Le mal dissimule mais est incapable de simuler

Pièce La Soeur du Grec d'Éric Delcourt

Pièce La Soeur du Grec d’Éric Delcourt

 

Hier soir, en assistant à la pièce Les Favoris d’Éric Delcourt, au théâtre de Dix Heures à Montmartre, c’est à la vue de la comédienne Ambre Ferrante (interprétant le personnage de junkie névrosée bisexuelle de Ninon) en train de fumer sur scène que j’ai mis intérieurement des mots sur ce que je pressentais depuis un moment par rapport à l’éthique de l’acteur, par rapport à l’« excuse de l’Art » à propos du mal que nous observons dans notre société. Elle fumait. Donc elle savait fumer dans la vie, et probablement beaucoup. Moi, je ne sais pas fumer, et si, dans ma courte carrière théâtrale, on m’avait demandé de fumer, j’aurais été bien emmerdé. En observant cette comédienne, j’ai réalisé qu’il n’y a que pour les actions mauvaises que les comédiens ne peuvent pas simuler et ne peuvent pas se planquer derrière l’excuse du « rôle » (« C’est mon personnage qui fume. C’est pas moi ! » ; « Chérie, si j’embrasse cette actrice qui est ma partenaire, c’est vraiment pour le rôle. Mon corps te trompe mais pas mon coeur ! C’est pour le bien du film. Ce n’est que du cinéma… »).

 

Avec le bien, on peut faire abstraction, on peut faire de la vraie fiction, du second degré, de la parabole poétique. Pas avec le mal. Le mal, quand on le fait, même sur scène, même sous le prétexte artistique, en l’enrobant d’intentions pour l’atténuer ou le camoufler, on le fait. Assez peu d’évasion. Satan est beaucoup plus premier degré qu’il ne le croie. Alors que le bien, lui, avance souvent caché et est seul capable de créer de l’artistique. Plus une pièce ou un film est immoral, justifie le mal, plus l’espace entre la réalité et la fiction, entre la création et l’imagination, est rétréci. Quand un comédien a des cas de consciences pour tourner une scène où il doit mal agir (fumer, boire, embrasser sur la bouche, baiser, se dénuder), je le comprends. Il n’y a plus, concernant le mal, de dissociation possible entre ce qu’on va faire sur scène et ce qu’on fait dans la vie (alors que cette dissociation est tout à fait possible avec les bonnes actions, scéniques ou quotidiennes). Le comédien, s’il agit mal sur scène, à moins d’être schizophrène et de penser que ce n’était pas lui qui jouait mais « son personnage », aura à porter la responsabilité et la culpabilité de ce qu’il a fait fictionnellement. Et en général, s’il agit mal dans la vie, il agit mal aussi sur scène, et inversement. En revanche, le comédien qui fait le bien sur scène, à la fois dit quelque chose de sa bonté réelle dans les faits (quand bien même il puisse interpréter le rôle d’un méchant ou d’un salaud ou d’un homme adultère sur scène : ce n’est pas le problème), à la fois peut bénéficier de cette reconnaissance apaisante de la séparation entre ses rôles et ce qu’il vit. Parce que le bien permet la concordance entre la fiction et le Réel, aussi bien que la dissociation, et donc la véritable création, la véritable interprétation.
 

D’ailleurs, pour prouver ce que j’avance, je prendrai deux exemples : peu créatives sont les fictions où les œuvres artistiques où les acteurs ne peuvent plus simuler leurs actions mauvaises car leur corps les y engage trop/forcément (exemples : certains play-back, le porno, les biopics de personnages transgenres ou transsexuels, qui sont davantage dans l’exhibition que dans le rôle de composition, le comédien soi-disant hétéro qui joue le rôle d’un homo, etc.). En revanche, très créatives sont les fictions qui dénoncent le mal, miment le mal, sans le faire sur scène, sans s’y adonner. C’est exactement le cas du comédien Cédric Clodic qui, dans la pièce Les Favoris citée ci-dessus, tout en jouant son rôle de salaud avec grand réalisme, a affiché non seulement zéro complaisance dans son interprétation (quoiqu’il prenne un plaisir évident à jouer) mais en plus n’a pas mal agi sur scène et a donc prouvé que dans la vie, c’était le contraire d’un salaud. La question de la morale d’une pièce ne se mesure pas tant dans l’intention ni dans les thématiques choisies (on peut faire une pièce sur le porno, sur le viol ou sur la mort, avec plein de personnages de méchants, tout en restant hyper moral et dans l’espérance ; et on peut faire une pièce sur l’amour et même sur Dieu, avec que des héros gentils, et être quand même hyper méchant, vulgaire, violent et immoral) que dans les moyens et les actions choisis pour mettre en scène tel ou tel sujet. Et je maintiens que, quand les moyens sont mauvais, la fin et le contenu deviennent aussi mauvais. Malgré les bonnes intentions militantes, « humoristiques », sentimentales, spirituelles ! Satan sait dissimuler, mentir, mais ne sait pas simuler.

 
 
 
 

En marge de cet article, voici les codes homosexuels de mon Dictionnaire des Codes homosexuels que j’ai identifiés dans la pièce Les Favoris (taux : 34 codes sur les 186). C’est la dernière pièce de théâtre qui sera référencée dans mon Dico.
 
Homosexuels psychorigides

Maquillage

Duo totalitaire lesbienne/gay

Faux intellectuels

Mère Teresa

Bobo

FAP la « fille à pédés »

Personnage homosexuel empêchant l’union femme-homme

Putain béatifiée

Cheval

Poids des mots et des regards

Homosexuel homophobe

L’hétérosexuel = l’homosexuel

Haine de la beauté

Poupées

Clown blanc et masques

Parricide

Quatuor

Drogues

Violeur homosexuel

Tante-objet

Manège

Corrida amoureuse

Jeu

Substitut d’identité

Appel déguisé

Reine

Artiste raté

Orphelins

Amoureux

Symboles phalliques

Icare

Inversion

S’homosexualiser par le matriarcat