Code n°54 – Duo totalitaire lesbienne/gay

duo totalitaire

Duo totalitaire lesbienne/gay

 

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

La relation explosive entre mecs gays et femmes lesbiennes, et l’émouvante gestion de la différence des sexes à l’intérieur de la cage aux barreaux transparents qu’est ledit « milieu homosexuel »…

 

B.D. "P'tite Blan" de Galou et Blan

B.D. « P’tite Blan » de Galou et Blan


 

Pourquoi l’amitié entre femmes lesbiennes et hommes gays reste logiquement problématique et explosive (même si personne n’en parle) ? Parce que les uns comme les autres, tant qu’ils pratiquent homosexuellement, expulsent la différence des sexes, aussi bien en amour qu’en amitié !

 

En général, l’amitié – ou mieux dit, « la collaboration » – entre l’homme gay et la femme lesbienne a tout l’air d’un petit arrangement entre potes intéressés par un même butin : la conquête amoureuse de l’Homme invisible tout-puissant (dans le cas des fictions), et la possession d’un maximum de droits légaux pour légitimer leur identité homo crue « éternelle » et la force de l’« amour » homo (dans le cas de la réalité). Au-delà de ça, il ne reste plus beaucoup de gratuité et d’amour entre eux. C’est pour cette raison que le duo fictionnel gay/lesbienne se présente souvent dans les romans et les films homosexuels comme un couple despotique ou associé dans le crime ; et dans le cas des amitiés lesbiano-gays réelles, on constate que l’absence de séduction entre les hommes gays et les femmes lesbiennes influe aussi négativement sur l’envie même toute simple d’être amis et de passer du temps ensemble. Derrière l’auto-injonction publicitaire et militante à la mixité, à la parité, et à la fraternité homosexuelle, les deux camps se séparent de plus en plus, ne font plus la fête ensemble, ne se rejoignent que dans les centres LGBT et pour les Gay Pride, s’utilisent comme bouche-trous aux soirées, se détestent en secret (puisque l’autre « camp » leur rappelle la différence des sexes qu’ils ont unanimement rejetée dans leurs amours).

 

Pourquoi est-ce si explosif entre les personnes gays et les personnes lesbiennes ? Parce que chacun renvoie à l’autre qu’il n’est pas physiquement désirable (dès qu’il commence à rentrer dans la comédie vestimentaire et comportementale du rejet de la différence des sexes et de son identité sexuée). Nouvelle pas si facile à encaisser, c’est sûr. Par exemple, je crois que je dois doublement rebuter une femme comme Caroline Fourest : parce que je suis un homme, et parce qu’extérieurement je suis un homme qui ne s’assume pas en tant que tel. Et c’est réciproque. Seul l’arrêt de la pratique homo ou de la croyance en l’identité homo (concrètement, seule l’amitié) esquissera l’horizon d’une trêve.

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « FAP la ‘fille à pédé(s)’ », « Mère gay friendly », « Destruction des femmes », « S’homosexualiser par le matriarcat », « Androgynie Bouffon/Tyran », « Parricide la bonne soupe », « Doubles schizophréniques », « Personnage homosexuel empêchant l’union femme-homme », « Solitude », « Milieu homosexuel infernal », « Liaisons dangereuses », « Grand-mère », et à la partie « Prostituée lesbienne » du code « Putain béatifiée », dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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PETIT « CONDENSÉ »

 

DUO sale pédé

 

Pour camoufler leur machisme/misandrie et leur misogynie, beaucoup de femmes lesbiennes et d’hommes gays font diversion en cultivant entre eux une amitié artificielle censée prouvée à la face du monde qu’ils sont tous deux absolument capables d’intégrer avec succès la différence des sexes au sein de leurs relations interpersonnelles. Dans le « milieu homo », cette contrefaçon porte le doux nom de « mixité » (sa jumelle « parité » est partie faire de la politique…). S’il pouvait y avoir une légende derrière ce mot, on lirait ce genre de discours : « Je t’aime tant que je ne crains rien de toi. Je m’approche de l’autre sexe à condition qu’il ne me demande pas de me donner entièrement à lui ». Selon cette logique, l’autre est considéré comme un parfait « collègue ». « Pour moi, les hommes, ce sont des camarades et je suis leur égale » entendons-nous de la part de certaines femmes lesbiennes (cf. le documentaire « La Vie à vif » (1982), dans La Nuit gay sur Canal +, diffusé le 23 juin 1995).

 

La mixité au sein de la communauté homosexuelle est malheureusement plus un beau principe bien intentionné qu’une pratique. Nous le constatons quand, par exemple, nous voyons qu’au fil des années, les bars mixtes se transforment en établissements uniquement lesbiens ou strictement gays dans les petites villes de province. Même à San Francisco (États-Unis), le « Centre du monde homosexuel », les personnes lesbiennes et gays ne se côtoient pas vraiment : il y a d’un côté le quartier de Castro (pour les garçons) et de l’autre le quartier de Mission (pour les filles). Au fond, il n’existe pas vraiment de ville homosexuelle même quand celle-ci est souhaitée sur le papier. Actuellement, le processus de séparation entre les femmes lesbiennes et les hommes gays est tellement avancé que la plupart des femmes lesbiennes voyant un homme gay lire des ouvrages sur le lesbianisme le regardent avec des yeux ronds, comme s’il n’était pas logique qu’il puisse s’intéresser à « leur » culture à elles.

 

B.D. "Kang" de Copi

B.D. « Kang » de Copi


 

Nous pourrions nous dire que les hommes gays et les femmes lesbiennes ont peu de chance de se retrouver esthétiquement et éthiquement, d’autant plus que dans leur système de pensée, leurs affinités relationnelles obéissent d’abord à leurs goûts et préférences sexuelles. Les femmes lesbiennes ont souvent pour idéal d’identification esthétique ce que les hommes gays prétendent détester : l’homme macho. Et inversement, les hommes gays ont un goût spécial pour les femmes-objets très féminines, que les femmes lesbiennes refusent d’être et rejettent violemment. Beaucoup de femmes lesbiennes adorent les sports collectifs, les travaux manuels réservés aux hommes… tout ce que les garçons gays haïssent !

 

Cependant, les hommes homosexuels ont un rapport ambigu avec les femmes lesbiennes, car ces dernières sont la transposition dans la réalité concrète de la femme forte et guerrière que tous deux convoitent (la seule différence, c’est que les femmes lesbiennes vont s’y identifier et la désirer sexuellement, alors que les hommes gays se contenteront simplement de s’y identifier). Ils aiment esthétiquement l’icône que les femmes lesbiennes ont voulu imiter, mais pas son actualisation homosexuelle, celle-ci les dégoûtant plus qu’autre chose. Le libertin garde pour la « femme plus que femme » un intérêt méprisant, tout comme la libertine voue à Don Juan et à la gent masculine qu’il représente une haine viscérale maquillée généralement en indifférence.

 

Les femmes lesbiennes se plaignent très souvent du manque de mixité dans les associations. Pourtant, elles font autant bande à part que leurs homologues masculins. Minorité dans la minorité, elles jouent de leur double statut d’exclues (en tant que femmes et en tant que lesbiennes) pour s’isoler encore plus des hommes gays. Beaucoup d’entre elles n’ont aucune sympathie pour les « folles », ni pour les hommes que les personnes gays représentent, tout comme de nombreux hommes gays méprisent les femmes lesbiennes. Certains ne gardent de la femme lesbienne que l’image d’une Josiane Balasko qui les bouscule dans les bars sans même s’excuser, qui ne leur adresse pas la parole quand elle débarque dans leur groupe d’amis, et qui ne fait la bise qu’aux filles… (je l’ai vu de mes propres yeux !)

 

Heureusement, femmes lesbiennes et hommes gays ont en commun leur humanité, ce qui leur permet parfois de tisser de vrais liens d’amitié. Mais n’idéalisons pas le tableau. Beaucoup d’hommes gays ont l’impression désagréable que leurs relations avec les femmes lesbiennes ne se construisent que par intérêt, et réciproquement pour les femmes lesbiennes. Cela s’explique assez bien : l’attirance amicale qu’aurait créée l’attraction sexuelle n’est plus là. On se rend vite compte qu’entre femmes lesbiennes et hommes gays, ce manque de complémentarité symbolique des désirs sexuels influe même dans la qualité des relations simplement amicales. Chacune des parties a l’impression de passer bien après la recherche d’amant(e)s de l’autre, et de servir de « bouche-trou » lors des soirées. Pour le coup, la déférence gay envers les femmes lesbiennes vire souvent à une parodie de galanterie ou de copinage, qui indique parfois l’existence des braises d’un incendie qui ne demande qu’à s’étendre. Il n’est pas étonnant de voir que le binôme « amical » que forment l’homme gay et la femme lesbienne est très souvent totalitaire ou sado-maso – donc hétérosexuel – dans les fictions et parfois dans la réalité concrète, comme l’illustre la description du binôme Mylène Farmer/Laurent Boutonnat faite par le chanteur Jean-Louis Murat : « Sur le tournage du clip, j’étais un peu en observateur, je trouvais ça assez formidable, je voyais bien que c’était un vrai fonctionnement de couple où l’extrême rigueur demandée par l’un était comprise et acceptée entièrement par l’autre. Une vraie complémentarité, une intensité dans le désir de faire quelque chose de qualité, sur la même longueur d’onde. Quand on travaille avec eux, c’est toujours assez bluffant de voir jusqu’à quel point ils peuvent aller dans le commandement, dans la soumission aussi… » (Jean-Louis Murat en parlant du tournage du vidéo-clip de la chanson « Regrets », dans la biographie Mylène Farmer : de chair et de sang (2005) d’Annie et Bernard Réval) La femme lesbienne et l’homme homosexuel simulent l’harmonie parfaite. En réalité, ils ne font que différer le moment de leur affrontement réel. Tant que leurs conquêtes pour les « droits sociaux des homos » ne cesseront de s’accumuler, ils joueront la comédie de l’amitié. Une fois qu’ils n’auront plus besoin l’un de l’autre et qu’ils auront souri ensemble pour la photo, ils risquent de se jeter/s’anéantir mutuellement s’ils ne travaillent pas ensemble à démasquer les ambiguïtés violentes de leur désir homosexuel.

 

Le paradoxe, c’est que tandis que les hommes gays rejettent les femmes lesbiennes, ils les attendent. La présence de celles-ci leur fait un bien fou. Il suffit qu’il y ait une seule femme lesbienne dans leurs rencontres majoritairement masculines pour qu’ils soient plus respectueux entre eux et qu’ils se tiennent mieux. Les femmes manquent véritablement aux hommes gays. Ils ne l’avouent pas souvent car leur désir le plus profond est encore trop encombré de fantasmes en tout genre pour qu’ils s’autorisent à en parler. Les femmes lesbiennes, quant à elles, expriment aussi le besoin d’avoir une bande d’amis garçons, même si elles soupirent à chaque fois qu’elles voient arriver les groupes de « mâles » dans « leurs » bars. En réalité, la désertion progressive des femmes lesbiennes dans le « milieu gay », ainsi que la séparation toujours plus marquée des sexes, sont peu profitables à l’ensemble des personnes homosexuelles… mais nous y tendons malheureusement, puisque de plus en plus, nous constatons un phénomène de compartimentation des minorités au sein même de la communauté homosexuelle. Le « narcissisme des petites différences » suit sa route… Qui l’arrêtera ?

 
 

GRAND DÉTAILLÉ

 

FICTION

 

 

a) L’union de misères et d’amertume misandre :

 
 

Comme nous l’avons étudié dans les codes « FAP la ‘fille à pédé(s)’ » et « Putain béatifiée » (la partie sur les prostituées lesbiennes), il est fréquent que la « fille à pédé(s) » fictionnelle ou celle qui se présente comme la meilleure amie « des » homos et de « leurs » droits (beaucoup de guillemets, désolé : on parle de gens qui sont dans le paraître), se rabatte par dépit (identitaire et amoureux) sur les femmes, le lesbianisme, la prostitution et le despotisme militant LGBT : cf. Lucy dans le film « Boy Culture » (2007) de Q. Allan Brocka, la maman de Jamie dans le film « Beautiful Thing » (1996) d’Hettie Macdonald, Mrs Hunter la maman de Nico dans le film « Another Gay Movie » (2006) de Todd Stephens, Lola dans la pièce À plein régime (2008) de François Rimbau, Marcy dans la pièce Un Mariage follement gai ! (2008) de Thierry Dgim, Nancy dans la pièce Qui aime bien trahit bien ! (2008) de Vincent Delboy, etc.

 

Par exemple, dans la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar, Florence, l’héroïne lesbienne avoue avoir été initialement amoureuse de Stéphane, son meilleur ami gay. Dans la pièce Macbeth (1623) de William Shakespeare, Lady Macbeth et Macbeth sont des répliques du couple libertin Merteuil/Valmont : Macbeth est décrit comme un « tyran » ; Lady Macbeth, quant à elle, méprise celles qu’elle appelle les « bonnes femmes », et demande aux esprits maléfiques qu’ils lui « rendent son sexe viril ». Dans la pièce D’habitude j’me marie pas ! (2008) de Stéphane Hénon et Philippe Hodora, la femme-objet est lesbienne. Dans le spectacle La folle parenthèse (2008) de Liane Foly, Jeanne Moreau est imitée en femme lesbienne. Dans la pièce La Famille est dans le pré (2014) de Franck Le Hen, Tom, le chanteur à succès ouvertement hétérosexuel (et secrètement homosexuel) se choisit comme couverture médiatique Cindy, le prototype de l’hétérosexuelle blonde et superficielle… qui finalement est aussi homosexuelle quand ça l’arrange : elle a joué pour les bienfaits de l’émission de télé-réalité voyeuriste Secret Story le rôle d’une lesbienne portant le secret suivant : « Je suis sortie avec une ancienne lesbienne bodybuildée et j’ai quatre orteils. » Dans le film « Rafiki » (2018) de Wanuri Kahiu, un jeune Kenyan est la risée de la bande masculine de Blacksta et Waireri, parce qu’il est coiffeur : « Il a encore plus une démarche de tapette ». Il est constamment traité de « tapette », et cela insupporte Kena, l’héroïne lesbienne, spontanément solidaire de son frère de condition homosexuelle : elle quitte même la table pour marquer son agacement.

 

On entend souvent dans la bouche des héroïnes lesbiennes leur haine des hommes, bref, leur misandrie (cf. je vous renvoie au code « Parricide la bonne soupe » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels, qui traite plus à fond la question de la misandrie lesbienne) : « Les mecs me font peur. » (Marie, la FAP violée, dans la pièce Une Cigogne pour trois (2008) de Romuald Jankow). Par exemple, dans la pièce Le Fils du comique (2013) de Pierre Palmade, Sylvie traite son meilleur ami gay Pierre d’« enculé » parce qu’il ne veut plus qu’elle soit la mère de leur enfant et qu’il a trouvé une autre mère qu’elle. Et du côté des héros gays, ils déversent parfois leur misogynie sur leurs copines lesbiennes : « Vous êtes deux diablesses. » (Greg, le porte homo s’adressant au couple lesbien Jézabel-Erika dans le film « La Mante religieuse » (2014) de Natalie Saracco)

 

Dans le film « Les Crevettes pailletées » (2019) de Cédric le Gallo et Maxime Govare, la rencontre entre la communauté gay et la communauté lesbienne est saignante. L’équipe des Crevettes pailletées, composée d’hommes gays et trans, est opposée lors d’un match à une équipe de water-polo de femmes lesbiennes appelées Les Déménageuses… ce qui suscite chez les gars de la peur (« Ça fait un peu peur… » avoue Damien) autant que du dégoût (« Dans ‘lesbiennes’, y’a ‘hyènes’… » dit Joël). Les deux équipes s’insultent. L’entraîneuse des Déménageuses traite Mathias Le Goff, l’entraîneur des Crevettes, de « baltringue, et son équipe féminine les insulte de « tarlouzes », de « tapettes », et même de « racistes » (alors qu’Alex est noir). En riposte, Mathias enjoint ses joueurs à faire leur fête aux Déménageuses : « Vous allez les défoncer ! ». Il fait un doigt d’honneur à l’entraîneuse. Sympa, l’homophobie excusée par la différence des sexes…
 

Dans les fictions traitant d’homosexualité, le héros gay rejoint très souvent l’héroïne lesbienne dans son désespoir sentimental et dans sa haine jalouse des hommes, quitte à anéantir ces derniers dans la tentative de séduction et de conquête (fusion identitaire ou fusion corporelle amoureuse) : cf. Rhonda et Adam dans le film « Adam et Steve » (1995) de Craig Chester, Marc et Gaby dans la pièce Faim d’année (2007) de Franck Arrondeau et Xaviéra Marchetti, Marcy et Sébastien dans la pièce Un Mariage follement gai ! (2008) de Thierry Dgim, l’union de misères gay/lesbienne pour « compenser le divorce » dans le film « Señora De Nadie » (1982) de Maria Luisa Bemerg, etc.

 

Par exemple, dans la comédie musicale Angels In America (2008) de Tony Kushner, l’homo (Prior) et la FAP (Harper) prétendent vivre une « triste complicité » ensemble. Dans le film « Como Esquecer » (« Comment t’oublier ?, 2010) de Malu de Martino, Hugo, le héros homosexuel, vit un douloureux chagrin d’amour à cause son amant Pedro ; en parallèle, sa meilleure amie lesbienne, Julia, pleure aussi sa rupture avec Antonia, son ex-compagne. Dans la pièce 1h00 que de nous (2014) de Marc et Mumu, lors d’un casting de film porno où Mumu et Max se voient obligés de coucher ensemble (« Qu’est-ce qu’il vous prend, Palmade et Moresmo ? On n’est pas sur un char ! » leur crie le régisseur-plateau), ils s’engueulent et se traitent de « sorcière ».

 

Dans la pièce La Thérapie pour tous (2015) de Benjamin Waltz et Arnaud Nucit, Arnaud, l’un des héros homos, découvre que son amant Benjamin a eu, dans son parcours amoureux, une aventure avec une femme. Il lui pique une crise de jalousie : « Quoi ?!? Tu t’es tapé une meuf pour de vrai ?!? Mais c’est dégueulasse !! C’était une lesbienne, c’est ça ?!? »
 

Dans le film « Saint Valentin » (2012) de Philippe Landoulsi, c’est l’amitié-vache entre Naïma et Valentin (le héros homosexuel) travaillant ensemble à une caisse de supermarché. Valentin ne s’intéresse pas à elle… sauf pour lui piquer une clope en faisant mine de lui offrir un bouquet… de poireaux. Naïma est navrée de leur vie sentimentale catastrophique commune (« Mais si t’arrêtais de te mettre dans des histoires impossibles, on n’en serait pas là. ») ; et Valentin semble blasé de l’amour en général. La vue d’un couple qui s’embrasse lui soulève le cœur : « Tu vas pas me dire que tout ce bonheur, c’est pas insoutenable ? »

 

La FAP et l’homosexuel se complaisent dans leur misère affective, dans l’adoration d’un Homme invisible qu’ils ont aimé et perdu. « Tu sais, je me demande si ta fréquentation me fait du bien ou me tire irrémédiablement vers le bas. » (Kathy s’adressant à Manu, dans le film « Comme les autres » (2008) de Vincent Garenq) ; « On n’est pas vraiment les champions de l’amitié. […] Pour toi, je suis juste la solution de simplicité. » (Franckie s’adressant à Hugo le héros homosexuel, dans la pièce Ça s’en va et ça revient (2011) de Pierre Cabanis) ; « Elle a l’aigreur des femmes qui n’auront pas de petits garçons, qui n’accapareront pas le sperme des mâles pour se faire croire qu’elles créent la vie, elles qui créent la mort. […] Ce sont des mères d’amertume. Elles sont tristes. » (Willie décrivant sa meilleure amie Liz, dans le roman La meilleure part des hommes (2008) de Tristan Garcia, p. 176) ; « Femme, j’ai eu tant d’ami hommes qui n’aimaient que les hommes que j’ai appris à me sentir inutile. Je n’avais pas de mari, pas d’enfants, c’est la vérité. » (Liz, idem, pp. 180-181) ; « Toi et moi on est pareils. On a tellement peur de nous […]. » (Damien à sa meilleure amie Agathe, dans la pièce Les deux pieds dans le bonheur (2008) de Géraldine Therre et Erwin Zirmi) ; « Quelque part, je crois qu’on se ressemble un peu trop. » (Laurent l’homo à sa meilleure amie Lola, dans la pièce À plein régime (2008) de François Rimbau) ; « C’est vrai que je n’aime personne, pas même vous, Garance. Et pourtant, mon ange, vous êtes la seule femme que j’aie jamais approchée sans haine ni mépris. » (Lacenaire à Garance, dans le film « Les Enfants du Paradis » (1943-1945) de Marcel Carné) ; « Moi aussi je me suis sentie humiliée, considérée comme moins que zéro. » (Antonietta à Gabriele dans la pièce Une Journée particulière (2007) d’Ettore Scola) ; « Je la [Marilyn la FAP] détestai, mais je me gardai bien de le lui montrer ; j’étais jaloux et je le cachais. Et elle adorait Pierre. » (le narrateur homosexuel dans le roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, pp. 29-30) ; « Ils [Pietro l’amant homosexuel du narrateur + Marilyn] portent tous les deux des imperméables blancs qu’ils ne quittent même pas à table, ils ont adopté la même coiffure à la garçonne, ils s’embrassent sur la bouche entre deux bouchées d’hamburger, ils se regardent les yeux dans les yeux, tristes, fatigués de leur soirée de travail. Ils mettent de l’argent de côté pour s’acheter une ferme à Ibiza qui coûte trois fois rien, ils rajoutent une chambre pour les enfants, lui plante des tomates pendant qu’elle s’occupe des mômes, c’est le bonheur. » (idem, p. 56) ; « À présent elle [Marilyn, la FAP] me force à faire chambre commune quoique je n’aie rien à craindre : cette fille de trente-cinq ans est toujours vierge. » (le narrateur homosexuel dans le roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, p. 94) ; « Au fil des années, entre Marc [homosexuel] et elle [Gabrielle, l’héroïne lesbienne], la passion s’était lentement transformée en une charmante amitié amoureuse. » (Élisabeth Brami, Je vous écris comme je vous aime (2006), p. 54) ; « Brusquement, il se lève, la regarde là, assise, petite et ronde et tassée. Sa Gabrielle narquoise et conquérante d’autrefois. Il veut dire quelque chose. Elle ne veut pas qu’il parle. Elle ne lui passerait aucune erreur, aucune faute de goût. Le cruel refrain d’une chanson de Trenet lui revient en mémoire : ‘Que reste-il de nos amours…’ Elle en ricane intérieurement. Toute seule. Il est temps pour eux de se quitter. » (idem, p. 95) ; etc.

 

Par exemple, dans le téléfilm « Le Clan des Lanzacs » (2012) de Josée Dayan, Élisabeth (la veuve noire calculatrice) et Brahim (son bras-droit homosexuel) partagent un secret : la mort par suicide du fils d’Élisabeth. Dans la série Clara Sheller (2005) de Renaud Bertrand, le binôme JP/Clara fait pitié : « Ma vie sentimentale est aussi nulle que la tienne. » remarque JP (cf. l’épisode 1 « À la recherche du prince charmant »). À eux deux, ils forment le « couple ‘homo hystérique/fille paumée’ » (Clara dans l’épisode 4 « 14 juillet »). En réalité, la FAP et l’homo souffrent d’aimer et de se disputer le même homme. Clara et Jean-Philippe sont tous deux amoureux de Gilles, le bisexuel (cf. l’épisode 5 « Oublier Paris »). Le même schéma se reproduit dans le film « Paddy » (1998) de Gérard Mordillat. À la fin du film « Les Amours imaginaires » (2010) de Xavier Dolan, on assiste à un face à face diabolique, sur fond rouge, entre Francis, le héros homosexuel, et Marie, la « fille à pédé » prise pour une lesbienne, se déchirant pour un homme, Nicolas : c’est le combat de l’ange et du diable, qui se termine par les convulsions et les cris de Francis.

 

Dans le film « Entre les corps » (2012) d’Anaïs Sartini, Greg le héros gay et Hannah sa meilleure amie lesbienne, sont colocataires et simulent la parfaite entente : « On vit ensemble comme deux jumeaux. » En réalité, on découvre peu à peu leur contentieux : « Comment as-tu trouvé cet endroit ? » demande Hannah à Greg ; Greg lui répond en boutade (?) : « Une nuit que tu m’as laissé pour une fille… »

 

Homo comme lesbienne s’enferment dans le mythe identitaire et amoureux de « l’homosexualité ». « C’est vous qui avez raison. » (Catherine, la prof de maths lesbienne, face à Nathan, son élève homo, dans le téléfilm « Baisers cachés » (2017) de Didier Bivel) Par exemple, dans la série Faking It (2014) de Dana Min Goodman et Julia Wolov (cf. l’épisode 1 « Couple d’amies » de la saison 1), Shane, le héros homo, fait tout pour outer, ou plutôt forcer Amy et Karma à être homosexuelles comme lui : « Je suis tellement fier de mes petites ! […] J’ai toujours voulu avoir des copines lesbiennes. Elles sont parfaites. » Ils font inconsciemment preuve d’homophobie l’un par rapport à l’autre.

 

Dans la pièce Les Favoris (2016) d’Éric Delcourt, Guen, le héros homosexuel, maintient une relation de couple avec sa meilleure amie lesbienne Camille : « Tu as l’air très impliqué dans sa vie. » remarque Stan. Guen confirme : « Avec Camille, c’est vraiment la rencontre d’un binôme. » On découvre qu’il profite d’elle financièrement. De plus, Camille sort avec Ninon, et donc Guen se met en concurrence avec cette nouvelle rivale. Il méprise Ninon en la décrivant comme une junkie bisexuelle névrosée qui n’a jamais rien construit de sa vie et qui n’arrivera à vivre longuement avec Camille : « Ta vie est une période transitoire. » Guen se fait rembarrer : « Arrête de faire semblant d’être ce que tu n’es pas. » (Ninon) Quand Guen crée un jeu improvisé « le Jeu des Favoris », Ninon fait preuve de misandrie homophobe et ne mâche pas ses mots : « C’est scolaire, homo, nul. »
 
 

b) S’unir pour détruire :

Sophie Tellier et Mylène Farmer, concert 1989

Sophie Tellier et Mylène Farmer concert 1989


 

Pour faire diversion et ne pas régler leurs contentieux personnels et leur souffrance identitaire/amoureuse, le héros gay et l’héroïne lesbienne s’unissent pour un temps ensemble (la plupart du temps pas génitalement ! c’est juste une collaboration ascétique… même si certains sont d’anciens amants) pour mener leur combat commun contre la différence des sexes (ils ne font que reporter leur propre affrontement final) : Onoko et Watanuki dans le film « Passion » (1964) de Yasuzo Masumara, le duo libertin Don José/Carmen dans le roman Carmen (1845) de Prosper Mérimée, le duo explosif Pierre Palmade/Michèle Laroque dans leur spectacle Ils s’aiment, Eddie Sparks et Dixie Leonard dans le film « For The Boys » (1991) de Mark Rydell (« Un numéro, toi et moi. »), le Vicomte de Valmont et la Marquise de Merteuil dans le roman Les Liaisons dangereuses (1792) de Choderlos de Laclos, Osmond et Serena dans le film « Portrait de femme » (1996) de Jane Campion, les deux nazis Bergmann et Ingrid dans le film « Rome Ville ouverte » (1945) de Roberto Rossellini, Sophie et son cousin nazi dans le film « Les Damnés » (1969) de Luchino Visconti, le film « Le Bal du vaudou » (1972) d’Eloy de la Iglesia, Nathalie et Julien dans le roman Gaieté parisienne (1996) de Benoît Duteurtre, le binôme tyrannique gay/lesbienne dans le film « Flesh » (1968) de Paul Morrissey, le film « Amours mortelles » (2001) de Damian Harris, le film « I Shot Andy Warhol » (1996) de Mary Harron (racontant l’épisode de Solanas et Warhol), le film « Delirium » (1987) de Lamberto Bava, le duo lesbienne/gay fomentant la prostitution dans le film « La Punition » (1972) de Pierre-Alain Jolivet et dans le tableau Les Complices (2002) de Narcisse Davim, Ksawert (gay et dragqueen) et Karolina son agent dans le film « Sekret » (2012) de Prezemyslaw Wodcieszek (leur union cache la shoah), Kévin (gay) et Sana (lesbienne) dans la pièce Carla Forever (2012) de Samira Afaifal et Yannick Schiavone (ils vivent en colocation, médisent à tout va, et camouflent un mort dans la chambre de Kévin), Adelaïde la lesbienne et Bernard le gay (fasciné par les militaires) dans la pièce Les Z’Héros de Branville (2009) de Jean-Christophe Moncys, etc.

 

« Être homos, ça nous oblige à tout détruire. » (Stéphane, le héros homosexuel s’adressant à sa meilleure amie lesbienne Florence, dans la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar) ; « Le Fou chantant et la Sorcière, ça ferait un beau couple ! » (cf. l’association entre Charles Trénet et Marie Besnard dans le téléfilm « Marie Besnard, l’Empoisonneuse » (2006) de Christian Faure) ; « Nous ficelons nos mensonges en un tour de langue – nous avons tellement l’habitude – et entre deux éclats de rire. » (Dominique en parlant de sa mère, dans le roman Françoise Dorin, Les Julottes (2001), p. 25) ; « Nous sommes vraiment, ma mère et moi, sur un pédalo en train de savourer un esquimau géant… » (idem, p. 36) ; « Meurtriers sataniques et violents ils étaient. » (Bernard décrivant Jeanne l’héroïne lesbienne et Philippe le héros homo, dans la comédie musicale La Belle au bois de Chicago (2012) de Géraldine Brandao et Romaric Poirier) ; « Tu sais que c’est un copain ? » (Laurent Spielvogel imitant André, un homme gay d’un certain âge, parlant de Marguerite Yourcenar, dans son one-man-show Les Bijoux de famille, 2015) ; etc.

 

Par exemple, dans le roman Le Garçon sur la colline (1980) de Claude Brami, Pascal l’homosexuel et Julia le garçon manqué s’affairent à maquiller un meurtre. Dans son one-man-show Tout en finesse (2014), Rodolphe Sand balance sur le faible sens de l’humour des lesbiennes camionneuses pas commodes, notamment avec le personnage de Joyce, la femme en cuir insensible qui se révèle être un vrai monstre : Joyce dit d’un air très pince-sans-rire qu’« elle adore les enfants » et qu’elle « en a déjà mangés 4 »… pour conclure hyper sérieusement « Non, j’déconne. Humour lesbien. C’est particulier. Je sais, je n’en ai pas. » Elle compte même couper en deux l’enfant que le couple Rodolphe/Claudio comptaient faire avec elle dans leur projet de coparentalité : « On fait 50/50 avec l’enfant ?Je prends la tête et vous les jambes ?»

 

Le duo que composent le héros homosexuel et sa meilleure amie lesbienne est parfois tellement fusionnel/séparé/séparateur (il semble composé de deux moitiés androgyniques qui se détestent tout en ne pouvant pas se détacher l’une de l’autre ! Je vous renvoie aux codes « Doubles schizophréniques » et « Androgynie Bouffon/Tyran » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) qu’il fait peur. Se dégage de lui un totalitarisme, une unité suffisante et misanthrope : « C’est comme cela que je rencontre Polly, que tout de suite je tombe amoureux d’elle. Peut-être parce qu’elle est un peu brute, ce que je ne suis pas du tout. » (Simon, le héros homosexuel parlant de sa meilleure amie lesbienne, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 12) ; « Polly et Simon se connaissent bien et cette complicité qui les anime me dérange presque. » (Mike, le narrateur homosexuel, idem, p. 22) ; « Alors que le discours de Fabien se terminait, juste avant les applaudissements, deux spectateurs ont quitté la salle. […] La femme est coiffée d’un large chapeau, l’homme porte un costume noir et tous les deux arborent des lunettes de soleil. » (cf. la description du Maître de la secte, au visage à moitié caché, et de sa mystérieuse guichetière, dans le roman Le Musée des amours lointaines (2008) de Jean-Philippe Vest, p. 331) ; etc.

 

Dans la pièce Lettre d’amour à Staline (2011) de Juan Mayorga, des couples étranges se forment : d’abord entre le poète Boulgakov et sa femme – qui se met dans la peau de Staline – (« Tu es la femme que j’aime. Comment puis-je imaginer que tu es Staline ? »), et ensuite entre Boulgakov et un Staline homosexuel (« C’est toi le poète et moi le lutteur » dit le dictateur). Ce n’est que lorsque ces duos apparaissent que les enjeux de pouvoir se modifient entre les personnages. Les combinaisons par binôme indiquent deux choses : l’émergence du désir sexuel d’une part, et de la violence de l’hétérosexualité comme de l’homosexualité pratiquées d’autre part.

 

Dans la pièce Un Cœur en herbe (2010) de Christophe et Stéphane Botti, Ingrid, femme lesbienne, a couché avec Mathan, homme gay, avant de devenir sa meilleure amie.

 

Dans le roman Les Nettoyeurs (2006) de Vincent Petitet, l’association machiavélique entre le président Mérovinge et son associée Nathalie, anciens amants dirigeant en bons despotes cruels et froids un Empire économique impitoyable broyant l’humain, a tout du binôme asexué androgynique formé de deux moitiés d’homme sadomasochiste : l’homme doucereux + la femme masculine (Nathalie est une blonde grande et mince, porte un smoking noir Saint Laurent, est surnommée « la balafrée de luxe ») : « Nathalie pense comme moi. Tu sais qu’elle ne se trompe jamais, il lui suffit de voir une personne quelques minutes… Même si elle juge un peu à la cravache. » (Mérovinge, p. 214) ; « Leur obscure et défunte relation le hantait toujours. Il désirait lui plaire encore, non pour la conquérir, mais par désir enfantin de ne pas décevoir cette ancienne et violente maîtresse. » (p. 215) ; « Antoine s’attarda sur la fraîche balafre qui barrait la joue de Nathalie Stevenson. » (p. 240) ; etc.

 
 

c) Une collaboration qui se referme comme un piège autodestructeur :

Le lien PD/FAP (ou gay/lesbienne) est fébrile et dangereux pour eux car il est principalement pécuniaire, intéressé et fondé sur la haine de soi (cf. le film « Flesh » (1968) de Paul Morrissey, le film « Queer Things I Hate About You » (2000) de Nickolaos Stagias, etc.). « Les hommes, je les utilise. Un peu de plaisir et puis c’est tout. » (Karin, l’héroïne lesbienne du film « Die Bitteren Tränen Der Petra Von Kant », « Les Larmes amères de Petra von Kant » (1972) de Rainer Werner Fassbinder) ; « Détends-toi. Ce mec a l’air pas mal, il est sexy et sûrement intelligent, alors détends-toi, profite, ne te pose pas trop de questions. Arrête de flipper. » (Polly, l’héroïne lesbienne encourageant son ami gay Mike à sortir avec un certain « Léo » qu’ils ne connaissent ni l’un ni l’autre, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 94) ; etc. Par exemple, dans le film « Shortbus » (2005) de John Cameron Mitchell, la FAP (Severin) marque un prix sur la photo qu’elle fait de son ami homo Jamie. Dans la pièce Qui aime bien trahit bien ! (2008) de Vincent Delboy, Sébastien l’homosexuel utilise et manipule son amie lesbienne Dadou. Dans le film « La Manière forte » (2003) de Ronan Burke, les hommes homos sont considérés comme des vaches à sperme par les lesbiennes qui veulent à tout prix un bébé.

 

Il arrive aussi que la FAP lesbienne se serve de son meilleur ami homo comme couverture, comme c’est le cas dans le film « My Father is Coming » (1991) d’Elfi Mikesh. Dans le roman Deux Femmes (1975) d’Harry Muslisch, Sylvia se prend en photo avec un homme inconnu dans un zoo pour ensuite le présenter à sa mère comme son fiancé et faire illusion sur son homosexualité. Dans la pièce Un Mariage follement gai ! (2008) de Thierry Dgim, Marcy fait passer son meilleur ami gay Sébastien pour son futur mari afin de leur cacher qu’elle est homosexuelle, ce à quoi Sébastien proteste : « Je suis la couverture de Madame ! » Dans le roman Deux femmes (1975) d’Harry Muslisch, Laura la lesbienne se sert de son ami Freddy comme alibi pour lui faire endosser la responsabilité de son vol (au lieu de citer son propre nom au marchand qu’elle a volé, elle lui donne celui du jeune homme) : « Freddy Hoenderdos était dans ma classe au cours moyen. Pourquoi avais-je donné son nom plutôt qu’un autre au marchand de légumes qui marqua le terme de mon escapade ? Ce n’était pas parce que je le détestais ; je le détestais bel et bien, mais ma réponse avait fusé trop vite pour être réfléchie. Son nom m’était venu à la bouche naturellement, comme si c’était vraiment le mien. » (p. 18) Dans la comédie musicale Panique à bord (2008) de Stéphane Laporte, Joséphine se sert de son fils gay Kevin pour appâter les clients du bateau et leur soutirer de l’argent. Dans le roman Los Ambiguos (1922) d’Álvaro Retana, le gay et la lesbienne se servent mutuellement d’appât. Dans la pièce Une Souris verte (2008) de Douglas Carter Beane, Diane, la FAP lesbienne, empêche son ami Mitchell de s’unir à Alex. Dans le film « Like It Is » (1998) de Paul Oremland, Paula, la FAP, veut que son copain homo Matt reste vierge : elle se montre jalouse envers Craig, le compagnon de celui-ci. Dans le film « Mambo Italiano » (2003) d’Émile Gaudreault, Lina, la mère de Nino, accepte avec enthousiasme l’homosexualité de son fils… à partir du moment où il reste tout à elle et qu’il ne ramène pas de copain à la maison. Elle lui fait une crise de jalousie quand son fiston lui présente Angelo. Dans la série Clara Sheller (2005) de Renaud Bertrand, la FAP Clara utilise son meilleur ami homo Jean-Philippe comme un objet : selon elle, il est pratique d’avoir à ses côtés « un type qui vous protège de la pluie » (cf l’épisode 1 « À la recherche du prince charmant »). Dans la pièce À plein régime (2008) de François Rimbau, Lola, avant de se découvrir lesbienne, paie des prostitués pour se donner l’illusion qu’elle peut avoir des amants (Luc, homosexuel, sera l’un d’eux). Dans le film « On ne choisit pas sa famille » (2011) de Christian Clavier est filmé le manque de solidarité et les luttes d’intérêts différents entre le couple lesbien Kim/Alexandra et leurs « potes » homosexuels, refusant de collaborer à leur projet de co-parentalité puis d’adoption (César, le héros hétéro, sera textuellement utilisé par elles comme une « roue de secours » pour le vol d’enfant dans l’orphelinat).

 

Film "Reflets dans un oeil d'or" de John Huston

Film « Reflets dans un oeil d’or » de John Huston


 

Cette exploitation mutuelle, même si elle passe par un consentement qui ne heurte pas au départ les deux intéressés, finit par se retourner contre eux. Ils sont l’un pour l’autre le témoin gênant de l’identité homophobe de « l’homosexuel » qu’ils croient partagée (ils sont donc en droit de traîner leur amitié en procès d’outing ! elle le conforte dans leur haine d’eux-mêmes !), le miroir de la violence de leur pratique séparée de l’homosexualité. Par exemple, dans le film « La Vie d’Adèle » (2013) d’Abdellatif Kechiche, Adèle découvre son homosexualité et commence à sortir dans les bars avec Valentin, homo comme elle. Mais on finit par comprendre qu’ils s’exploitent l’un l’autre car à la fin des soirées, ils draguent chacun de leur côté. Leur relation s’envenimera définitivement lorsqu’au lycée, la relation amoureuse entre Adèle et Emma est démasquée (Adèle engueule Valentin d’avoir cafté qu’ils étaient allés dans des établissements LGBT, le traite de traître). Dans le film « Cloudburst » (2011) de Thom Fitzgerald, Stella, l’héroïne lesbienne antipathique et follophobe, traite Prentice, son autostoppeur hétéro, de « Sissy » parce qu’il fait des mouvements de danse sur la plage et qu’elle les juge ridicules.

 

Dans le roman The Girl On The Stairs (La Fille dans l’escalier, 2012) de Louise Welsh, le skinhead gay tente d’agresser sexuellement Jane la lesbienne : « Le rire de ce skinhead éméché résonna contre les murs, aigu et efféminé » (p. 95) Plus tard, à une soirée organisée par sa compagne Petra, Jane se fait lourdement draguer par un collègue de travail de Petra, Jurgen, pourtant homosexuel, qui profite du fait que Jane soit lesbienne et la seule personne homosexuelle du dîner mondain auquel ils participent pour avoir un surprenant geste déplacé : « Il glissa la main sous la table. Jane lui prit la main et la repose sur la table en se disant qu’il était dommage que la première personne qu’elle trouvait sympathique depuis son arrivée à Berlin ait été un tel connard. […] Jurgen Tilmann était dans les affaires, comme les autres invités de Petra, pas un hors-la-loi en quête d’une alliée. » (p. 114 et p. 116)
 

Le héros homo et son amie lesbienne se haïssent et cherchent souvent à se fuir ou à s’entretuer, à se disputer un pouvoir ou un mythe. « Je te tuerai. » (Weldon menaçant face à Leonora dans le film « Reflection In A Goldeneye », « Reflets dans un œil d’or » (1967) de John Huston) ; « Cette fille est en train de me bouffer… » (Fred, le héros homosexuel parlant d’Alice, sa meilleure amie, une femme-cowboy, dans la pièce Coloc’ à taire ! (2010) de Grégory Amsis) ; « Elle [Marilyn, la FAP] me hait seulement, elle n’agit que par la haine de moi. » (le narrateur homosexuel dans le roman Le Bal des Folles (1977) de Copi, p. 78) ; « Tu me pèses. T’es toujours là à tourner autour de moi. » (Stéphane, le héros homo s’adressant à sa meilleure amie lesbienne Florence, dans la pièce Confidences (2008) de Florence Azémar) ; « J’te déteste ! » (Florence à Stéphane, idem) ; « Vous vous étiez compromis entre vous, pédés et gouines, à ventiler vos problèmes sans venir nous emmerder ! […] Allah, les gouines me poignardent ! […] Ah, race de femmes maudites, vous êtes toutes des putes ignorant tout de la bite ! » (Ahmed dans la pièce Copi, Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « Elle m’aime pas, Polly, je crois que j’aimerais quand même l’avoir comme fille de pédés, c’est comme ça qu’on dit fag hag, pour lui coiffer ses cheveux et tout ça, mais quand même, elle est très méchante avec moi, hein ? Les fag hags françaises sont toutes comme ça, méchantes ? Moi la mienne, à New York, Emma, elle fait tout ce que je dis à elle, comme de montrer ses seins pour que je souce des mecs. Ta fag hag à toi elle est pas gentille comme ça. » (Cody, le personnage homo nord-américain efféminé s’adressant à son pote gay Mike à propos de Polly, l’amie lesbienne de Mike, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, pp. 116-117) ; « Polly ferait mieux de devenir hétéro et coucher avec un boxeur italien qui la mettrait sur le trottoir et la tabasserait de temps en temps, chuis sûr que là, et là seulement, elle prendrait son pied ! » (Simon, idem, p. 46) ; « De toute façon, en matière de prévention, dès que tu fais un truc t’as des tonnes d’associations dont t’avais jamais entendu parler qui te tombent dessus. Faut pas faire ci, faut pas faire ça… Tsss… Il ne faut pas mettre que des pédés, mais quand même. » (Claude, lesbienne, idem, p. 63) ; « Je me demande si on est encore amis. » (Ine, la FAP lesbienne, à Miriam, l’héroïne transsexuelle F to M, dans le film « Romeos » (2011) de Sabine Bernardi) ; « Ah, race de femmes maudites, vous êtes toutes des putes ignorant tout de la bite ! » (Ahmed s’adressant à des femmes lesbiennes, dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « J’ai passé une petite annonce à la radio, doctoresse, pour me trouver un moustachu maso comme moi et fonder un couple ! J’ai obtenu une réponse. Une lesbienne, doctoresse. » (« L. » dans la pièce Le Frigo (1983) de Copi) ; « C’est mal fichu, une fille. Il manque l’essentiel ! C’est à se demander comment les lesbiennes font pour se reproduire ! Vous imaginez ? Passer de la saucisse à la moule : bonjour l’indigestion ! » (Fabien Tucci, homosexuel, dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch, 2015) ; etc.

 

Par exemple, dans la pièce Hétéropause (2007) d’Hervé Caffin et de Maria Ducceschi, on retrouve le couple haineux gay/lesbienne : « Je vais te détruire » dit Hervé, le héros homosexuel à sa femme Choupette qu’il imagine, le temps d’un cauchemar, en lesbienne. Dans le roman Le Cœur éclaté (1989) de Michel Tremblay, l’amitié Jean-Marc/Mélène est parfois liée à la terreur. « J’avais presque sursauté. Elle a une façon de lire en moi qui me surprend toujours. Sa perspicacité est confondante. […] Elle atterrit souvent au milieu de mes pensées comme si elles étaient les siennes. » (Jean-Marc, p. 28) D’ailleurs, Jean-Marc n’hésite pas à traiter sa meilleure amie lesbienne de « sorcière » (idem, p. 53) et à désirer la tuer : « Pourquoi est-ce qu’on voudrait étrangler ses amis parfois ? » (idem, p. 48) Dans la pièce Doris Darling (2012) de Ben Elton, Sidney (gay) et Doris (lesbienne) se traitent comme des merdes : il pique à Doris son projet d’émission, à cause d’un malencontreux échange d’enveloppes. Dans la pièce Le Fils du comique (2013) de Pierre Palmade, Sylvie a tout de la goudou-FAP : elle est flic et débarque à l’appartement du « couple » Benjamin/Pierre en feignant de les menacer au flingue « d’être trop heureux » ; elle exige également de son meilleur ami gay Pierre qu’il la choisisse comme mère porteuse de leur futur enfant. Dans la pièce À partir d’un SMS (2013) de Silas Van H., lorsque, pour tuer l’ennui, Jonathan et Matthieu expriment le désir d’avoir un chien, Jonathan pose une condition : éviter le bulldog, montré comme le « chien de gouine ». Dans la pièce Hors-Piste aux Maldives (2011) d’Éric Delcourt, Franck, le héros homosexuel, dit qu’il « ne peut pas saquer les lesbiennes ». Dans son one-man-show Chroniques d’un homo ordinaire (2008) de Yann Galodé, Didier, homosexuel, utilise sa cousine-FAP comme faire-valoir : « Tu es mon public ! » Mais il finit par la renier : « Je refuse de porter le poids de ton mal de vivre permanent ! » La cousine est comparée à un monstrueux poisson mort. Elle a tout de la femme lesbienne : Didier la trouve « beaucoup trop sportive ». Dans la pièce Et Dieu créa les folles (2009) de Corinne Natali, c’est carrément la guerre ouverte entre Romuald, homosexuel (en couple gay), et Frédérique, lesbienne (en couple avec une femme). Il la traite plusieurs fois de « salope », de « femme hystérique mal baisée », et l’enferme dans son orientation sexuelle (« J’suis sûr, c’est une lesbienne ! »). Frédérique n’est pas en reste dans la calomnie homophobe à l’égard de Romuald (avec qui elle finira par coucher) : « Le Roi des crétins, la Crème des nuls » ; « J’suis sûr qu’c’est un pédé ! » ; « Misogyne en plus… Enfin, ça, c’est pas un scoop… ». Dans le film « Harvey Milk » (2009) de Gus Van Sant, on voit toute la misogynie des mecs homos envers Anne, une femme lesbienne qui essaie de s’intégrer à leurs premières associations LGBT. Dans la pièce La Belle et la Bière (2010) d’Emmanuel Pallas, Léo (le héros homo) et Garance (l’héroïne lesbienne) se disputent : il la traite de « sorcière », de « pute », de « goudou ! », et elle de « vampire », de « pédale ! ». « Tu me hais. » rajoute Léo. « À la guerre comme à la guerre ! » finissent-ils par se lancer ensemble.

 

Dans le roman The Well Of Loneliness (Le Puits de solitude, 1928) de Marguerite Radclyffe Hall, la relation amicale entre Jonathan Brockett (homosexuel) et Stephen (lesbienne) est à une machiavélique exploitation mutuelle, apparemment consentie par les deux parties : « Inconsciemment, Stephen était un jouet entre ses mains. » (p. 316) ; « Que restait-il à Stephen alors ? Jonathan Brockett ? Qui se ressemble s’assemble. Non, non, pensée intolérable ! […] Il était intolérable de penser que ses seuls compagnons seraient des hommes et des femmes comme Jonathan Brockett… et pourtant… quoi d’autre, après tout ? Que restait-il ? » (idem, p. 319) ; « Stephen le regarda froidement, se demandant comment elle pouvait tolérer ce jeune homme… comment, vraiment, elle parvenait à le souffrir. » (idem, p. 320) ; etc. Jonathan Brockett dit à Stephen qu’il « la déteste positivement » (p. 430). Et cette dernière le présente à son entourage comme un « compagnon » avec qui elle a établi un pacte de non-agression qui ressemble à une Guerre froide : « Voici Jonathan Brockett, un vieil ami à moi, nous sommes des confrères. » (p. 430)

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) L’union de misères et d’amertume misandre :

Vivien Leigh et Laurence Olivier

Vivien Leigh et Laurence Olivier


 

Comme nous l’avons étudié dans les codes « FAP la ‘fille à pédé(s)’ » et « Putain béatifiée » (la partie sur les prostituées lesbiennes), il est fréquent que la « fille à pédé(s) » ou celle qui se présente comme la meilleure amie « des » homos et de « leurs » droits (beaucoup de guillemets, désolé : on parle de gens qui sont dans le paraître), se rabatte par dépit (identitaire et amoureux) sur les femmes, le lesbianisme, la prostitution et le despotisme militant LGBT : cf. je vous renvoie à la lettre de Charlotte dans la rubrique « Courrier des lecteurs », lue dans Têtu, novembre 2001 (cette lectrice se met dans la peau de la lesbienne, à la fois par provocation, par jeu, mais aussi par identification inconsciente… une identification qui a pu déboucher quelques années après sur un coming out) : « Chers tous ! Je suis une hétérosexuelle qui lutte contre l’homophobie. Vous allez vous dire : ‘Mais qu’est-ce que c’est que cette fille ?’ Eh bien, je suis une fille qui vous aime et vous embrasse très fort, et, surtout, qui crache à la gueule des homophobes (c’est clair ?) ! Non, franchement, je ne tolère ni les propos racistes ni les propos antigays. Je ne comprends pas comment on peut avoir de la haine envers les gens qui aiment, tout simplement ! Aussi, je n’aime pas trop utiliser les appellations ‘homo’, ‘hétéro’, ‘bi’, etc. Nous sommes tous des gens qui avons envie d’aimer et d’être aimés ! Il ne faut pas classer les individus, sinon les cons pointent leur doigt vers ‘ceux-là’. Il y a des gens qui aiment les patates et pas les carottes, ou l’inverse, ou les deux. Chacun son truc ! Un jour, mes poufs de copines ont insulté un homo dans la rue (honte à moi d’avoir été leur amie !) Je les aurais massacrées une par une ! Je mourrais d’envie de leur crier : ‘Hé, bande de connes, j’suis lesbienne !’ J’achète Têtu tous les mois parce que c’est un mag que j’aime et qui est très intéressant. Je suis fan de Mylène Farmer aussi. C’est Simon, mon meilleur ami homo, qui m’a fait découvrir tout cela, et je l’en remercie du fond du cœur. Parce que grâce à lui, j’aime vivre, j’aime aider les autres. J’ai découvert ma voie et je me suis fait de vrais amis, et, même s’ils sont homos pour la plupart, je les aime infiniment. Grâce à eux, je sors dans le milieu gay de temps en temps. J’aime un homme ; il est homo. C’est le plus beau de la terre à mes yeux. Que celui qui le touche pour lui faire du mal meure sur-le-champ. Ou alors je lui pète la gueule (je fais de la boxe depuis deux ans) ! J’aimerais que cette lettre fasse le tour du monde et mette en colère tous les gros cons de la planète – j’ai nommé les homophobes, qui ont un esprit aussi large qu’un cheveu et dont le QI est semblable à celui d’une huître (mais je n’ai rien contre les huîtres !). Charlotte. »

 

Autres exemples : Fanny Ardant, Jeanne Moreau, Mylène Farmer, Jeanne Mas, Michèle Laroque, Catherine Deneuve, et bien d’autres, à force de jouer les filles à pédé(s), ont fini par tourner des scènes lesbiennes dans des films ou par se lancer « pour expérience » dans une aventure lesbienne épisodique. « J’ai dû être gay dans une autre vie ! Je n’ai toujours eu que des amis gays. J’avais même un homme de ménage, c’est pour dire ! Je ne sais pas, j’ai dû être gay dans une autre vie ! Et jusqu’ici, je n’ai toujours travaillé qu’avec des gays. » (la chanteuse Anggun dans un article du journaliste Jordan Grevet, pour la revue Têtu, publié le samedi 31 mars 2012)

 

On entend souvent dans la bouche des actrices, des femmes-objets, et des femmes lesbiennes leur haine des hommes, bref, leur misandrie (cf. je vous renvoie au code « Parricide la bonne soupe » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels, qui traite plus à fond la question de la misandrie lesbienne). Elles les apprécient comme de sympathiques et fidèles « camarades » exploitables de leur plein gré, aux petits soins avec elles. Par exemple, pendant son passage télé à l’émission le Jeu de la Vérité dans les années 1980, on demande à Alice Sapritch « pourquoi elle ne fréquente que des homos ». Elle répond : « Dans nos métiers, il y a beaucoup d’homosexuels. En plus de cela, je suis une femme seule. Les homosexuels sont des gens charmants, qui sont drôles, qui ont des métiers très amusants, et qui sont célibataires, et qui ont une voiture ! Vous comprenez, c’est mon péché mignon. Je n’ai pas de chauffeur. »

 

Un certain nombre d’individus gays rejoignent les filles lesbiennes dans leur désespoir sentimental et dans leur haine jalouse des hommes, quitte à anéantir ces derniers dans la tentative de séduction et de conquête (fusion identitaire ou fusion corporelle amoureuse). La FAP et l’homme homosexuel se complaisent dans leur misère affective, dans cet idolâtrie commune pour un Homme invisible perdu ou disparu : « J’ai également eu la chance de rencontrer Marc qui était aussi seul que moi. À partir du jour où nous sommes devenus amis, ma solitude a été moins lourde. » (Paula Dumont, La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), p. 172) ; « Ce n’est pratiquement jamais par hasard qu’une femme épouse un homosexuel. » (Xavier Thévenot, Homosexualités masculines et morale chrétienne (1985), p. 61) ; « Le monde de mon enfance était un monde peuplé de femmes abandonnées. » (Reinaldo Arenas, Antes Que Anochezca (1992), p. 20) ; « Oui, c’était une sorte de dieu pour nous. » (Gore Vidal en parlant de Jimmie, l’amour de sa vie, qu’il a partagé avec une femme, Palimpseste – Mémoires (1995), p. 426) ; « Le Sida a permis aux lesbiennes et aux gays de se rassembler. » (Deborah Glick, activiste lesbienne, dans le documentaire « Lesbiennes, gays et trans : une histoire de combats » (2019) de Benoît Masocco) ; etc. Par exemple, Dalida et Charles Trénet chantant ensemble « Que reste-t-il de nos amours ? », c’est certainement l’alliance de deux maux de vivre qui se sont compris.

 

Dans son autobiographie La Mauvaise Vie (2005), Frédéric Mitterrand dévoile le fin mot de l’histoire de l’amitié entre l’homme gay et la femme lesbienne quand il évoque la nature du lien qu’il entretient avec une des nombreuses « filles à pédés » de son existence, Carmen : « Nous savons très bien où nous en sommes avec Carmen : nous aimons le même homme et il nous a dévastés, l’un et l’autre. » (p. 132) Il fait ce constat amer sur les femmes célibataires ou mal mariées qui l’ont fortement entouré à certains moments de sa vie : « C’est étrange, au fond je n’ai pas tant compté pour elles. » (idem, p. 126)

 
 

b) S’unir pour détruire :

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Pour faire diversion et ne pas régler leurs contentieux personnels et leur souffrance identitaire/amoureuse, certains sujets gays et lesbiennes s’unissent pour un temps ensemble (certainement pas génitalement ! c’est juste une collaboration ascétique) pour mener leur combat commun contre la différence des sexes (ils ne font que reporter leur propre affrontement final). « Jean Genet avait en commun avec Violette Leduc ce goût du massacre, ce besoin de démolir. Pour des gens comme eux, il fallait que tout aille mal, c’était une stimulation. » (Jacques Guérin, cité par Valérie Marin La Meslée, « Genet, Violette Leduc », dans Magazine littéraire, n°313, septembre 1993, p. 72) ; « Tout le travail idéologique des féministes et des militants homosexuels a consisté à ‘dénaturaliser’ la différence des sexes, à montrer le caractère exclusivement culturel, et donc artificiel, des attributs traditionnellement virils et féminins. La déconstruction sexuelle a sapé toutes les certitudes des uns et des autres. C’était le but recherché. » (Éric Zemmour, Le Premier Sexe (2006), p. 24) ; « Oui, le nouveau diable et le nouveau bon Dieu, l’homophobe imbécile et le bien-pensant gay, le machiste et la féministe, etc., s’entendent très bien désormais pour étrangler toute rationalité et souffler les dernières Lumières. C’est ce que j’appelle le nouvel état de possession dans lequel se trouve la société. » (Philippe Muray, Festivus festivus : Conversations avec Élisabeth Lévy (2005), p. 454) ; « Nous sommes arrivés à la plage pour nudistes si bien que Marc a pu se rincer l’œil tout à son aise. Il est notamment resté un bon moment en extase devant des éphèbes qui jouaient au volley sans un fil sur le corps. Pour un voyeur, le spectacle ne devait pas manquer d’être saisissant. Quant à moi, qui n’ai jamais éprouvé le moindre plaisir à contempler des anatomies, à quelque sexe qu’elles appartiennent, je m’amusais plus de son émerveillement que de ce qui en faisait l’objet. » (Paula Dumont, La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), p. 146) ; etc.

 

Par exemple, dans l’autobiographie Recto/Verso (2007) de Gaël-Laurent Tilium, Morgane, la châtelaine dominatrice, et Gaël, le libertin homo faible, forme un couple ascétique et pervers à la fois : « Morgane avait réussi le mélange des genres, le paradoxe, toute sa vie était faite de cela : notre complicité était scellée. » (pp. 140-141) Dans un registre similaire, le plasticien homo Andy Warhol s’est uni au lesbianisme pour la défense de la provocation et du scandale : il a mis en scène des baisers lesbiens.

 

L’union entre l’homme gay et la femme lesbienne est basée sur la schizophrénie et l’inversion identitaire sexuée : elle n’est absolument une rencontre. Par exemple, dans le one-woman-show Mâle Matériau (2014) d’Isabelle Côte Willems, on nous montre en parallèle sur un écran un homme efféminé se maquiller en femme, et la narratrice transgenre F to M sur scène se travestissant en homme, en se posant un faux bouc. Les deux comédiens habitent dans des mondes juxtaposés mais ne sont pas ensemble.
 

Le duo que composent le sujet homosexuel et sa meilleure amie lesbienne est parfois tellement fusionnel/séparé/séparateur (il semble composé de deux moitiés androgyniques qui se détestent tout en ne pouvant pas se détacher l’une de l’autre ! Je vous renvoie aux codes « Doubles schizophréniques » et « Androgynie Bouffon/Tyran » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) qu’il fait peur. Se dégage de lui un totalitarisme, une unité suffisante et misanthrope, où personne ne sait se positionner ni aimer pleinement : « Dans quelle mesure suis-je Paula, la sœur jumelle de Marc, lui-même et tout comme moi homosexuel exclusif ? » (Paula Dumont, Mauvais Genre (2009), p. 16) ; « Il [Marc, le meilleur ami gay de Paula] est comme moi, homo à cent pour cent. On fait tout deux partie d’une espèce rare. » (Paula Dumont, La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), p. 40) ; etc. Par exemple, dans l’essai Le Rose et le Brun (2015), il est dit que Klaus Mann, homosexuel, « adorait sa sœur Erika [lesbienne] d’un amour jaloux » (p. 117).

 
 

c) Une collaboration qui se referme comme un piège autodestructeur :

Le lien homme gay/FAP lesbienne est presque toujours fébrile et dangereux pour eux car il est principalement pécuniaire, intéressé et fondé sur la haine de soi. « Au fil du temps, les femmes sont devenues les otages des homosexuels. Elles ont lié leur sort à celui de leurs ennemis. » (Éric Zemmour, Le Premier Sexe (2006), p. 24) On peut penser à tous les projets de co-parentalité et à toutes les féroces actions coup-de-poing du militantisme LGBT qui unissent dangereusement la communauté gay et la communauté lesbienne.

 

DUO rainbow

 

Il arrive aussi que la FAP lesbienne se serve de son meilleur ami homo comme couverture. L’homme gay n’est que le voisin de vitrine de la femme lesbienne : « Moi je suis devant elle, de l’autre côté de la vitre. » (Frédéric Mitterrand, La Mauvaise Vie (2005), p. 266)

 

Cette exploitation mutuelle, même si elle passe par un consentement qui ne heurte pas au départ les deux intéressés, finit par se retourner contre eux. Ils se haïssent et cherchent souvent à se fuir ou à s’entretuer. « Anaïs Nin et moi étions incompatibles – oiseau prédateur contre oiseau prédateur. » (Gore Vidal, Palimpseste – Mémoires (1995), p. 350) ; « Il faut admettre que les études gays et lesbiennes ont souffert d’un manque de communication entre les sexes, les femmes s’intéressant toujours aux auteures, les hommes presque exclusivement aux hommes. » (cf. l’article « Critique littéraire » d’Élisabeth Ladenson et Brigitte Mahusier, dans le Dictionnaire des cultures gays et lesbiennes (2003) de Didier Éribon, p. 136) ; « J’ai pu aller voir ‘Another Country’. […] Je n’avais pas envie, pendant ce moment privilégié, de me soucier d’histoires d’hommes, fussent-ils homosexuels. Comme c’était la première fois que je voyais ce film, je l’ai regardé jusqu’au bout malgré la très forte envie que j’éprouvais d’aller retrouver mes semblables dehors. J’ai surmonté le malaise qui m’envahissait à devoir me conforter aux valeurs viriles, et qui me donnait à réfléchir sur toutes les distorsions que nous impose le fait de vivre cachées dans un monde phallocentré. Et je me disais que je faisais un effort de curiosité en m’ouvrant au monde de l’homosexualité masculine alors que la plupart des gays se désintéressent de la culture lesbienne en toute bonne conscience. » (Paula Dumont, La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne 2010, p. 238) ; etc. Les « couples » formés de la femme lesbienne et de l’homme gay, s’ils n’ont pas éclairci ensemble les ambiguïtés des désirs homosexuel et hétérosexuel, sont en général violents : pensons aux binômes Evita/Juan Domingo Perón, Leduc/Genet, Mylène Farmer/Laurent Boutonnat, Salvador Dalí/Gala, Marcel Jouhandeau/Élise, etc.

 

Par exemple, la relation de couple entre l’écrivaine lesbienne Carson McCullers et son mari homosexuel Reeves, « ces deux enfants malades de détresse et d’alcool » (Josyane Savigneau, Carson McCullers (1995), p. 279), s’est révélée à la fois narcissique et destructrice : « Carson avait rencontré son double, et le double lui déclara son amour comme on profère une menace. » (Linda Lê, idem, p. 65) ; « Il y a entre ces deux jeunes gens un lien plus profond et plus irrationnel, une bizarre ‘gémellité’ que personne ne comprendra jamais vraiment, chacun s’acharnant à chercher qui porte la responsabilité de leur désastre commun, voulant trouver des fautes, de la méchanceté, du désir de destruction, de la volonté de nuire. » (idem, p. 65) ; « Chacun d’eux étaient le ‘mauvais jumeau’ de l’autre, à la fois destructeur et peut-être indispensable. » (idem, p. 129) ; « Ces deux-là ne parviendront jamais vraiment à vivre ensemble, mais sont incapables de se séparer. » (idem, p. 283)

 

Les relations entre hommes gays et femmes lesbiennes ne sont en général pas tendres… car évidemment, ce qui les réunit (le désir homosexuel), c’est le rejet de la différence des sexes, donc les membres de l’autre sexe (homos ou pas, ça ne change rien à la donne). « Je me reconnais dans beaucoup de points que tu cites comme par exemple sur les agressions homosexuelles qui sont commises par des homos refoulés, et c’est vrai que pour mon cas, non pas que j’aie eu fait des agressions ni physique ni verbale, loin de là, mais dès que je croise des hommes qui ont un regard empli d’attention à mon égard ça me fout la rage, sûrement de voir son propre miroir ne fait pas plaisir à voir mais c’est idem pour les lesbiennes ça m’énerve encore plus car j’ai l’impression qu’elles me rejettent dans mon intégrité en tant qu’individu et que je me dis qu’elles sont heureuse sans nous, et que elles se font du bien entre elles alors que moi je voudrais aussi en faire partie. » (cf. le mail d’un ami homo, Pierre-Adrien, 30 ans, juin 2014) Par exemple, dans son autobiographie La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), Paula Dumont raconte un épisode concret de sa vie : le jour où son groupe d’amies lesbiennes n’a pas supporté que l’une d’entre elles, Élise, ramène un ami homo à elle, Thierry : elles la suspectent de lâcheté (p. 210).

 

 

La coalition entre la femme lesbienne et l’homme gay peut même se révéler, contre toute attente, homophobe, comme on a pu le constater lors de l’émission On n’est pas couchés de Laurent Ruquier diffusée le 20 octobre 2018 sur la chaîne France 2, pendant laquelle Muriel Robin et Marc-Olivier Fogiel se sont ligués contre le jeune chroniqueur Charles Consigny, pour défendre avec hargne la GPA (Gestation Pour Autrui).
 

 

J’ai le souvenir personnel de beaucoup de prises de tête et de conflits des sexes dans les associations LGBT que j’ai fréquentées, y compris celles qui, de l’extérieur, affichent une parfaite mise en application du principe de mixité. Je vous renvoie à deux articles du « Phil de l’Araignée » que j’ai écrits sur ce site de l’Araignée du Désert, dont le fameux tollé que j’ai soulevé à la soirée à l’Hôtel Millénium le 8 juin 2010 quand l’association L’Autre Cercle m’a demandé de parler de la gestion interne de la différence des sexes dans la « communauté homosexuelle » (le premier sur la misandrie lesbienne, le second sur l’antipathie lesbienne). Le malaise collectif dans cette minorité sexuelle s’applique également au quotidien et par rapport aux rencontres interpersonnelles. Je connais même un ami homo qui s’est fait insulter de « sale pédé » dans une rue de Marseille par une femme qui pénétrait plus loin dans un bar homosexuel (anecdote incroyable mais véridique !). Pour ma part, j’avoue que mes relations avec des filles lesbiennes, même si elles sont maintenant nombreuses, ont du mal à durer (mais quand elles durent, elles sont inattendues et très fortes).

 

Entre les femmes lesbiennes et les hommes gays, ça se crêpe souvent le chignon, et ça peut même se terminer dans le sang. Par exemple, Valery Solanas (femme lesbienne) tire un coup de feu sur Andy Warhol en 1968 dans sa Factory. Pensons également aux conflits violents entre Carson McCullers et Truman Capote.

 

Ce n’est pas rien de virer la différence des sexes, y compris entre personnes homosexuelles. L’attrait pour les personnes du même sexe ne fait pas le tout ! Elle ne fait même rien sur la durée, quand on y pense.

 
 

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