sujet de l’homosexualité est traité dans les fictions. Pensez au roman Les Bestiaires (1926) d’Henri de Montherlant, au film « Zoolander » (2003) de Ben Stiller, au film « Toto Che Visse Due Volte » (« Toto qui vécut deux fois », 1998) de Daniele Cipri et Francesco Maresto (où zoophilie et homosexualité se marient sans problème), à la pièce The Zoo Story (1958) d’Edward Franklin Albee, au film « Jin Nian Xia Tian » (« Fish And Elephant », 2001) de Yu Li (avec la gardienne du Zoo de Pékin), au film « Garçon stupide » (2003) de Lionel Baier (qui débute au Muséum d’Histoire Naturelle), au film « Zéro Patience » (1993) de John Greyson (toujours avec le Muséum d’Histoire Naturelle), à l’opéra Le Carnaval des Animaux (1886) de Camille Saint-Saëns, à la pièce L’Autre Monde, ou les États et Empires de la Lune (vers 1650) de Savinien de Cyrano de Bergerac, au roman Le Livre de la Jungle (1894) de Rudyard Kipling, au film « Je t’aime toi » (2004) d’Olga Stolpovskay et Dmitry Troitsky (l’un des héros homos travaille au zoo), à la pochette de l’album Histoires naturelles (2005) de Nolwenn Leroy, à la pochette de l’album Ersatz (2008) de Julien Doré, à la pièce Animales Feroces (1963) d’Isaac Chocrón, au film « Je suis curieuse » (1967) de Vilgot Sjöman, au film « Animal Factory » (2000) de Steve Buscemi, au film « Les Minets sauvages » (1984) de Jean-Daniel Cadinot, à la chanson « Jesus Is Gay » de Gaël (où le « milieu homo » est baptisé de « l’Arche Delanoë »), la pièce Loretta Strong (1978) de Copi (avec Loretta Strong et son « rat en porcelaine »), le one-man-show Gérard comme le prénom (2011) de Laurent Gérard (avec le coiffeur homosexuel secondé de son yorkshire « Joséphine »), la pièce Copains navrants (2011) de Patrick Hernandez (avec Nono, le héros homosexuel, et son calendrier du facteur avec des photos d’animaux), le roman Les Animaux sentimentaux (2016) de Cédric Duroux, etc.

 

On retrouve les bestiaires dans les créations de Léonard de Vinci, Vladimir Maïakovski, Copi, Alfred Hitchcock, Mylène Farmer, Néstor Perlongher, Colette, Salvador Dalí, Jean de La Fontaine, Jean-Luc Hennig, etc. Beaucoup de personnages homosexuels se présentent comme les amis des bêtes (pas toujours vivantes, d’ailleurs !) : « J’adore tous les oiseaux. » (Océane Rose Marie dans son one-woman-show La Lesbienne invisible, 2009) ; « J’aime les gens qui aiment les bêtes. Sans mes loups, je ne me sentirais pas tout à fait humain, juste un peu ado, juste un peu stupide. Les animaux te poussent sans cesse à s’interroger sur la joie, la simplicité, la fidélité, les inégalités, la dépendance. » (Chris s’adressant à son amant Ernest dans le roman La Synthèse du camphre (2010) d’Arthur Dreyfus, p. 134) ; « Fais comme Arnaud. Achète une perruche. Ce sera plus simple ! » (Stef s’adressant à son pote Vivi, homo lui aussi, et qui veut un enfant, dans la pièce Copains navrants (2011) de Patrick Hernandez) ; etc. Par exemple, dans la pièce Psy Cause(s) (2011) de Josiane Pinson, Jeanne avoue avoir rêvé de « coït avec les animaux du zoo » : le lion et l’éléphant la « font jouir » (je cite). Dans la pièce En panne d’excuses (2014) de Jonathan Dos Santos, au moment où Guillaume doit faire du bouche à bouche à son meilleur ami Louis qui s’asphyxie, il pense immédiatement à mal : « Ça devient du porno gay, ton truc… On n’est pas des bêtes ! ». Dans le film « Test : San Francisco 1985 » (2013) de Chris Mason Johnson, Bill, l’étrange voisin de Frankie, qui lui fait des avances et lui taille une pipe, possède une perruche blanche. Frankie, le héros homosexuel, a décoré sa chambre de plein d’animaux morts, photographiés ou peints : souris, hibou, poisson rouge aux dents pointues, etc. Dans le film « Die Mitter der Welt » (« Moi et mon monde », 2016) de Jakob M Erwa, Phil, le héros homo, regarde avec fascination une coccinelle sous verre dans sa chambre. Par ailleurs, Dianne, la sœur jumelle de Phil, attire à elle magiquement tous les animaux. Elle tient ce don de leur père disparu. Cela fascine Phil : « Comment tu fais pour attirer les animaux ? »

 

Concernant la zoophilie à proprement parler, elle fait l’objet d’une étude encore plus approfondie de ma part dans le code « Chiens » du Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

Sacha Baron Cohen

Sacha Baron Cohen


 

Je m’attarderai un peu plus sur un artiste homosexuel que je connais bien et qui nous donne les bonnes clés de la signification des bestiaires homosexuels : le dessinateur Copi. Pour moi, il est le Spécialiste des bébêtes. À tel point que Loretta Strong, l’un des personnages les plus emblématiques de son univers décalé, sort dans la pièce éponyme (1978) une réplique qui résume bien toute l’œuvre de l’Argentin (et peut-être même toute la production artistique homosexuelle !) : « Il n’y a que des bêtes mortes ! » (p. 131)

 

B.D. "Kang" de Copi

B.D. « Kang » de Copi


 

Dans toute sa production défilent les animaux, des plus domestiques aux plus insolites : cela va du rat à la langouste, en passant par l’escargot et l’araignée (cf. les albums Kang (1984), Du côté des violés (1976), toute la série des Femme assise, etc.) Ce sont en général de faux animaux : des marionnettes à main, des bestioles réifiés, des peluches, des déguisements animalier d’adultes, etc. Copi voit le monde et la Nature comme une salle de jeux en carton pâte déshumanisé : « Ensuite il est entré une petite fille de six ans environ avec mon chien empaillé dans les bras et elle me l’a donné. […] Je suis sorti dans la rue comme tous les jours. Ça n’a pas tellement changé par rapport à avant la catastrophe, exceptant le fait que tous les gens sont morts et empaillés. » (la voix narrative dans le roman L’Uruguayen (1972), pp. 31-32) Dans la tête de Copi, tout ce qui est vivant fini empaillé ! « Le bien, le mal n’existent pas dans le bonheur, dans le malheur. Les hommes sont des animaux, les femmes sont des animales. » (Cachafaz dans la pièce Cachafaz, 1993) ; « C’est une voyante ! Elle a une boule de cristal sur une petite table ronde, un hibou empaillé sur une perche. » (le narrateur homosexuel à propos de Delphine Audieu, dans le roman Le Bal des Folles (1977), p. 80) ; « À côté du hibou sur la cheminée je vois une photo de Marilyn petite, avec le hibou (celui qui est à présent empaillé ou bien un autre qui lui ressemble beaucoup) accroché à son épaule. C’est une petite fille maigre au nez crochu, on dirait un aigle, elle ressemble beaucoup à sa mère d’à présent. » (idem, pp. 81-82) ; « Quand j’étais petite, je mettais tous les jours une robe de communiante pour l’heure du thé, ainsi que mes sœurs. Nous avions chacune un petit pigeon empaillé au bord de la tasse. » (Jeanne dans la pièce La Journée d’une rêveuse (1968), p. 87) ; « Regarde comme elle [la mouette] flotte ! On dirait un canard en Celluloïd ! » (Ahmed à Jean dans la pièce La Tour de la Défense, 1974) ; etc. Le bestiaire de Copi agit comme un totem, le totem du dieu Schizophrénie, à l’image d’un carnaval des animaux que compose le Dieu des Hommes dans le roman La Cité des Rats (1979) : « Nous vîmes de notre cachette […] un thon à pieds de cochon et tête de mule, un éléphant à tête d’homme dont la trompe finissait par un ongle, un crapaud à queue de paon et tête de dinde, un griffon tel quel, une femme à queue et tête de kangourou portant un grand scorpion à tête de coq dans sa poche, et parmi eux le Dieu des Hommes avec les deux têtes du caniche et du fox-terrier à la place de la sienne, et une queue de lézard, et j’en passe des plus bizarres, telle une tortue de mer à tête de queue de poisson. » (Gouri, p. 135) Les animaux empaillés sont la preuve « vivante » (si on peut dire…) que le désir homosexuel est un désir idolâtre, puisqu’on les voit dépeints comme des veaux d’or : « On raconte que quand les ‘Boludos’ vous regardent dans les yeux vous restez figés dans la même position pour l’éternité. On a trouvé sur leur chemin d’innombrables statues en lave représentant des êtres humains et des animaux à l’expression effrayée. » (cf. la nouvelle « La Déification de Jean-Rémy de la Salle », dans le recueil Virginia Woolf a encore frappé (1983), p. 58) ; « Je suis rivé à la tête du boa dont les yeux de chien mort me font plus peur que jamais, je m’évanouis dans l’ambulance. » (la voix narrative dans le roman Le Bal des Folles (1977), p. 59) Les animaux chez Copi sont en général des symboles du viol tant ils sont capables de réagir avec la cruauté humaine et de se mener une terrible guerre entre eux : je pense notamment au boa constrictor de la pièce La Tour de la Défense (1974) ; ou bien au Rat crevant un œil au renard en fourrure de « L. » dans la pièce Le Frigo (1983). L’homme-animal est une référence voilée à l’irrespect de la différence des générations, aux rapports inversés mère/enfant (si souvent traités par l’artiste !), à l’inceste : « J’ai peur qu’il naisse anormal, avec la tête de ma mère et le corps d’un animal ! » (Lou en accouchant de son bébé dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986), p. 360) ; « La fille dévisagea son père et Jane se rappela le renard qu’elle avait trouvé à Londres sur le pas de sa porte en hiver en fin d’après-midi. Elle rentrait de la librairie, un sac de commissions à la main. L’animal s’était figé et elle avait été frappée par sa beauté. Jane s’était accroupie, sans quitter des yeux la tête au museau pointu. […] Le renard l’avait regardée dans les yeux et, l’espace d’un instant, elle avait cru qu’il allait la prendre dans sa main, mais il avait tressailli et s’était enfoui dans la nuit. » (Jane décrivant le rapport incestueux entre la jeune Anna et son père, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, pp. 44-45) ; etc. Dans la pièce Le Frigo (1983), Copi envisage même les unions zoophiles comme une forme d’amour homosexuel incestueux : le personnage de « L. » veut se marier avec le Rat (« Je pourrais te faire passer pour mon fils adoptif. », p. 47) Dans le film « Kaboom » (2010) de Gregg Araki, les hommes de la secte du Nouvel Ordre (présidée par le père de Smith, le héros homosexuel) portent des masques de tigre, de gorille, d’éléphant, de biche.

 

B.D. "Femme assise" de Copi

B.D. « Femme assise » de Copi


 
 

c) Le personnage homosexuel se présente sous les traits d’une créature hybride mi-humaine mi-animale :

C’est le cas dans le roman El Beso De La Mujer-Araña (Le Baiser de la Femme-Araignée, 1976) de Manuel Puig (Molina, le protagoniste homosexuel principal, se définit comme la femme-araignée), les pièces de Bernard-Marie Koltès (l’homme-chien ou l’homme-cerf dans Combat de nègre et de chiens (1979) et Le Roi des Aulnes (1970)), les tableaux du peintre Paul (avec le motif récurrent de l’homme-singe), le film « La Femme Scorpion » (1972) de Shunya Ito, toute l’œuvre de Jean Cocteau (le Centaure y occupe une grande place), le film « Freak Orlando » (1981) d’Ulrike Ottinger, le film « La Criatura » (1977) d’Eloy de la Iglesia (avec la jeune femme et son chien-loup), le conte Lisa-Loup et le Conteur (2003) de Mylène Farmer, le film « La Féline » (1942) de Jacques Tourneur (avec Irena la femme-panthère), la B.D. homo-érotique Batman (1939) de Bob Kane et Bill Finger (avec l’homme-chauve-souris), le roman Dix Petits Phoques (2003) de Jean-Paul Tapie, le ballet Alas (2008) de Nacho Duato, les tableaux du peintre Claude Ganiage, le conte La Petite Sirène d’Hans Christian Andersen, le vidéo-clip de la chanson « Frozen » de Madonna (avec la femme-chien), le vidéo-clip de la chanson « Comme j’ai mal » de Mylène Farmer (avec la femme-insecte), la pièce Loretta Strong (1974) de Copi (avec les hommes-singes ou les hommes-rats), la chanson « Allan » de Mylène Farmer (avec l’homme-oiseau), la pochette de l’album L’Autre de Mylène Farmer (avec la femme-corbeau), le film « Aimée et Jaguar » (1998) de Max Farberbock, le film « La Femme Reptile » (1966) de John Gilling, le film « Tropical Malady » (2004) d’Apichatpong Weerasethakul, le roman La Dame à la Louve (1904) de Renée Vivien, le one-(wo)man-show Madame H. raconte la saga des transpédégouines (2007) (avec Madame H., le travesti M to F, et sa peau de renard baptisée « Montherlant », à qui elle s’adresse comme si elle était vivante), le film « Reflection In A Goldeneye » (« Reflets dans un œil d’or », 1967) de John Huston (avec la femme-cheval amazone), le film « Marnie » (« Pas de printemps pour Marnie », 1964) d’Alfred Hitchcock (toujours avec la femme-cheval), la pièce Entre Fous Émois (2008) de Gilles Tourman (avec l’homme-pingouin), le film « Johnny Minotaur » (1971) de Charles-Henri Ford, la chanson « Jardin de Vienne » de Mylène Farmer (avec le pendu qui se métamorphose en oiseau), les tableaux du peintre Éric Raspaut, la pièce Angels In America (2008) de Tony Kushner (avec l’homme-singe), le roman La Synthèse du camphre (2010) d’Arthur Dreyfus (où Tchang fusionne avec son cheval : « Il fait corps avec l’animal. », p. 141), la nouvelle « Le Travesti et le Corbeau » (1983) de Copi, le film « Horse Women Dog » (1990) d’Hisayasu Sato, la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud (avec les personnages homosexuels pourtant tous sur le dos, comme des ailes, des bois de cerfs), la pièce Bang, Bang (2009) des Lascars gays (avec Steeve l’homme-canard), les poèmes scatologiques de Raúl Gómez Jattin, Néstor Perlongher, Reinaldo Arenas, racontant des aventures zoophiles, etc. Par exemple, dans le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, Lukacz joue à cache-cache avec Adam pour le draguer. Ils imitent des cris de chiens et de singes pour se retrouver au beau milieu d’un champ de maïs. Dans le film « Métamorphoses » (2014) de Christophe Honoré, beaucoup de personnages sont transformés en êtres hybrides mi-humain mi animaux : le chasseur en cerf (à cause de son voyeurisme pour un transsexuel M to F), les jeunes vierges en génisse, en oiseaux. Dans la pièce L’Héritage était-il sous la jupe de papa (2015) de Laurence Briata et Nicolas Ronceux, le perroquet surnommé « Barclay » de Géraldine, la bourgeoise, dit tout haut les phrases les plus vraies et les plus compromettantes des personnages. Dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch (2015), Fabien, le héros homosexuel, se déguise en âne.

 

La comédie musicale La "Nuit d’Elliot Fall" de Vincent Daenen

La comédie musicale La « Nuit d’Elliot Fall » de Vincent Daenen


 

« Que laisserons-nous de nous, moitié-anges moitié-loups, quand nos corps seront dissous dans la langueur monotone du premier frisson d’automne ? » (le protagoniste homosexuel dans le spectacle musical Luca, l’évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès) ; « Mais parmi les chacals, les panthères, les lices, les singes, les scorpions, les vautours, les serpents, les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants, dans la ménagerie infâme de nos vices, il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde : c’est l’ennui. » (c.f. la chanson « Au lecteur » de Mylène Farmer, reprenant Charles Baudelaire)

 

Si, dans les fictions homo-érotiques, l’Homme est parfois animalisé, à l’inverse, les animaux seront aussi très souvent personnifiés, voire homosexualisés : on peut penser au lapin gay de Caroline dans le film « Gelée précoce » (1999) de Pierre Pinaud, aux loups homos du film « Les Loups de Kromer » (2003) de Will Gould, aux plantes carnivores des films « Suddenly Last Summer » (« Soudain l’été dernier », 1960) de Joseph Mankiewicz et « Les Filles du Botaniste » (2006) de Daï Sijie, au canard gay dans le film « Queer Duck : The Movie » (2005) de Xeth Feinberg, le film « Le Baiser de la Lune » (2010) de Sébastien Watel (racontant l’amour entre Félix, un poisson-chat, et Léon, un poisson-lune), etc. Dans son one-woman-show Karine Dubernet vous éclate ! (2011), Dubernet sort une devinette qui, blague mise à part, rapproche le désir homosexuel de l’instinct animal : « Comment appelle-t-on un dinosaure homosexuel ? Un tripothanus. » Dans la pièce Le Gai Mariage (2010) de Gérard Bitton et Michel Munz, Dodo raconte une histoire d’un ours polaire homosexuel qui visite l’Afrique, ou encore celle d’un « cochon pédé ». Dans la pièce L’Héritage était-il sous la jupe de papa ? (2015) de Laurence Briata et Nicolas Ronceux, Vanessa, dont le frère Nicolas est gay, emploie l’expression « pédé comme un pingouin ».

 

L’Homme est réduit à définir comme un « individu » (la notion d’individu définissant tout être vivant, qu’il soit animal, végétal ou minéral) et non plus une « personne » (c’est-à-dire un être humain, le plus grand et le plus libre des vivants).

 

Par ailleurs, aussi paradoxal que cela puisse paraître, les œuvres homosexuelles nous expliquent que s’animaliser revient à se robotiser. Par exemple, dans le film « Xenia » (2014) de Panos H. Koutras, Dany, le héros homosexuel immature, a un rapport très particulier aux animaux qu’il voit partout (le renard dans la chambre de l’hôtel désaffecté, le lapin en peluche blanc géant Dido qui lui apparaît en rêve, les animaux de la forêt entourant la barque, etc.), un rapport qu’on pourrait qualifier d’idolâtre : tandis qu’il les prend pour des dieux vivants (par exemple, Dany se voit tout petit devant Dido : « Mais tu es devenu énorme ! »), il cherche aussi à les vider de vie (le jeune homme confond son vrai lapin blanc Dido avec un objet-peluche qu’il enterre sous un arbre). Dans le roman Joyeux animaux de la misère (2014) de Pierre Guyotat, le monde du bas peuplé d’animaux et de monstres répond et soutient le monde du haut, futuriste et techniciste, créé par les humains.

 

Cette inversion humain >< animal illustre généralement un processus de robotisation de l’être humain par l’envahissement d’un monde végétal virtuel, comme le démontre la brillante nouvelle de Manuel Rivas El Pez Doncella, parue en 1998 dans le journal espagnol El País. Il est étonnant de voir que plus l’Homme prétend revenir radicalement à la Nature et développer son côté animal, plus il en perd son âme et rejoint la machine. Le lien de coïncidence entre l’animalisation et le « devenir objet », mal connu de notre époque, est pourtant manifeste dans énormément de créations artistiques traitant d’homosexualité, et mériterait d’être davantage approfondi.

 

La présence des animaux dans la vie du héros homosexuel peut être mentale, symbolique, et renvoie à l’animalité, à son comportement sexuel, à un désir désordonné qui l’habite. « La bête est plutôt du genre étalon. » (Bernard parlant à son nouvel amant, dans la pièce À quoi ça rime ? (2013) de Sébastien Ceglia) ; « Belle bête ! » (Jean-Paul, le pédé bourgeois, à la vue du docteur Louis, dans le film « On ne choisit pas sa famille » (2011) de Christian Clavier) ; etc.

 

Par exemple, dans le film « Una Giornata Particolare » (« Une Journée particulière », 1977) d’Ettore Scola, la rencontre entre Antonietta, la femme au foyer soumise, et Gabriele, le héros homosexuel qui allait se tirer une balle dans la tête, se fait grâce à l’escapade de sa cage du mainate d’Antonietta, « Rosemonde », un perroquet mâle mais qui porte un prénom de femme. L’oiseau est ici la métaphore du désir de liberté et d’asexualité d’Antonietta. Il est aussi la voix de sa conscience qu’elle refoule, et la voix de la conscience qui ramène Gabriele à la vie : « Il y a toujours un petit perroquet qui vient vous rappeler que la vie est belle. » (Gabriele) Dans la pièce L’Héritage était-il sous la jupe de papa ? (2015) de Laurence Briata et Nicolas Ronceux, le perroquet surnommé « Barclay » de Géraldine, la bourgeoise, dit tout haut les phrases les plus vraies et les plus compromettantes des personnages.
 

Dans l’épisode 98 « Haute Couture » de la série Joséphine ange gardien, Joséphine s’entend très bien avec Dallas, l’assistant-couturier homosexuel de Cecilia, avec qui elle a élaboré un cri de guerre bestial où chacun, par une chaîne d’union consistant à montrer ses griffes (pour mimer la chanson « Alexandrie Alexandra » de Claude François) se transmet une force venant à bout de toutes les épreuves : « Allez ! Que la Force soit avec toi ! » (Joséphine) : la Bête accompagne souvent l’homosexualité, et vice-versa.
 


 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

Photo noir et blanc prise par Hervé Guibert

Photo noir et blanc prise par Hervé Guibert


 

Un certain nombre de personnalités homosexuelles sont taxidermistes, sculpteurs ou peintres animaliers : c’est le cas de Christa Winsloe, Rosa Bonheur, Jean Cocteau, etc. Et beaucoup d’entre elles pratiquent la taxidermie : Pierre Loti, Vladimir Maïakovski, Hervé Guibert, Claude Cahun, Jeffrey Dammer (le tueur en série homosexuel qui était fasciné, petit, par les animaux morts), etc. Au niveau de la mode, Karl Lagerfeld a révolutionné la fourrure, la rendant bohème alors qu’elle n’était que chic. Dans l’autobiographie Folies-Fantômes (1997) d’Alfredo Arias, l’homme transsexuel M to F Concha Bonita (p. 30) « aime les oiseaux en porcelaine ». Jean-Claude Dreyfus fait une collection de cochons. Francis Bacon, quant à lui, adore prendre des photos d’animaux sauvages. Les noms choisis par les groupes musicaux homosexuels (tels que The Animals, Pet Shop Boys, etc.) ne sont pas non plus anodins. Le cinéaste et écrivain Christophe Honoré, se parlant à lui-même dans son autobiographie Le Livre pour enfants (2005), laisse justement libre cours à son inconscient de « taxidermiste qui s’ignore » : « Êtes-vous un grand amateur d’oiseaux ? Voilà, vous êtes-vous occupé d’oiseaux parce que les oiseaux ont captivé votre imagination […] ? » (p. 26) Dans le documentaire « Zucht Und Ordnung » (« Law And Order », 2012) de Jan Soldat, traitant du sadomasochisme, on voit des statues d’animaux dans l’appartement des deux interviewés. Je pense également aux pastiches de comptines chez Pierre Louÿs (notamment celui d’un Algérien pratiquant la zoophilie sur son âne). Dans la pièce Les Vœux du Cœur (2015) de Bill C. Davis, les personnes homosexuelles sont comparées à un documentaire animalier sur les flamands roses. Tom, l’un des héros, est vétérinaire par misanthropie : « La vérité, c’est que je ne suis pas très à l’aise… sauf avec les animaux. Je ne suis pas très à l’aise dans ma propre peau. » Dans l’émission d’hôtellerie Bienvenue chez nous diffusée sur la chaîne TF1 le 23 août 2018, les hôteliers Stéphane et Patrick, en couple homo, possèdent un hôtel rempli d’animaux empaillés. Dans le documentaire « Ni d’Ève ni d’Adam : une histoire intersexe » de Floriane Devigne diffusé dans l’émission Infrarouge sur la chaîne France 2 le 16 octobre 2018, Déborah, personne intersexe élevée en fille, et son amie Audrey, elle aussi intersexe, se baladent au Muséum d’Histoires Naturelles de Lausanne (en Suisse), et y observent les animaux empaillés, et notamment un « Chat : Monstre à tête double ».

 

Photo "Military Tailors" (1936) de Claude Cahun

Photo « Military Tailors » (1936) de Claude Cahun


 

Le lien entre l’homosexualité et les bestiaires, ou entre l’homosexualité et la zoophilie est identifié par des scientifiques et des sociologues de renom. « L’homosexualité et la masturbation proviennent en partie des conditions de la captivité. […] On retrouve les mêmes réactions chez les bêtes à cornes parquées (béliers ou taureaux). » (Paul Guillaume, La Psychologie des singes, 1941) ; « Les leçons de charme des lesbiennes ressemblent à une longue parade animale. » (Sigmund Freud) ; etc. Il se recoupe avec le concept d’« homosexualité de circonstance » que je développe dans le code « Entre-deux-guerres » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) et ne vient pas que de chercheurs dits « homophobes ».

 

Il est repris et causalisé par beaucoup d’« intellectuels » homosexuels et gay friendly pour prouver le bien fondé de l’homosexualité, et soutenir que le désir homosexuel est inné, naturel, et qu’il n’est pas un choix à condamner moralement : je vous renvoie au traitement de l’« homosexualité » dans le monde animal par André Gide dans Corydon (1920), aux travaux de Jean-Pierre Otte, ainsi qu’au documentaire « L’Homosexualité animale » (2001) de Bertrand Loyer, à l’essai Christianisme, tolérance sociale et Homosexualité (1985) de John Boswell, etc. « On a observé un comportement homosexuel chez 13 espèces appartenant à 5 ordres de Mammifères (Beach, 1968). En voici quelques exemples. Il se produit chez la truie, la vache, la chienne, la chatte, la lionne et les femmes du singe Rhésus et du Chimpanzé. » (Claude Aron, « Les Facteurs neuro-hormonaux », Bisexualité et Différence des sexes (1973), pp. 161-162) Pour prouver la pourtant évidente réalité que « l’homosexualité n’est pas contre-nature » (elle est justement très/trop naturelle chez l’Homme !), le Musée d’Histoire Naturelle d’Oslo (Norvège) présente une expo sur les « Animaux-homos » en octobre 2006. Dans son documentaire « Des Filles entre elles » (2010), Jeanne Broyon est toute fière d’interroger un paysan au Salon de l’Agriculture pour montrer que l’homosexualité féminine est normale : « Chez les animaux, l’homosexualité, ça se passe beaucoup » assure-t-il.

 

En plus de l’animalisation des personnes homosexuelles par elles-mêmes grâce à la « science » (plutôt la technique, à proprement parler), elles se servent du prétexte « artistique » ou « militant » pour laisser libre cours à leur déshumanisation par l’« amour » : « Queer est plus généralement cet art même du déplacement, touristique ou zoophilique, stylistique ou corporel, l’art d’être où rien ne vous attend. » (François Cusset, Queer Critics (2002), p. 15) ; Dans le documentaire « Homo et alors ?!? » (2015) de Peter Gehardt, Tamàs Dombos, militant homosexuel hongrois, raconte son sentiment d’enfermement par la protection policière lors des premières Gay Pride de Budapest : « On avance dans des cages, comme les animaux d’un zoo. Voilà ce qu’on ressent quand on manifeste en Hongrie. » ; etc.

 

Les personnes homosexuelles défendant la légitimité des actes homosexuels en s’animalisant elles-mêmes (je vous dirige par exemple vers le récent article, mi-intox, mi-sérieux « Un Couple manchots gays adopte un petit avec succès » dans le journal Le Monde du 3 juin 2009), ne se rendent pas compte que, même si elles sortent dans un premier temps l’identité homosexuelle de la moralité, et donc de la culpabilité, elles l’engouffrent du coup sur le terrain très glissant et homophobe de la pathologie, de la zoophilie, de la pulsion bestiale, de la violence (quand bien même celle-ci, parce qu’elle est rendue instinctive, sera dé-moralisée, ne mériterait pas d’être condamnée). Ce n’est pas par hasard si le réalisateur de films X gays Jean-Daniel Cadinot affirme très sérieusement dans la revue Triangul’Ère 4 (2003) qu’il « serait plutôt comme un cinéaste animalier. » (p. 70) Il existe des liens entre homosexualité et zoophilie (le récent film « La Sonde urinaire » (2006) de la très queer Camille Ducellier nous le rappelle !), quand bien même les « human pets », qui aiment sexuellement les animaux, forment une minorité dans les communautés homosexuelles et hétérosexuelles. Ce sont les personnes homosexuelles elles-mêmes – et non, comme elles se plaisent à le croire, les « méchants homophobes » extérieurs – qui, en cherchant à tout prix à « naturaliser » et à banaliser les actes homosexuels en s’appuyant sur la science et la faune, construisent l’absurde amalgame entre homosexualité et zoophilie. « À l’école, c’étaient les débuts de l’éducation sexuelle et ce n’est pas avec ce que l’on nous disait que j’aurais pu comprendre grand-chose… l’acte homosexuel, par contre, m’était inconnu. C’est lors de vacances scolaires que je l’ai découvert à l’âge de douze ans, avec un homme d’une trentaine d’années… Il m’a proposé de monter dans sa chambre pour me montrer quelque chose. Les choses en question, c’étaient des photos pornographiques que ce monsieur faisait venir de Suède, de Hollande, de tous ces pays qui ont une réputation de mœurs très libérales. Ces photos… il y en avait pour tous les goûts : homosexualité masculine, féminine, enfant en cours de puberté en état d’érection, et même des photos de femmes en train de ‘faire l’amour’ avec des animaux. » (Philippe, homosexuel séropositif, dans son autobiographie L’enfer est à vos portes, 1991) Même si elles se la jouent « rebelles sociaux » à travers l’animalité (« L’homosexuel demeure un loup, libre et fier, farouchement indépendant et sans doute encore sauvage, et rien ne l’oblige à se faire chien, animal domestique, embourgeoisé et de bonne compagnie. » Dominique Fernandez, Le Loup et le Chien, 1999), elles scient la branche sur laquelle elles sont assises !

 

Nolwenn Leroy

Nolwenn Leroy


 

Pour en revenir aux animaux empaillés, on peut également comprendre pourquoi l’association de la taxidermie et de l’homosexualité ne plaît en général pas beaucoup aux personnes homosexuelles. En plus de faire un peu psychopathe sur les bords (à la fin du film « Psychose » d’Alfred Hitchcock, Norman Bates, le taxidermiste déséquilibré, se voit quand même fortement suspecté d’être « un inverti »…), la fascination homosexuelle pour les bêtes pétrifiées indique que le désir homosexuel est un élan de mort plus qu’une force de vie. Et ça, en effet, ce n’est pas très réjouissant, et ça ne vient pas redorer le blason de l’homosexualité ! Quand Hervé Guibert, dans son autobiographie À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie (1990), explique sa passion pour les animaux empaillés, on comprend pourtant bien que la morbidité est certes magnifiée par l’esthétisme, mais qu’elle est quand même palpable ! : « Depuis que j’ai douze ans, et depuis qu’elle est une terreur, la mort est une marotte. […] Je ne cessai de rechercher les attributs les plus spectaculaires de la mort, suppliant mon père de me céder le crâne qui avait accompagné mes études de médecine, m’hypnotisant de films d’épouvante et commençant à écrire, sous le pseudonyme d’Hector Lenoir, un conte qui racontait les affres d’un fantôme enchaîné dans les oubliettes du château des Hohenzollern, me grisant de lectures macabres jusqu’aux stories sélectionnées par Hitchcock, errant dans les cimetières et étrennant mon premier appareil avec des photographies de tombes d’enfants, me déplaçant jusqu’à Palerme uniquement pour contempler les momies des Capucins, collectionnant les rapaces empaillés comme Anthony Perkins dans ‘Psychose, la mort me semblait horriblement belle, féeriquement atroce… » (p.158-159)

 
 

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