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Code n°174 – Trio

trio

Trio

 

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

Le trio qui déguise le couple homosexuel, ou qui dit un désir homosexuel latent et non-assumé, c’est vieux comme le monde ! En tous cas en littérature, au cinéma, et parfois dans le réel.

 

L’un des moyens humains qu’une personne homosexuelle emploie pour, en amour, rejeter progressivement les membres de l’autre sexe tout en conservant socialement l’apparence hétérosexuelle qui lui assure une bonne réputation, c’est la bisexualité ; c’est le discret et hypocrite stade intermédiaire du trio. Je dis « hypocrite » car le triolisme louvoie avec la beauté de l’amitié pour la pervertir par l’adultère et par l’exclusion progressive de la tierce personne… car, rappelons-le, l’amour conjugal véritable ne se conjugue pas à trois, mais uniquement à deux (quoiqu’en disent les esprits adoptant de plus l’idéologie des couples libertaires et échangistes).

 

Si elle est mariée à un homme, cette personne homosexuelle (fictionnelle avant tout ; réelle parfois) essaie d’imposer progressivement à son mari sa meilleure amie, ou bien de le pousser dans les bras d’une maîtresse pour que l’adultère de ce dernier justifie son propre adultère lesbien, ou alors carrément pour se partager ensemble la maîtresse. Si l’individu homo est marié à une femme, il essaie d’imposer progressivement à celle-ci son meilleur ami, ou bien de la pousser dans les bras d’un amant pour que l’adultère de cette dernière justifie son propre adultère gay, ou alors carrément pour se partager ensemble l’amant. Si la personne homosexuelle est célibataire, qu’elle soit homme ou femme, elle essaie de s’insérer d’abord en tant qu’ami du couple homme-femme, pour ensuite se rapprocher du membre du sexe qui l’intéresse le plus, et lyncher l’intrus(-e).

 

Dans les trois cas, le motif fictionnel du trio (extrêmement présent dans les œuvres homosexuelles) – ou carrément la réalité du trio – illustre la mise à l’écart de la femme accueillie au sein du couple homosexuel, de l’homme accueilli au sein du couple lesbien, et plus rarement de « l’homosexuel » ou de la personne homosexuelle si le couple femme-homme décide de ne pas se laisser diviser par l’homosexualité (ce qui, en occident, devient de plus en plus rare). Le trio homosexuel des fictions est généralement composé de deux acteurs et d’une actrice (peu de fois l’inverse : la principale victime du trio homosexuel, c’est bien l’héroïne féminine/la femme réelle !), et dit à la fois le fantasme de puissance androgynique du personnage bisexuel (il faut bien être deux moitiés d’Hommes plus une troisième personne entière pour constituer un couple, hétéro ou homo, non ?), et l’homosexualité détournée de chacun des deux hommes. Il exprime également un mépris machiste pour la femme innocente du trio qui se transforme souvent en faire-valoir de virilité, ou bien un rejet du membre homosexuel, donc une misogynie ou une homophobie. Le trio peut représenter aussi, dans le cas où il existe une différence de génération entre l’un des deux hommes et le couple femme-homme, un transfert de la filiation à l’inceste : nous passons du trio familial enfant-papa-maman au « trouple ».

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Quatuor », « FAP la « Fille à pédé(s) », « Destruction des femmes », « Personnage homosexuel empêchant l’union femme-homme », « Inceste entre frères », « L’homosexuel = L’hétérosexuel », « Clonage », « Liaisons dangereuses », « Moitié », « Parricide la bonne soupe », « Espion », et à la partie « Infidélité » du code « Manège », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

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FICTION

 

Un, deux, trois, nous irons au bois…

 

Film "Cabaret" de Bob Fosse

Film « Cabaret » de Bob Fosse


 

a) L’allusion énigmatique et répétée au trio :

 

« Quand on sera grands, on se mariera tous les trois ? » (Christophe, Boris et Ludmilla, dans le film « Nés en 68 » (2008) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau) ; « Tu vois, c’est marrant, à l’aube de nos trente ans, on se retrouve comme quand on en avait vingt ! Toi tu cherchais la preuve que l’amour existe, tu n’en étais pas sûr, Simon la preuve que l’amour n’existe pas, et moi je suis venue ici pour le trouver. Et aujourd’hui, après tout ce temps, on est tous les trois revenus au même point, hein ? » (Polly, l’héroïne lesbienne, s’adressant à Mike, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 121) ; « On peut aimer deux personnes en même temps ? » (Marie, l’héroïne bisexuelle du téléfilm « Ich Will Dich », « Deux femmes amoureuses » (2014) de Rainer Kaufmann, prise entre son amour pour son mari Bernd et pour son amante Aysla) ; « Tous les trois, enfants uniques. Qu’est-ce que ça peut vouloir dire ? » (Dick s’adressant à Tom, le héros homosexuel, à propos de leur trouple avec Marge, dans le film « The Talented Mister Ripley », « Le Talentueux M. Ripley » (1999) d’Anthony Minghella) ; etc.

 

Film « Dare » (« Entre vous deux ») d’Adam Salky

Film « Dare » (« Entre vous deux ») d’Adam Salky


 

Le trio apparaît très fréquemment dans les fictions homosexuelles. C’est d’abord l’« innocent » motif esthétique de l’errance libertaire sans limite (le trio est envisagé comme un terrain d’expérimentation de la sexualité, aux contours volontairement flous : on dira « pansexualité »). Dans le même ordre d’idée, c’est aussi la structure conjugale typique de l’indifférenciation entre l’amitié et l’amour dans les rapports d’adultes très adolescents : cf. le film « Mysterious Skin » (2004) de Gregg Araki, le film « Las Cosas Del Querer » (« Les Choses de l’amour », 1989) de Jaime Chavarri, le film « Nagisa No Sindbad » (« Grains de sable », 1995) de Ryosuke Hashiguchi (avec Ito/Yoshida/Aihara), le film « Kaboom » (2010) de Gregg Araki (avec Rex/London/Smith), le film « El Sueño De Ibiza » (« Rêve d’Ibiza », 2003) d’Igor Fioravanti (avec Nacho/Carlos/Chica), le film « Wild Side » (2003) de Sébastien Lifshitz, le film « Les Astres noirs » (2009) de Yann Gonzalez (avec Macha/Walter/Nathan), le film « Pourquoi pas ! » (1977) de Coline Serreau, le film « Un Mariage à trois » (2009) de Jacques Doillon (avec Harriet/Auguste/Théo), la pièce Les Amours de Fanchette (2012) d’Imago (avec Agathe/Fanchette/Lucenville qui finissent par former un ménage à trois), le vidéo-clip de la chanson « Popular » du groupe Nada Surf, la pièce Les Indélébiles (2008) d’Igor Koumpan et Jeff Sirerol, le film « Les Enfants terribles » (1949) de Jean-Pierre Melville (avec Élisabeth/Paul/Bernard, qui chipent ensemble dans les épiceries), le film « Some Like It Hot » (« Certains l’aiment chaud », 1959) de Billy Wilder (avec Alouette/Joe/Jerry), le film « La Fin de la nuit » (1998) d’Étienne Faure (avec François/Marc/Laure), le film « L’Homme de désir » (1969) de Dominique Delouche, le film « Cabaret » (1972) de Bob Fosse (avec Sally/Brian/Maximilian), le film « Je t’aime moi non plus » (1975) de Serge Gainsbourg (avec Johnny/Krass/Padovan), le film « Chill Out » (1999) d’Andreas Struck, le film « Le Ciel de Paris » (1991) de Michel Bena (avec Suzanne/Marc/Lucien), le film « Y Tu Mamá También » (2001) d’Alfonso Cuarón (avec Julio/Tenoch/Luisa), le film « Pusong Mamon » (« Cœurs mous », 1998) de Joel Lamangan et Enrico Quizon (avec Annie/son collègue gay/le compagnon de ce dernier), le film « Deux garçons, une fille, trois possibilités » (1994) de Andrew Fleming, le film « A Home At The End Of The World » (« La Maison du bout du monde », 2004) de Michael Mayer (avec Bobby/Jonathan/Claire), le film « Le Journal de Lady M » (1992) d’Alain Tanner (avec Lady M/Diego/la femme de ce dernier), le film « The Trio » (1997) d’Hermine Huntgeburth (avec Karl/Zobel/la fille de ce dernier), la pièce À trois (2008) de Barry Hall, le film « Un Duplex pour trois » (2003) de Danny DeVito (avec Alex/Nancy/Madame Connelly), la chanson « Ma langue au chat » d’Élodie Frégé, le film « El Sexo De Los Ángeles » (« Le Sexe des anges », 2012) de Xavier Villaverde (avec Carla/Bruno/Rai), le film « Castillos De Cartón » (2009) de Salvador García Ruiz, les films « 2, 3, Leben » (2005) ou encore « Cybrâil » (2010) de Tor Iben, le film « Praia Do Futuro » (2014) de Karim Aïnouz (avec Donato/Konrad/Ayrton), etc.

 

Par exemple, dans la pièce Célibataires (2012) de Rodolphe Sand et David Talbot, on assiste à une simulation de séance libertine SM entre Christiane, Antoine et Bruno, sous la tente ; ces trois personnages ont tout du couple androgynique puisqu’ils sont partis faire une chasse au trésor « en couple » mais à 3 ! Dans le roman Paysage avec dromadaires (2014) de Carola Saavedra, Erika vit en couple avec Alex, et ils accueillent chez eux une élève d’Alex, la jeune Karen, avec qui ils vont former un « trouple ». Dans le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha, la bande des gays Nicolas/Gabriel/Rudolf est surnommée « les 3 Mousquetaires » tellement ils semblent inséparables (… et « malheureux en amour » ensemble !). Dans le film « À trois on y va ! » (2015) de Jérôme Bonnell, c’est carrément l’éloge de l’amour à trois entre Charlotte, Mélodie et Michel, qui couchent les uns avec les autres.

 
 

b) Le trio en tant qu’exclusion de la différence des sexes et du désir homosexuel :

 

b) 1 – Le trio de deux hommes et d’une femme (avec la femme mise à l’écart) : le trio comme symbole de misogynie

 

« Quel trio ! Deux pédés et une pute ! » (Peio parlant du trio Reme/José/Ander dans le film « Ander » (2009) de Roberto Castón) ; « Ça fait combien de temps que tu la supportes, l’autre folle ? » (Philippe, le héros homosexuel s’adressant à son amant, dans la comédie musicale La Belle au bois de Chicago (2012) de Géraldine Brandao et Romaric Poirier) ; « C’est sans doute la raison pour laquelle il a souvent l’air de s’ennuyer lorsque nous nous trouvons tous les trois ensemble. » (Cecily dans la pièce The Importance To Being Earnest, L’Importance d’être Constant (1895) d’Oscar Wilde) ; etc.

 

Téléfilm "Un amour à taire" de Christian Faure

Téléfilm « Un amour à taire » de Christian Faure


 

Quand le trio des fictions homosexuelles est composé de deux hommes et d’une femme, en général, celle-ci est mise à l’écart. Au pire elle sera traitée de « prostituée », au mieux elle gagnera la médaille de la « bonne copine », de la « fille à pédés », ou de la « mère qu’on tolère »… mais en tous les cas, la femme est mise au second plan par le couple gay : cf. le vidéo-clip de la chanson « Je suis gay » de Samy Messaoud, le film « Dakan » (1997) de Mohamed Camara, le film « Nuits d’ivresse printanière » (2009) de Lou Ye (avec Jian Cheng/Li Jing/Wang Ping), la pièce Coloc’ à taire ! (2010) de Grégory Amsis (avec Julien/Fred/Alice), le film « Faux semblants » (1988) de David Cronenberg (avec le duo de jumeaux Beverly et Elliot excluant la femme de l’un des deux), le film « La Vie privée de Sherlock Holmes » (1970) de Billy Wilder (avec Watson/Holmes/Ilse), le film « Le Refuge » (2010) de François Ozon (avec Serge/Paul/Mousse), le film « Comme les autres » (2008) de Vincent Garenq (avec Emmanuel/Philippe… Fina laissée sur le billot), le film « Un Amour à taire » (2005) de Christian Faure (avec la scène explicite de la balade en vélo, pendant laquelle la belle Sara est à la traîne comparé au couple homo Philippe/Jean qui caracolent à l’avant, sans même l’attendre…), le roman Un Garçon d’Italie (2003) de Philippe Besson (avec Luca/Leo/Anna), le film « Les Chansons d’amour » (2007) de Christophe Honoré (avec Ismaël/ Erwann/Julie), le film « Les Deux papas et la maman » (1995) de Jean-Marc Longval, la pièce Les Amers (2008) de Mathieu Beurton, le téléfilm « Juste une question d’amour » (2000) de Christian Faure (avec Laurent/Cédric… et Carole utilisée par Cédric comme couverture d’hétérosexualité), le film « Je t’aime toi » (2004) d’Olga Stolpovskay et Dmitry Troitsky (avec Uloomji/Timofei/Vera), le téléfilm « À cause d’un garçon » (2001) de Fabrice Cazeneuve (avec Vincent/Benjamin/Noémie), la pièce Madeleine, elle aime bien ça (2002) de Didier Burel et Hervé Le Pan (avec les deux protagonistes masculins passant leur temps à attendre une femme fictive qui ne viendra jamais), la pièce Son mec à moi (2007) de Patrick Hernandez (avec Daniel/Ludo/Nina), le film « Amour à trois » (1969) de Sergio Capogna (racontant l’histoire d’un garçon amoureux d’un autre garçon, et qui va devenir l’amant de la fiancée de ce dernier afin de mieux atteindre son but), le film « Making Love » (1982) d’Arthur Hiller (avec Zach et sa femme Claire, couple filant le bonheur parfait jusqu’à l’arrivée de Bart qui va convertir Zach à l’homosexualité), le film « Where The Truth Lies » (« La Vérité nue », 2005) d’Atom Egoyan (avec Lanny/Vince/Karen), le téléfilm « La Confusion des genres » (2000) d’Ilan Duran Cohen (avec Alain/Marc/Babette), le film « Clara Es El Precio » (1976) de Vicente Aranda (avec Juan/Kellerman… et Clara, le dindon de la farce), le film « The Woman I Stole » (1933) d’Irving Cummings, le film « Food Of Love » (2001) de Ventura Pons (avec Hector/Richard/Pamela), la pièce Confidences entre frères (2008) de Kevin Champenois (dans laquelle Amélie se fait traiter de « salope » par Damien parce qu’elle a couché avec son « frère » Samuel), le film « Liv Og Dod » (« Vie ou mort », 1980) de Svend Wam et Peter Vennerod (le dramaturge/le jeune homme/Gerda la prostituée), le film « Blessure » (2011) de Johan Vancauwenbergh (avec Tom/Marie/Steven), le film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho » (« Au premier regard », 2014) de Daniel Ribeiro (avec Giovanna qui tient la chandelle entre Léo et Gabriel), etc. Par exemple, dans le film « Mine Vaganti » (« Le Premier qui l’a dit », 2010) de Ferzan Ozpetek, la jolie Alba est délaissée par Tommaso (il préfère les garçons, et sort avec Marco), qui au départ l’avait embrassée. Dans la pièce Soixante Degrés (2016) de Jean Franco et Jérôme Paza, Rémi et Damien se rencontrent dans une laverie. À priori, chacun est hétéro. Mais les femmes dont ils parlent sont soit invisibles (Marie, la copine de Damien et l’ex de Rémi), soit transgenres (Vanina, le drag-queen). Elles sont tellement dématérialisées que Rémi finit par tomber amoureux de Damien. « Marie ne m’a pas remplacé par un con. Elle a toujours bon goût. » dit Rémi à Damien, pour le flatter. La femme est éjectée du triangle amoureux, après avoir été encensée. Le transfert sentimental s’opère chez Rémi : « J’aime le mec de mon ex. » À la fin de la pièce, il n’assume toujours pas cette déviation : « Je ne suis même pas homo. Il y a deux ans, j’ai juste aimé follement l’homme de la vie de l’ancienne femme de la mienne. Depuis, tout est rentré dans l’ordre. » Dans le film « The Cakemaker » (2018) d’Ofir Raul Graizer, Tomas, un Allemand, est en couple épisodique avec Oren, un Israëlien marié à une femme Anat, qui finit par se tuer dans un accident de voiture à Jérusalem. Tomas, pour retrouver Oren, couche avec la veuve. Anat est le seul témoin vivant et sensuel qui peut ramener à Tomas, le souvenir d’Oren. Finalement, Anat se fait « sauter » (en décalé) par les deux amants homos. Tomas couche avec elle pour recoucher symboliquement avec Oren.

 

Film "Les Valseuses" de Bertrand Blier

Film « Les Valseuses » de Bertrand Blier


 
 

b) 2 – Le trio de deux hommes et d’une femme (avec l’homosexuel mis à l’écart) : l’homophobie de la bisexualité

 

Quand le trio des fictions homosexuelles est composé de deux hommes et d’une femme, il arrive que ce soit le héros homosexuel qui finisse par être éjecté du couple hétérosexuel. On retrouve ce schéma dans des films où la bienséance imposée par certains pays et certaines époques ne permet pas de laisser le dernier mot à l’homosexualité (celle-ci est présentée comme un accident, un simple jeu, ou une intrusion passagère, dangereuse, voire diabolique) : cf. le film « Noruwei No More » (« La Ballade de l’impossible », 2011) de Tran Anh Hung (avec Kizuki/Naoko/Watanabe), la pièce Casimir et Caroline (2009) d’Horváth von Ödön (avec Casimir/Caroline/Eugène), le film « Ossessione » (« Les Amants diaboliques », 1942) de Luchino Visconti (avec Gino/Giovanna/Giuseppe le gitan éjecté), la pièce Cyrano intime (2009) d’Yves Morvan (avec Roxane/Christian/Cyrano), le film « Tenue de soirée » (1986) de Bertrand Blier (Antoine/Monique/Bob), le film « La Meilleure façon de marcher » (1975) de Claude Miller (avec Philippe/Chantal/Marc), le film « Contracorriente » (2011) de Javier Fuentes-León (avec Mariela/son mari Miguel/Santiago qui finira noyé), le film « Une Histoire sans importance » (1980) de Jacques Duron (avec Claude/sa copine/Philippe), le film « Ma vraie vie à Rouen » (2001) d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau (avec Ludovic/sa copine/Étienne), la pièce L’École des femmes (1662) de Molière, la pièce Frères du bled (2010) de Christophe Botti (avec les trois frangins Djalil/Jasmine/François : François est jaloux de Djalil puisqu’il va même soupçonner l’inceste entre Jasmine et Djalil), le film « Amis de table d’hôte » (1910) de Pathé Production, le film « La Chair et le diable » (1927) de Clarence Brown, la chanson « Depuis qu’il vient chez nous » de Dalida, etc. La femme est parfois celle qui dresse les deux hommes l’un contre l’autre… dans tous les sens de l’adverbe ! : cf. la pièce Bodas De Sangre (1933) de Federico García Lorca, le film « West-Side Story » (1961) de Robert Wise (avec Tony/Maria/Bernardo), etc.

 

Film "Je t’aime toi" d’Olga Stolpovskay et Dmitry Troitsky

Film « Je t’aime toi » d’Olga Stolpovskay et Dmitry Troitsky


 

« Comme trio, on ferait la paire ! » (le cruel Beetlejuice s’adressant au couple Barbara/Adam dans le film « Bettlejuice » (1988) de Tim Burton) ; « Tout est en place. Le troisième acte s’est bien installé, les personnages – Mimi, Rodolfo, Marcello – ont eu le temps de nous situer dans l’action : Mimi tousse de plus en plus, Rodolfo prétend vouloir l’abandonner, Marcello se trouve coincé entre eux, éternel confident de deux amants qui s’adorent sans pouvoir se supporter. » (la première phrase du narrateur homosexuel parlant de l’opéra La Bohème de Puccini, dans le roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, p. 17) ; etc.

 

Dans le film « Die Mitter der Welt » (« Moi et mon monde », 2016) de Jakob M Erwa, le trio amoureux Phil/Nicholas/Katya est très toxique : au départ, Phil sort avec Nicholas, et les deux hommes rejettent « Kat », la meilleure amie de Phil, jalouse de lui… et finalement, Phil finit par surprendre Nicholas et Katya en train de coucher ensemble dans le cabanon de Nicholas, et décide de rompre définitivement avec Nicholas car il ne veut pas « le partager ». Se sentant trahi, il coupe également tout contact avec « Kat ». Pourtant, Nicholas se satisfaisait pleinement de leur combinaison : « On pourrait continuer tous les 3. J’ai besoin de vous deux. »
 

Fictionnellement, il n’est pas anodin que le diable soit parfois le membre extérieur qui s’immisce par le biais de la séduction homosexuelle dans le couple femme-homme pour en faire un trio mettant en danger l’unité du duo (la mise à mort finale du « tentateur homosexuel » est d’ailleurs un rituel punitif fréquent des intrigues homo-érotiques, présenté comme la restauration d’un équilibre) : cf. le film « Le Trio infernal » (1974) de Francis Girod (avec Georges/Philomène/Catherine), le film « The Rocky Horror Picture Show » (1975) de Jim Sharman (avec le Dr Frank-N-Furter/Janet/Bard), le film « Teorema » (« Théorème », 1968) de Pier Paolo Pasolini (avec l’inconnu/la mère/le père), le film « Ossessione » (« Les Amants diaboliques », 1942) de Luchino Visconti (avec Giovanna/Bragana/Gino), le film « Nettoyage à sec » (1997) d’Anne Fontaine (avec Jean-Marie/Nicole/le beau Loïc qui finira par être tué), le film « Reflections In A Goldeney » (« Reflets dans un œil d’or », 1967) de John Huston (avec le major Weldon/Leonora/le jeune William qui finira par être assassiné), le film « Scènes de chasse en Bavière » (1969) de Peter Fleischmann (avec Rovo/la Tonka/Abram, le héros mis à mort), le film « Suddenly Last Summer » (« Soudain l’été dernier », 1959) de Joseph Mankiewicz (avec Catherine/Mrs Venable/Sebastien qui finira assassiner), etc.

 
 

b) 3 – Le trio de deux femmes et d’un homme (avec l’homme mis à l’écart) : le trio comme symbole de misandrie

 

« On avait un plan tous les trois. Esti et moi, nous irions ensemble à l’université à Manchester, et Dovid nous rejoindrait à son retour de la yeshiva en Israël. On serait ensemble, à trois. » (Ronit et sa compagne Esti, rejetant dans le roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, p. 247) ; « Si seulement c’était un vampire, il serait parfait. » (Amy en parlant de Liam, le copain de son amante Karma, dans la série Faking It (2014) de Dana Min Goodman et Julia Wolov, l’épisode 1 « Couple d’amies » de la saison 1) ; etc.

 

On a aussi le cas du trio de deux femmes et d’un homme, où cette fois c’est l’homme qui finit sur le carreau : cf. le film « Elena » (2011) de Nicole Conn (avec Elena/son mari/Peyton), le film « Navidad » (2009) de Sebastián Campos (Aurora/Alicia/Alejandro), la pièce Un Mariage follement gai ! (2008) de Thierry Dgim (avec Sébastien/Marcy/Anne-Liz), le film « La Manière forte » (2003) de Ronan Burke (avec les deux héroïnes lesbiennes qui vont jusqu’à violer Adam dans la nuit pour lui piquer son sperme), le film « Fino A Farti Male » (2004) d’Alessandro Colizzi (avec Lara/Martina/Martin), le film « Between Two Women » (2000) de Steven Woodcock (avec Kathy/Ellen/Geoff), le film « Cloudburst » (2011) de Thom Fitzgerald (avec Dotty/Stella/Prentice), le film « Mommy » (2014) de Xavier Dolan (avec le trio incestuel Steve/Diane/Kyla, qui finit par l’hospitalisation forcée de Steve), etc.

 

Par exemple, dans la pièce Un Lit pour trois (2010) d’Ivan Tournel et Mylène Chaouat, Jean-Pierre, Catherine, Fanny composent un trio libertin explosif. Jean-Pierre est jaloux et prend ombrage de la complicité des deux femmes : « Il me semble que je n’y étais pas. » Jean-Pierre est l’homme rejeté par les deux femmes lesbiennes, dont Fanny sa femme : « Maintenant, je pleure. » Dans le film « Vita et Virginia » (2019) de Chanya Button, sir Harold Nicolson, le mari-couverture de Vita Sackville-West, lesbienne vivant une liaison avec Virginia Woolf, souffre d’être mis à l’écart : « Tu veux le beurre, l’argent du beurre… et toutes les crémières ! […] Ça me blesse. »
 

Le trio est un moyen pour glisser discrètement en actes vers une homosexualité. Par exemple, dans le roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, Alexandra, l’héroïne lesbienne, afin de pouvoir vivre librement ses aventures lesbiennes sans que son mari l’en accuse, tente de pousser ce dernier à l’adultère… comme cela, ils seraient quitte dans le vice : « Le principe de l’action est simple : le pousser à la faute avec une autre femme et le surprendre dans ses ébats. » (p. 165) Dans la pièce Sugar (2014) de Joëlle Fossier, le trio gay friendly William/Georges/Adèle (couple homo + fille à pédés) forme une coalition pour mater « l’hétéro » homophobe Pierre qui a eu la cuistrerie de draguer franchement Adèle (Non mais dis donc !) Dans le film « Fried Green Tomatoes » (« Beignets de tomates vertes », 1991) de John Avnet, c’est un mort, Buddy (le grand-frère de Idgie, et le fiancé de Ruth), qui réunit les deux femmes.

 
 

b) 4 – Le trio de deux femmes et d’un homme (avec la lesbienne mise à l’écart) : le trio comme symbole de lesbophobie

 

Parfois, le trio d’homosexualité est composé de deux femmes et d’un homme, et cette fois, c’est l’héroïne lesbienne qui est éjectée : cf. le roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman (avec Ronit/Dovid/Esti), le film « Chloé » (2009) d’Atom Egoyan (avec David/Chloé/Catherine), le roman Huis clos (1943) de Jean-Paul Sartre (avec Inès, l’héroïne lesbienne se présentant comme « damnée »), le film « Ô trouble » (1998) de Sylvia Calle (avec Inès/le frère d’Inès/Laura), le film « Circumstance » (« En secret », 2011) de Mariam Keshavarz (avec Atafeh/son mari/Mehran, celle qui décidera de partir), le film « Émilienne » (1975) de Guy Casaril, etc.

 

En général, l’homme de ce trinôme est soit un mari hors paire, un modèle de force et de compréhension, soit un concurrent indépassable, macho, qui se sert des deux femmes pour les dresser l’une contre l’autre (dans tous les sens de l’adverbe) et pour prouver la toute-puissance de sa virilité : cf. la pièce Le Jour de Valentin (2009) d’Ivan Viripaev, le film « Les Biches » (1967) de Claude Chabrol (dans lequel Why et Frédérique, les amantes lesbiennes, se disputent le jeune architecte Paul ; au bout du compte, Why tuera Frédérique), le film « Harlis » (1972) de Robert Van Ackeren (dans lequel Raymond finit par séduire Harlis, une femme lesbienne en couple avec sa copine Ria… ce qui attise bien sûr les foudres de Ria), etc. Par exemple, dans le roman The Well Of Loneliness (Le Puits de solitude, 1928) de Marguerite Radclyffe Hall, le trio composé du couple lesbien Mary/Stephen ainsi que de Martin (intéressé par Mary), saupoudré de bisexualité, est défini comme une « étrange trinité » (p. 555), insupportable à vivre pour chacun des membres.

 
 

b) 5 – Le triolisme (3 garçons homos ou trois filles) : le trio comme symbole d’infidélité

 

Il arrive que le couple homosexuel fictionnel, lassé de vivre une « solitude à deux », cherche à masquer son ennui en y intégrant une tierce personne, pour se fuir soit dans les amitiés extérieures soit dans la débauche. Les brochettes de 3 homos – amicales « et plus si affinités » – ne manquent pas dans les fictions homo-érotiques : cf. le film « Donne-moi la main » (2009) de Pascal-Alex Vincent, le film « Tan De Repente » (2002) de Diego Lerman, la pièce Le Roi Lune (2007) de Thierry Debroux, le film « Arisan ! » (2003) de Nia di Nata (avec Memey/Sakti/Andien), le film « Far West » (2003) de Pascal-Alex Vincent (avec Éric et ses deux copains de la ville), le film « Boy Culture » (2007) de Q. Allan Brocka (avec X/Andrew/Joey), le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin (avec Larry/Hank/Alan), etc.

 

Film "And Then Came Lola" d'Ellen Seidler et Megan Siler

Film « And Then Came Lola » d’Ellen Seidler et Megan Siler


 

Le trio est magnifié comme une relation de couple améliorée, avec valeur ajoutée (= l’amitié ou l’infidélité) : « La bonne avait envers Marie des gestes de tendresse dont la seule vue me mettait dans un état de désir intense et déclenchait une excitation qui me faisait mouiller. » (Alexandra, l’héroïne lesbienne du roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, p. 150) ; « J’veux dormir avec vous deux… même si on ne baise pas. » (Arthur s’adressant à Jacques, son amant régulier, et Mathieu, dans le film « Plaire, aimer et courir vite » (2018) de Christophe Honoré) ; « On est des copains. » (Mireille s’adressant à ses amants Dominique et Marcel, « mariés » par un « mariage pour tous » blanc, dans la pièce Drôle de mariage pour tous (2019) de Henry Guybet) ; etc. Par exemple, dans la série Joséphine Ange-gardien (1999) de Nicolas Cuche (épisode 8, « Une Famille pour Noël »), Thierry, le héros homosexuel, est de temps en temps infidèle à Martin : il décide de vivre un triolisme avec Rodin et Constance. Dans son one-man-show Tout en finesse (2014), Rodolphe Sand associe les trois mousquetaires à une union homosexuelle libertine : « Les Trois Mousquetaires font une petite épilation avant une bonne sodomie. Trois mecs tout le temps ensemble, ça crée du lien. »

 

En réalité, on découvre que le fantasme du trio ne trouve sa saveur (éphémère) que dans une jalousie mutuelle, et son utilité que dans l’ombre dénégatrice qu’il projette temporairement sur le manque d’amour vécu au sein du couple homosexuel stricto sensu. Par exemple, dans la pièce Gothic Lolitas (2014) de Delphine Thelliez, Suki, l’une des héroïnes lesbiennes, souffre de la fusion entre Juna et Kanojo. Dans le film « Rosa la Rose : Fille publique » (1985) de Paul Vecchiali, Rosa, la prostituée, se voit courtisée par deux clients qui veulent coucher avec elle séparément. Mais elle fait tout pour les réunir pour un plan à trois :« Si vous voulez, on peut monter tous les trois. ». Au départ, le client 1 rechigne un peu, et finit par se laisser tenter : « Moi, ça me va… du moment qu’il ne me tripote pas. » Après avoir couché ensemble, les deux hommes prennent leur douche ensemble et se comparent leur bite. Rosa s’en amuse, et fait tout pour les homosexualiser : « Vous en avez fait, des folies ! J’espère que j’ai pas suscité une vocation. » Dans la pièce Géométrie du triangle isocèle (2016) de Franck d’Ascanio, Lola trompe sa copine Vera d’un commun accord avec Nina. Un trio diabolique s’organise autour des calculs machiavéliques de Vera, et pour faire tomber Nina : « Nina, tu es une fantaisie que j’accorde à Lola. » (Vera s’adressant à sa rivale Nina). Dans le film « Babysitting » (2014) de Philippe Lacheau, Sam et Franck s’embrassent à leur insu dans le noir (une Dark Room d’un parc d’attractions), mauvaise blague orchestrée par Sonia que les deux hommes se disputent : en découvrant les images, ça ne les fait pas rire du tout.

 
 

c) Le trio en tant qu’irréalité, que désir de se prendre pour Dieu :

« À deux, on s’amuse. Mais à trois, on s’éclate ! » (le Maître de cérémonie du spectacle musical Cabaret (2011) de Sam Mendes et Rob Marshall) ; « Le trio s’enroule autour de moi, je me vautre dedans, je vis avec une grande délectation les trois malheurs qui se déploient en même temps dans mon oreille, je peux vivre simultanément trois malheurs, c’est ça, je crois, qui me plaît le plus. » (le narrateur homo parlant de l’opéra La Bohème de Puccini, dans le roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, p. 18) ; « Il va nous détruire. Il nous laissera jamais. Il faut que je m’en débarrasse. » (Fabien, homosexuel, s’adressant à son amant Hugues à propos de son amant Herbert, dans la pièce Le Cheval bleu se promène sur l’horizon, deux fois (2015) de Philippe Cassand) ; « Fabien, Herbert et moi : deux crocodiles et un pigeon. » (Hugues, idem) ; « J’ai rencontré le Grand Amour. Comme dans les contes de fée. On s’est trouvés dans un plan à trois. Le coup de foudre. Il m’a fait un vrai festival de Cannes » ; « Nous devrions tous baiser. Femmes, hommes, animaux, tous en même temps. Que nous finissions tous ensemble, et que le monde explose, et nous mourrons comme ça, heureux. » (Hernán s’adressant à Fede à qui il propose un plan à trois avec son partenaire régulier, dans le film « El Tercero » (2014) de Rodrigo Guerrero) ; « Nous formons avec Marie ce que nous appelons un trio. C’est quelque chose de rare. » (Seb et Loïc, en couple homo, parlant de « leur » fille-à-pédés, dans le film « Pédale dure » (2004) de Gabriel Aghion) ; etc.

 

On se rend compte que le trio représenté dans les fictions traitant d’homosexualité dénature la réalité de l’identité (le trio peut être le signe à la fois d’orgueil et de schizophrénie). Par exemple, dans son concert Free : The One Woman Funky Show (2014), Shirley Souagnon rit de son identité d’OVNI télévisuel en tant que femme, homosexuelle et noire : « Ces trois personnes, c’est moi ! » Le trio dénature également la réalité du couple, formé normalement de deux personnes seules. Pire, il la divise (en croyant l’élargir), au nom par exemple de la constitution d’une famille sentimentale, amicale (… et parfois « un peu » biologique), au nom d’une fusion dite « spirituelle » entre ses trois participants, au nom du progrès, de « l’évolution » de la société, de la convivialité, de la force politique (le trio est dit par nature « transgressif » et « révolutionnaire »), du libertinage, de l’égalité : « Tu vois, c’est tellement anticonstitutionnel d’être pédé et d’aimer une nana, je veux dire de vivre un couple à trois comme on fait, c’est tellement hors-norme que les gens nous en veulent presque de le vivre. » (Simon parlant de son trio avec Polly – la lesbienne – et Mike – son ami/amant –, dans le roman Des chiens (2012) de Mike Nietomertz, p. 46)

 

Par exemple, dans le film « Rue des roses » (2012) de Patrick Fabre, Medhi et Axel, en couple homo, intègre la petite fille du premier, Allison : cette dernière fait peu à peu copine-copine avec le copain de son père. Dans le film « Les Amours imaginaires » (2010) de Xavier Dolan, Marie et Francis se disputant le même homme, Nicolas, la figure de l’androgynique christique.

 

Derrière le motif du trio se cache au fond le fantasme de se prendre pour Dieu, d’incarner la Trinité (Père-Fils-Esprit Saint), mais une Trinité pour le coup désincarnée, tournée sur elle-même, excluante, androgynique : cf. la chanson « Line » de Nicolas Bacchus (avec la notion de trio androgynique), le roman Le Bal du Comte d’Orgel (1924) de Raymond Radiguet (où l’on retrouve des couples à deux ressemblant à des couples à trois), le film « 2 × Adam, 1 × Eva » (1959) d’Herbert Jarczyk, le film « Les Valseuses » (1974) de Bertrand Blier (avec Jean-Claude/Marie-Ange/Pierrot), le film « Jamais deux sans trois » (1951) d’André Berthomieu, la pièce Un Rôle pour deux actrices et demie (2012) de Christine Berrou, etc. Le trio est la symbolisation d’un désir schizophrénique (donc homosexuel et hétérosexuel), comme le montrent les propos de John, la lesbienne de la pièce Elvis n’est pas mort (2008) de Benoît Masocco, qui s’adresse à ses deux compagnons Marilyn et Elvis en ces termes : « Faites comme si vous étiez seuls… mais à trois. » On retrouve l’idée d’égocentrisme à trois en bouche d’autres personnages homosexuels : « La petite sera le bras, Marie, la tête, et moi, la décision. » (Alexandra, l’héroïne lesbienne parlant de ses deux bonnes avec qui elle couche de temps en temps, dans le roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, p. 140)

 

Par exemple, dans le one-(wo)-man show Désespérément fabuleuses : One Travelo And Schizo Show (2013), le trio qu’incarne à lui seul le travesti M to F David Forgit – la grand-mère Mémé Huguette, la mère, et la fille Gwendoline – symbolise trois schizophrénies… et, au bout du compte, une misandrie ainsi qu’une misogynie.

 

Le trio rappelle finalement l’échec cuisant du héros homosexuel qui n’est pas passé loin de la différence des sexes, ni de l’amour homosexuel. Par exemple, dans la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert, Yves Saint-Laurent commence à tomber amoureux de Victoire, « la femme qu’il a toujours voulu épouser » dira-t-il, mais au lit, face à un autre concurrent plus fort que lui, qui pose sa main sur la sienne (qui caressait Victoire) puis l’évacue, il abandonne la course…

 

Pour compléter la réflexion sur ce code, je vous renvoie au code « Personnage homosexuel empêchant l’union femme-homme » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) L’allusion énigmatique et répétée au trio :

« Dédié à nous trois. » (cf. la dédicace de Marguerite Radclyffe Hall à son roman The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude, 1928)

 

Il existe dans le réel des « petits arrangements amoureux à trois » : soit dans le cas de la bisexualité (On peut penser à un « trio » célèbre, Henry Miller/sa femme June/Anaïs Nin), soit dans le cas de l’infidélité consentie dans l’homosexualité (cf. Yves Saint-Laurent/Pierre Bergé/Bernard Buffet). Je connais certains cas dans ma vie personnelle.

 

Je ne suis pas le premier à parler de ce thème. Quelques rares études ont déjà été menées pour traiter du trio comme un emblème spécifiquement crypto-gay. Je pense notamment aux timides travaux d’Ève Kosofsky Sedgwick (Essays On Critical Theory And Queer Culture, 1998) montrant rapidement que le trio est le signe avant-coureur d’une homosexualité latente entre les deux voire les trois personnes de même sexe qui le composent, un symbole de misogynie. En revanche, je pense que ma lecture de ce symbole va un peu plus loin car elle ne cherche pas à prouver une quelconque essence homosexuelle ou amour homosexuel, ni une thèse victimisante anti-hommes ou anti-hétéros. Je m’applique simplement à expliquer que le trio homosexuel, fictionnel comme réel, dit une misogynie, une misandrie, une misanthropie, une homophobie, sociales et intrinsèques aux désirs homosexuel et hétérosexuel.

 

TRIO noir

Film « Antarctica » de Yair Hochner


 
 

b) Le trio en tant qu’exclusion de la différence des sexes et du désir homosexuel :

Dans le documentaire « Bixa Travesty » (2019) de Kiko Goifman et Claudia Priscilla, Linn, jeune homme brésilien travesti en femme, confesse qu’il est en « ménage à trois » avec Felipe et Alvaro, et que ça lui convient très bien.
 

Le triolisme, comme l’explique très justement Éric Zemmour dans son essai Le Premier Sexe (2006), est un simulacre d’accueil de la différence des sexes, une agression faite à la masculinité et la féminité même, un élan prometteur mais avorté vers l’autre sexe parce qu’il n’est pas assumé jusqu’au bout et qu’il est englué par un effet de mode pro-homosexualité beaucoup plus arbitraire et télévisuel qu’on ne croit : « Et si nombre d’homosexuels n’étaient pas victimes d’une erreur de perspective en confondant leur désir mimétique pour le fameux tiers avec un désir homosexuel du même ? Paul ne désire pas Pierre, mais il désire Valérie en Pierre. Nuance. […] Le trio mari, femme, amant doit être revu avec ces lunettes. […] L’intercesseur du désir des hommes est désormais l’homosexuel. […] Pour plaire aux femmes, l’homme doit se comporter comme un homosexuel. » (pp. 66-67) René Girard parle de ce curieux triangle amoureux : « Je voudrais rapporter le cas, que j’ai pu observer récemment, d’un jeune homme, fiancé à une jeune femme de la façon la plus bourgeoise, et qui tombe amoureux d’un homme plus âgé que lui, qu’il prend de son propre aveu d’abord pour modèle, puis pour maître et enfin pour amant. Cet amant lui-même, bien que ‘purement homosexuel’, me racontera plus tard que, nullement attiré par mon malade au départ, il n’avait été intéressé que par la présence de sa fiancée et la situation triangulaire créée lors d’un dîner. Lorsque le malade, jaloux de son amant, abandonna pour lui sa fiancée, cet amant se désintéressa complètement de lui. Interrogé par moi sur les raisons de ce revirement, il me dit : ‘L’homosexualité, croyez-moi, c’est vouloir être ce que l’autre est.’ » (Jean-Michel Oughourlian cité dans l’essai Des choses cachées depuis la fondation du monde (1978) de René Girard, pp. 469-470)

 

Film "Les Chansons d'amour" de Christophe Honoré

Film « Les Chansons d’amour » de Christophe Honoré


 

Comme je le disais en introduction, les couples à trois, qui échangent des actes aussi bien homosexuels qu’hétérosexuels (ils préfèrent ne pas les définir, d’ailleurs !), sont beaucoup plus fréquents qu’on ne le pense au sein du « milieu homosexuel » (il n’y a qu’à voir la flopée d’hommes mariés et de femmes mariées mettant timidement les pieds dans la communauté homosexuelle pour s’en convaincre). Ils témoignent d’un inconscient mépris de la différence des sexes et du Réel.

 

En effet, si elle est mariée à un homme, la personne homosexuelle qui veut vivre une polysexualité essaie d’imposer progressivement à son mari sa meilleure amie, ou bien de le pousser dans les bras d’une maîtresse pour que l’adultère de ce dernier justifie son propre adultère lesbien, ou alors carrément pour se partager ensemble la maîtresse. Si l’individu homo est marié à une femme, il essaie d’imposer progressivement à celle-ci son meilleur ami, ou bien de la pousser dans les bras d’un amant pour que l’adultère de cette dernière justifie son propre adultère gay, ou alors carrément pour se partager ensemble l’amant. « Ils en arrivent fréquemment à jeter leur propre femme dans les bras d’hommes auxquels ils aimeraient s’offrir eux-mêmes. Ces complaisances sont généralement suivies de crises de jalousie. Beaucoup de drames et de crimes de la jalousie proviennent ainsi de ce genre d’homosexualité latente. Le dégoût que les invertis éprouvent à l’égard de la femme, ils le retrouvent devant le partenaire passif avec lequel ils viennent de s’accoupler et qui est devenu ainsi l’être féminin. » (Jean-Louis Chardans, Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970), p. 260) Si la personne homosexuelle souhaitant vivre le triolisme est célibataire, qu’elle soit homme ou femme, elle essaie de s’insérer d’abord en tant qu’ami du couple homme-femme, pour ensuite se rapprocher du membre du sexe qui l’intéresse le plus, et lyncher l’intrus(-e).

 

Film "The Houseboy" de Van Spencer Lee Schilly

Film « The Houseboy » de Van Spencer Lee Schilly


 

En ce moment, les projets d’homoparentalité (par GPA – Gestation Pour Autrui –, par insémination artificielle, par arrangement amical entre deux couples homos), en plus d’imposer le trio (voire le quatuor !) comme socle idéal et réel des « nouvelles familles » (car c’est bien des familles à minimum 3 parents que les militants homos proposent de former et de légiférer !), rentrent parfaitement dans la mouvance de misandrie et de misogynie sociales que nous vante la plupart des médias et des lobbies pro-gay : cf. le documentaire « La Grève des ventres » (2012) de Lucie Borleteau (avec le couple lesbien Clara/Lise qui se sert d’Alexandre pour « avoir un enfant »).

 

Par exemple, les couples homosexuels d’hommes louant le ventre d’une femme pour qu’elle porte « leur » enfant, et qui dans la plupart des cas se débarrassent ensuite de la mère (avec son consentement, c’est ça le drame, puisqu’elle repart avec le fric, et au mieux son statut de gentille « génitrice/marraine existante ») parlent bien, par leur pratique de la GPA, de cette « exploitation mutuelle » (donc misogyne et misandre) vécue dans la structure éphémère du trio (Je ne fais que citer les propos de la mère porteuse rapportés pendant la conférence « L’Homoparentalité aux USA » de Darren Rosenblum à Sciences-Po Paris, le 7 décembre 2011).

 

Et dans le discours des couples homosexuels qui obtiennent un enfant par insémination artificielle, on observe clairement que non seulement la réalité du fantasme du trio dans le cadre temporaire de la conception de l’embryon est souvent niée, mais qu’en plus l’exclusion de la différence des sexes est délibérée : « On est deux, pas un trio. » (Pascale et Julie, « mères » lesbiennes ayant eu un enfant par insémination artificielle avec donneur anonyme, donc en éjectant le père après utilisation, au micro de l’émission 7 minutes pour une vie intitulée « Homoparentalité : Le Parcours de deux mamans et deux papas », dans Le Magazine de la Santé sur la chaîne France 5, diffusée en décembre 2009)

 

Le trio homosexuel dénature la réalité du couple, formé par essence de deux personnes seules. Pire, il la divise (en croyant l’élargir), au nom par exemple de la constitution d’une famille sentimentale, amicale (… et parfois « un peu » biologique), au nom d’une fusion dite « spirituelle » entre ses trois participants, au nom du progrès, de « l’évolution » de la société, de la convivialité, de la force politique (le trio est dit par nature « transgressif » et « révolutionnaire »), du libertinage, de l’égalité : « Ernestito, Mirna et Pepe étaient devenus inséparables. » (Alfredo Arias, Folies-Fantômes (1997), p. 282) ; « Ce qu’on essaie de nous faire oublier dans la revendication d’égalité des couples homosexuels [par rapport aux couples femme-homme], c’est que chez eux ce n’est pas le couple qui fera l’enfant mais un trio. Un trio au minimum, un quatuor dans certains cas, mais pas un couple. » (Jean-Pierre Winter, Homoparenté (2010), p. 205)

 

Dans les faits, soit la réalité du trio est totalement niée (dans les cas d’homoparentalité principalement), soit totalement idéalisée (dans les cas de l’infidélité). J’ai déjà entendu des amis homos en couple – depuis parfois une trentaine d’années ensemble – justifier le fait qu’ils accueillaient de temps en temps dans leur lit une troisième personne pour « pimenter » leur couple, comme un « cadeau » qu’ils s’offraient mutuellement. Le concept de « trio » est alors applaudi et magnifié comme une « relation de couple améliorée avec valeur ajoutée ».

 
 

c) Le trio en tant qu’irréalité, que désir de se prendre pour Dieu :

Derrière le trio se cache en général le fantasme très inconscient, et finalement particulièrement destructeur, de se prendre pour Dieu, d’incarner la Trinité (Père-Fils-Esprit Saint), mais une Trinité pour le coup désincarnée, tournée sur elle-même, excluante, préservative, peu ouverte sur la vie concrète, androgynique. « Être homosexuel, être Juif, être Blanc sont les 3 jambes sur lesquelles je marche. J’aime utiliser ma judaïté. » (Steven Cohen, le performer transgenre M to F, dans le documentaire « Let’s Dance – Part I » diffusé le 20 octobre 2014 sur la chaîne Arte) Par exemple, dans le one-woman-show Mâle Matériau (2014) d’Isabelle Côte Willems, la comédienne transgenre F to M, pendant qu’elle chante « Are You Boy Or Girl ? », reçoit des spots de couleurs qui projettent sur un mur blanc trois ombres colorées d’elle : une bleue, une rose, une jaune. Signes de sa schizophrénie mégalomaniaque.
 

En d’autres termes, quand le trio s’actualise conjugalement dans le réel, on se retrouve face à trois personnes qui se considèrent et qui s’utilisent plus ou moins sciemment comme des objets de consommation : « Kamel comprit qu’un couple se formait. […] Cette fois il avait composé le trio idéal : remplacer l’insignifiante Julie par David le magnifique, quelle idée de génie ! Une femme, un homme, et lui moitié homme, moitié femme… » (Christian Giudicelli, Parloir (2002), p. 35) Pascal (le philosophe) avait bien raison : qui veut faire l’ange fait finalement la bête… et l’objet !

 
 

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Passer de l’objet à l’idée, pour concrètement nier la personne

Le libertin, pour se justifier de mal agir en appliquant à ses pratiques de consommation sexuelle un vernis de beauté, d’éthique, d’éternité, de spiritualité humaniste et vaguement judéo-chrétienne, qu’elles n’ont pas, aura tendance à passer de l’objet (son amant de passage) à l’idée, pour mieux zapper la personne. À l’instar des dictateurs instrumentalisant leur Peuple au profit de leur « idée de Peuple », pour finalement détruire les Hommes réels. L’enfer est bien pavé de bonnes intentions : il ne sait juste pas reconnaître la dimension humaine des actes d’amour.

L’accusation de personnes est le reflet du libertinage

L’accusation de personnes est le reflet et la jumelle du libertinage. Les mêmes qui permettent tout ne pardonnent rien. Les mêmes qui jugent les fautes « impardonnables » sont ceux qui, en secret, les pratiquent. Pensons par exemple à la mise au pilori publique des pédophiles, des violeurs, des gens comme DSK, à la traque à l’homophobie. Il n’y a qu’un moyen, finalement, que cet effet miroir ne fonctionne pas : c’est le pardon après la condamnation de l’acte mauvais. C’est la Miséricorde. Pour Elle, rien n’est « impardonnable ».

 

Bisexualité : le traître adoré

Bisexualité, le traître adoré

 

 

Quand on dit que l’homosexualité est « tendance » et que notre société actuelle encourage à la vivre, c’est à peine juste. Je crois plutôt qu’on essaie finalement de nous transformer tous en personnes bisexuelles pratiquantes qui ne doivent ni se définir en tant que telles ni assumer leurs actes sexuels. Selon le discours queerisant/bobo de nos contemporains et des prophètes de la Gender Theory, il ne faudrait plus se dire « homo », « hétéro », « bi », ou « trans », et encore moins « femme » ou « homme », mais juste « AMOUREUX ». Travail de « déconstruction », de  « lutte altermondialiste », et de « transcendance des normes culturelles » oblige. On assiste à une sorte de bisexualisation généralisée de la société, où débauche génitale et asexualité sont réunies au service de pratiques amoureuses violentes prétendument inexistantes et banales. Certes, à première vue, deux corps – voire plus si affinité ! – se rencontrent, les parties génitales se frottent concrètement, … mais pourtant, comme la conscience de l’autre et de soi, le respect du Réel, l’horizon procréateur, ne sont pas là, et que la différence des sexes n’est pas désirée, il n’y a pas de SEXUALITÉ à proprement parler. On est dans le génital ; non dans le sexué ni le sexuel.

 

 

Cette propagande du « tout génital sans le sexuel » montre bien l’écart schizophrénique qui se creuse entre intentions et actes, entre fantasmes et Réalité, entre sens et Sens : une bipolarité humaine caractéristique des phases de transition dans notre vie et qui n’est pas négative en soi tant qu’elle reste passagère et non-désirée (elle est justement le signe de notre liberté et de notre évolution !) mais qui peut devenir violente si et seulement si elle est considérée comme un absolu d’identité ou d’amour. L’ambiguïté pour l’ambiguïté conduit à la perte de sens, à l’angoisse, à la frustration, et à la violence. La psychanalyse nous redit que la bisexualité est un état transitoire, une phase enfantine qui, si nous accédons à une maturité d’adulte qui nous donne accès à l’Autre, n’est qu’une passerelle. En aucun cas elle est une identité éternelle. C’est pourquoi – et je vais majoritairement dans ce sens – la bisexualité, peut-être encore plus que l’homosexualité qui serait une réalité fantasmatique stable et définitive (ce qui reste encore à prouver…), est considérée comme un comportement et non une identité, comme une pratique ponctuelle, un « accident », une circonstance, une passade (d’ailleurs, les associations bis ne font pas long feu, en général ; et le courant idéologique actuel a tendance à présenter les bis comme des homos refoulés qui vont tôt ou tard choisir une homosexualité définitive), un papillonnage, une excuse pour l’infidélité et le non-engagement, une muflerie, un fantasme égoïste de toute-puissance (celle de l’Homme invisible androgynique), une hypersexualité surréaliste, que comme une réalité. Au fond, je crois qu’il est juste de penser tout cela sur la bisexualité, mais dans la mesure où on l’applique aussi à l’homosexualité. Car dans la communauté LGBT, on s’arrange de la faiblesse du statut bisexuel pour nier ses liens de parenté/fragilité avec le désir homo, et surtout pour ne pas remettre en cause l’idolâtrie (pour l’homme-objet et la femme-objet) que représente les désirs bisexuel/homosexuel.

 

 

Oui, j’ai bien parlé d’idolâtrie. C’est le point commun qui réunit personnes homos et personnes bis, et qui, de plus, est le nom de la relation qu’elles entretiennent les unes avec les autres. Les personnes bisexuelles recherchent autant qu’elles méprisent/utilisent les personnes homosexuelles : il y a en elles de l’homophobie intériorisée ainsi qu’une juste résistance à la caricature du coming out, à la parodie du couple homo, à la violence du désir homosexuel, au formatage du monde gay/lesbien. Du côté des personnes homos envers les individus bisexuels, c’est tout autant l’amour-répulsion. Elles les voient comme des faux frères, des honteuses, des gens instables, des dominateurs qui prennent et jettent, des hommes mariés avec qui il est impossible de s’engager, des êtres déchirés ne sachant pas ce qu’ils veulent, des clients, des dépressifs, des menteurs, des « papas » qui vont les entraîner dans les « enfers hétéros » (les exs, les possibles conquêtes féminines, les enfants, leur probable retour à une vie « hétéro » rangée), bref, comme des nids à inquiétude et à jalousie. Mais en même temps, pour les personnes homosexuelles, les hommes ou les femmes bis représentent malheureusement LE Fantasme sexuel et affectif par excellence ! Le rêve secret de la majorité des personnes homosexuelles, c’est de se trouver comme partenaire une personne « hétérosexuelle » (= un papa ou une maman de substitution ; quelqu’un de très masculin pour les hommes, ou de très féminin pour les femmes) qui par « amour » tomberait soudain amoureuse d’elles et deviendrait exceptionnellement bisexuelle. Généralement, les personnes homosexuelles n’aiment pas sortir entre elles : un mec trop efféminé, trop homo dans son mode de vie, (tout comme une femme trop « butch » côté femmes) coupe l’appétit. Elles attendent plutôt l’exception bisexuelle qui confirmera la règle homophobe de l’infamie amoureuse homosexuelle ! « On s’est rencontrés parce que c’était lui, parce que c’était moi… ; l’orientation sexuelle et les sexes n’avaient rien à voir, finalement ; s’ils avaient été prédéfinis, nous ne nous serions certainement pas aimés. »

 

 

Le seul grain de sable dans ce conte de fée bisexuel nommé « détournement des hétéros », c’est que la personne bisexuelle (et Dieu sait s’il y en a sur les sites de rencontres homos !), en acceptant de sortir avec une personne homosexuelle, devient fatalement avec le temps un petit peu voire beaucoup trop homosexuelle aux yeux des personnes homos ! Logique implacable ! Elle perd peu à peu le prestige de son titre vu qu’elle a agi en personne homo. La bisexualité n’avait la grandeur que de l’inaccessibilité et du désir homo non-acté. L’enchantement du début de relation s’évanouit. La faute du sujet bisexuel, ce n’est pas tant d’être double/illogique/encore un peu hétéro, que d’être trop homosexuel ! À un moment donné, il finit par être confondu avec une personne homo, et donc il doit dégager. Les personnes homos sont homophobes, y compris avec les individus bis !

 

Ce qui, aux yeux des personnes homosexuelles, paraît insupportable (mais qui est en réalité une bonne nouvelle), c’est que la bisexualité nous prouve que le désir homosexuel n’est ni essentiel ni profond pareil en chacun de nous. Elle met en lumière la caricature du coming out, nous oblige à ouvrir nos frontières vers l’autre sexe, nous rappelle à notre liberté profonde, nous dit : « Ne vous enfermez pas bêtement dans une homosexualité exclusive. L’Amour est une personne avant d’être une orientation sexuelle. N’ayez pas peur de vous laisser surprendre. » Car, en effet, quoi de plus beau que la bisexualité conjuguée à un engagement entier et fidèle dans une relation intégrant la différence des sexes ? Moi, personnellement, j’aime beaucoup rencontrer des personnes bisexuelles qui, après avoir vécu une phase homosexuelle, trouvent une stabilité conjugale durable avec une personne de l’autre sexe, car en général, la relation qu’elles vivent est réellement motivée par l’Amour, le risque, la confiance !

 

Pire que ça : la personne bisexuelle révèle aux personnes homosexuelles et à toute notre société que l’homosexualité est un désir de viol. Ben oui. Quand on dit qu’on est “bi” (souvent par peur d’avouer qu’on est homo ou hétéro), on porte à notre insu l’écriteau “Entrez, c’est ouvert ! Je suis prêt à toutes les expériences (sensuelles, sexuelles) !”… y compris le viol ! Bisexualité, tu nous trahit par l’appel inconscient au viol de ton choix d’ambiguïté !