Archives par mot-clé : Gay Pride

Podcast audio sur l’anti-catholicisme dans les dessins animés des années 1980 en France

Voici un podcast de décryptage des dessins animés des années 1980 diffusés sur les chaînes de télé françaises (Youpi l’école est finie ! sur La Cinq, Récré à deux sur Antenne 2, Amuse trois sur FR3, Le Club Dorothée sur TF1, etc.), avec l’angle insolite du catholicisme : « L’anti-catholicisme dans les dessins animés des années 80 ».
 

 

Philippe Ariño vous démontre que cela fait au moins 40 ans que les dessins animés jeunesse nous poussent à mépriser Jésus et la religion catholique, au profit de la religion énergétique.

 

Ce podcast se découpe en 3 parties :

1 – Les dessins animés clairement anti-catholiques

2 – Les dessins animés de la Nouvelle Religion mondiale, fondés sur l’Énergie et l’Or

3 – Les rares dessins animés « cathos-friendly » voire carrément cathos.

 

Vous pouvez retrouver d’autres podcasts de décryptages de Philippe, sur Youtube, comme par exemple celui sur les goûts musicaux homosexuels, celui sur la série Manifest, celui sur la série Sex Education ou encore celui du discours alchimique du Cardinal Sarah.
 

Réagir à la vague pro-homosexualité (Interview péruvienne)


 

1. L’enseignement de l’Église est-il homophobe ? D’après ton expérience et ton travail, l’Église haït-elle ou discrimine-t-elle les homos ?

L’Église Catholique ne se trompe pas dans ce qu’Elle dit, y compris sur le péché mortel. Et Elle n’a jamais été homophobe. Elle déteste le péché et aime le pécheur ou les personnes qui portent un signe de péché. Et l’attraction homosexuelle ne semble pas être un choix, et est un signe de péché. C’est une peur. Pas une maladie. Mais une peur de la différence des sexes. Toute personne homo a eu peur de ne pas être un « vrai homme » ou une « vraie femme ». Et l’Église catholique ne peut pas défendre une peur.

Ceci dit, pour parler en Vérité, la grande majorité des gens d’Eglise est homophobe. Ils ont peur de l’homosexualité. Les mouvements pro-Vie ne parlent que de l’enfant, et ne dénoncent ni l’Union Civile ni l’hétérosexualité. Et les rares fois où ils sollicitent les personnes homosexuelles, y compris celles qui ne justifient pas la pratique homo et vivent ce que demande l’Église, ils nous utilisent pour diaboliser la pseudo « dictature gay ». Ils ne nous invitent jamais et censurent notre témoignage, alors qu’il est le plus puissant. Les premiers persécuteurs des personnes homos, c’est triste à dire mais ce sont les fondamentalistes pro-Vie comme La Manif Pour Tous ou Hazte Oír. Ils sont là honte de l’Église Catholique.
 

2. Le mois des Gay Pride vient de passer, avec des annonces Facebook et tout. Mais crois-tu que le style de vie qu’adoptent les gays éloignés de Dieu puisse être célébré ?

D’abord la Gay Pride n’est pas le « style de vie gay ». C’est juste un carnaval, une certaine image de l’homosexualité qu’il convient d’écouter et d’analyser. Bien souvent, nous, catholiques, réagissons, nous nous indignons, pour ne pas réfléchir, pour ne pas parler de l’homosexualité ni des personnes. Le problème de l’homosexualité, ce n’est pas son image médiatique ni la Gay Pride : c’est la pratique homo. Je fais partie du lobby gay et mes amis aussi. Je vous demande de nous aimer.
 

3. Je te pose une question que tu abordes dans ton livre L’Homosexualité en Vérité ?, avec la cruauté de l’interview brève : si tu es croyant et homo, quoi faire ? Existe-il un chemin ?

Oui. Le chemin, c’est Jésus et Marie. Concrètement, c’est l’annonce de la Vérité par un apostolat mondial de l’homosexualité. Nous, personnes homos continentes, ne devons pas être écoutées simplement par misérabilisme ou devoir moral, « parce que nous en aurions besoin », « parce qu’il faudrait nous accompagner ». Non. Nous sommes les gardiens des sacrements les plus importants de l’Église (Mariage, Eucharistie, Confession, et surtout Sacerdoce), nous sommes les meilleurs boucliers humains de l’Église parce que la persécution anticléricale repose principalement sur l’homosexualité.

Et nous avons le pouvoir de combattre l’hétérosexualité (appelé aussi diversité ou égalité), qui est notre ennemi numéro 1, qui est le pilier idéologique de la Franc-Maçonnerie, et que la grande majorité des catholiques défendent. L’hétérosexualité, écoutez-moi bien, est le diable déguisé en différences des sexes. Toutes les lois pro-gays passent au nom de l’hétérosexualité. Alors que l’Église n’a jamais défendu l’hétérosexualité. J’appelle donc toutes les personnes homos qui m’écoutent et qui aiment Jésus à se lever pour défendre leur Église. C’est maintenant ou jamais.

Le film de propagande LGBT « PRIDE » de Matthew Warchus arrive dans des lycées français : bonne ou mauvaise nouvelle ?


 
 

a) Réagir sans sur-réagir :

Je viens d’apprendre à l’instant par une mère de famille que le lycée privé (…de foi) de son fils va rendre obligatoire en classe le visionnage du film « Pride » (2014) de Matthew Warchus (qui vient de sortir au cinéma en France depuis le 17 septembre 2014). Je l’ai vu en avant-première il y a deux semaines. À la base, je ne comptais pas en faire une critique (j’ai juste fait le relevé des codes de mon Dico que j’y identifiais). Mais là, le contexte m’y oblige. On ne peut pas laisser faire ça.

 

(Vous comprenez maintenant à quoi ça sert que j’aille voir mes films de merde ? ;-))

 
pride affiche
 

Alors bien sûr, je vais éviter de faire un article trop long (parce que déjà, je n’ai pas trop le temps ; et puis parce que l’idée, c’est de ne pas vous embrouiller avec trop d’infos). Je vais aussi éviter de la jouer dans l’alarmisme disproportionné à la Civitas quand le film « Tomboy » s’était aussi retrouvé au programme de certaines sorties scolaires (une de mes nièces, en Touraine, avait eu droit à voir « Tomboy » au cinéma : ma sœur et mon beau-frère s’étaient faits, comme tous les autres parents, prendre en otage). Ma mise en garde sera donc concise, pas alarmiste, mais va quand même essayer d’aller droit au but.

 

Tout d’abord, je commencerai par dire que si ces films de propagande LGBT (car c’est vraiment le mot : ce sont des films de propagande, avec une idéologie bien précise qui est diffusée, à savoir « l’ouverture à toutes les différences sauf à la différence des sexes et à la différence Créateur/créatures ») parviennent à franchir le comité de censure d’établissements scolaires même catholiques, c’est – ça tombe sous le sens – que déjà, ils ne sont ni horribles, ni traumatisants, ni choquants à première vue (ce ne sont pas tous des « Vie d’Adèle », avec 4-5 scènes de « pur » sexe dedans…). Pas besoin, par conséquent, de perdre son calme et de se gendarmer outre mesure. L’opposition ferme et argumentée, l’humour et le dialogue, devraient largement suffire à éteindre ces petits incendies que sont ces intrusions cinématographiques dans le milieu scolaire et qui n’en sont pas moins anodines. Si ces films plaisent à une équipe pédagogique ou à un proviseur, c’est évidemment que leurs messages sont pleins de bons sentiments, que les images, la musique et les histoires d’amitié qu’ils racontent sont un minimum belles et travaillées. Même si je ne les conseille absolument pas à un public jeune (sauf s’ils sont accompagnés de la légende qui va avec, ou de l’étiquette « films de propagande LGBT » qu’ils méritent), même si j’en décèle les nombreuses impostures, ça ne m’empêche pas de continuer à les trouver touchants, parfois captivants, et en général très bien faits (il ne faut pas non plus diaboliser les choses, ni prendre les profs pour des cons ou des gens inconséquents : certains, en proposant ces films, veulent bien faire). Un film de propagande ne peut pas être totalement de mauvaise qualité, car il doit au moins user de formes et de bonnes intentions qui font oublier aux spectateurs qu’il est un film de propagande. Ce que je veux dire par là, c’est que même si la démarche pédagogique ne se justifie pas, elle s’explique parfois très bien et a des sincérités que le film LGBT actuel, autrement plus vraisemblable et sensible que « La Cage aux folles », aide objectivement à porter. On ne peut pas le nier.

 

Alors si on cherche bien, qu’est-ce qui peut bien motiver une équipe de profs à amener des élèves voir un film comme « Pride » ? Je doute que ce soit pour en faire une étude critique avec mon Dictionnaire en main, auquel cas la démarche pourrait à la rigueur être géniale ^^ (… car un film pareil, s’il est décrypté correctement, aide au développement du sens critique des élèves et à l’identification des techniques de lavage de cerveaux et de propagande développées par de nombreux systèmes totalitaires d’hier et d’aujourd’hui). Mais à moins d’un miracle ou d’interroger l’initiateur du projet, je ne me fais pas trop d’illusions. Je pense que l’objectif d’un prof qui a trouvé ce film beau et touchant, et qui veut le faire voir à ses élèves de lycée, c’est tout simplement : le souci de faire connaître une page de l’histoire de l’Angleterre des années 1980 sous Margaret Thatcher (« objectif culturel » : gros LOL), le souci de donner aux élèves le goût de l’engagement politique et des actions de solidarité, le souci de proposer un film drôle, bon enfant, original, convivial, un poil « subversif » dans sa thématique, le souci de la transmission de « valeurs » telles que le respect, l’ouverture, la tolérance, l’égalité, la solidarité, l’accueil des différences, la diversité… tous ces concepts humanistes qui sont merveilleux s’ils sont connectés au Réel (c’est-à-dire à la différence des sexes et la différence Créateur/créatures) et qui deviennent de la grosse merde idéologique et même tyrannique de la pensée unique libérale libertaire dès que la différence des sexes et Dieu sont virés des messages… ce qui est exactement le cas du film « Pride » !
 
 

b) Message de fond du film : « La différence des sexes peut être expulsée en identité et en Amour : c’est pas grave »

Voyons voir d’un peu plus près pourquoi « Pride » rentre tout-à-fait dans la catégorie des « œuvres culturelles de propagande ».
 
 

En gros, le message de ce film,
 

1 – c’est de montrer que l’éjection de la différence des sexes (la différence qui nous a fait naître, celle qui nous aide à nous aimer nous-mêmes tels que nous sommes et à aimer vraiment les autres, à nous donner pleinement à eux) est banale et merveilleuse à la fois (ce qui est faux et violent : sans la différence des sexes, nous ne sommes plus humains, nous n’existons pas, et nous aimons moins)
 

2 – c’est de montrer que l’homosexualité et l’hétérosexualité sont de vraies identités (ce qui est également faux et anti-Droits de l’Homme : nous sommes homme ou femme, et Enfants de Dieu, point barre ; nous ne sommes pas que des animaux et nous ne pouvons pas être définis uniquement par notre orientation sexuelle du moment – aussi durable et fixée soit-elle parfois -, par nos pulsions ou nos fantasmes sexuels ou nos sentiments ou les personnes qui nous attirent sexuellement ou notre pratique génitale ; en clair, nous ne sommes pas des bites ni des vagins sur pattes ! Les personnes homosexuelles existent, parfois de manière transitoire, et « les » homos ainsi que « les » hétéros, ça n’existe pas !)
 

3 – c’est de montrer que l’« amour » homosexuel est possible, extraordinaire et équivalent à l’amour entre l’homme et la femme (ce qui est également faux : l’amour vrai, c’est l’accueil de la différence des sexes, qu’on soit marié ou célibataire consacré). Dans le film « Pride », d’ailleurs, quasiment tous les personnages présentés comme « hétéros » finissent par faire leur coming out homo ! Même parmi les papys et les mamies ! C’est vraiment un film pro-homosexualité et pro-hétérosexualité… mais qui en revanche laisse de côté l’amour entre l’homme et la femme… d’où sa gravité).

 
 

Ce message filmique global reposant sur la discrimination de la différence des sexes est objectivement violent. Mais cette violence, diffuse à plein d’endroits dans le film (j’y reviendrai plus en détail tout de suite après), n’est pas flagrante car d’autres différences moins fondatrices que la différence des sexes sont chantées et sont censées la faire oublier : je pense d’une part à la différence des espaces (illustrée dans le film par la rencontre émouvante et exotique du milieu ouvrier et du milieu homo que tout semble opposer, illustrée par le mélange improbable entre le monde citadin londonien et le monde provincial gallois, illustrée par la description de l’engagement politique et associatif des personnages, illustrée par de nombreux actes de solidarité concrets, illustrée par le rappel d’événements dramatiques comme l’arrivée du Sida ou le rejet homophobe des parents, qui forcément touchent notre corde sensible, etc.) ; je pense également à la différence des générations (illustrée dans le film par la vie des familles et les réconciliations/conflits qui s’y vivent, par le melting pot amusant entre les jeunes et les vieux retraités, etc.) ; je pense enfin un peu à la différence des sexes (car même si elle n’est pas célébrée dans la conjugalité femme-homme ni dans le célibat consacré – voire elle est carrément rejetée dans l’homosexualité et partiellement rejetée dans la bisexualité hétérosexuelle -, elle reste quand même un peu défendue par la célébration d’amitiés touchantes tout au long du film). Ceci étant dit, qui s’attaque à la différence des sexes finit aussi par s’attaquer à la différence des espaces et à la différence des générations à un moment ou un autre, vu que les 3 composent le même Réel. Donc nous allons voir maintenant comme ces exclusions des différences fondatrices de l’humain, faites paradoxalement au nom de l’accueil des différences, se traduisent concrètement dans le film « Pride ».
 
 

c) Comment se traduit concrètement l’expulsion de la différence des sexes dans ce film ?

Je souligne pour commencer un détail très important : qu’en dépit des apparences et de ses intentions, « Pride » n’est pas un film sur l’homosexualité, et encore moins sur la vie de couple homo (qu’on ne voit jamais, d’ailleurs). Il est tout au plus un film sur le coming out, c’est-à-dire l’annonce et les débuts de la visibilité sociale de l’étiquette identitaire et amoureuse « l’homosexuel »… et a fortiori ce coming out est à peine filmé, ou alors il est filmé de manière très manichéenne et victimisante. « Pride » n’affronte jamais la problématique de l’homosexualité concrètement, sur la durée et en termes de pratique amoureuse. Il est juste un portrait des soubresauts de l’attrait homo-érotique qui peut exister à l’adolescence, de l’excitation des débuts du militantisme LGBT et de la découverte de l’engagement politique pour une cause qui commence à faire la Une des médias parce qu’elle bénéficie de la compassion mondiale pour le dommageable Sida. C’est important de le garder en tête : « Pride » a totalement aplati, déproblématisé l’homosexualité. Par exemple, les histoires d’« amour » homo dans le film sont zappées (on comprend que Joe, le jeune « Rastignac » de l’histoire, a été dépucelé par un mec le soir du bal, mais on n’en saura pas plus ; on comprend que Mark, le leader de l’asso LGBT, est un coureur de pantalons qui n’arrive pas à construire une relation et qui enchaîne les mecs au point d’attraper le Sida ; on voit que la vie et l’entente de l’unique « couple » homo du film, formé par Geth le libraire et par Jonathan, ne sont pas du tout filmées ; dans ce film, l’amour homo est réduit à une expérience ponctuelle en état d’ébriété, comme on en a l’illustration avec la femme d’Alan qui vire sa cuti avec Stephany, un soir d’ivresse, juste pour « vivre cette expérience sensuelle inédite »). Donc les profs qui voudraient, par le biais du visionnage de ce film, encourager leurs élèves à connaître l’homosexualité, déculpabiliser des jeunes qui se cherchent sexuellement, favoriser des « coming out », une meilleure acceptation des personnes homosexuelles, et permettre une plus grande ouverture d’esprit à leur classe, se fouteraient le doigt dans l’œil bien profond : ce film ne parle absolument pas d’homosexualité. Il extériorise le thème d’une part sur le contexte géopolitique dramatisé de grèves ouvrières des années 1980 (= la fermeture d’une mine de charbon au Pays de Galles), sur fond de lutte des classes et de lutte contre la pauvreté (en filigrane est dénoncée la soi-disant « dictature » anti-pauvres et « homophobe » de Margaret Thatcher, femme politique qui est textuellement traitée de « salope » dans le film) ; d’autre part, il extériorise et travestit le problème de l’homosexualité sur l’amitié (comme si amour et amitié pouvaient être mises exactement sur le même plan…) ou sur la famille (comme si la famille et l’« amour » homo étaient la même chose : il y a énormément d’incestuel dans ce film, même si le réalisateur Matthew Warshus serait estomaqué de l’apprendre).

 

Cette tentative de mélange des genres de relations humaines (amour-amitié, amour-famille, amour-solidarité) n’a pour but que de nous embrouiller l’esprit par un chantage aux sentiments. Ni plus ni moins. Dans la tête du spectateur, il se voit mal dénoncer les incohérences du scénario, ou la violence de l’homosexualité, puisque celle-ci est enrobée de camaraderie, de multiculturalité, de solidarité, de combat contre le « fascisme » thatchérien, de violons, de trompettes, de fous rires, de larmes (face à ce qui nous est présenté comme de « terribles injustices »), de couleurs arc-en-ciel, de rebondissements supposément spectaculaires (les prises de parole des héros homos ou hétéros sont soit totalement catastrophiques, soit d’immenses succès nourris d’applaudissements dithyrambiques : super réaliste, on y croit…),.
 

 

Mais réveillons-nous. « Pride » fait passer les militants homosexuels pour des héros super courageux… alors que concrètement, le milieu homosexuel de cette époque était déjà un baisodrome, et que ces militants ont instrumentalisé la misère des mineurs gallois pour se victimiser eux-mêmes et pour donner à la lutte pour les droits LGBT une teinte révolutionnaire, solidaire, universelle, qui aurait occulté les conséquences de leur propre pratique amoureuse. Tout le film « Pride » repose sur une falsification historique. Je n’ai jamais vu un tel succès et une telle euphorie pour le discours homosexuel dans le monde ouvrier réel, et encore moins dans le monde homosexuel réel. Je n’ai jamais vu une telle camaraderie dans le milieu associatif LGBT (l’amitié a très peu de place dans les cercles relationnels homos puisqu’elle est très vite sclérosée par la drague). Je n’ai jamais vu d’amours solides et joyeuses dans l’homosexualité. Je n’ai jamais vu le milieu ouvrier célébrer l’homosexualité comme dans « Pride » (plutôt le contraire !). Je n’ai jamais vu de bals hétéros-homos ni de Gay Pride finir en triomphe et grandes pompes comme c’est montré dans le film. Et pourtant, croyez-moi, ce n’est pas faute d’avoir assisté à bon nombre de Gay Pride, de m’être engagé dans bon nombre d’associations LGBT. Ce film est un tissu de mensonges, de fantasmes concrétisés uniquement sur pellicule, et de falsifications historiques. La réalité du monde homosexuel, ce n’est pas ça, et c’est même beaucoup moins rose. Il y a, je trouve, une violence, dans ce genre de films, à traiter sur le mode de la légèreté humoristique et de l’esthétisme émotionnel euphorique, des réalités qui non seulement ne sont pas poétiques, mais qui en plus sont révoltantes et violentes (la violence des relations homosexuelles, la souffrance et l’insatisfaction qu’elles font vivre, les vols et les viols et les nombreuses atteintes à l’amitié dans le « milieu homo », la brutalité de la drague, les infidélités très nombreuses entre personnes homos, les actes d’homophobie perpétrés exclusivement entre personnes homosexuelles, la perte de joie dans le mode de vie homosexuel, etc. etc.). L’enfer est pavé de bonnes intentions : on le sait déjà, mais je préfère le répéter plus que jamais pour le film « Pride », au cas où certains oublieraient ce que vivent vraiment les personnes homosexuelles, y compris celles qu’on croit heureuses, stables, en couple et « hors milieu ».

 

Derrière la guimauve dégoulinante et imparable que nous sert « Pride » se trouve en réalité l’idéologie sentimentaliste et anti-naturaliste LGBT qui stipule que le corps sexué n’a que peu d’importance, que tous les hommes-pères sont au pire des cons et des bébés lâches au mieux des homos refoulés, que nous serions tous des anges asexués libres d’aimer qui nous voulons à partir du moment où nous obéirions à nos sentiments et à notre ressenti individuel. À travers ce type de films, on nous laisse croire (à tort) que la débauche de sensations – et de leurs mises en scène – va pallier à l’éjection de la différence des sexes, éjection qui reste pourtant objectivement violente puisque la différence des sexes est le socle de notre existence à tous et, si elle est librement accueillie, le roc qui nous permet d’aimer au mieux, pleinement et durablement, et de respecter les amitiés même entre personnes de même sexe.

 

Comme je l’avais déjà expliqué l’été dernier à propos d’un autre film, « Au premier regard » de Daniel Ribeiro (un film similaire à « Pride » quant à sa force de frappe : très mignon, très bien fait, vraisemblable, traitant du lien entre handicap et homosexualité, un petit bijou de propagande qui pourrait d’ailleurs tout à fait faire l’objet idéal d’une sortie scolaire aux yeux d’une équipe pédagogique un peu « gay friendly »), il y a une forme de malhonnêteté intellectuelle à mêler à l’homosexualité des sujets graves comme la pauvreté. Car même si je suis le premier à dire qu’il y a un lien entre ces thématiques, je me bats pour que ce lien-là ne soit ni causalisé, ni défendu, ni idéalisé, ni utilisé pour justifier l’homosexualité sous forme d’identité ou d’amour, car cela reviendrait à justifier la souffrance et le mal. Et ça, éthiquement, ce n’est pas humain ! Y compris si, par cette tentative de victimisation-essentialisation de l’homosexualité, on prétend vouloir le bien des personnes qu’on victimise/transforme en espèce (« les » homos ; « les » hétéros ; « les » mineurs ; « les » victimes ; etc.).

 

Ce qui est très gênant dans « Pride », parce que l’analogie entre les deux me parait totalement abusive, c’est que l’homosexualité est mise sur le même plan que la pauvreté matérielle et sociale des mineurs. Implicitement, Matthew Warchus laisse entendre que l’amour homosexuel serait aussi fort et légitime que la pauvreté (et les tentatives solidaires pour soi-disant l’éradiquer). C’est totalement méconnaître le point de vue des pauvres réels sur l’homosexualité. C’est totalement méconnaître la misère sexuelle qui sévit au sein du « milieu homo », et qui est le reflet de la misère sexuelle vécue en milieu ouvrier ou pauvre.

 

Projeter sur les personnes prolétaires des fantasmes d’hommes homosexuels petits-bourgeois (et qui plus est, des fantasmes inhumains, car rejeter la différence des sexes qui nous a fait tous naître, relève de l’inhumanité angéliste), c’est malhonnête, c’est mal les connaître ELLES, c’est utiliser leur pauvreté à des fins romantico-individualistes, c’est exploiter la fragilité des plus faibles. Cette jalousie maquillée en « solidarité universelle » est très bien illustrée par les propos de Mark, le jeune chef de l’association LGBT du film « Pride » voyant dans un article de journal relatant les répressions policières que subissent les mineurs gallois du pain béni pour redorer le blason de la cause homosexuelle : « Ils s’en prennent à ces pauv’ gars plutôt qu’à nous ! » ; « On a subi les mêmes épreuves que vous. » ; « Je ne sais pas à quoi ça rime de défendre les droits gays, mais je le fais pour les autres. » ; « On écrit l’Histoire. Gays et hétéros ensemble ! » ; « Solidarité pour toujours ! Solidarité pour toujours ! » (sur l’air de « God Saves The Queen »). Sérieusement : ce « Touche pas à mon ouvrier ! » LGBT, on dirait l’agressif et sincère « Touche pas à mon pote ! » de S.O.S. RACISME, le « Touche pas à mon Sidéen ou à mon Homo ! » de S.O.S. Homophobie et du Refuge, le « Touche pas à mon Pape, touche pas à MON homo, touche pas à mon Chrétien d’Irak ! » de Frigide Barjot, le « Touche pas à mon enfant ! » de la Manif Pour Tous. Personnellement, je trouve cela choquant et honteux. Il n’y a qu’un seul personnage dans le film qui se rend compte de cette instrumentalisation, de ce violent « mélange des genres » et de l’arrivisme de ce groupe de 10 militants LGBT venu du jour au lendemain annexer son village gallois à des fins purement idéologiques : c’est Maureen. Et comme par hasard, ce témoin gênant est filmé comme « LA Méchante hétérosexuelle » de l’histoire, la femme frustrée et rigide, mal mariée. Elle est décrédibilisée et homophobisée puisque sa dénonciation est montrée comme un phénomène totalement isolé, minoritaire et arbitraire (or, je doute que, hors des salles de cinéma, ce soit le cas dans le vrai monde réel des travailleurs ; et je peux vous assurer que non seulement cette gêne n’est pas homophobe mais que de surcroît elle est humaine !).

 

Je comprends bien que l’innocence, la simplicité et la fragilité des mineurs (une réalité apparemment subie : d’ailleurs, dans le film, on nous montre que beaucoup de ces travailleurs n’ont pas eu la chance de faire des études… ni des thèses gays friendly féministes LOL… à l’exception de Sian, la « mère-courage » hétéro-gay-friendly qui intègrera une université à la toute fin de l’intrigue) confère du naturel, de l’empathie, de l’émotion, de la tendresse et du courage à l’homosexualité. Or l’homosexualité, on ne sait pas si elle est subie ou non. On ne sait pas si c’est un fait de nature ou de culture. Comme la pauvreté matérielle et culturelle, elle est bien le signe d’une anomalie (une personne ne fuit pas la différence des sexes sans raisons ; et une personne ne devient pas pauvre s’il n’y a pas eu à l’origine une erreur dans la répartition des richesses au sein de l’Humanité). Mais l’homosexualité touche à l’identité sexuée, à la génitalité et à la sexualité bien plus profondément que la précarité des travailleurs, qui eux ne remettent pas en cause la différence des sexes ni la sexualité. Donc moralement et concrètement, c’est difficile de mettre sur le même plan le monde ouvrier et l’homosexualité. La pauvreté possède une innocence (parce que la plupart du temps elle s’impose à la personne qui le porte) que l’homosexualité n’a pas (certaines homosexualités sont des choix, voire des mauvaises actions). L’homosexualité est tout sauf innocente : le rejet de la différence des sexes qu’elle illustre est signe de souffrances et, si celles-ci ne sont pas identifiées, moteur de violences.
 
PRIDE Victimisation
 

Il y a derrière cette analogie compassionnelle entre homosexualité et lutte des classes une volonté de mettre la pratique homosexuelle à l’abri de la responsabilité, de l’analyse, de la liberté, du jugement, et d’entourer l’homosexualité du doux manteau de la solidarité. Car qui, humainement, peut être contre l’existence des pauvres ou en faveur d’un système politique qui les broie ? À travers cette réalité de la misère matérielle et de la relation d’amitié avec la personne pauvre, Matthew Warchus a la malhonnêteté de nourrir deux amalgames fâcheux : d’une part l’amalgame entre l’amitié et l’amour (qui sont pourtant des réalités relationnelles bien distinctes) ou entre la sexualité et la politique, et d’autre part l’amalgame entre la personne et le désir/l’amour/la pratique homosexuels qu’elle peut vivre (or une personne humaine ne se définit par le désir sexuel qu’elle ressent, ni par l’acte sexuel qu’elle pose, ni par le « couple » homosexuel qu’elle composerait).

 

Il n’est pas juste qu’un film comme « Pride » instrumentalise la pureté des nécessiteux ou des vieux syndicalistes, l’empathie face à la fragilité qu’est la précarité matérielle et intellectuelle, pour justifier d’un amour ambigu (= le « couple » homo) qui, contrairement à la pauvreté, n’est pas un fait physique : il n’existe pas de corps homosexuel (alors qu’il existe un misère concrète). L’homosexualité est prioritairement un fait désirant, bien avant de se manifester par une réalité corporelle.

 

Comme les films de blacksplotation (qui n’hésitent pas à marier le Gay Power au Black Power, l’anti-homophobie à l’anti-racisme, pour servir leurs propres intérêts), on peut constater actuellement que certains réalisateurs pro-gays surfent sur la vague victimiaire de la crise économique actuelle pour donner corps à leurs propres fantasmes amoureux.

 

La juxtaposition cinématographique d’un mal et de l’homosexualité est une recette qui marche de plus en plus car elle repose sur un chantage aux sentiments et des réalités humaines douloureuses qu’il est extrêmement difficile de cautionner. Tout comme le téléfilm « Juste une question d’amour » (2000) de Christian Faure exploitait la difficulté du coming out pour justifier le « couple » homo, tout comme le film « Les Joies de la famille » (2008) d’Ella Lemhagen exploitait le malheur de l’orphelin pour justifier la « beauté » de l’adoption « homoparentale », tout comme le film « Beautiful Thing » (1996) d’Hettie MacDonald exploitait le malheur de la précarité et du chômage pour dépeindre une idylle amoureuse homosexuelle, tout comme le film « My Beautiful Laundrette » (1985) de Stephen Frears exploitait le malheur de la xénophobie pour justifier la force de l’« amour » homo, tout comme le film « Loin du Paradis » (2002) de Todd Haynes exploitait le malheur du racisme pour justifier la « véracité » de l’« identité homosexuelle », tout comme le films « Love ! Valour ! Compassion ! » (1997) de Joe Mantello exploitait sincèrement le malheur du Sida pour justifier les « couples » homos, tout comme le film « Tom Boy » (2011) de Céline Sciamma exploitait le « malheur » de l’adolescence et de sa soi-disant « cruauté » pour justifier la schizophrénie transidentitaire d’une adolescente, tout comme le film « Comme les autres » (2008) de Vincent Garenq exploitait le malheur de la stérilité pour justifier la Gestation Pour Autrui (= les mères porteuses), tout comme le téléfilm « Un Amour à taire » (2005) de Christian Faure exploitait le malheur de la guerre pour justifier la force de l’histoire d’« amour » homo, tout comme le film « Cloudburst » (2011) de Thom Fitzgerald exploitait le malheur de la vieillesse et de la mort pour prouver la beauté du « couple » homo, tout comme le film « Harvey Milk » (2008) de Gus Van Sant exploitait le malheur de l’homicide et de la folie meurtrière pour justifier le courage du militantisme LGBT, tout comme le film « I Love You Phillip Morris » (2009) de Glenn Ficarra exploitait le malheur de la prison pour démontrer la puissance de l’amour entre deux hommes, tout comme le film « Week-end » (2011) d’Andrew Haigh exploitait le désespoir amoureux pour justifier la « beauté » des « plans cul », tout comme le film « Le Secret de Brokeback Mountain » (2005) d’Ang Lee exploitait le malheur de l’homophobie intériorisée pour rappeler l’urgence du coming out, le film « Pride » utilise également la misère du monde ouvrier et les maladresses parfois violentes d’un monde hétéro découvrant l’existence des personnes homosexuelles, pour nous faire signer aveuglément le certificat d’« amour » décerné à la relation entre deux personnes de même sexe. Désolé, mais chez moi, ça ne prend pas.

 

La Méchante Maureen Barry

La Méchante Maureen Barry


 

Clou du spectacle et du chantage aux sentiments : Matthew Warchus a mis en place dans son film une méthode très classique pour redorer le blason de l’homosexualité à peu de frais : la composition de la caricature des « hétéros ». C’est une astuce très répandue actuellement : pour neutraliser les critiques sur l’« amour » homosexuel, beaucoup de réalisateurs homosexuels ou gays friendly extériorisent systématiquement les problèmes des « couples » homos sur cette espèce cinématographique odieuse que composent « les hétérosexuels »… Et nous avons de sacrés spécimens de « beaufs hétéros » dans « Pride ». Deux catégories manichéennes, pourrait-on dire : d’un côté les « hétéros qui resteront homophobes à jamais » (genre Maureen, genre les parents de Joe, genre Jason – le frère de Joe -, genre les bourgeois qui tiennent des pancartes « Brûlez en enfers » à la première Gay Pride du début du film, genre Margaret Thatcher, cette « salope », genre les pavés anonymes et insultants brisant la vitrine du local-librairie LGBT, etc.) ; et puis de l’autre côté les « hétéros homophobes repentis… et ‘ouverts’ (puisqu’ils sont en réalité homosexuels ou au moins convertis à la gay friendly attitude) » : je pense par exemple à Carl (le jeune qui roule les mécaniques et qui finira par tendre la main à ses frères étrangers homosexuels), à Sian (la fille à pédés énergique et boulote, qui défendra bec et ongles la cause homo quand elle intègrera l’Université), à Martin (le syndicaliste brutalement gay friendly), à Dai (le père de famille un peu lettré, grand orateur… de cabaret), à Cliff (le vieil hétéro qui finira par révéler son homosexualité après tant d’années de secret et de refoulement), à Hefina (l’hétérote agressivement gay friendly et qui se révèlera lesbienne à la toute fin du film : elle et Cliff sont d’ailleurs mis en avant sur l’affiche de « Pride », alors que, comme par hasard, ce faux couple hétéro – pléonasme – est en réalité composé d’un gay et d’une lesbienne déguisés en hétéros), la mère de Geth (catholique, « homophobe », et qui « s’ouvrira » in extremis à la fin), la vieille mamie Gwen (qui fait sa crise d’ado et son bain de jouvence à 80 balais, et qui joue la miraculée de Lourdes au contact de ses nouvelles amies lesbiennes : « Vous m’avez ouvert les yeux, les filles. » conclura-t-elle, les yeux pleins de larmes, à la fin de l’histoire), l’un des fils homophobes de Maureen-la-Méchante (qui assistera à la Gay Pride londonienne finale). Grâce à ces monstrueux « hétéros homophobes » (mais « vieux cons » si mignons et si touchants quand ils se convertissent à LEURS idées LGBT…), les cinéastes pro-gays font passer les limites et les fragilités des « couples » homos réels pour un processus purement circonstanciel et extérieur : si les unions homosexuelles n’arrivent pas à perdurer et à satisfaire, ce serait uniquement parce que la société ne les encouragerait pas, et qu’elles seraient empêchées par la cruauté gratuite des Hommes (… et surtout des hommes : les mâââles).

 

Quand nous voyons des films traitant de l’homosexualité et choisissant pour toile de fond des événements terribles venant détruire une romance ou une identité homosexuelle présentée comme idyllique, nous avons tous envie de dire à la fin de la projection que la spectaculaire catastrophe ou l’agression extérieure rendent les unions homosexuelles, sinon idéales, du moins justifiables, même si dans les faits, ces films sont bien éloignés de la réalité quotidienne des « couples » homosexuels de chair et d’os. Qui peut essayer de comprendre avec un certain détachement les mécanismes de l’homophobie, après avoir vu un tel carnage d’« amour » construit sur pellicule ? Qui peut paraître humain de remettre en cause une image d’Épinal de l’« amour » homosexuel contrebalancée par une violence visuelle assurément percutante, mais ô combien exagérée ? Difficile, par exemple, de ne pas avoir le cœur brisé en voyant sur les écrans le désarroi du mari de Cathy Whitaker dans le film « Loin du Paradis » (2002) de Todd Haynes, homme qui n’arrive résolument pas à réprimer ses penchants homosexuels malgré toute la bonne volonté du monde, ou de ressortir du visionnage du « Secret de Brokeback Mountain » (2006) d’Ang Lee en affirmant la bouche en cœur que l’« amour » homosexuel n’est pas réel et merveilleux, même si nous l’avons vu entravé. Qui peut humainement se réjouir de voir dans le film « Pride » de Matthew Warchus la spoliation (pour reprendre les termes de cette chère Arlette Laguillier) des droits des mineurs, la répression policière, la maltraitance des villageois au chômage et crevant de froid en hiver sans chauffage, le rejet d’un adolescent homo par sa famille bourgeoise hétérosexiste ? Personne ! Vraiment personne !

 

Mais, je vous le demande, est-ce que l’Amour ne se manifeste que dans les cas extrêmes où la liberté humaine se rapproche de la nullité ? À travers de tels films, les réalisateurs homosexuels sont plutôt en train d’enfermer l’Amour et l’identité humaine dans un cadre déterministe et fataliste. Ils valident par un regard orienté vers des situations particulièrement dramatiques une vision de l’existence humaine et de l’Amour très négative. Ils énoncent que l’Homme n’est que rarement libre et heureux, et que c’est cela sa vérité d’amour et d’identité. Comment peuvent-ils espérer ensuite que leur défense du désir homosexuel apparaisse aux yeux de la société comme aimante ?

 

Dernière image du film : le délire, les lendemains qui chantent...

Dernière image du film : le délire, les lendemains qui chantent…


 

Il semble paradoxal de prouver l’Amour par son contraire. Face à ce nouveau type de « films choc » (qui, soit dit en passant, dans leur formule, ne s’opposent pas aux comédies sentimentales et enjouées de l’homosexualité), nous sommes pris entre l’extrême compassion et la méfiance de l’émotionnel, si bien travaillé par le cinéma. Au fond, la révolte et l’empathie ne sont que des effets recherchés par ceux qui créent le mythe du couple télégénique homosexuel heureux, ou de l’homosexuel assumé et émancipé post-coming out, pour masquer la réalité d’une union beaucoup moins rose dans les faits. Ils universalisent, en quelque sorte, un méfait opéré sur un personnage télévisuel homosexuel vivant un scénario-catastrophe, pour ensuite justifier leurs utopies personnelles et des revendications concernant la communauté gay très discutables dans la réalité concrète. L’injustice filmée ne laisse pas de marbre, c’est sûr. Mais il y a une sorte de malhonnêteté intellectuelle à traiter de l’homosexualité avec d’autres thèmes qui lui sont liés mais non de manière causale (par exemple la folie meurtrière des camps de concentration, le déferlement incontrôlé de l’homophobie dans certains milieux sociaux culturellement pauvres, une agressivité familiale exacerbée, l’émergence inopinée du Sida, le handicap, etc.). Malhonnêteté rehaussée par sa prétention (hypocrite) au réalisme et à la biographie. C’est particulièrement visible dans le film « Pride » puisque celui-ci se veut « historique », basé sur des événements réels et des personnes ayant réellement existé. En réalité, comme je le disais un peu plus haut, ce film n’est absolument pas réaliste. Il est tellement noyé de poncifs manichéens et d’intentions militantes et sentimentalistes pro-LGBT qu’il régurgite l’hypocrisie de ses nombreux et inconscients anachronismes. La sincérité n’est pas la Vérité. Et ce n’est pas en reconstituant un passé avec des références télévisuelles, des reportages-télé, des coupures de journaux ou des bribes de clins d’œil musicaux « d’époque » (les chanteurs « New Wave » et punk de la légendaire Great Britain Eighties : Sylvester, Bronski Beat, Bananarama, Franckie Goes To Hollywood, etc.) que Matthew Warchus est parvenu à masquer qu’il a projeté sur le passé et aussi sur le présent ses propres fantasmes amoureux et militants, fantasmes pour le coup mégalomaniaques et finalement dépressifs (car OUI, finir son film par des images d’une Marche des Fiertés 1985 triomphante et ensoleillée avec Big Ben en décor, c’est du pur folklore et du pur mensonge ; OUI, finir son film en tressant une couronne de lauriers à Mark Ashton, le jeune et beau leader LGBT mort du Sida à l’âge de 26 ans – comme si l’héroïsme pouvait se résumer à mourir jeune du Sida et pour n’importe quelle cause politique minoritaire -, c’est de la pure dépression). Le pire, c’est que je crois que cette volonté naturaliste du réalisateur est sincère et qu’il ne s’est même pas rendu compte qu’il manipule le Réel et le public par l’émotionnel.
 

Mark se jetant sur les "bads news"

Mark se jetant sur les « bads news »

 

Ne nous laissons donc pas déborder par nos émotions : écoutons la Réalité, qui est bien meilleure conseillère. En effet, comme humainement et éthiquement nous ne pouvons pas cautionner la haine et le mépris, nous sommes encouragés à signer sans réfléchir à des versions idylliques et victimisantes de l’« amour » homosexuel. On se réveille. Le couple homosexuel n’est pas le couple homosexuel cinématographique. La communion fraternelle vécue entre personnes homos (parfois concrète et porteuse d’une chaleur amicale réelle, d’un vrai pouvoir d’actions associatives de solidarité) n’est pas le couple homo. C’est con de le dire mais c’est vrai. Ne confondons pas l’amitié avec l’amour, la solidarité avec l’amour conjugal, la sincérité de nos bonnes intentions avec la Vérité (on peut vouloir le bien sans le faire), les films avec la Réalité, l’euphorie (adulescente) avec la vraie joie.
 

L'homosexualité, c'est "génial". Pourquoi? Parce que ça DOIT être génial.

L’homosexualité, c’est « génial »

 

Pour conclure, je finirai cet article en vous mettant en garde sur la signifiance du titre du film « Pride ». Contrairement au mot « fierté » en français, il recouvre en anglais, exactement comme en espagnol, le double sens de « fierté » et d’« orgueil », double sens qu’on perd en français. Nous pouvons nous appuyer sur cette polysémie anglo-saxonne et hispano pour comprendre que malgré les bonnes intentions, la Fierté homosexuelle est un orgueil déguisé. Et le film « Pride » pue l’orgueil qui nous regarde avec des étoiles et des cœurs rainbow dans les yeux. Un vrai lavage de cerveaux sincère. Alors au nom de nos enfants, au nom du respect que vous nous devez à nous les personnes homosexuelles, s’il vous plaît, n’y succombez pas (même si nous ne savons pas vous le demander).
 
pride
 
brain
 
 

Pour accéder au menu de tous les codes de mon Dictionnaire des Codes homosexuels, cliquer ici.

 

Code n°12 – Appel déguisé

appel déguisé

Appel déguisé

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

Ça hurle en moi « J’ai mal ! »… mais personne, pas même moi, n’y prête attention !

 

Le paradoxe du cri au secours du personnage homosexuel (et, a fortiori, de son émetteur artistique réel), c’est qu’il dénonce un viol/un fantasme de viol en même temps qu’il ordonne, par une injonction mi-sérieuse mi-cynique, qu’on le cache. Exactement comme l’injonction paradoxale de la demande de silence (l’interjection « Chuuut !!! ») qui, si elle est faite avec excès, finit par faire plus de bruit que le calme initialement réclamé. Sous prétexte que les personnes homosexuelles ne seraient pas les seules à souffrir, ou que le malheur ne serait pas typiquement homosexuel (ce qui est totalement vrai), beaucoup d’entre elles, par phobie d’une pathologisation de l’homosexualité sur leur personne, par peur d’une nouvelle stigmatisation victimisante/misérabiliste à leur encontre, vont par conséquent défendre avec véhémence l’idée inverse qui consiste à dire qu’elles et leurs pairs ne souffriraient jamais (ce qui n’est pas moins absurde). Mais leur hargne les trahit. Provocation, intimidations, obscénités, travestissement, colère pour « normaliser » un désir homosexuel qui n’a justement rien de « normal » (cf. « Mais on ne souffre pas !!! » hurlent les militants du FHAR), exhibition provocatrice, rires gras, scotch sur la bouche des « fouilleurs de merde », etc. : la communauté homo appelle avec insistance à ce qu’on ne l’écoute pas… mais paradoxalement, cette insistance appelle.

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Manège », « Déni », « Solitude », « Milieu homosexuel infernal », « Homosexualité noire et glorieuse », et « Désir désordonné » dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

Pour accéder au menu de tous les codes, cliquer ici.

 

 

FICTION

 

a) Le personnage homosexuel lance un S.O.S. :

APPEL Copi Difficulté

 

On entend parfois les artistes homosexuels crier leur douleur, sur le mode dramatique ou parodique, comme par exemple dans le roman Biographie d’une douleur (2007) de Didier Mansuy, le roman La Difficulté d’être (1947) de Jean Cocteau, la pièce L’Homosexuel ou la difficulté de s’exprimer (1971) de Copi, le film « Quels adultes savent ? » (2003) de Jonathan Wald, le film « Keiner Liebt Mich » (« Personne ne m’aime », 1993) de Doris Dörrie, le film « Lost And Delirious » (« La Rage au cœur », 2001) de Léa Pool, le film « Ich Will Doch Nur, Daß Ihr Mich Liebt » (« Je veux seulement que vous m’aimiez », 1976) de Rainer Werner Fassbinder, la pièce Love ! Valour ! Compassion ! (1994) de Terrence McNally, le film « ¿ Por Qué Le Llaman Amor Cuando Quieren Decir Sexo ? » (1993) de Manuel Gómez Pereira, « ¿ Qué He Hecho Yo Para Merecer Esto ? » (« Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? », 1984) de Pedro Almodóvar, la chanson « Comme j’ai mal » de Mylène Farmer, le film « Tu crois qu’on peut parler d’autre chose que d’amour ? » (1999) de Sylvie Ballyot, le film « Help » (2009) de Marc Abi Rached, le roman Une douleur normale (2013) de Walter Siti, la pièce À quoi ça rime ? (2013) de Sébastien Ceglia, la chanson « Au secours » de Véronique Rivière, la pièce Orage (et des espoirs) (2017) d’Alexis Matthews, le one-man-show Aimez-moi ! (2018) de Pierre Palmade, etc.

 

« Ma longue agonie n’est pas celle de ma vie mais celle d’une lignée de filles incapables de la flamme qui soutient une famille. » (Copi, Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « C’est terrible. Je suis tout seul. Dans le noir. » (Tom, le héros homosexuel, dans le film « The Talented Mister Ripley », « Le Talentueux M. Ripley » (1999) d’Anthony Minghella) ; « Il fait toujours nuit pour moi. » (Léo, le héros homosexuel du film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho », « Au premier regard » (2014) de Daniel Ribeiro) ; « Maintenant, je pleure. » (Jean-Pierre, l’homme rejeté par les deux femmes lesbiennes qui l’entourent, dont Fanny sa femme, dans la pièce Un Lit pour trois (2010) d’Ivan Tournel et Mylène Chaouat) ; « Tu crois qu’on sera heureux un jour ? » (cf. la réplique finale de Vincent à son amant Stéphane, dans la pièce Un Tango en bord de mer (2014) de Philippe Besson) ; « Dans cette ville, on ne pouvait jamais être sûr de ce qui s’était passé. La souffrance s’imprégnait-elle dans les murs des bâtiments, les cris capturés telle une image sur une plaque photographique ? » (Jane, l’héroïne lesbienne, à propos de Berlin, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 39) ; « J’étais pas épanoui totalement. Il me manquait quelque chose. » (Jeanfi, le steward homo dans le one-man-show Au sol et en vol (2014) de Jean-Philippe Janssens) ; « J’ai jamais eu de chance avec les p’tits copains. J’ai toujours été spolié. » (idem) ; « Tante Eva, pensez-vous qu’aucune société ne veuille de moi ? » (Anthony, le héros homosexuel du roman At Swim, Two Boys, Deux garçons, la mer (2001) de Jamie O’Neill) ; « Je me suis toujours trompé dans mes choix. » (George s’adressant à son amant Paul, dans le film « L’Objet de mon affection » (1998) de Nicholas Hytner) ; « Être un homme libéré, tu sais, c’est pas si facile. » (Jérémy Lorca dans son one-man-show Bon à marier, 2015) ; « C’est pas drôle d’être homo. Y’a des mecs dans la salle, ce soir ? Bande de salauds ! C’est vous qui nous faites souffrir ! » (Fabien Tucci, homosexuel, en pleurs, dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch, 2015) ; « Devenir gay, c’est pas très gai. » (idem) ; « ta vie est une période transitoire. » (Guen, homosexuel, s’adressant avec mépris à son amie lesbienne Ninon, dans la pièce Les Favoris (2016) d’Éric Delcourt) ; « Arrête de faire semblant d’être ce que tu n’es pas. » (Ninon, idem) ; « Même si la racine de cet amour est bonne, comme l’est la racine de tout autre amour humain, son tronc et ses branches ont été courbés. Je ne sais pas pourquoi je suis attiré par ce désir déréglé. J’en souffre. Mais je refuse d’appeler l’arbre courbé un arbre droit. » (Pawel Tarnowski, homosexuel continent, repoussant son élan physique et sentimental pour le jeune David, dans le roman Sophia House, La Librairie Sophia (2005), p. 419) ; « Il y a une partie bonne et l’autre partie est une blessure infligée par le sitra ahra. Cette blessure, est-ce qu’elle vous fait mal ? Oui, elle me fait mal. » (Pawel parlant de son élan homosexuel, idem, p. 477) ; « C’est moi que je n’aimais plus. » (Louise, le personnage trans M to F, dans le téléfilm « Louis(e) » (2017) d’Arnaud Mercadier) ; « J’aimerais être sous morphine tout le temps. » (Thibault, malade du Sida, dans le film « 120 battements par minute » (2017) de Robin Campillo) ; « Vous pensez que j’ai un problème ? » (Virginia Woolf confiant sa gêne par rapport à son incapacité à aimer et au désir passionnel que lui voue son amante Vita Sackville-West, dans le film « Vita et Virginia » (2019) de Chanya Button) ; etc.
 

Un dessin de Jean Cocteau de 1926, dans l’album Maison de Santé, représente un gnome nu tracé d’un trait tremblé, avec une bulle où figure un « J’ai mal ! » Dans son spectacle-cabaret Dietrich Hotel (2008), Michel Hermon parle du cri de l’enfant qui retentit dans la nuit parce qu’il est laissé seul : le spectateur comprend que l’enfant, c’est l’artiste lui-même. Dans le film « Mon Arbre » (2011) de Bérénice André, la petite Marie vit super mal d’avoir été conçue sans amour par ses quatre « parents » homosexuels.

 

À la fin de son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch (2015), Fabien, le comédien homosexuel, filme son public en leur demandant de compléter sa phrase « Le coming out… », par un hurlement collectif euphorique « ÇA PEUT FAIRE MAL ! ».
 

L’icône gay par excellence en France, Mylène Farmer, n’a pas été choisie comme porte-parole de la communauté homosexuelle par hasard. En effet, elle est la plus plaintive des chanteuses françaises : « 8, j’ai mal. » (cf. la chanson « Maman a tort ») ; « Pauvre humanité muette… » (cf. la chanson « Leïla ») ; « Comme j’ai mal, je ne saurai plus comme j’ai mal. » (cf. la chanson « Comme j’ai mal ») ; « Je suis saignée aux quatre veines. » (cf. la chanson « Agnus Dei ») ; « Elle a deux vies mais pas de chance, pas d’équilibre, mais elle fait de son mieux, elle penche. » (cf. la chanson « Lonely Lisa ») ; « C’est bien ma veine, je souffre en douce. » (cf. la chanson « Je t’aime Mélancolie ») ; « Je cherche une âme qui pourra m’aider. » (cf. la chanson « Désenchantée ») ; « Un sentiment de n’être rien du tout. » (cf. la chanson « J’ai essayé de vivre ») ; « Si je suis en prison, et j’y suis, pourquoi pas une autre. Délivrez-moi, ta, talala. Je suis pas là, suis pas de ce monde. » (cf. la chanson « Monkey Me ») ; etc. Elle donne corps et voix à la plainte cachée de beaucoup d’individus homo-sensibles.

 
 

b) Que lamente le personnage homosexuel ?

B.D. "Kang" de Copi

B.D. « Kang » de Copi


 

C’est d’abord l’expression d’un vide existentiel, d’un dégoût de vivre, qui ne se rapporte pas à quelque chose de précis. Un malaise global qui renvoie à un Tout dont les contours sont difficiles à cerner, mais qui certainement touche un peu à l’ensemble des domaines de la vie (affectif, amical, professionnel, spirituel, etc.) : « Je suis dans le vide. J’ai rien. » (Didier à sa maman, dans le one-man-show Chroniques d’un homo ordinaire (2008) de Yann Galodé) ; « J’étais une épave. Je me sentais vraiment mal. » (Emory, le héros homo efféminé évoquant son adolescence, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « Je préfèrerais être heureuse. » (Petra, l’héroïne lesbienne du film « Die Bitteren Tränen Der Petra Von Kant », « Les Larmes amères de Petra von Kant » (1972) de Rainer Werner Fassbinder) ; « Quand je réfléchis, j’ai 38 ans et je n’ai rien vécu. […] Je suis en jachère. » (Marcy, l’héroïne lesbienne de la pièce Un Mariage follement gai ! (2008) de Thierry Dgim) ; « J’ai l’impression d’être un tableau… abstrait. » (François parlant de Dominique qui le prend pour une bête curieuse parce qu’il est homo, dans la pièce On la pend cette crémaillère ? (2010) de Jonathan Dos Santos) ; « Je suis une caricature. » (la figure de Sergueï Eisenstein, homosexuel, dans le film « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway) ; « J’ai besoin qu’on me tienne la main. Je suis fatiguée. […] J’me sens tellement seule, fragile, et provisoire. » (Charlène Duval, le travesti M to F, dans son one-(wo)man-show Entre copines, 2011) ; « Ma vie est un échec. Et je ne sais même pas comment j’en suis arrivé là… » (Hugo, l’homosexuel refoulé de la pièce Ça s’en va et ça revient (2011) de Pierre Cabanis) ; « Qu’est-ce que je vais faire de ma vie ? Je ne sais rien faire. » (Gwendoline à la fin du one-(wo)-man show Désespérément fabuleuses : One Travelo And Schizo Show (2013) du travesti M to F David Forgit) ; « L’enfant sent en lui qu’il est porteur d’une minuscule fissure. […] C’est une chance et une souffrance. » (Damien, le travesti M to F racontant son adolescence et la perception de sa « transsidentité », dans le pièce Brigitte, directeur d’agence (2013) de Virginie Lemoine) ; « Quant à moi, je serai la conteuse de ces malheurs. » (l’actrice parlant de la vie de Dorian Gray, dans la pièce Le Portrait de Dorian Gray (2012) d’Imago) ; « Ah si ! J’ai une vie privée ! Privée de tout, c’est vrai… mais privée quand même. » (cf. le sketch « La Solitude » de Muriel Robin) ; « Elle doit être triste, ta vie. » (Greg, le héros gay s’adressant à son amie bisexuelle Jézabel, dans le film « La Mante religieuse » (2014) de Natalie Saracco) ; « Je n’en peux plus de toute cette merde. Je ne sais plus à quoi m’accrocher ! » (Mélodie, l’héroïne bisexuelle dans le film « À trois on y va ! » (2015) de Jérôme Bonnell) ; « Personne ne m’a jamais respecté. » (Loïc, personnage homo, dans le film « Pédale dure » (2004) de Gabriel Aghion) ; etc.

 

Par exemple, dans la pièce Le Fils du comique (2013) de Pierre Palmade, Pierre, le héros homosexuel, passe aux aveux : « Je ne suis pas sûr de m’aimer. » Quand Isabelle le flatte (« Vous n’avez jamais rien raté ? »), il lui répond laconiquement et cyniquement : « Seulement ma vie privée. » Dans le film « Facing Mirrors : Aynehaye Rooberoo » (« Une Femme iranienne », 2014) de Negar Azarbayjani, Adineh l’héroïne transsexuelle F to M envie Rana la femme mariée, et pense s’exiler en Allemagne pour se faire opérer et changer de sexe : « Tu crois que ta vie sera meilleure une fois que tu seras opérée ? » lui demande Rana. « Non, je n’en suis pas sûre. » rétorque Adineh.

 

Souvent, les plaintes du personnage homosexuel s’originent dans son insatisfaction personnelle par rapport au désir homosexuel, et à la relation amoureuse homosexuelle en général, même si la part de lui-même qui veut encore « y croire » vient les démentir : « Comment peut-on arriver à être heureux quand on est gay ? » (Didier dans le one-man-show Chroniques d’un homo ordinaire (2008) de Yann Galodé) ; « J’aurais aimé être un pédé heureux. » (Éric Caravaca dans le film « Dedans » (1996) de Marion Vernoux) ; « Qui a dit ‘Montre-moi un homosexuel heureux, je vous montrerai son cadavre.’ ? » (Michael, le héros homo du film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « Pourquoi être gay est-ce si difficile ? » (Eddie, déçu que Scott, qui l’a dépucelé, ne le rappelle plus et l’ait pris pour un simple « plan », dans le film « The Big Gay Musical » (2010) de Casper Andreas et Fred M. Caruso) ; « Bon, vous savez quoi ? Être homo, c’est pas toujours gai/gay. » (Samuel Laroque dans son one-man-show Elle est pas belle ma vie ?, 2012) ; « Tu cherches ta vie entière un amour, et quand tu l’as trouvé, tu souffres. Tu souffres autant que tu es heureuse. » (la voix narrative de la pièce musicale Arthur Rimbaud ne s’était pas trompée (2008) de Bruno Bisaro) ; « Ma vie ne se résume à rien. Personne à aimer. J’ai été toute ma vie un homme seul. Un homosexuel. » (Hanz dans la pièce Entre vos murs (2008) de Samuel Ganes) ; « Un homosexuel est un homme qui souffre et qui a mal. […] Depuis que je suis petit, mon existence est un calvaire. […] Personne ne m’a jamais dit je t’aime. » (Bernard, le héros homosexuel déclaré de la pièce À quoi ça rime ? (2013) de Sébastien Ceglia) ; « J’arrive pas à déchiffrer les raisons de cet amour-là. » (Stéphane, le héros homosexuel s’adressant à son jeune amant Vincent, dans la pièce Un Tango en bord de mer (2014) de Philippe Besson); « Est-ce que je ne suis pas en train de m’attacher artificiellement à un lien qui finalement ne vaut rien ? » (Adrien en parlant de sa relation foireuse avec Malcolm, dans le roman Par d’autres chemins (2009) d’Hugues Pouyé, p. 59) ; « Vous savez, dans la vie, j’ai couché avec plus d’hommes qu’on peut en dénombrer dans la Bible. Jamais un homme m’a dit ‘Je t’aime’… et que j’ai cru. Ça m’embête énormément. » (Arnold, le héros homosexuel du film « Torch Song Trilogy » (1989) de Paul Bogart) ; « Ça fait cinq, […] si je repense à mes amours. […] Ils m’ont tous détesté à la fin […] on ne s’est pas vraiment aimés. » (Willie, le héros homosexuel du roman La meilleure part des hommes (2008) de Tristan Garcia, p. 279) ; « Plus je vieillis, moins le sexe m’intéresse. Je cherche quelqu’un à qui parler. C’est dur à trouver. » (le protagoniste du film « À la recherche de Garbo » (1984) de Sidney Lumet) ; « Cette succession d’états riches en émotions avait rythmé nos vies jusqu’à ce qu’elles s’y résumassent, sans autre perspective qu’attendre, jouir puis pleurer. » (la voix narrative lesbienne, dans le roman Mathilde, je l’ai rencontrée dans un train (2005) de Cy Jung, p. 8) ; « Je souffre de ne pas savoir quelle blessure vous me faites. » (le narrateur homosexuel parlant à l’inconnu du parc, dans la pièce Dans la solitude des champs de coton (1985) de Bernard-Marie Koltès) ; « Mais de quoi étais-je donc le complice ?? […] Mais de qui étais-je donc complice ? » (Luca, le chanteur homosexuel du spectacle musical Luca, l’évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès) ; « Tu sais très bien que la vie que tu m’offres n’est faite que de pleurs, de déchirures et de tracas. » (Fanchette à son amante Agathe, dans la pièce Les Amours de Fanchette (2012) d’Imago) ; « Y’a toujours au fond de moi une petite voix qui disait non à tout ça. » (Tom, le héros homo catho par rapport à la pratique homo, dans la pièce Les Vœux du Cœur (2015) de Bill C. Davis) ; « J’aurais mieux fait de me casser une jambe le soir de notre rencontre. » (Thomas s’adressant à son amant François, dans la pièce L’un dans l’autre (2015) de François Bondu et Thomas Angelvy) ; « L’homosexualité, c’est pas pour moi. » (idem) ; « Amour, étoile que je n’ai pas. » (le chœur des prostitués homosexuels chantant dans la voiture, dans le film « Mezzanotte » (2014) de Sebastiano Riso) ; « L’Amore Te fotte. » (cf. une inscription sur le mur dans le film « Mezzanotte » (2014) de Sebastiano Riso) ; « Personne ne semble se rendre compte que j’existe. » (Nina, l’héroïne lesbienne dans la pièce Géométrie du triangle isocèle (2016) de Franck d’Ascanio) ; « Je ne suis rien. Je n’existe pas. » (idem) ; « Personne ne m’aime. Personne ne m’entend. » (idem) ; « J’ai peur de partir à la dérive. » (Lola l’héroïne lesbienne s’adressant en pleurs à son amante Vera, idem) ; etc.
 

Par exemple, dans la pièce Gouttes dans l’océan (1997) de Rainer Werner Fassbinder, les deux amants homosexuels s’avouent l’un à l’autre la souffrance qu’ils s’infligent en restant ensemble : « Je ne vais pas bien. » dit Franz à Léopold qui lui répond : « Moi non plus. » À la fin de l’intrigue, Franz est tellement au fond du trou (« Je suis malheureux ! Personne ne peut me comprendre. ») et tellement mal consolé par son ex-compagne Vera (« Pourquoi pleures-tu ? » lui demande-t-elle… ce à quoi Franz rétorque : « Parce que je suis malheureux ! Je passe par toute la gamme de la souffrance. Tant de malheur ! ») qu’il finit par se suicider par empoisonnement.

 

La détresse du protagoniste homosexuel est souvent profonde et superficielle, les deux à la fois, puisqu’il est complice de son propre malheur (et de la censure de celui-ci !) : c’est ce qui la rend amère et difficilement détectable. « J’ai pleuré. De vraies larmes, parce que Loche était parti sans moi, et de fausses larmes, parce que je voulais qu’on m’arrête, qu’on m’interroge. » (Julien Brévaille, le héros homosexuel du roman Portrait de Julien devant la fenêtre (1979) d’Yves Navarre, p. 69) ; « Je suis terriblement heureux et insatisfait. » (idem, p. 14)

 

Dessin de Keith Haring

Dessin de Keith Haring


 

Bizarrement, et contre toute attente, ce n’est pas l’homophobie sociale qui attriste le plus le héros homosexuel : son vrai problème, sa réelle souffrance, c’est l’homophobie intériorisée, c’est la méchanceté des personnes homosexuelles entre elles, c’est la lâcheté et la faiblesse de l’amour homo. Dans la B.D. Kiwi au paradis (1999) de Teddy of Paris, par exemple, les derniers mots du dessinateur après avoir dépeint le désenchantement de la découverte du monde homosexuel, s’adressent aux lecteurs en ces termes : « Bon courage à tous, il vous en faudra. » (Christophe Gendron, Triangul’Ère 1 (1999), p. 151) Difficile d’être plus clair.

 

Les personnages homosexuels se plaignent de leur communauté homosexuelle. Avec eux, on oscille entre jérémiades peu crédibles et invocation très sérieuse : « Quand je pense à la souffrance de tout le peuple gay… » (Omar, le héros homosexuel de la pièce La Mort vous remercie d’avoir choisi sa compagnie (2010) de Philippe Cassand) ; « Si seulement nous pouvions ne pas nous haïr autant… C’est ça notre drame. » (Michael, le héros homo du film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin) ; « J’ai pour amis des folles comme moi, des amis pour passer un moment, pour rigoler un peu. Mais dès que nous devenons dramatiques… nous nous fuyons. Je t’ai déjà raconté comment c’est, chacune se voit reflétée dans l’autre, et est épouvantée. Nous nous déprimons comme des chiennes, tu peux pas savoir. » (Molina à son amant Valentín, dans le roman El Beso De La Mujer-Araña, Le Baiser de la Femme-Araignée (1976) de Manuel Puig, p. 205)

 

Enfin, le cri poussé par le personnage homosexuel est un appel lancé à toute sa société pour qu’elle ne le laisse pas tomber, mais aussi, vu qu’elle ne répond pas comme lui l’espère, et qu’elle fait l’autruche, l’expression d’une profonde déception : « Et sous les apparences, le prix du vêtement, personne ne voit les plaies et le sang de celui qui survit. » (cf. la chanson « Retour à toi » d’Étienne Daho) ; « Personne ne sait consoler un vague à l’âme trop singulier. On vous répond que ça va passer, mais moi je sais que ça va rester. » (cf. la chanson « Pleurer en silence » de Mélissa Mars) ; « Pendant très longtemps, j’ai pas eu le droit de m’exprimer. » (Karine Dubernet dans son one-woman-show Karine Dubernet vous éclate !, 2011) ; « On m’accuse de distribuer ce que chacun vient déposer en moi. » (Julien Brévaille dans le roman Portrait de Julien devant la fenêtre (1979) d’Yves Navarre, p. 176) ; « Il faut que je me rende à l’autre bout de la ville pour le baby-sitting : personne n’a encore compris que c’était plutôt moi qui avais besoin de me faire garder. » (Karin Bernfeld, Apologie de la passivité (1999), p. 24) ; « Je suis jalouse, envieuse, pourquoi voudrait-on que je ne le sois pas ? Qu’est-ce que j’ai à moi, qu’est-ce qu’on m’a donné ? » (Cécile, l’héroïne lesbienne face à une famille, dans le roman À ta place (2006) de Karine Reysset, p. 142) ; « Je ne suis pas seulement ta fille, mais une fille de la terre ! Tu me parles de misère, mais est-ce que tu connais la terre ? La terre de la pissotière, tu en connais l’odeur, ma mère ? » (Lou, l’héroïne lesbienne s’adressant à Solitaire dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur (1986) de Copi) ; « L’énorme bêtise, elle l’a faite en me quittant. Elle m’a trop fait souffrir. Elle m’a largué sans aucun état d’âme. » (Julien, le héros bisexuel, parlant de Zoé, la femme qui l’a quitté, avant qu’il ne devienne homosexuel, dans la pièce Ma belle-mère, mon ex et moi (2015) de Bruno Druart et Erwin Zirmi) ; etc.

 
 

c) Comment le personnage pousse son cri ?

D’abord, l’appel du personnage homosexuel est silencieux. Il passe par un murmure discret, et surtout par les regards de détresse. Des regards comme ceux que Stephen, l’héroïne lesbienne du roman The Well Of Loneliness (Le Puits de solitude, 1928) de Marguerite Radclyffe Hall, perçoit dans le « milieu homosexuel » de son époque : « Et leurs yeux, Stephen n’oublia jamais leurs yeux, ses yeux d’obsédés, ces yeux tourmentés des invertis… […] Stephen apercevait leurs faces ravagées et pleines de reproches, aux yeux mélancoliques et obsédés d’invertis […] Des fusées de douleur, de brûlantes fusées de douleur… leur douleur, sa douleur, soudées ensemble en une immense et dévorante agonie. […] toute la misère de chez Alec. Et l’envahissement et les clameurs de ces autres êtres innombrables… » (pp. 562-571) On entend le monologue intérieur de certains héros homosexuels insatisfaits de leur relation amoureuse du moment. Leur appel prend alors la forme de l’exaspération contenue, du sentiment paniquant et assommant à la fois de ne pas se sentir à leur place, du malaise ruminé dans le secret et difficile à exprimer (parce qu’il concerne la personne soi-disant « aimée ») : « Michael ronflotait doucement à côté de moi. Sa main gauche était plaquée contre ma poitrine comme s’il avait voulu m’empêcher de bouger, me clouer sur place. Une angoisse suffocante m’étreignait le cœur. Je regardais le si beau profil de Michael, je pensais aux cadavres de codoms [préservatifs] dans le fond de la poubelle de la salle de bains et je me disais c’est pas ça, c’est pas ça que je voulais, c’est pas ce que je veux. » (Jean-Marc parlant de son amant Michael dans le roman Le Cœur éclaté (1989) de Michel Tremblay, p. 260) ; « Je savais que c’était faux, que je n’aimais pas Michael d’amour mais là, juste à ce moment-là, je voulais le croire. » (idem, p. 299) ; « Arrête avec ces bouquins. Ça fait du mal à tout le monde. Même à toi, ça te fait du mal. Au fond, je suis sûr que tu souffres encore plus que moi. » (Suki s’adressant à son amie lesbienne Juna à propos de ses livres de magie, dans la pièce Gothic Lolitas (2014) de Delphine Thelliez) ; etc.

 

Il arrive cependant que le cri de détresse du personnage homosexuel se fasse visible et bruyant. Il prend alors davantage la forme de l’exclamation quand il exprime la révolte, et la forme de l’interrogation (qui n’attend pas forcément de réponse, d’ailleurs ; cela peut être une posture esthétique, ou une provocation « gratuite » et agressive) pour la dénonciation et les appels à l’aide : « C’est moi, Linda ! Mais moi je crie ! Vous m’entendez ?!? Allô !!! » (cf. une réplique de la pièce Loretta Strong (1974) de Copi) ; « Mais qu’est-ce qu’elle a, ma p’tite chanson ? » (un des protagonistes homos, parlant de la comédie d’amour qu’il sert à tous ses amants successifs, dans la comédie musicale À voix et à vapeur (2011) de Christian Dupouy) ; « Pourquoi est-ce que tu m’as laissé dans le noir pendant toutes ces années ? » (le héros homosexuel s’adressant à son père dans la pièce Happy Birthday Daddy (2007) de Christophe Averlan) ; « M’entendez-vous ? Je crie, je hurle que vous ne m’aurez pas. Je lutterai. De toutes mes forces, je vous défie. » (Cyril dans le roman Pavillon noir (2007) de Thibaut de Saint Pol, p. 52) ; « Je suis sûr d’être dans le vrai. Où est le mal Julien ? » (Pierre s’adressant à son amant Julien, dans la pièce Homosexualité (2008) de Jean-Luc Jeener) ; « Qu’est-ce que j’ai fait de mal ?!? Si seulement j’étais un pervers, je mériterais qu’on me crache dessus ! Mais si à l’intérieur de moi je me sens doux et femme ! » (José María, le transsexuel M to F du roman El Ángel De Sodoma (1928) d’Hernández Catá) ; « Alors putain, qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ?!? » (Louis dans la comédie musicale Angels In America (2008) de Tony Kushner) ; « Et ma vie, quand est-ce qu’elle commencera ? Quand est-ce que ce sera mon tour d’avoir quelque chose à moi ? » (Molina, le héros homosexuel efféminé du roman El Beso De La Mujer-Araña, Le Baiser de la Femme-Araignée (1976) de Manuel Puig, p. 239) ; « Il faut que je sache la vérité. La vérité sur la vie et sur l’amour. La vérité sur la vérité. J’étais au bord des larmes. Pourquoi une personne qui savait tout ne pouvait-elle pas me prendre à part et tout m’expliquer ? Comment se fait-il que les gens ne sachent rien ? Comment des milliards de personnes avaient-elles pu passer sur cette Terre pendant des milliers d’années sans jamais avoir trouvé la réponse à ces questions ? Je mourrais s’il me fallait encore attendre. » (Anamika, l’héroïne lesbienne du roman Babyji (2005) d’Abha Dawesar, p. 193) ; « Non, mais franchement. Sincèrement. Il faut que je comprenne. » (Jarry dans le one-man-show Entre fous émois (2008) de Gilles Tourman) ; « Qu’est-ce que j’ai fait de mal ? Je me suis laissé aller à vivre mes sentiments. Est-ce un crime ? Je n’ai pas le droit d’aimer ? Si ! Mais pas lui, c’est ça ? Seulement, on ne choisit pas. Tu crois qu’on peut lutter contre ? Tu crois que je n’ai pas essayé ? Mais plus je me refusais d’y croire et plus je l’aimais ! Qu’est-ce que j’y peux ? » (Bryan, le héros homosexuel s’adressant à sa mère, dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 336)

 

Souvent, le cri du héros homo s’épuise en mélancolie, en isolement de bête farouche, en auto-mutilation, en déni de souffrance. Son entreprise de destruction est dirigée essentiellement vers lui-même. Voilà le drame. « Cet isolement, c’est une sauvagerie, rien d’autre. Oui, une barbarie. Mais inoffensive. À la fin, ça ne détruira que moi. Ce qui m’attend, c’est de me consumer, de m’annuler. » (Leo, le héros homosexuel dans le roman Un Garçon d’Italie (2003) de Philippe Besson, p. 66) ; « Tu dis : je suis l’homme sans ascendance, ni fraternité, ni descendance. Je suis cette chose posée au milieu du monde mais non reliée au monde. Je suis celui qui ne sait pas d’où il vient, qui n’a personne avec qui partager son histoire et qui ne laissera pas de traces. Ainsi, quand je serai mort, c’est davantage que le nom que je porte qui disparaîtra, c’est mon existence même qui sera niée, jetée aux oubliettes. » (la figure de Marcel Proust s’adressant à son jeune amant Vincent dans le roman En l’absence des hommes (2001) de Philippe Besson)

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) Les personnes homosexuelles lancent un S.O.S.:

Étant donné la dureté des relations dans le « milieu homosexuel », et les tensions au sein de leur(s) couple(s), beaucoup de personnes homosexuelles crient leur souffrance, même si elles préfèrent bien souvent extérioriser leurs problèmes sur « les clichés »… et « la société » (dont elles font pourtant bien partie elles aussi, malgré ce qu’elles croient ; et sûrement, en effet, que la société, par son silence et son indifférence à leur douleur, pèchent par omission dans cette affaire !). Sans misérabilisme, sans faire du malheur une spécificité typiquement homosexuelle – les personnes homosexuelles ont bien assez tendance à se définir elles-mêmes comme une « race maudite » pour qu’on en rajoute une couche ! –, je vais simplement vous dresser maintenant une liste des lamentations de la communauté homosexuelle, celle que la presse gay spécialisée, et même S.O.S. Homophobie dans ses rapports annuels !, ne publient jamais (Si je ne le fais pas, de toute façon, un jour, les pierres crieront !) :

 

« De quel droit je m’inflige une telle douleur quotidiennement ? » (Keegan après son « changement de sexe », dans le documentaire « Boy I Am » (2006) de Sam Feder et Julie Hollar) ; « Je me pose des questions, moi qui ai toujours crié sur les toits n’avoir aucun problème d’identité. » (Paula Dumont, Mauvais Genre (2009), p. 16) ; « Seul le passé me donne le vertige. […] Si je me penche sur la réalité de ma vie affective et sexuelle, elle est beaucoup moins rose. Idem pour ma solitude. […] Allons donc, ma vie ne sera donc qu’une suite de malentendus ?! » (Denis Daniel, Mon théâtre à corps perdu (2006), p. 9, puis p. 78, et enfin p. 111) ; « Je suis juste en train de mourir et je n’ai pas d’amour vers qui me tourner pour me poser des questions. […] C’est dommage, tout cet amour disponible… » (Jean-Luc Lagarce dans son Journal, mis en scène dans la pièce Ébauche d’un portrait, 2008) ; « Personne ne peut prétendre vivre la marginalité dans le bonheur. On peut simplement parfois en éprouver une jouissance. » (Jean-Paul Aron, « Mon Sida », dans Le Nouvel Observateur, 30 octobre 1987) ; « Je regrette toujours ensuite cet épisode sordide où je fais chaque fois l’épreuve de mon délaissement. » (le philosophe Roland Barthes concernant son expérience des backrooms) ; « Je dessine pour ne pas entendre. Les cris. » (Yves Saint-Laurent dans la biopic « Yves Saint-Laurent » (2014) de Jalil Lespert) ; « J’aimerais partir. Ne rien faire. Pour tout oublier. Devenir sage. […] La vie est un enfer. » (Yves Saint-Laurent dans le documentaire « Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé : l’Amour fou » (2010) de Pierre Thoretton) ; « Oui, j’ai une vie ratée. » (Jean-Pierre, homme homosexuel de 68 ans, dans le documentaire « Homos, la haine » (2014) d’Éric Guéret et Philippe Besson, diffusé sur la chaîne France 2 le 9 décembre 2014) ; « Ses pulsions et ses désirs aplanis, il vécut totalement hors du circuit qui avait tant abîmé sa vie auparavant. » (Prologue à l’essai d’Henry Creyx, Propos décousus, propos à coudre et propos à découdre d’un chrétien homosexuel (2005), p. 9) ; « Dès son enfance, m’a raconté Maurice Pinguet, il avait compris qu’il était homo, mais il croyait que c’était là un rare malheur et qu’il n’aurait jamais la chance de rencontrer son semblable. » (Paul Veyne, Et dans l’éternité, je ne m’ennuierai pas (2014), p. 64-65) ; « J’ai eu le sentiment d’une intensité terrible que j’avais gâché ma vie entière en ne suivant pas le Christ comme il le voulait. Alors où en suis-je à quatre-vingt ans ? Que vaut cette accumulation de livres que je laisse derrière moi ? » (Julien Green face au Saint Suaire de Turin, dans son autobiographie L’Arc-en-ciel, Journal 1981-1984, 12 juillet 1981, p. 50) ; « Où trouverai-je la paix ? » (la Reine Christine, pseudo « lesbienne », dans le docu-fiction « Christine de Suède : une reine libre » (2013) de Wilfried Hauke) ; « L’existence que je mène me semble insignifiante et inutile. Totalement dépourvue de sens. » (Alexandre, jeune témoin homo de 24 ans, dans l’émission Temps présent spéciale « Mon enfant est homo » de Raphaël Engel et d’Alexandre Lachavanne, diffusée sur la chaîne RTS le 24 juin 2010) ; « Je cherche à comprendre ce qui en moi te dérange. » (Linn, jeune homme brésilien travesti en femme, s’adressant aux gens, dans le documentaire « Bixa Travesty » (2019) de Kiko Goifman et Claudia Priscilla) ; etc.

 

Le 5 juillet 1869, Carl Ernest Wilhelm von Zastrow (1821-1877), dans le box des accusés pour un viol homosexuel qu’il a commis : « J’appartiens à ces malheureux qui à cause d’un défaut de leur nature ne ressentent aucune inclination pour le sexe féminin. J’ai souvent parlé de ça avec des hommes, qui alors m’ont traité froidement et inamicalement, de telle sorte que je me suis retrouvé seul au monde. »
 
APPEL Cocteau
 

Il est rare que ce soit les personnes homosexuelles qui disent elles-mêmes leur souffrance… ce qui est plutôt logique, et pas spécifiquement homosexuel d’ailleurs : la souffrance reste une chose difficile à extraire de soi, quelle que soit notre orientation sexuelle. C’est à travers les témoignages des proches que nous apprenons le calvaire que vivent certaines d’entre elles, non du fait d’être simplement homosexuelles, mais de vivre leur homosexualité en couple. « Jean Genet est le garçon le plus angoissé que j’ai jamais connu de ma vie. Et le plus malheureux. » (Jacques Guérin, cité dans l’article « Jacques Guérin : souvenirs d’un collectionneur » de Valérie Marin La Meslée, dans le Magazine littéraire, n°313, septembre 1993, p. 72) ; « Un homme émasculé n’est pas une femme, c’est un homme désespéré. » (Robert J. Stoller, en parlant des hommes transsexuels M to F, dans « Faits et hypothèses », Bisexualité et différence des sexes (1973), p. 218) ; « Cocteau souffrait énormément, et déguisait cette souffrance sous les calembours. » (Pierre Bergé, cité dans l’article « Cocteau est aujourd’hui le plus moderne » de Gérard de Cortanze, dans le Magazine littéraire, n°423, septembre 2003, p. 39) ; « Il y a de la souffrance que la scène communique. » (Georges Banu, « Jeux théâtraux et enjeux de société », dans l’ouvrage collectif Le Corps travesti (2007), p. 5)

 

Souvent, c’est une blessure familiale et en lien avec la différence des sexes que les personnes homosexuelles montrent. Par exemple, À la fin de son one-man-show Jefferey Jordan s’affole (2015), Jefferey Jordan avoue qu’à travers son spectacle, il a essayé de réunir ses parents divorcés, le temps d’une heure fictionnelle.
 

À ce sujet, j’aimerais vous partager une anecdote personnelle. Je me souviendrai longtemps de la réaction du président de mon association homo angevine Tonic’s, Stéphane, à la fin de la brillante conférence sur la vision de l’Église catholique sur l’homosexualité, donnée par la sœur dominicaine Véronique Margron, le 4 mars 2002, au Centre spirituel de la Pommeraye (Maine-et-Loire). Toute une délégation de l’asso était venue armée jusqu’aux dents, en ayant pour but de régler son compte à la religieuse, parce que l’un des membres de Tonic’s avait « sensiblement » modifié l’intitulé du débat (initialement très neutre : « Homosexualité : qu’en dit l’Église ? » ; aux oreilles du jeune homme qui aurait entendu l’annonce à l’église Saint-Laud, la conférence s’intitulait « Comment lutter contre le fléau de l’homosexualité ? ». No comment…). Et comme le discours de Véronique Margron était non seulement juste mais en plus pas du tout jugeant, la bande de pirates homosexuels que j’accompagnais a baissé les armes au fur et à mesure du débat, et s’est même adoucie au point de n’avoir plus rien à dire (c’était drôle à voir !). Et au moment des questions et de l’échange avec le public, j’ai vu le chef de Tonic’s se lever précipitamment de sa chaise (il était assis juste à côté de moi). Stéphane, spontanément, a pris la parole. Je craignais le pire. Je m’attendais à l’éclat de voix, à l’injure, à la révolte. Mais en échange, on n’a eu droit qu’à une petite phrase, poignante, presque sanglotante, pure, dépouillée de toute théâtralité. Une sorte de « mécresse, j’ai bobo là » : « Vous savez, eh bien c’est pas facile tous les jours… » Et Stéphane s’est rassis tout de suite après, sans rien rajouter d’autre. Intérieurement, j’étais « soufflé ». Le beau gosse de Tonic’s, le modèle de tous dans l’asso, celui qui donnait une image reluisante et enviée de l’homosexualité (homme engagé associativement, en couple durable avec un autre jeune et bel homme, vivant une vie apparemment normale – labrador, boulot correct, entourage amical solide, etc.) venait de passer naturellement aux aveux. C’était magnifique. Et tellement révélateur !

 

Certaines personnes LGBT pleurent au fond leur non-acceptation d’elles-mêmes telles qu’elles sont. Par exemple, dans le film biographique « Girl » (2018) de Lukas Dhont, Lara/Victor, garçon trans M to F de 16 ans, ne semble avoir aucune intériorité : il a du mal à parler, est très introverti, ne peut pas dire ce qu’il ressent, n’a aucun avis sur rien. Quand il est triste ou bien souffre, il a du mal à pleurer (« Je ne sais pas pourquoi je pleure. Les hormones… »), à extérioriser ses émotions. Ce sont les autres qui crient à sa place. Par exemple, sa prof et chorégraphe de danse classique, Marie-Louise Wilderijckx, vient vers lui, plein de compassion après l’avoir maltraité pendant un cours : « Je sais que tu souffres. »
 
 

b) Que lamente la personne homosexuelle ?

Souvent, les plaintes des personnes homosexuelles s’originent dans leur insatisfaction personnelle par rapport au désir homosexuel, et à la relation amoureuse homosexuelle en général, même si la part d’elles-mêmes qui veut encore « y croire » vient les démentir : « Ce sont mon sentiment, ma faiblesse qui ont fait de moi un monstre. Oui, un monstre, puisque, au moment où je fais le bilan de mon existence, je m’aperçois que je n’ai jamais rien compris de la vie… » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 80) ; « Votre devoir à vous qui lirez ces lignes, c’est de vous approcher de ceux qui vivent actuellement dans l’erreur, de détester cette erreur enfin mise à nu. » (idem, p. 93) ; « Vous avez déjà vu, vous, de l’homosexualité épanouie ? Et même si cela arrive quelquefois, on ne fait pas un film sur une situation homosexuelle heureuse. » (le réalisateur homo Patrice Chéreau à propos de son film « L’homme blessé », tourné en 1983) ; « Maintenant je ne suis même plus attiré par quelque corps que ce soit. Comme si j’étais un asexué sans âme, comme si la tristesse avait pris possession de tout mon être. […] Alors c’est ça ma vie que je dois vivre ?!? C’est ça mon chemin de vie ? Vivre avec des types, ressortir mon sexe plein de merde, me faire défoncer le cul ?!? C’est ça la beauté de cette vie, de ma vie ?!? » (cf. le mail d’un ami homo, Pierre-Adrien, 30 ans, reçu en juin 2014) ; « Par rapport à la relation affective, j’arrive pas à trouver une relation stable, fidèle. J’arrive pas à trouver une relation affective. Ça ne marche pas. Je ne savais pas que le chemin était si tortueux. » (Pascal, homosexuel et séropositif, mettant en grande partie sur le compte du Sida l’échec de ses « amours » homos, dans le documentaire « Vivant ! » (2014) de Vincent Boujon) ; etc.

 

Les personnes homosexuelles réclament en général que vérité soit faite sur l’Amour et la sexualité. Même si elles ne savent pas le demander, elles souhaitent tout simplement qu’on les aime, et pas seulement qu’on les aime pour qui elles croient être, en tant qu’« homosexuels », mais qu’on les aime pour ce qu’elles sont. Le documentaire « Nous n’irons plus au bois » (2007) de Josée Dayan, par exemple, termine par une phrase accablante d’un homme transsexuel, Claire, qui nous met devant l’urgence de ne pas prendre les binarismes identitaires « homo » et surtout « hétéro » actuels comme base de notre morale humaine : « Si ces codes (féminin/masculin ; hétéro/homo) n’existaient pas, je n’aurais peut-être pas eu besoin de me transformer. » Car cela crée des drames réels, lourds de conséquences.

 

Le bilan sur le couple homosexuel qu’on a l’occasion d’entendre de la part des personnes homosexuelles de notre entourage, est sensiblement le même : en amour, très peu ont trouvé/trouvent ce qu’elles cherchaient/cherchent. « Que vouloir de plus ? L’amour. C’est le point obscur de ma vie. » (Brahim Naït-Balk, Un homo dans la cité (2009), p. 11) ; « Jamais personne ne me dit que je suis belle. » (la femme transsexuelle F to M, dans le documentaire « Le Genre qui doute » (2011) de Julie Carlier) C’est comme si l’insatisfaction concernant le couple homosexuel (mais c’est sensiblement pareil pour le couple hétérosexuel) était généralisée. Quand bien même elles s’estiment parfois très bien servies, elles exposent à un moment ou un autre la vanité de leur désir et souffrent sur la durée des affres du désenchantement amoureux. Quelquefois, le retour en arrière sur leur parcours sentimental, même s’il n’est pas désespéré, leur donne le vertige. Certaines se fourrent dans de beaux draps en s’engageant dans une relation avec une personne qui semble les aimer davantage qu’elles ne l’aiment. Elles la trouvent « bien », l’apprécient beaucoup, c’est sûr … mais ne sont pas vraiment emballées ni spontanément attirées par elle. Elles expérimentent souvent un décalage culpabilisant, paniquant. Elles voudraient en théorie combler le vide horrible de leur célibat, et pourtant, dès qu’il y a quelqu’un dans leur vie, elles étouffent, et se demandent pourquoi on ne leur fiche pas la paix !

 

Certains auteurs homosexuels, dans leurs autobiographies, se désarment enfin, osent se mettre à nu sans pleurnicherie, juste pour dire que leurs aventures amoureuses sont révélatrices chez eux d’une « grande fragilité dans le domaine sentimental » (Paula Dumont, Mauvais Genre (2009), pp. 115) : « Si mon homosexualité consiste à chercher à combler la carence affective dont j’ai souffert quand j’étais petite, je me demande aujourd’hui s’il ne vaut pas mieux renoncer à la quête, vouée d’avance à l’échec, d’une compagne susceptible de panser les blessures de la petite fille que j’ai été il y a plus de cinquante ans. Car la gamine en souffrance sera de toute manière toujours là, à gémir sur ses plaies… » (idem, p. 114) ; « Quel gâchis que mes amours ! » (Paula Dumont, La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), p. 134) ; « Pendant des années, je pensais : ‘Je ne connais pas ce garçon’. » (André parlant de Laurent avec qui il est resté dix ans en couple, dans le film « Le Deuxième Commencement » (2012) d’André Schneider) ; « Tu sais, si ça n’a pas marché entre nous, c’est qu’il y avait des raisons. » (André s’adressant à Laurent, idem) ; etc.

 

Banderole d'Act Up

Banderole d’Act Up


 

Concernant maintenant le « milieu homosexuel », beaucoup de personnes homosexuelles ne se retrouvent pas dans leur communauté d’adoption. Pour vous l’illustrer, je voudrais vous retranscrire tel quel un extrait d’un mail qu’un ami homo, qui avait 40 ans à l’époque, m’a envoyé. C’était en 2002, pendant ma période étudiante dans la ville d’Angers, où je commençais à fréquenter les associations LGBT, et que j’allais au bar-boîte homosexuel Le Cargo : « C’est dur pour moi : je suis un affectif et la solitude me pèse… et puis les années sont là malgré tout. En 2 ans, je n’ai jamais réussi à construire une relation d’amour. Que de tentatives, d’espoirs vains, d’illusions et de désillusions ! et ce soir je vais rentrer seul… En fait, je n’aime pas aller au Cargo. L’ambiance festive me plaît et parler ‘homo’ m’est utile, mais le côté pathétique des homos me déprime. Je me sens totalement en décalage, perdu dans tout ça, noyé dans cette souffrance sous-jacente. J’ai juste envie de bonheur, de rire, de plaisir partagé, de douceur. Je connais trop la solitude, et même quand j’étais en couple je vivais seul. Parfois c’était pire qu’aujourd’hui. »

 

Ce que je ressens très fort de la part de mes frères communautaires, c’est un appel à témoin(s) pour que des personnes homosexuelles exemplaires, dont on puisse être fier, se lèvent et montrent un visage BEAU de l’homosexualité, délivrent un message fort et juste. « Pourquoi n’existe-t-il pas de modèles forts de la vie et de l’amour homosexuels ? » (Jean-Luc Hennig cité dans le Dictionnaire gay (1994) de Lionel Povert, p. 8) La soif de modèles est profonde dans le « milieu homosexuel ». Peu de personnes gay ou lesbiennes osent formuler tout haut, comme Laura dans l’essai L’Homosexualité dans tous ses états (2007) de Pierre Verdrager, un mécontentement relativement général : « Ce que j’ai perçu du milieu homosexuel et du monde homosexuel, ça ne me plaît pas. Je ne me reconnais pas là-dedans. […] L’homosexualité, ce n’est pas très net… Je me dis : ‘Ils sont frappés’. Moi, j’ai rarement connu des homos bien dans leur tête, en couple depuis des années. C’est n’importe quoi. […] Tu vois, moi, j’ai grandi et je n’ai pas eu de modèle homosexuel… Là, aujourd’hui, il n’y a pas un mec ou une nana que j’admire en tant qu’homosexuels. Pourtant, j’en ai croisé des gens ! Moi, j’aimerais qu’il y ait des modèles, des mecs intelligents, des mecs instruits, des mecs simples, artistes qui se fassent connaître. Moi, j’en ai marre des gens destroy. » (pp. 281-282) Ce qui est difficile et paradoxal dans cet appel à candidatures, c’est que presqu’à chaque fois qu’une personne homosexuelle s’avance pour parler de l’homosexualité en vérité dans les media, elle est très vite critiquée, jalousée, détruite, traînée en procès de haute trahison, accusée de crime de lèse majesté, par les communautaires homosexuels soi-disant « hors milieu » (comme ils disent tous d’ailleurs !) parce qu’elle ose montrer que le désir homosexuel est signe d’une blessure, d’une souffrance !

 

Pourtant, certaines personnes homosexuelles en appellent indirectement à entreprendre un travail d’homotextualité sur leurs œuvres artistique. « Quel lien a l’homosexualité avec la presse, les comédies musicales, les films de Disney, Judy Garland, Alaska ? » (Alberto Mira, De Sodoma A Chueca (2004), p. 330) C’est toujours le même discours qui revient de la part des créateurs homosexuels : « Ma vie doit être légende, c’est-à-dire lisible. » dit Jean Genet ; Gus Van Sant, de son côté, assure que « tout est dans ses films » ; Andy Warhol affirme que l’essentiel se trouve dans ses toiles, qu’il n’y a pas de sens caché ; François Ozon déclare que l’homosexualité n’est pas problématisée dans ses films (« Dans mes courts-métrages, elle est donnée telle quelle. » cf. l’entretien avec Philippe Rouyer et Claire Vassé, « La Vérité des corps », dans la revue Positif, n°521/522, juillet/août 2004, p. 41) ; « Je crois que mon travail est un chaos parfaitement ordonné. » explique Bacon (cf. le documentaire « Francis Bacon » (1985) de David Hinton)

 
 

c) Comment la personne homosexuelle pousse son cri ?

APPEL culs à l'air

Documentaire « Sex Life In L.A. » de Jochen Hick


 

D’abord, l’appel au secours est silencieux. Il passe par un murmure discret, un cri réprimé : « À moi aussi on me demandait ‘Pourquoi tu parles comme ça [= avec autant de manières efféminées] ?’ Je feignais l’incompréhension, encore, restais silencieux – puis l’envie de hurler sans être capable de le faire, le cri, comme un corps étranger et brûlant bloqué dans mon œsophage. » (le narrateur homosexuel du roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p.p. 84)

 

Plus tard, c’est souvent la voie de la question (agressive), voire de l’exclamation colérique qui est empruntée. « Je veux scandaliser les purs, les petits enfants, les vieillards par ma nudité, ma voix rauque, le réflexe évident du désir. » (Claude Cahun, Aveux non avenus, 1930) ; « Je ne suis pas heureux et je ne tiens pas à l’être. Le spectacle des gens heureux ou qui croient l’être autour de moi me paraît tellement répugnant que je le crains terriblement. » (Pierre Démeron, homosexuel de 37 ans, au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 3 avril 1969) ; etc. Je vous dirige par exemple vers le documentaire « Je suis homo et alors ? » (2006) de Ted Anspach. Il y a aussi le fameux « pétage de plombs » de Christophe Martet face à Philippe Douste-Blazy pendant le Sidaction de 1996, qui a fait chuter les promesses de don (« Je suis en colère, merde ! C’est quoi ce pays de merde !?! ») L’appel homosexuel à la société se fait sous forme de cri : « Il y a une énorme violence à l’intérieur d’Act Up, à cause du désespoir, de la colère, des deuils. On utilise ce désespoir pour le diriger quelque part. » (Didier Lestrade cité dans l’essai Le Rose et le Noir (1996) de Frédéric Martel, p. 519)

 

Même les femmes lesbiennes toquent inconsciemment à la porte des hommes pour qu’ils les respectent davantage dans leur identité de femmes, qu’ils les reconnaissent dans la douceur et le souci de leur plaisir à elles… y compris quand certaines hurlent « Osez le clito ! » pour réhabiliter l’importance du clitoris dans la sexualité conjugale lesbienne. « C’est avant tout un message adressé aux hommes… pour leur dire : Wouhou, l’oubliez pas ! » lance une militante à l’antenne de l’émission Homo Micro de Paris Plurielle du 3 avril 2006.

 

C’est en plein cœur de la nuit des années de découverte du Sida (fin des années 1980 – début des années 1990) que la communauté homosexuelle a lancé ses plus beaux appels de désespoir, à la fois aux personnes aimées (« Je veux que tu vives ! » est l’un des slogans choisis par Act Up lors des premières Gay Pride) et à sa société qui se défile (« Silence =Mort »).

 

Parmi les fréquentes « fausses questions » que les personnes homosexuelles dirigent à leur société par rapport à l’homosexualité, on trouve beaucoup celle-ci : « Pourquoi ce serait mal ? » : « Si encore c’était un crime… mais là, je vois pas où est le mal ? » (Jérôme, invité à l’émission Jour après Jour, spéciale « Coming out : Le Jour où j’ai révélé mon homosexualité à mes proches »), France 2, novembre 2000) Elles jouent les interloquées, pour cacher l’objet d’indignation derrière la monstration de leur propre indignation. Cette manière de fuir la quête du meilleur, et de se rassurer dans la comparaison au mal ou au pire, est à mon sens typique de l’interjection homosexuelle.

 
 

d) Un dépassement des frontières homosexuelles:

L’appel des personnes homosexuelles n’est manifestement pas entendu par les personnes non-homosexuelles, comme le souligne Alain Minc dans Épîtres à nos nouveaux maîtres (2002) qui qualifie les secondes de « mol-pensants » : « Mol-pensants’, nous le sommes, non parce que nous pensons faux, mais parce que nous ne pensons plus. ‘Mol-pensants’, car nous avons abdiqué devant les minorités. » (p. 8) ; « Une fois de plus, vous n’avez même pas eu à revendiquer. Par lassitude ou manque de réflexion, nous ciselons, de notre propre chef, les instruments dont vous avez besoin. » (idem, p. 97)

 

Beaucoup de personnes homosexuelles poussent leur entourage à bout pour tester jusqu’où il est capable d’aller pour les aimer. Celui-ci peut entendre, en lisant leur prose, un appel agressif dissonant qui n’emploie pas les moyens que son but requiert, qui cherche l’autre en feignant de ne pas le chercher. On a reproché à des Hervé Guibert ou des Guillaume Dustan l’exhibitionnisme violent, au lieu de voir dans leur impudeur un mime des mécanismes d’exclusion dont les personnes homosexuelles sont parfois victimes. À mon avis, tout a un sens, et à plus forte raison l’agressivité. Dans ce que profère l’autre, il y a toujours une part de Vérité, même s’il me l’exprime méchamment et que sa volonté est justement d’évacuer la Vérité. Y compris en me jetant une pierre ou en m’agressant verbalement, il me dit quelque chose de la beauté de l’Homme sans même le savoir, car la grâce de son humanité de lui appartient pas, et dépasse sa cruauté. C’est pourquoi la Gay Pride et la visibilité tapageuse des personnes homosexuelles n’ont absolument pas à nous choquer : elles sont juste temporairement dignes d’intérêt, et fondamentalement secondaires et inutiles. Nous devrions nous laisser toucher par les appels au secours de certains individus homosexuels, souvent camouflés dans un discours stéréotypé et lapidaire, qui ne se donnent pas les moyens de leur plainte, qui s’auto-sabordent par le cynisme et l’ironie. Ils attendent une parole, une réaction de notre part. On retrouve cette demande malhabile chez l’Eva Perón de Copi qui, derrière la farce agressive, s’adresse à notre indifférence laxiste face à l’homosexualité : « Je suis devenue folle, folle, comme la fois où j’ai fait donner une voiture de course à chaque putain que vous m’avez laissé faire. Folle. Et ni toi ni lui ne m’avez dit de m’arrêter. […] Quand j’allais dans les bidonvilles […] et que je rentrais comme une folle toute nue en taxi montrant le cul par la fenêtre, vous m’avez laissé faire. Comme si j’étais déjà morte, comme si je n’étais plus qu’un souvenir d’une morte. » (Copi, Eva Perón, 1970) Il y a dans l’attitude de provocation de nombreuses personnes homosexuelles un acte d’illustration visant à exposer aux autres ce qu’ils leur laissent impunément faire, un miroir brisé qui se veut le reflet de la lâcheté sociale. Au fond, elles regrettent amèrement le silence de leurs proches concernant leur situation souvent dramatique. « Mes parents n’entendent pas mon murmure. Mes chuchotements ne parviennent pas jusqu’à leurs oreilles. Ils n’entendaient déjà pas mes cris, il y a des années de cela. » (Luca, le héros homosexuel du roman Un Garçon d’Italie (2003) de Philippe Besson, p. 168) ; « Il m’arrive parfois de me poser la question sur ce que cela signifiait réellement : un groupe d’adultes qui feint ou qui ignore totalement nos complicités sexuelles. » (Berthrand Nguyen Matoko soulignant le silence complice de ceux qui n’ont pas dénoncé sa relation pédophile entre le père Basile et lui, dans son autobiographie Le Flamant noir (2004), p. 37) ; « Je n’ai pas été un enfant à qui on disait qu’il était merveilleux. » (Stéphane Bern, Paris Match, août 2015) ; « À sept ans, ce garçonnet subit des attouchements sexuels de la part d’un collègue de travail de son père. Malheureusement, sachant que personne ne s’intéresserait à son problème, il ne put se confier. Adesse, sa mère, ne détectait pas les soucis de son fils, ni à quel point il était martyrisé par son frère. Il ne put jamais trouver les mots pour exprimer son désarroi et sa souffrance. […] Et voilà qu’en plus de toutes ces difficultés, un autre drame s’ajouta à son calvaire. Une nouvelle tentative d’agression sexuelle perpétrée par Octave [23 ans], l’un des meilleurs copains de son frère Hugues. À onze ans, la vie d’Ednar commençait par une descente aux enfers, cet abîme qui déjà le convoitait en le livrant à la merci et à l’incompréhension des personnes censées l’aimer et le protéger. Affecté par ce sentiment de culpabilité, cet enfant ne put dévoiler les secrets trop lourds à porter dans son cœur. Jamais dans sa famille il n’osa avouer son malheur dans le sous-bois. Il en parla à demi mots à ses copains de classe, qui eux non plus n’avaient pas le droit de répéter ces choses-là aux grandes personnes. À l’époque, il n’était pas permis aux jeunes enfants de dénoncer les perversités ni les égarements des anciens. […] Ce traumatisme inavouable fut l’un des plus grands secrets de sa vie. Et lorsqu’il devint adulte lui-même, il évoqua cette mauvaise rencontre comme ‘l’incident’ qui n’aurait jamais dû être […]. Décidément, le malheur s’acharnait sur cet enfant ; l’adolescent venait d’avoir treize ans, lorsqu’il tomba dans un autre piège. Cette fois un ancien collègue de son père l’attira chez lui dans un guet-apens ; lorsqu’il comprit le but de l’invitation, il voulut s’enfuir. L’homme le retint ; il se débattit, parvint à se libérer et, enjambant la fenêtre, il s’enfuit et escalada le mur du cimetière voisin. Dans le crépuscule, il prit la poudre d’escampette pour échapper au viol. L’homme le poursuivit, en vain. Là non plus, il ne put se confier à un adulte et, pire, c’est lui qui culpabilisait. » (Jean-Claude Janvier-Modeste parlant de lui à la troisième personne, dans son autobiographie Un Fils différent (2011), pp. 12-14) ; « Il souffrait en silence ; personne ne décelait son mal-être, même pas Adesse, la mère aimante proche de son petit poète. » (idem, p. 16) ; « Cet enfant différent qui n’osait pas lui dire : ‘Maman, je souffre, j’ai besoin de savoir pourquoi la vie pour moi est synonyme de désarroi, et aussi pourquoi ma sexualité embarrasse autant les autres ? » (idem, p. 78) ; etc.

 

Face au mutisme social, elles se demandent quelles personnes seront vraiment capables de se laisser toucher par leurs appels. Elles font tout pour dissimuler leur souffrance, mais paradoxalement, elles regrettent que les autres ne la perçoivent pas, et leur reprocheront parfois d’y être indifférents !

 

Je reste convaincu que malgré leur auto-censure sur leur souffrance, les personnes homosexuelles sont finalement profondément blessées que leur société rentre dans leur jeu de la banalisation de l’homosexualité, qu’elle n’entende pas leur cri derrière leurs vociférations enjouées de Gay Pride : « C’est un poids de moins pour nous. Moi, je m’attendais à plus de cris et d’opposition. C’est cool ! » (Bryan s’adressant à sa mère et à la mère de son copain Kévin, dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 358) ; « J’étais vraiment déçu… Si tout le monde accepte… » (Patrick, expliquant en boutade l’acceptation guillerette de son homosexualité par sa famille, lors du débat « Toutes et tous citoyen-ne-s engagé-e-s », le samedi 10 octobre 2009, à la Mairie du XIème arrondissement de Paris) ; « On voulait juste s’amuser. On ne pensait pas avoir autant de succès. On s’attendait même à provoquer plus d’indignation, de scandale en affichant notre homosexualité. » (Jimmy Somerville dans l’émission Sex’n’Pop 4 (2004) de Christian Bettges) ; « Le premier défilé d’homosexuels à Paris eut lieu en juin 1977. Je me souviens de notre départ de la rue Bonaparte jusqu’à Montparnasse ; cette marche eut lieu dans une ambiance festive et plutôt carnavalesque. Les pédés dans les rues, c’était du jamais vu ! Les badauds alignés sur le trottoir, ébahis, applaudissaient notre culot. Certains nous encourageaient à poursuivre le combat, pendant que d’autres exaspérés nous manifestaient leur hostilité. Cette première marche eut surtout un impact médiatique inespéré ; la presse écrite de gauche plaidait notre cause et la télévision commentait la ‘provocation’ : le courage de la minorité silencieuse prenait des proportions extraordinaires. » (Jean-Claude Janvier-Modeste parlant de sa participation au FHAR, dans son autobiographie Un Fils différent (2011), p. 173)

 

Et c’est vrai que la tolérance gay friendly de notre « démocratie de l’indifférence mutuelle », ainsi que les applaudissement actuels face à ce cri des sans-voix (que les sans-voix eux-mêmes renient !), sont révoltants. Il faut bien quelqu’un comme moi pour l’écrire, quand bien même les plaignants concernés se défilent et pourraient le faire mieux que moi !

 
 

Pour accéder au menu de tous les codes, cliquer ici.

 

 

Code n°40 – Cour des miracles homosexuelle (sous-code : Choeurs de tragédie grecque)

cour des

Cour des miracles homosexuelle

 

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

La nostalgie d’une royauté bafouée

 

COUR DES MIRACLES Bossu

Film d’animation « Le Bossu de Notre-Dame » de Walt Disney


 

Un certain nombre de personnes homosexuelles s’intéressent à la Cour des miracles du Moyen-Âge. Cette étrange passion homosexuelle se fait passer pour un grand élan de solidarité (= éloge du multiculturalisme, de la pauvreté), de militantisme (= éloge de la marginalité « dérangeant » le « Système ») ou bien artistique (= éloge de l’originalité). En réalité, elle cache un grand orgueil (celui de se rêver Christ à la place du Christ, de vivre une royauté égocentrée… par manque d’amis véritables), un fantasme d’irréalité transgressive et de fantaisie festive qui finissent par montrer toute leur vanité et leur horreur une fois confrontées au Réel, une haine de soi (= homophobie) maquillée d’autosuffisance et de rire.

 

Nous aurions tort de nous fier aux apparences. Au vrai pauvre, bien des personnes homosexuelles lui préfèrent son icône – souffrante ou euphorique – et son absence. Elles le transforment en image folklorique. Le nécessiteux qu’elles bercent sur leur sein n’est autre que la « romanichelle de luxe » (Esméralda dans Notre-Dame de Paris de Victor Hugo), le vagabond sublimé des poètes maudits, le « bon sauvage » étranger, « la transfiguration d’un état de misère » pour reprendre les termes d’un de mes amis romancier homosexuel. Elles dépeignent une pègre qui, au lieu d’être constituée de vrais pauvres, se compose plutôt de cercles d’intellectuels libertins – donc un peu d’elles-mêmes ! – s’amusant à imiter, par moquerie ou/et générosité, les images d’Épinal de pauvres qu’ils se fabriquent dans leur imaginaire pour se donner bonne conscience. Elle sert de prétexte à l’exhibition carnavalesque et au déni de la pauvreté. C’est la raison pour laquelle les motifs du cirque, des fêtes foraines, du chœur de tragédie grecque, et des cours des miracles, reviennent excessivement souvent dans les œuvres homosexuelles. Vêtus de haillons, les faux mendiants homosexuels se donnent en spectacle, en entonnant la litanie de la honte de l’Occidental narrant son malheur face au soi-disant malheur planétaire apocalyptique. Ils se glissent subtilement dans la foule colorée et masquée qu’ils ont eux-mêmes créée pour s’élever en chefs. « En attendant d’être des rois, mes amis et moi sommes les acteurs d’une version de la folie des grandeurs, … sous une pluie de confettis » chante Arnold Turboust dans sa chanson « Mes amis et moi ». Intellectuellement, l’esthétique de la folie du SDF-bouffon donquichottesque séduit beaucoup les auteurs homosexuels bobos : pour eux, le délire « transgressif » est davantage vecteur de Vérité que la Vérité même. Elle est en réalité l’expression de leur propre homophobie/misanthropie/athéisme.

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Homosexualité noire et glorieuse », « Faux révolutionnaires », « Milieu homosexuel infernal », « Milieu homosexuel paradisiaque », « Reine », « Folie », « Milieu psychiatrique », « Femme vierge se faisant violer un soir de carnaval ou d’été à l’orée des bois », « Bobo », « Défense du tyran », « Homosexuels psychorigides », « Amour ambigu de l’étranger », « L’homosexuel riche/L’homosexuel pauvre », « Cirque », « Magicien », « Mariée », « Doubles schizophréniques », « Grand-mère », « Drogues », « Quatuor », « Voleurs », « Homosexuel homophobe », « Méchant pauvre », « Prostitution », « Putain béatifiée », « Humour-poignard », « Voyante extralucide », à la partie « Carnaval » du code « Clown blanc et Masques », et à la partie « Nain » du code « Amant modèle photographique », dans mon Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

Pour accéder au menu de tous les codes, cliquer ici.

 

 

FICTION

 

a) La cour des miracles, une rêverie :


 

Dans beaucoup d’œuvres homo-érotiques apparaît une pègre, une foule carnavalesque grimaçante et ricanante, un groupe de personnages atypiques et difformes (nains, drogués, trans, travestis, prostituées, femmes déguisées en mariées, escort boys, personnages siamois, vieillards, géants, etc.) entourant le héros homosexuel : cf. le film « Die Unendliche Geschichte » (« L’Histoire sans fin », 1984) de Wolfgang Petersen (avec la cour de la jeune reine), le vidéo-clip de la chanson « Le Brasier » d’Étienne Daho, le vidéo-clip de la chanson « Substitute For Love » de Madonna, le vidéo-clip de la chanson « Libertine » de Mylène Farmer, le film « Antes Que Anochezca » (« Avant la nuit », 2000) de Julián Schnabel, le concert de Mika à Paris Bercy le 26 avril 2010 (et surtout la chanson « Big Girl »), le film « Totò Che Visse Due Volte » (« Toto qui vécut deux fois », 1998) de Daniele Cipri et Francesco Maresco, le film « Mann Mit Bart » (« Bearded Man », 2010) de Maria Pavlidou, le film « 30° couleur » (2012) de Lucien Jean-Baptiste et Philippe Larue, le film « Le Sang du Poète (1930) » de Jean Cocteau (entouré de gitans), le roman Joyeux animaux de la misère (2014) de Pierre Guyotat, le film « Splendori E Miserie Di Madame Royale » (« Madame Royale », 1970) de Ugo Tognazzi, le film « Freak Orlando » (1981) d’Ulrike Ottinger, le film « Jugatsu » (1990) de Takeshi Kitano, la nouvelle L’Encre (2003) d’un ami homosexuel angevin (avec la Cité des Laiderons), le film « Tan De Repente » (2003) de Diego Lerman, le film « Opera De Malandro » (1986) de Ruy Guerra, les films « Accattone » (1961), « Mamma Roma » (1962), et « La Ricotta » (1963) de Pier Paolo Pasolini, la pièce Quai Ouest (1985) de Patrice Chéreau, le roman Monsieur de Phocas (1901) de Jean Lorrain, la nouvelle « De La Melancolía De Las Perspectivas » (1983) d’Héctor Bianciotti (avec sa population bigarrée : des nains, des prostituées, des alcooliques, des mariées, etc.), le roman La Noche De Walpurgis (1910) d’Antonio de Hoyos (avec la cour des miracles de bourgeois homosexuels déguisés en pauvres), le film « A Rainha Diaba » (1975) de Antonio Carlos Fontoura, le film « Die Hure Und Der Hurensohn » (1982) de Dagmar Beiersdorf, le vidéo-clip de la chanson « Relax » du groupe Frankie Goes To Hollywood, le roman Los Alegres Muchachos De Atzavará (1988) de Manuel Vázquez Montalbán, le film « Priscilla, folle du désert » (1995) de Stephan Elliot (avec les aborigènes et les trois drag-queen réunis autour d’un grand feu de joie), le film « The Rocky Horror Picture Show » (1975) de Jim Sharman, le one-man-show Tout en finesse (2014) de Rodolphe Sand (décrivant à la fin la « faune » homosexuelle dans toute sa diversité), le film « Rosa la Rose : Fille publique » (1985) de Paul Vecchiali, le film « The Greatest Showman » (2017) de Michael Gracey, le film « Pédale dure » (2004) de Gabriel Aghion (avec le chœur de pédales chantant « Alléluia »), etc. Par exemple, dans le film « Mine Vaganti » (« Le Premier qui l’a dit », 2010) de Ferzan Ozpetek, Vincenzo est obsédé par le qu’en-dira-t-on à propos de l’homosexualité de son fils Antonio : dans les lieux publics, il est persuadé que tout le monde l’a identifiée et en rient sarcastiquement.

 

Film "The Rocky Horror Picture Show" de Jim Sharman

Film « The Rocky Horror Picture Show » de Jim Sharman


 

Se crée le mythe snobinard du « bonheur entre exclus » et de la « force jouissive » (jubilatooooire) de la transgression des codes sociaux : « Ici on est tous des frères dans la joie dans la misère… À la cour des miracles, mendiants et brigands dansent la même danse… » (cf. la chanson « À la cour des miracles » de la comédie musicale Notre-Dame de Paris de Luc Plamondon) ; « Les vieux nobles qu’elle recevait étaient des amis de son père, aussi laids qu’elle. Le vieux comte des Asturies était couvert de verrues et le duc de Castille, son parrain, était bossu. » (Copi dans sa nouvelle « L’Autoportrait de Goya » (1978), p. 12) ; « On est tous des imbéciles, on est bien très bien débiles. » (cf. la chanson « On est tous des imbéciles » de Mylène Farmer) ; « Son visage se tordit tandis qu’il regardait le labyrinthe de livres. Littérature ! Littérature – les Olympiades des nains de jardin ! Bavardage des déments ! Il fit un pas vers l’avant et renversa une étagère de livres par terre. » (Pawel Tarnowski, homosexuel continent, dans le roman Sophia House, La Librairie Sophia (2005), p. 176) ; « Goudron organisait tant de salons et de soirées fréquentées par des centaines de personnes ridicules de toutes sortes. Il les collectionnait, vous savez. Et il y avait nom pour chacune. Cette courtisane communiste, Madame Kortovsky était ‘Le Ballon rouge’ et Francœur, l’éditeur catholique, était ‘La Mante religieuse’. Picasso était ‘Le Minotaure’ et vous ‘Le Prince noir’. » (le pervers Comte Smokrev s’adressant à Pawel Tarnowski, au sujet de son mécène homosexuel Goudron, idem, p. 308) ; etc. Par exemple, dans le roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, le couple Khalid/Omar se rend à Douar Dbada, qui est une sorte de cour des miracles : « Ils sont un peu dangereux là-bas. […] En plus des prostituées, il y a des maquereaux, les dealers de drogue… Les fous… Des assassins aussi… Les voleurs d’enfants… » (p. 125) Dans le film « Marguerite » (2015) de Xavier Giannoli, la cour des miracles entourant l’héroïne est composée de dandys efféminées, de femmes-à-barbe, d’hommes travestis en nonnes, de nains, de Noirs, de « copines » transgenres, etc.

 

Au départ, le héros homosexuel prétend trouver dans cette cour des miracles multiculturelle et marginale un refuge à la soi-disant intolérance sociale par rapport à son homosexualité, une famille qui reconnaît enfin sa royauté et la primauté de ses désirs identitaires/amoureux profonds : « Peut-être que ce qui fut jadis la Cour des Miracles saurait le guérir de sa peur, l’aider à s’affirmer auprès des siens. » (Ahmed en parlant du quartier gay du Marais, dans le roman Accointances, connaissances, et mouvances (2010) de Denis-Martin Chabot, p. 52) ; « Tout est permis au bal de Savoy. » (Madeleine, dans la comédie musicale Ball Im Savoy, Bal au Savoy (1932) de Paul Abraham) ; etc. Par exemple, dans la bande dessinée La Foire aux Immortels (1992) d’Enki Bilal, Jean-Ferdinand Choublanc, « Gouverneur de la Cité autonome de Paris » est manifestement homosexuel et a réuni une cour d’adhérents autour son parti dont tous sans exception très fortement maquillés. Et Choublanc s’adresse à ses maquilleurs en les appelant « les filles » et à son intendant en l’appelant « chéri », intendant avec lequel il partage son bain. Dans la comédie musicale « Les Demoiselles de Rochefort » (1967) de Jacques Demy, les deux compères Bill et Étienne sont décrits comme des « lutins farfelus et fantoches ». Dans le film « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway, Sergueï Eisenstein, homosexuel, suit un cortège carnavalesque mystique de squelettes mexicains masqués. Dans le film « Mezzanotte » (2014) de Sebastiano Riso, le petit monde de la nuit de la ville italienne de Catano s’anime autour de la prostitution : les prostitués, les travelos, les sosies de Mary Poppins ou Marilyn Monroe, les macs, les gigolos, le vieux disquaire muet, etc.

 

La particularité de cette cour des miracles homosexuelle, c’est qu’elle est souvent prise d’hilarité (comme les hyènes… juste avant ou après de frapper violemment) : « Je cours, je cours. Sans respirer. Puis je tombe. Des gens rient. […] Autour de lui [Hassan II], un souk. Beaucoup de femmes. […] Elles rient de moi. Cela les amuse : moi qui tombe et sur le point de pleurer. Elles rient longtemps sans vraiment me regarder. » (Khalid, le protagoniste homosexuel du roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 10) ; « Tout le monde a ri. Tout le monde. Tous ces gens avec qui j’ai grandi. […]  Le pire, c’est que je ne les ai même pas détestés. » (Pauline, l’héroïne lesbienne racontant un spectacle public où elle a été la risée des gens de son village parce qu’elle a joué le premier rôle et s’est travestie en homme, dans le film « Pauline » (2009) de Daphné Charbonneau) ; « Parfois je la voyais au milieu d’autres hommes habillés. Allongée sur le dos, les jambes en l’air, avec pour toute parure ses talons aiguilles. Il y avait là des profs de la fac, des laborantins en blouse du département de chimie, quelques-uns des garçons au rire gras avec qui j’avais déjeuné au RU. Ils ne la caressaient pas. Ils se contentaient de la regarder, de la montrer du doigt et de rire. Et elle riait avec eux, dans cette posture humiliante. Dans d’autres rêves, elle se moquait de moi avec sa copine, pendant les cours de Gritchov. Je ne comprenais pas ce qu’il y avait de si comique dans ma tenue. » (Jason, le héros homosexuel décrivant Varia Andreïevskaïa, dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, p. 59) ; « La foule riait aux éclats, ils lançaient sur Truddy des pavés. » (Copi dans sa nouvelle « Les Potins de la femme assise » (1978), p. 40) ; « Tous nous ovationnèrent, pleurant et riant […] » (Gouri, le rat bisexuel du roman La Cité des Rats (1979), p. 94) ; « Les rires de la foule des hommes » (idem, p. 104) ; etc. Par exemple, dans le film « My Own Private Idaho » (1991) de Gus Van Sant, la cour homosexuelle de Bob (composée de drogués) passe insensiblement de l’agression au rire : ça passe ou ça casse. Dans sa chanson « À table » de Jann Halexander, le protagoniste homosexuel décrit « le rire déformant des visages » des membres d’une fête de famille.

 
 

b) La cour des miracles homosexuels, un cauchemar :

Film "Poltergay" de

Film « Poltergay » d’Éric Lavaine


 

Symboliquement, la cour des miracles homosexuelle ressemble à la voix d’une schizophrénie. Le héros homosexuel se sent entouré de nains et de clowns rieurs qui, après s’être amusés et après l’avoir intronisé, vont le momifier, le trahir et le brûler sur un char (cf. je vous renvoie au code « Méchant Pauvre » de mon Dictionnaire des Codes homosexuels) : cf. la chanson « L’Horloge » de Mylène Farmer, la chanson « Porno-graphique » de Mylène Farmer, la chanson « No More I Love You’s » d’Annie Lennox, la comédie musicale Les Oiseaux (2010) d’Alfredo Arias, les vidéo-clips des chansons « Sans contrefaçon », « Sans logique », « Désenchantée », « L’Âme-Stram-Gram » et « Optimistique-moi » de Mylène Farmer, etc. Par exemple, dans le film « Mommy » (2014) de Xavier Dolan, lors d’une séance de karaoké, où Steve (le héros homosexuel) se ridiculise, la prestation vire à la vision d’enfer : il voit tous les clients du bar ricaner (au ralenti), puis en menace violemment un avec une bouteille de bière car il ne gère pas l’humiliation.

 

« Le fond de leur rire avait quelque chose de métallique. » (Pretorius, le héros homosexuel parlant des clients de l’Hôtel du Transylvania, dans la pièce Confessions d’un vampire sud-africain (2011) de Jann Halexander)

 

 

La cour des miracles, c’est aussi le retour homophobe d’un désir homosexuel pratiqué (retour violent prêté uniquement à « la société »… mais qui n’est en réalité que la société des amants, que le monde de la prostitution et de la drogue) : cf. le film « L’Homme blessé » (1983) de Patrice Chéreau (avec la gare parisienne se transformant en cour des miracles), le film « Suddenly Last Summer » (« Soudain l’été dernier », 1960) de Joseph Mankiewicz (avec la cour homosexuelle gitane de Sébastien, qui finit par l’assassiner, en représailles), le roman Un Garçon d’Italie (2003) de Philippe Besson, l’opéra-rock Starmania de Michel Berger (avec le gang des Étoiles Noires), le film « Twist » (2004) de Jacob Tierney et Adrienne Stern, le film « Garçons d’Athènes » (1998) de Constantinos Giannaris, etc. « C’est une chose difficile que d’être homosexuel au pays des cow-boys. » (4 journalistes en chœur, et en direct du Wyoming, dans la pièce Le Projet Laramie (2012) de Moisés Kaufman) ; « Autour de moi, les hommes forment une ronde. […]  Le spectacle de la gare est immuable. Presque rituel. » (Léo, le héros homosexuel du roman Un Garçon d’Italie (2003) de Philippe Besson, p. 213) ; « Vous n’avez jamais rencontré de vrais homosexuels. Ce sont des bossus qui riraient de votre mariage. » (le père de Claire, l’héroïne lesbienne, s’adressant à sa fille et à sa compagne Suzanne à propos de leur projet de « mariage pour tous », dans la pièce Le Mariage (2014) de Jean-Luc Jeener) ; « C’est un petit monde. Vous devez tous vous connaître, non ? » (l’Inspecteur s’adressant à Franck, le héros homosexuel, pour enquêter sur les crimes homophobes de l’île qui est un lieu de drague gay hostile et impitoyable, dans le film « L’Inconnu du lac » (2012) d’Alain Guiraudie) ; etc.

 

Queen

Queen


 

Cette cour des miracles représente donc la conscience du viol, exprimée par le traditionnel chant du chœur de tragédie grecque qui annonce la mort prochaine (physique et déjà symbolique) du héros homosexuel : cf. le film « Hey, Happy ! » (2001) de Noam Gonick (avec les trois femmes asiatiques), la pièce Macbeth (1623) de William Shakespeare (avec le chœur des sorcières), le film « Bug » (2003) d’Arnault Labaronne (avec les trois drag-queen), le film « Anguished Love » (1987) de Pisan Akarasainee, le film « Puta de Oros » (1999) de Miguel Crespi Traveria (avec le cortège des pleureuses), le film « Les Sorcières » (1966) de Pier Paolo Pasolini et Luchino Visconti, les pièces de Federico García Lorca telles que La Savetière prodigieuse (1926) ou Doña Rosita la célibataire ou le langage des fleurs (1935), la chanson « Bohemian Rhapsody » du groupe Queen, la chanson « Duel au soleil » d’Étienne Daho, la comédie musicale La Bête au bois dormant (2007) de Michel Heim (avec les trois bonnes fées travesties), les films « Pepi, Luci, Bom Y Otras Chicas Del Montón » (1980), « Entre Tinieblas » (« Dans les ténèbres », 1983) et « Mujer Al Borde De Un Ataque De Nervios » (« Femme au bord de la crise de nerfs », 1987) de Pedro Almodóvar, le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus (avec le chœur des femmes ouvrières galloises), etc. Par exemple, dans la pièce Cachafaz (1993) de Copi, les chœurs des voisins – qui se fait appeler aussi « le chœur des âmes » – sont toujours les annonciateurs de mort ou de violence, et la symbolisation de la contemplation de l’horreur à distance. Ils annoncent le viol, et dans le même mouvement, le nient. Dans le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha, Nicolas, Gabriel et Rudolf, les trois héros gays sans avenir, forment le chœur montagnard de « Sissi », une cantatrice fantomatique transgenre M to F autrichienne.

 

« Au milieu d’un désordre phénoménal (les tables cassées parmi les bouteilles arrosées de confettis) […] À chaque fois que je laissais échapper un cri, l’assistance repartait d’un gros rire […]. Et ne songeons même pas à demander de l’aide aux esquimaux : pour cette peuplade, Glou-Glou Bzz représentait plus qu’une reine. » (le narrateur homosexuel se faisant trucider la bite, après le carnage de la reine du carnaval Glou-Glou Bzz, dans la nouvelle « La Mort d’un Phoque » (1983) de Copi, pp. 22-24) ; « Je ne fais jamais partie des chœurs. On a quand même son orgueil ! Les chœurs sont les seuls morceaux d’opéra que j’écoute de l’extérieur, en restant assis dans mon fauteuil, en ‘regardant’ dans ma tête un spectacle plutôt qu’en le vivant comme si j’étais un des protagonistes. J’aime écouter les chœurs, je n’aime pas les vivre. » (le narrateur homosexuel parlant de l’opéra La Bohème de Puccini dans le roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, p. 19) ; « Je ne savais plus si j’étais heureux de l’observer parce que je le trouvais émouvant dans son ridicule ou si je souffrais avec lui de chanter des choses idiotes dans une œuvre idiote, entouré d’idiots déguisés comme pour un carnaval de pauvres. J’aimais croire qu’il était conscient de la petitesse et de l’insignifiance de ce qui l’entourait sur ce plateau et que ce qu’il ressentait était la honte d’en faire partie. Le Prince Charmant existait donc et il était habillé en petit page d’opérette dans une mauvaise production d’opéra ! » (le narrateur homosexuel parlant du chanteur Wilfrid Pelletier, idem, p. 50) ; etc.

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) La cour des miracles, une rêverie :

Quand j’étais enfant et adolescent, j’étais très attiré par l’univers moyen-âgeux de la Cour des miracles. Il m’arrivait d’en faire un jeu (par exemple, j’avais créé « Les Aventures de Jean », une mise en scène nocturne théâtralisée de personnages fictifs habitant l’univers de mon frère jumeau, Jean), et j’aimais ces univers clos avec des personnages étranges autant qu’inquiétants (le jeu du Cluedo, le jeu télévisé Fort Boyard, etc.).

 

Cette attraction pour les salons de précieuses, pour les bals masqués peuplés de Colombine, de voyantes extra-lucides, de brigands, de sorcières, de courtisanes, de nains, d’Esméralda et autres créatures extraordinaires, je pense la partager avec un certain nombre de personnes homosexuelles. Et il n’est pas étonnant que dans l’imaginaire collectif LGBTI, la « communauté homosexuelle » mondiale soit régulièrement décrite comme une pâle copie de la cour des miracles littéraire. Par exemple, lors de son entretien avec J. O’Higgins en 1982, le philosophe homosexuel Michel Foucault assimila les quartiers homosexuels des grandes villes nord-américaines comme San Francisco ou New York aux « cours médiévales, qui définissaient des règles très strictes de propriété dans le rituel de cour » (Michel Foucault, « Choix sexuel, Acte sexuel », Dits et écrits II, 1976-1988 (2001), p. 1150). Dans sa thèse « Avatares De Los Muchachos De La Noche » qui précède son recueil de poésies Austria-Hungría (1992), Néstor Perlongher évoque le monde extrêmement codifié de la nuit et de la prostitution masculine. Dans ses mémoires Coto Vedado (1985), Juan Goytisolo aborde « la réalité brutale de la cour des miracles espagnole » dans les quartiers homosexuels de Barcelone.

 

Beaucoup d’auteurs homosexuels se plaisent à chanter les louanges d’une cour des miracles interlope, d’une nation « élue » qui aurait le devoir d’annoncer au monde la grandeur transgressive de la marginalité, de la négation de la différence des sexes : John Cameron Mitchell, Pier Paolo Pasolini, Steven Cohen, Essobal Lenoir, Philippe Besson, Hervé Guibert, Federico Fellini, Jean Cocteau, Marcel Proust, Severo Sarduy, Osvaldo Lamborghini, Rancinan, etc. « Un gigantesque bidonville. Ernestito et moi adorions ces habitants grossiers, populaires, dangereux. Ils faisaient souvent partie de nos histoires, de nos fantaisies. Ils devenaient, à leur insu, les interprètes de nos feuilletons imaginaires. » (Alfredo Arias, Folies-Fantômes (1997), p. 186)

 

Cette nation-pègre voulue par beaucoup de personnes homosexuelles/transsexuelles ressemble, dans les faits, à une cour royale de maison close, dans laquelle gravitent les maquereaux et leurs dandys escort-boys (leurs mignons) fêtant la jouissance libertine, la mixité sociale et intergénérationnelle : « À soixante-dix ans, Lito [une femme transsexuelle transformée en homme] continuait à mener une existence de play-boy. Toujours tiré à quatre épingles, il était le plus souvent escorté par une cour de jeunes gens aux casiers judiciaires chargés. Par on ne sait quel miracle, cette petite pègre l’adorait. Ils avaient l’élégance de prolonger son règne lorsque l’un d’eux devait s’éclipser quelques temps à l’ombre d’une cellule. » (Alfredo Arias, Folies-Fantômes (1997), p. 291) On en trouve un exemple parlant avec la bande des Cockettes dans les années 1970 à San Francisco (États-Unis), groupe d’érotomanes et cocaïnomanes revendiqué : « On ne pensait qu’à faire la fête, à s’éclater. On ne se rendait pas compte qu’on créait quelque chose de magique. On vivait dans notre monde. On réalisait nos rêves et nos fantasmes. On se fichait de ce qui se passait à l’extérieur. Les Cockettes étaient très incestueuses. Tout le monde couchait avec tout le monde… sous LSD… » (Rumi, un survivant travesti M to F des Cockettes, interviewé dans le documentaire « Somewhere Over The Rainbow » (2014) de Birgit Herdlitschke, diffusé en juillet 2014 sur la chaîne Arte) Je vous renvoie également au documentaire « Paris Is Burning » (1980) de Jennie Livingston, sur la sous-culture du voguing dans les bas quartiers nord-américains, avec des concours de travestis noirs.

 

COUR DES MIRACLES Rois

Francky Goes To Hollywood


 

Plus gravement, il est possible d’entrevoir dans cette foule indiscernable de personnes gay friendly, hétéro, homo, bi, transgenre et transsexuelle, le phénomène (décrit magistralement par Philippe Muray) de possession hystérique collective, prenant l’étrange masque de l’euphorie carnavalesque agressivement plaintive : « Le Possédé. Comme tel, il souffre. Tout ce qui ne lui plaît pas le fait tellement saigner qu’il porte plainte ; mais il jouit encore tellement lorsqu’il porte plainte qu’il est incapable de se voir en train de porter plainte et de rire de lui-même. C’est ainsi qu’il est comique, d’un douloureux comique que plus personne n’ose nommer ainsi. C’est un comique de doléance, comme il y a un comique de répétition, et ce nouveau comique, absolument inconnu des anciennes littératures, est souvent très réussi. » (Philippe Muray, Festivus festivus : Conversations avec Élisabeth Lévy (2005), p. 71) Ça sent la misère culture et affective à plein nez.

 
 

c) La cour des miracles homosexuels, un cauchemar :

La cour des miracles, symboliquement, c’est la voix de la schizophrénie. Par exemple, ce n’est pas un hasard si le téléfilm « À cause d’un garçon » (2001) de Fabrice Cazeneuve, dont la trame est l’homosexualité, commence par un débat sur l’obligation du pluralisme des langues. Cette question de la « prose babélique », de la pluralité du langage et des sexualités, a intéressé des chercheurs tels que Michel Foucault ou Nicolás Rosas. Il existe une correspondance entre le monde babélique/babylonien et le « milieu homosexuel ».

 

Dans le monde homosexuel actuel, je retrouve des actualisations incomplètes de la cour des miracles médiévale dans beaucoup de mouvements LGBTI : le milieu associatif homosexuel dans son ensemble (peuplé souvent de « cas sociaux »), les Gay Pride (avec les chars des Maghrébins, des daddies, des Sœurs de la Perpétuelle Indulgence, etc.), les discothèques et les bars (de plus en plus compartimentés en sous-catégories : les bears, les crevettes, les minets bodybuildés, les fem, les butch, les trans, les sadomasos, etc.) et surtout surtout les sites de rencontres internet (les fameux chat, hyper ritualisés et habités par des profils improbables de profonds mythomanes). Là, on a vraiment l’impression de rentrer dans un monde de fous, très codifié.

 

La cour des miracles, c’est aussi le retour homophobe d’un désir homosexuel pratiqué (retour prêté à « la société »… mais qui n’est en réalité que la société des amants ou le monde de la prostitution). Le libertinage donne une illusion de liberté et construit en réalité un ghetto doré, avec des nouvelles règles d’autant plus rigides et féroces qu’elles constituent des barreaux invisibles, tacites : la société homosexuelle est en effet fondée sur la double vie, la dissimulation, le mensonge, le paraître, l’anonymat, la pulsion sexuelle (…et ses caprices inattendus), un désir sexuel qui n’ose pas assumer son nom ni ses pratiques : « Outre la mauvaise réputation qu’avait la Savane la nuit, je lui rapportais en détail certaines agressions dont j’avais été témoin. Sur la place, je rencontrais toutes sortes d’individus ; les ‘branchés’ étaient une population très hétéroclite. On était du même bord, mais on ne se fréquentait pas. Sans doute par manque de confiance, beaucoup se méfiaient de leur propre clan et jouaient à cache-cache en permanence, se dénigrant et se méprisant mutuellement. Impensable pour un groupe déjà victime du malheur de sa propre différence ! C’est quand même surprenant et regrettable d’en arriver là. […] Cette histoire de clans est une fatalité pour la communauté et l’on ressentait une rivalité oppressante entre les groupes différents. En fait, chaque groupe entrait dans une catégorie bien distincte : les extravagants, les cancaniers, les très discrets et enfin les ‘leaders’, ceux qui incitaient à la prise de conscience contre les discriminations et l’homophobie dans la région d’outre-mer. Je trouvais bien dommage cette diversification au sein de la communauté. » (Ednar parlant des lieux de drague antillais, dans le roman autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, pp. 188-189) ; « Quant aux quais de la Seine, il y a belle lurette qu’ils abritent, en plus des traditionnels clochards, les idylles d’horribles couples. » (Jean-Louis Chardans, Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970), p. 59) ; etc.

 

Enfin, la cour des miracles fictionnelle représente, une fois transposée dans le réel, la conscience du viol (un viol réel ou/et fantasmé), le chœur symbolique des garçons sauvages et adolescents qui annoncent la mort prochaine (physique et/ou psychique) de la personne homosexuelle. « Ils se sont rapprochés de moi en se masturbant. J’étais allongé sur le dos au milieu du lit bleu. J’ai fermé les yeux et j’ai essayé de m’imaginer encore une fois à la piscine, l’eau, le chlore, le plongeoir, la paix, le luxe. Un rêve impossible à l’époque. Je nageais mais dans la peur. Je tremblais, à l’intérieur. Je ne voyais plus les garçons sauvages mais je les sentais venir, se rapprocher de mon corps, le renifler et le lécher. Dans un instant le violenter, l’un après l’autre le saigner. Le marquer. Lui retirer une de ses dernières fiertés. Le briser. » (Abdellah Taïa, Une Mélancolie arabe (2008), p. 25) Pour ma part, j’ai vécu au collège cette petite descente aux enfers qu’a opérée sur moi la cour des miracles de mes camarades collégiens. En effet, tous les garçons de ma classe de 5e m’ont violenté sur la cour d’école du collège Jeanne d’Arc à Cholet, ceux-là mêmes qui m’avaient intronisé roi et délégué de classe en 6e, un an auparavant.

 

La cour des miracles est finalement la représentation fantasmagorique (et parfois l’actualisation concrète) de l’idolâtrie sociale. Un désir passionnel déçu. Elle sied donc parfaitement au désir homosexuel.

 
 

Pour accéder au menu de tous les codes, cliquer ici.

 

Hypocrisie des « homos mais pas gays »

Certains individus gay ou lesbiens, de plus en plus nombreux (et de plus en plus bobos aussi…) tentent de sauvegarder leur utopie d’amour homosexuel et leur croyance en la beauté de l’homosexualité en valorisant les « exceptions d’amour » que leurs couples seraient, en n’attribuant les travers du désir homosexuel qu’aux êtres soi-disant débauchés du « ghetto gay », qu’à Internet, qu’au « milieu », en diabolisant la génitalité et « le sexe homo » (comme ils disent) au profit de la beauté de « l’homophilie » et de « l’homo-sensibilité » (ils n’aiment pas, d’ailleurs, le terme « homosexuel », car il y a « sexuel » dedans, ni le terme « gay » parce qu’il y a l’idée de « foire aux bestiaux contemporaine » derrière : ils tiennent à se définir comme « homo-sensibles », « homophiles »), en fustigeant toutes les manifestations de visibilité homosexuelle (Gay Pride, médiatisation, lois sociales sur l’homosexualité, tout type de débat collectif sur le désir homosexuel, etc.). Selon eux, l’invisibilité, la pudeur, la gratuité, la discrétion, la sincérité, l’intimité, l’amitié amoureuse, le spirituel, rachèteraient in extremis le désir homosexuel et lui redonneraient ses lettres de noblesse. La mise en pratique des actes homosexuels et du couple homosexuel se justifierait dans la poésie angéliste, dans la mise en scène de désintéressement et d’amour platonique, limite religieux (« Si j’aime mon copain, c’est pas que pour le cul : c’est pour sa personne, c’est parce que c’est lui. On ne couche pas nécessairement ensemble, vous savez ? Le sexe prend une part mineure dans notre relation. Nous sommes homo-sensibles, mais nous ne nous réduisons pas à notre tendance sexuelle ni à nos ébats sexuels, sensuels. C’est bien plus chaste que ça… C’est bien plus silencieux, plus sobre, plus sacré… »). Ça semble beau, dit comme ça. Mais quelle bande d’hypocrites !

 

Pas d’UMP à la prochaine Gay Pride !

Pas d’UMP à la prochaine Gay Pride !

Table ronde improvisée sur Facebook au sujet de l’égalité de droits pour les personnes homosexuelles

 

 

Voici l’intégralité d’un échange spontané datant de février 2010 et que j’ai entretenu avec deux internautes trentenaires de Facebook, Paul D. et Jérôme M., que j’avais dans mes contacts mais que je ne connaissais pas du tout en vrai. Tout a commencé quand j’ai lu sur le mur de Jérôme M. que ce dernier « aimait » le Groupe Facebook « Pas d’UMP à la Marche des Fiertés« . J’avais réagi gentiment en le commentant : « Qu’est-ce que c’est que ce groupe??? ^^ Qu’on soit de droite ou de gauche, elle est où, la tolérance qu’on demande aux autres si même entre homos on n’est pas unis et on alimente ce genre de sectarismes ? ». Ce « post« , pourtant anodin et qui aurait pu me passer sous le nez, nous a donné l’occasion de parler des droits « des » homos (mariage gay, homoparentalité, PaCS…) et a entraîné un dialogue sur les questions de société LGBT qui aurait pu s’éterniser, où chacune des parties s’est relativement bien prêtée au jeu et a développé librement son argumentaire. Je remercie donc chaleureusement Paul D. et Jérôme M. d’avoir pris le temps pour l’écoute et le dialogue… même si, à la fin, nous ne sommes pas toujours tombés d’accord. L’important est d’avoir échangé, malgré tout. Je me permets de saluer la qualité de leurs réflexions, leur rigueur et leur honnêteté intellectuelle, qui m’ont poussé dans mes retranchements, et qui ont vraiment contribué à élever le débat pour le rendre publiable et digne d’être connu.

 

N.B. : Dans ce petit débat virtuel, que j’ai tenu à ne pas fermer moi-même (même si j’aurais été tenté de le faire en répondant une dernière fois à Jérôme M. pour « boucler la boucle » en vainqueur… ce qui n’aurait pas été très fair-play de ma part) et à retranscrire tel quel (y compris avec mes « lol » et mes « mdr » ridicules : pour que l’échange soit un minimum possible et pacifié, je me suis forcé à rajouter une tonalité joviale à des phrases qui, échangées entre inconnus, auraient pu être mal prises dans le contexte froid et émotionnellement décuplé d’internet), je vous engage à faire attention dans le discours de mes interlocuteurs à 3 détails :

 

1 – D’une part à toutes les expressions du déni (« Je ne vois pas ce que tu veux dire… » ; « Tu as peut-être raison, mais je ne suis toujours pas convaincu.« ) ainsi que tous les indices de nonchalance, d’indifférence, de relativisme (« J’en n’ai rien à foutre » ; « Chacun fait ce qu’il veut. L’important, c’est d’être soi-même.« ; etc.).

 

2 – D’autre part comment est célébré et érigé en valeur indétrônable le Dieu « Égalité » (celui qui distribue des Droits) sans aucune remise en question.

 

3 – Et enfin toutes les marques d’anti-fascisme moralisant (références manichéennes qui ne se disent pas en termes religieux ou clairement moraux mais qui obéissent quand même à un axe bien/mal dans lequel le bien se situerait dans LEUR idée du progrès et de la démocratie, et dans lequel le mal serait des personnes humaines bien identifiables – Christine Boutin, Christian Vanneste, etc. – dont tous ceux qui ne les diaboliseraient pas comme de dangereux ennemis de la liberté seraient les pernicieux complices).

 

 

Mur de Jérôme M. :

 

Jérôme aime le groupe « Pas d’UMP à la Marche des Fiertés« .

 

Philippe Ariño :

 

Qu’est-ce que c’est que ce groupe??? ^^ Qu’on soit de droite ou de gauche, elle est où, la tolérance qu’on demande aux autres si même entre homos on n’est pas unis et on alimente ce genre de sectarismes ?

 

Jérôme M. :

 

Le fait que je fasse partie d’un groupe, que je publie un lien ou un article sur cette page ne veux pas forcément dire que je partage tout ou partie des opinions. J’ai décliné la première invitation à rejoindre ce groupe parce que je ne trouvais pas judicieux d’exclure, lors de dernière Gay Pride, Gay Lib. J’avais la même position que tu adoptes. Et je pensais que Gay Lib avait une carte à jouer, pour faire bouger les mentalités de l’intérieur. (Et je le pense toujours).

 

Si j’ai finalement intégré le groupe, c’est qu’il y a, dans ce groupe, des conversations, des échanges, des débats d’idées. Et évidemment des critiques de l’UMP voire de Gay Lib parce qu’il faut reconnaître que des propos tenus par la droite lors du Pacs aux gages lancés à l’électorat le plus conservateur lors de l’affaire du « Baiser de la Lune« , les positions de l’UMP filtre toujours avec un conservatisme nauséabond. On peine à voir les résultats de l’action de Gay Lib tant les conservateurs font entendre leur voix. Sans parler que sur le papier, les partis de gauche sont quand même nettement plus Gay Friendly que l’UMP.

 

Je pense aussi que l’orientation sexuelle n’est qu’une composante de notre identité et qu’il est somme toute normal que nous ayons des avis différents. Même s’il est primordial d’être unis pour la défense d’intérêts collectifs. Et personnellement, je ne demande pas de la tolérance. Je demande un peu plus que d’être toléré. Je demande comme beaucoup d’autres une égalité totale des droits.

 

Paul D. :

 

Je partage ton point de vue Jérôme et je trouve ton argumentaire brillant ! Chapeau.

 

Philippe Ariño :

 

S’inscrire dans un groupe, ce n’est pas forcément y souscrire… mouaif… si on veut… (lol) Cela reste quand même très rare, ici, les Facebookiens qui s’inscrivent dans un groupe qu’ils ne cautionnent pas. Je te mets au défi de m’en trouver, cher Jérôme, … (à part toi) :-)))

 

Sinon, je ne sais pas si on peut généraliser comme tu le fais sur la droite et sur l’UMP : ils n’ont pas qu’une voix, qu’un avis, et ils ne sont pas composés de personnes qui pensent pareil. (Je ne crois pas aux expressions du type « les propos tenus par la droite »). Il n’y a que « des » droites, même s’il existe une tendance. Et je peux te montrer aussi « des » gauches très homophobes et pas du tout « gay friendly« !!^^

 

Concernant d’ailleurs ladite « communauté homo », j’ai été étonné de voir que, au dernier SIGL (Salon International Gay et Lesbien de Paris), le stand de Gaylib’ était bien plus visité que son pendant de gauche : beaucoup de personnes homos, même si elles ne l’assument pas, se sentent plus attirées par la droite que par la gauche. Ce n’est ni bien ni mal : c’est une réalité à observer. Vouloir la disparition de l’UMP à la Gay Pride, c’est aussi mettre un couvercle sur toute cette part non minoritaire de personnes homos. Étant de gauche pourtant, je m’oppose (comme toi) à cette fermeture. Et rejoindre un groupe qui défend cette fermeture, quoi que tu en dises, ce n’est pas neutre.

 

Je suis d’accord quand tu discutes le mot « tolérance » (que j’ai employé alors que je ne l’aime pas, car pour moi, il ne veut rien dire : on peut tolérer tout et n’importe quoi tout en étant fermé d’esprit et de coeur. Le terme que j’aurais dû employer est celui d’accueil.)

 

Et pour moi, « égalité de droits » n’équivaut pas à « égalité des identités ». Étant différents des personnes « hétéros » (pas foncièrement, certes, mais quand même profondément : ce qui touche à la sexualité et à l’orientation sexuelle n’a beau pas nous définir entièrement, c’est quand même un poids qui pèse sur notre identité), nous n’avons pas à réclamer TOUS leurs droits (nos réalités – désirantes, conjugales, relationnelles, politiques, légales… – sont parfois communes, parfois différentes).

 

À toi la balle ^^.

 

Jérôme M. :

 

^^ Si je ne m’étais pas inscrit à ce groupe, il n’y aurait pas eu cet échange de « balle(s) », alors cette inscription a quelque chose de positive au fond.

 

Des échanges et débats d’idées ont également lieu sur le mur du groupe et ça m’intéresse tout autant. Alors, certes, ce n’est pas neutre de rejoindre ce groupe : je ne rejoins que des groupes qui m’interpellent. Pour autant, ça ne signifie pas que j’approuve l’exclusion de Gay Lib à la Gay Pride.

 

Je suis d’accord avec toi que nombre d’homosexuels sont politiquement à droite et à mon sens les exclure de la Gay Pride porterait atteinte à quelque chose de fondamental, à une liberté d’expression élémentaire. Mais ceux qui ont protesté contre la participation de Gay Lib à la dernière Gay Pride ont également exprimé quelque chose : leur incompréhension à l’adhésion par des homosexuels à un parti politique qui milite pour une vision conservatrice du couple et de la famille et qui refuse d’accorder aux couples homosexuels des droits équivalents aux couples hétérosexuels…

 

Je suis d’accord avec toi qu’on peux trouver à gauche, des politiciens pas franchement gay friendly comme on peux trouver à droite des politiciens favorables à une égalité de droits au moins sur le papier : Hervé Morin s’est exprimé par exemple en faveur à l’adoption par des couples homosexuels.

 

Il n’en demeure pas moins que (toujours sur le papier) les partis de gauche ont inscrit l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe dans leur programme alors que l’UMP est toujours favorable à une politique discriminatoire : des contrats différents en fonction qu’il s’agit de couples homos ou hétéros.

 

Je ne suis pas convaincu par ton paragraphe sur l’opposition égalité des droits et égalités des identités. À mon sens, il ne devrait pas y avoir de différence dans une république laïque et démocratique entre les individus et entre les couples. Que ceux-ci soient hétérosexuels ou homosexuels importe peu. Une inégalité de droits ne devrait pas être acceptable…. même si dans les faits, cette inégalité de droits ne choque a priori que peu de monde.

 

 

Philippe Ariño :

 

Tu me rassures 😉

 

Moi aussi, j’aime beaucoup que tu te sois un peu « trahi » dans le choix du groupe !^^

 

Concernant le « papier » (de la droite) dont tu parles, je crois qu’il vaut mieux considérer plutôt les personnes derrière. Même si je suis de gauche, je ne pense pas que la droite milite, comme tu dis, « pour une vision conservatrice du couple et de la famille ». Crois-moi : pour être dans l’enseignement ZEP et croiser à longueur de temps des gamins avec des familles absentes, déstructurées, ou démissionnaires, je me dis que les bases d’une famille traditionnelle et aimante font vraiment défaut (la droite a le mérite de rappeler l’importance de ces bases). Et ça, ce n’est ni « vieux jeu », ni « réac » : c’est nécessaire.

 

En ce qui me concerne, je ne suis pas pour que les couples homos aient les mêmes droits que les couples dits « hétérosexuels ». Les couples homos sont différents, ils ne fonctionnent pas pareil dans bien des aspects (la conception d’un enfant, la gestion de l’infidélité – plus fréquente -, l’absence de la différence des sexes, les conséquences de la différence du regard social, l’organisation du couple, l’entourage amical, etc.). Je ne suis pas pour que les individus homos aient des droits radicalement différents des personnes « hétéros », ni pour qu’ils aient les mêmes droits. Je suis juste pour qu’ils aient d’autres droits. Pas les mêmes. Le droit suit et reconnaît les identités, les différences. Il n’est pas « bon » et « sacré » en soi. Sinon, il participe à une entreprise extrémiste d’uniformisation (sous des prétextes pourtant jolis sur le papier : la défense de la différence, de l’égalité, de l’amour, de la justice, etc. etc.). Le « tous pareil » n’est pas synonyme de « justice ». Il est important de respecter les différences. Et le premier pas pour que celles-ci se mélangent, c’est déjà de les reconnaître et de ne pas tout passer sous un rouleau compresseur. Tout mélange n’est pas forcément réussi et heureux. Encore une fois, mettre le mélange, l’égalité, ou le droit, sur un piédestal peut se révéler injuste et inapproprié aux PERSONNES.

 

J’ai beau être gay et pour la reconnaissance du désir homosexuel, je ne suis par exemple pas pour un pastiche du mariage « hétéro », ni pour un pastiche de la famille par la famille homoparentale. Le couple homo et le couple « hétéro » sont des réalités différentes : il n’y a pas à faire d’équivalence là où il n’y a pas lieu d’en faire, même par le biais du droit et des lois. Ça n’a rien de « discriminatoire » que de souligner des différences de réalités, et donc de droits.

 

Tu sacralises « l’égalité de droits », mais tout ce qui est possible ne nous est pas forcément profitable, ni adapté à notre réalité, à notre contexte. Rien ne sert de quémander des droits qui ne s’adaptent pas à qui nous sommes, tout ça pour « être comme le voisin », faire comme ferait Monsieur Tout le monde et rentrer dans le moule. Faire de « l’égalité de droit » un but en soi, une Vérité immuable, positive et incontestable, c’est du conformisme à mes yeux, de l’extrémisme. Et c’est dangereux. Pourquoi faire obligatoirement comme le modèle hétéro, sous prétexte qu’on aurait le droit d’être pareil ? Et pourquoi ne saisissons-nous pas, en tant que personnes habitées par un désir homosexuel, le « droit d’être différents » ?

 

Jérôme M. :

 

Je ne suis évidemment pas contre les familles « traditionnelles et aimantes ». Je ne minimise pas l’importance d’un lien filial et je n’ignore pas l’importance d’une base familiale stable pour le développement de l’identité d’un enfant.

 

Si selon toi, je sacralise « l’égalité des droits », je ne sacralise cependant pas le modèle hétérosexuel de la famille. Je pense que d’autres schémas sont possibles, que les familles hétérosexuelles ne sont plus de toutes façons aussi stables qu’autrefois et que les familles d’aujourd’hui sont souvent recomposées. Les pères et mères biologiques ne sont plus les seuls référents dans l’éducation de nombre d’enfants et les beaux parents ont dans certaines situations un rôle éducatif à jouer. Au modèle traditionnel sont venus se greffer une multitude d’autres modèles familiaux hétérosexuels comme il n’existe pas une seule conception de la famille homoparentale mais des situations de vie bien différentes. Parler de singer le modèle hétérosexuel n’a pas de sens. Les homosexuels ne revendiquent plus dans la grande majorité à avoir un modèle de vie subversif.

 

Je ne partage pas ton avis sur les différences fondamentales entre les couples hétérosexuels et les couples homosexuels. Je ne suis pas persuadé que les différences entre les couples et entre les individus soient de l’ordre de l’orientation sexuelle.

 

En tant qu’individu et à titre personnel, je me sens plus proche de certains de mes amis hétéros que de mes amis homos. Et ça n’a rien à voir avec leur orientation sexuelle. La différence ne se situe pas là. Il en va de même pour les couples. Tous les couples hétéros ne sont pas liés à la conception d’une famille et la conception d’un enfant. Tous les couples homos n’ont pas une conception libertine de l’infidélité. Sur l’organisation du couple, là encore, il y a des situations de vie bien différentes indépendantes de l’orientation sexuelle.

 

Bref, je ne vois pas bien en quoi, le droit devrait être différent entre les couples s’agissant de couples homosexuels et de couples hétérosexuels.

 

Sans doute attaches-tu trop de valeur aux petites phrases : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits » ou la version de 1789 : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits.« 

 

Je m’arrête là, je vais être en retard au boulot.

 

 

Paul D. :

 

J’avoue ne pas non plus être d’accord avec Philippe. Je ne vois pas en quoi les couples homo sont différents des couples hétéro. Je ne connais que des couples différents les uns des autres, mais je n’ai encore jamais trouvé de caractères communs aux uns ou aux autres en fonction de l’orientation sexuelle des personnes du couple. Beaucoup d’homo aspirent à se fondre dans le moule de la société. Beaucoup d’hétéro aspirent à s’en démarquer. Quant à ta sortie sur la fidélité, elle me fait tout de même dangereusement penser à celle de Vanneste sur le sujet.

 

Je ne pense pas non plus que dans ce cas précis comme dans l’absolu, une égalité des droits entraîne une « entreprise extrémiste d’uniformisation » (pour te citer). À la rigueur, une égalité des devoirs pourrait entraîner cette uniformisation. Mais le droit n’est pas une obligation. C’est une possibilité. Les hétéro ont le droit de se marier, le font-ils tous pour autant ? Non. Au contraire: de plus en plus se pacsent. Que toi, à titre personnel, tu ne veuilles pas singer le mariage hétéro, je le comprends tout à fait, je le respecte et je peux même, par certains côtés, partager cet avis. Mais le droit n’est pas fait pour toi et moi. Le droit est un champs des possibles qui englobe tout et son contraire (tu peux te marier, tu peux ne pas te marier / tu peux voyager, tu peux ne pas voyager / tu peux attaquer ton patron en justice, tu peux ne pas le faire…), ce serait une égalité des devoirs qui entraînerait l’uniformisation, mais je pense que l’égalité des droits, au contraire, est la plus grande façon d’exprimer sa personnalité car elle donne le choix à l’individu.

 

Par ailleurs, il me semble que, dans sa très très grande majorité, la droite milite pour une vision conservatrice du couple et de la famille. Je ne sais pas si elle a raison ou tort (perso, je pense qu’elle a tort) mais je crois qu’il est difficile de le nier.

 

Philippe Ariño :

 

Comment Paul ??? Tu ne vois pas en quoi les couples homos sont différents des couples « hétéros » ? Je peux te rafraîchir la mémoire si tu veux ^^ : pas de possibilité de procréation du couple homo (va dire qu’un enfant peut naître de deux hommes, ou bien de deux femmes… et tu passeras pour un fou ^^), pas de présence de la différence des sexes (va dire que le couple homo n’est pas composé de 2 hommes, ou de 2 femmes… et tu rejoindras là aussi la science-fiction ^^), pas le même accès à la procréation médicalement assistée (va dire aux couples homos essayant d’avoir des enfants que ce sera aussi facile pour eux que dans un couple femme-homme ! Ils te riront au nez), pas la même organisation ni le même porte-monnaie (plus de temps libre, de voyages, de dépenses dans le « milieu homo »), pas les mêmes fonctionnements (dû notamment au contrôle de la visibilité, de la volonté des partenaires de ne pas se voir tout le temps ou de ne pas vivre sous le même toit par exemple), pas les mêmes pratiques sexuelles, pas le même entourage amical, pas les mêmes centres d’intérêt ni les mêmes engagements politiques, pas la même manière de s’organiser, pas le même regard social (va dire que se faire traiter d’homo dans la rue ou sur une cour d’école équivaut à se faire traiter d’hétéro ; va dire que le « coming out » est une démarche anodine et sans conséquence). Pour la seule question de la fidélité, je peux te donner des statistiques et des études sociologiques (sérieuses et très « gay friendly » en plus) qui te montrent pourtant que les couples homosexuels sont en général moins fidèles que les couples « hétérosexuels », en considérant pourtant les nombreuses exceptions à cette tendance : je n’invente rien, et ça n’a rien d’un discours « fasciste vannestien » lol. Ce sont des différences objectives, incontournables. Après, que certaines d’entre elles soient justifiables ou non, généralisables à « tous » les individus homos, c’est une autre histoire (et je ne crois pas, je te rassure, qu’elles soient généralisables à toutes les personnes homos). Mais il n’y a pas lieu de moraliser systématiquement ces différences de manière manichéenne, ou de croire que, parce qu’elles sont évoquées, on les moralise. Celui qui les souligne n’est pas en train de hiérarchiser entre le « bien » d’un côté et le « mal » de l’autre. Dire qu’elles existent, ce n’est pas les justifier, les condamner. C’est dire que nous sommes différents et qu’il n’y a pas à nier l’unicité des individus, des situations, des configurations. Il est heureux que, même si nous avons à cohabiter ensemble et que nous formons partie d’une même humanité, belle et plurielle, les personnes homos et les personnes « hétéros » ne soient pas mises dans le même panier. Pour moi, la différence de traitements (du point de vue des lois) entre personnes homos et personnes « hétéros » n’est pas « mauvaise » en soi : nous n’avons pas tous les mêmes besoins, les mêmes identités, les mêmes limites ou qualités. Le couple homo a des avantages que le couple « hétéro » n’a pas, et inversement. Le couple homo a des richesses que le couple « hétéro » n’a pas (étant minoritaires, je trouve même que les couples homos ouvrent des voies nouvelles, doivent faire preuve de davantage d’inventivité). Il est donc normal que le droit se penche sur les personnes au cas par cas. Dire, dans un relativisme bon ton, que « tout se vaut » (alors que c’est pertinemment faux), c’est nier le cas par cas. Oui, je maintiens, c’est de l’extrémisme, même s’il se dit en des termes très généreux et politiquement corrects.

 

Concernant ce que tu dis sur le « droit », il y a, je trouve, un amalgame entre le « droit social » (dans le sens légal du terme, c’est-à-dire celui qui vise à l’universel, qui a des implications sociales concrètes) et le « droit personnel » (dans le sens de libre arbitre, de liberté, que chacun possède, qui concerne l’individu, qui est légitime, et qui n’a pas nécessairement d’applications concrètes). Du point de vue personnel, je pense que ce n’est pas parce qu’a priori nous avons le droit de « tout faire » que tout est par conséquent « à faire » (de manière individuelle, et, de surcroît, de manière universelle). Ce n’est pas parce que tout est possible que tout nous est profitable (je me réfère au fait que tu dises que ce qui est bien en soi, c’est « d’avoir le choix » ; pas d’en poser un ; moi, je crois précisément le contraire). Le droit individuel, quand il se dirige vers l’universel et qu’il s’étend vers ce que tu appelles si justement « le champs des possibles », s’arrête là où les droits fondamentaux des autres sont bafoués (ça marche comme pour la liberté : la liberté personnelle s’arrête là où la liberté fondamentale de l’autre est niée ; elle n’est pas bonne en soi. Le droit, c’est kif-kif).

 

P.S. : lol ! Jérôme, la prochaine fois, réfléchis à deux fois avant de dire que tu fais partie d’un groupe FB (je plaisante bien sûr ^^ ; j’aime beaucoup notre petit débat en fait)…

 

Paul D. :

 

Ouh, ben ça c’est d’la réponse… Mais je ne suis pas convaincu pour autant. Les exemples que tu donnes pour justifier d’une différence fondamentale entre les couples homo et les couples hétéro sont conjoncturels. J’ai l’impression que tu opposes ton propre univers et ta propre expérience de l’homosexualité (que tu ériges en vérité générale) à une certaine idée de l’hétérosexualité. Il n’y a pas à mon avis de centre d’intérêt, d’engagement politique, de fonctionnement, d’ami ou d’achat compulsif (je reprends délibérément les exemples que tu as donnés) exclusivement homo ou exclusivement hétéro. Je crois que ce que nous sommes est plus complexe que ça et que notre orientation sexuelle ne détermine rien d’autre que notre orientation sexuelle. Je suis homo, ça veut dire que je suis attiré physiquement par les hommes, mais ça ne veut pas dire forcément que je kiff Madonna, que je pars à Saint-Barth en dehors des vacances scolaires, que j’ai voté pour Delanoë ou que je m’habille en D-Squared.

 

Pour tes statistiques sur la fidélité, je demande à les voir, et surtout je demande à voir comment ils ont été calculés.

 

Quant à la question du droit, je parlais bien sûr des lois. Et pas de philosophie.

 

Philippe Ariño :

 

Si tu veux qu’on en vienne aux statistiques (même si je ne les trouve pas si justes que ça car elles peuvent encourager à une généralisation que je rejette), on va le faire !lol

 

Alors par exemple dans l’ouvrage de référence de Janine Mossuz-Lavau « La Vie sexuelle en France » (Éd. de la Martinière, Paris, 2002, p. 372), il est dit que les personnes homosexuelles ont en général plus de partenaires sexuels que les personnes dites « hétéros ». D’après l’enquête ACSF (si tu veux, tu peux aller consulter : c’est tout ce qu’il y a de plus sérieux ^^), le nombre moyen de partenaires s’élevait en 1991-1992 à 11 pour les personnes « hétéros » et à 13,7 pour les personnes homos. Parmi les moins de 30 ans, les personnes homos ont souvent collectionné une cinquantaine d’amants, les personnes « hétéros » moins d’une vingtaine. Il apparaît effectivement que les premières se caractérisent en moyenne par une moindre propension à développer des liens durables avec un partenaire privilégié.

 

Par ailleurs, en 2008, en France, la moyenne du nombre de partenaires chez les personnes homosexuelles est de 6,6 partenaires pour les femmes lesbiennes, et de 15,4 pour les hommes gay. L’existence de relations extraconjugales est plus fréquente dans les couples d’hommes homosexuels que dans les couples de sexe différent. Ainsi, 1 homme sur 3 qui vit en couple avec un homme depuis plus d’un an rapporte avoir eu un autre partenaire dans les 12 derniers mois (versus 3,5 % des hommes vivant en couple avec une femme). Les hommes homo-bisexuels déclarent avoir eu 10,4 rapports en moyenne au cours des 4 dernières semaines contre 8,6 chez les hommes hétérosexuels (pas de différence avec les femmes) (« Enquête sur la Sexualité en France » (2008) de Nathalie Bajos et Michel Bozon, p. 251). Par ailleurs, n’en déplaisent aux femmes lesbiennes, « elles ont un nombre plus important de partenaires que les femmes qui n’ont eu que des partenaires masculins. » (Idem, p. 254)

 

Voilà pour les sondages.

 

D’autre part, cher Paul, je ne sais pas d’où tu tires que je cherche à « justifier une différence fondamentale entre les couples homo et les couples hétéro », que « j’oppose » hétérosexualité et homosexualité (je les trouve au contraire jumeaux et non opposés, même si, dans notre discussion, j’ai parlé de leurs différences, parce que ce sont leurs différences que toi et Jérôme avez niées). Je n’ai jamais parlé d’actes, de comportements, « exclusivement homos » (relis, s’il te plaît, ce que j’ai marqué : je parle de tendances ; je ne déblatère pas de « généralités » ni de « clichés » sur « les » homos, c’est toi qui caricatures ^^).

 

Et enfin, si pour toi, parler des « droits » en termes humains et non simplement en termes froidement législatifs (tu te places uniquement du côté des « lois ») ça revient à « philosopher », je suis fier d’être un philosophe alors ! 😉

 

Paul D. :

 

Ben là quand même, je te trouve un chouia de mauvaise foi ! Tu écris un post dans lequel tu démontes mes arguments pour arriver à la conclusion qu’homo et hétéro sont différents en tous points (procréation, organisation, fonctionnement, style de vie, réseau d’amis, centre d’intérêts, engagement politique, regard social, rapport à l’autre…) et ensuite tu me reproches d’interpréter ce post comme instaurant une différence fondamentale entre couple homo et couple hétéro. Si opposer les homo et les hétéro à la fois par leur rapport à l’autre et par leur rapport à soi ce n’est pas opposer homosexualité et hétérosexualité de façon fondamentale, je ne sais pas ce qu’il te faut!

 

Pour les sondages, je ne nie pas qu’il y ait des publications sérieuses pour dire que les homo sont plus infidèles que les hétéro, je les ai lues aussi. Mais j’émets des doutes non pas quant au sérieux de l’enquête mais sur la vérité des conclusions. Je sais, c’est un cliché de dire que les chiffres et les enquêtes on leur fait dire ce qu’on veut, mais dans chaque cliché il y a quand même une part de vérité. Je suis journaliste et quand je lis certains articles de certains confrères sur des sujets que j’ai également traités et que je constate que nos conclusions sont différentes, voire opposées, à partir des mêmes chiffres et parfois des mêmes interviews, je deviens beaucoup plus prudent avec les enquêtes et les statistiques. C’est pour ça que je demande à voir comment ces chiffres ont été trouvés, qui a été interrogé, où, quand, sur quelles tranches d’âges, dans quelles catégories socio-pro, comment les personnes ont été recrutées, par qui, dans quelles circonstances, pourquoi ont-elles répondues, etc.

 

Bon, après, mea culpa, je reconnais que c’est moi qui ai caricaturé avec Madonna et les vacances scolaires. Mais c’est parce que j’aime plus Madonna. (mais je ne vais pas devenir hétéro pour autant. – j’espère -)

 

Philippe Ariño :

 

Cool ! lol ! En fait, nous sommes d’accord !^^

 

Je ne suis pas friand non plus des statistiques, car en effet, on peut les utiliser pour transformer les clichés en personnes réelles, les tendances en généralités abusives.

 

Après, perso, j’aime les coïncidences (j’ai pas dit les « causes ») et les tendances que les sondages révèlent maladroitement, froidement. Car, en effet, il n’y a généralement pas de cliché sans feu.^^ (je me tue à le dire dans mon bouquin).

 

Je ne pense pas être de mauvaise foi quand j’essaie de parler à la fois des divergences et des ressemblances entre les personnes homos et les personnes « hétérosexuelles » : j’appelle ça plutôt le sens de la nuance ^^ (sachant que si j’avais dressé uniquement le tableau des divergences, ou uniquement le tableau des ressemblances, il y a de fortes chances pour que je sois en effet tombé dans la caricature – manichéenne ou uniformisatrice – ).

 

Je suis ravi de savoir que tu es journaliste. Je suis ravi que tu sois homo. Je suis ravi que Jérôme (mais où est-il passé, ce blaireau qui s’inscrit à des groupes FB débiles et qui après se casse lâchement en courant ?…lol) nous ait mis en lien. Je suis ravi de notre échange.

 

Jérôme M. :

 

Eeeeeeeeeehhhhhhhhhh ! C’est moi le blaireau ? 😉

 

Les seules choses dans lesquelles je me retrouve dans ta description de la vie très différente des couples homosexuels, c’est pour :

 

1) la différence des sexes : C’est clair que nous sommes du même sexe avec mon compagnon 🙂 Et que ça entraîne des … pratiques sexuelles … différentes [encore que ^^]

 

— > Mais en quoi cela justifie des droits différents ? Je ne suis pas, comme Paul, fan du mariage et je ne suis pas sur que je viendrais à me marier si j’en avais la possibilité. Je suis pacsé et je suis satisfait personnellement de cette forme de contrat. [Merci à ceux qui se sont battus pour la création du Pacs au passage] Mais il ne s’agit pas de cela. Mais juste du fait qu’il n’y a aucune raison dans une société démocratique, républicaine et laïque qui se revendique des droits de l’homme et qui reconnaît les couples homosexuels d’exclure du mariage ces derniers. Au nom de quoi en fait cette exclusion se justifie ? Parce que c’est sans doute cela la question : Qu’est ce qui dans nos supposées différences justifie que certaines unions soient réservées aux seuls hétérosexuels ? En quoi l’ouverture du mariage aux homosexuel(le)s constituerait une menace pour le mariage des hétérosexuel(le)s ?

 

2) Le fonctionnement du couple : Il se trouve que je ne vis pas toute la semaine sous le même toit que mon compagnon. Mais en réalité, ça n’a rien à voir avec mon orientation sexuelle et tout à voir avec ma profession. D’ailleurs, j’ai plusieurs collègues bien hétéros qui vivent la même situation que moi.

 

Pour le reste, pour tout ce qui concerne le budget, les voyages, les partenaires sexuels, l’infidélité, les besoins … j’ai franchement l’impression de ne pas être dans les « normes homosexuelles ».

 

Je suis persuadé que beaucoup d’autres homosexuel(le)s ne se reconnaissent pas dans la description d’un certain microcosme homosexuel que tu décris. Je suis convaincu qu’un nombre non négligeable d’homosexuel(le)s aspirent à une égalité des droits même s’ils ne veulent pas tous se marier, adopter…

 

Paul D. :

 

Oui, d’autant plus que je ne le connais pas vraiment, Jérôme… c’est le deuxième post que j’écris sur son mur. j’avais créé un groupe sur les propos de Vanneste et on s’était facebooké à ce moment-là. C’est fou quand même. Et dire que le siècle dernier les gens se rencontraient dans la vraie vie!

 

Philippe Ariño :

 

* à Paul : MMMMDDRRR! (je sais pas pourquoi je te trouve provincial… : peut-être parce que je suis allé voir tes photos FB et que je me suis dit que tu faisais très « bobo / citadin qui ne s’assume pas » lol!)

 

Allez, ce serait cool que tu nous dises, maintenant que tu as vendu la mèche, dans quel trou paumé de la Creuse tu fais de la peinture sur soie (mdr), et où habite vraiment ta famille dans le Marais (cet antre de perdition lol)!!!^^

 

Sinon, (je me répète), pour moi, un choix, un droit, une loi, ne sont pas bons et indiscutables du simple fait d’être POSSIBLES. Beaucoup de choses nous sont possibles, mais tout ne nous est pas PROFITABLE : ce n’est pas parce que j’ai le choix que je choisis au mieux ; ce n’est pas parce que j’ai une plus grande variété de « possibilités » devant moi que je suis plus libre et que je vais bien choisir ; en plus, la « liberté de refuser » n’est pas en soi l’expression d’une vraie liberté, car contrairement à la vraie liberté qui s’oriente vers un « OUI », vers une adhésion POSITIVE (qui implique certes le renoncement, mais le renoncement n’est pas son but absolu), la « liberté de refuser » s’oriente prioritairement vers un « NON » (si j’étais dur, je dirais qu’elle est la « liberté du sale gosse » ou « du caprice » ^^).

 

Paul D. :

 

Mais avant de devenir l’antre de perdition que nous connaissons, le Marais était bien pire encore. Pensez donc, y’avait que des étrangers, principalement des juifs, parce que c’était tellement le quartier le plus pourri de Paris, aucun Français ne voulait s’y aventurer alors on y parquait les immigrés. Voilà comment nous sommes arrivés en France, à Paris et dans le quartier. C’est vrai que ça a bien changé depuis Malraux, Picasso et Beaubourg.

 

Sinon, en effet, ce n’est pas parce que tu as le choix que tu vas bien choisir. Mais si tu as le choix, ça s’appelle une démocratie, si tu n’as pas le choix ça s’appelle une tyrannie (au sens grec, pas au sens moderne).

 

Ceci posé, j’ai toujours pensé que la meilleure solution pour une société est une autocratie éclairée. À l’unique condition que ce soit moi l’autocrate. Mais comme c’est compliqué à réaliser, c’est pour ça que je suis démocrate. (À regret, mais que veux-tu… faut bien se résigner)

 

Philippe Ariño :

 

Pour moi, la démocratie et la liberté, ce n’est pas d’ « avoir le choix » : c’est de « choisir » (et de faire le meilleur choix possible). ^^ Beaucoup de gens à qui on donne tous les choix finissent par choisir la tyrannie dont tu parles (par refus de l’engagement). Ce n’est pas parce qu’on te propose la liberté que tous la prennent et en font bon usage 😉

 

Jérôme M. :

 

Philippe, tu t’es défendu à plusieurs reprises de sombrer dans les clichés. Tu as même parlé de « généralités abusives » et pourtant ta vision du mariage est pleine de clichés. C’est une vision très traditionnelle et surtout très judéo-chrétienne.

 

Le mariage n’est plus, en France, depuis la Révolution Française l’affaire des religieux. Seul le mariage civil a une quelconque valeur aux yeux de l’État. Et même tes références religieuses ne reflètent pas non plus la réalité française. L’Église catholique n’est pas la seule à être pratiquée en France et même si tout nous renvoie dans notre calendrier à cette religion, elle n’a pas plus de valeur qu’une autre religion aux yeux de la loi. Nous vivons, grâce à … DIEU 😉 dans un pays laïc.

 

Il se trouve que ta définition du mariage : « l’union d’amour en vue de la composition d’une famille de sang » n’est pas à ma connaissance celle du Code Civil. L’amour n’est pas présent dans le Code. Pas plus que le Code Civil ne définit le mariage comme l’union d’un homme et d’une femme. Ni qu’il définit le mariage comme ayant pour but la composition d’une …. « famille de sang » ou d’une famille tout court.

 

Tous les hétérosexuels n’ont pas vocation à faire des enfants et certains homosexuels aspirent à en avoir, voire ont déjà des enfants (Que ces enfants soient biologiques ou adoptifs). Et ça ne date pas d’hier.

 

Tu parlais que je sacralisais le droit mais aucune raison a priori de sacraliser le mot et le concept du mariage : inutile de changer le nom : le mariage civil existe depuis la révolution.

 

En ce qui concerne, la famille traditionnelle et biologique : je ne la renie pas. Je suis féru de généalogie et je suis très attaché à ma famille même si elle a connu depuis de nombreuses évolutions et recompositions. Il se trouve que tous les enfants ne grandissent pas au sein de leur famille biologique et que l’adoption existe depuis des lustres. Il se trouve que même des célibataires peuvent adopter et ce depuis de nombreuses années en France (donc sans le double et sacro saint référent masculin-féminin). Il se trouve aussi que l’homosexualité ne date pas d’hier et que les homosexuels font des enfants depuis des lustres. Il se trouve que les couples homosexuels sont de mieux en mieux acceptés par la société (même si l’homophobie demeure une réalité) et que de nombreux couples élèvent déjà des enfants… Il se trouve que des homosexuels célibataires adoptent déjà et que certains en couple ont obtenu (à titre individuel mais c’est déjà une avancée) un agrément pour adopter. L’adoption par des couples homosexuels, c’est pour demain.

En fait, ce qui nous oppose n’est pas rien. Tu considères le PACS comme un pacte fourre tout qui a presque perdu de sa valeur initiale parce qu’il s’est « hétérosexualisé » !!!

 

Je considère moi que les individus et les couples (À partir du moment où l’homosexualité n’est pas considérée comme une infraction pénale ni comme une maladie mentale ou autre) sont égaux et ne doivent pas faire l’objet de distinction aux yeux de la Loi. Je ne me serais jamais pacsé si le PACS n’avait concerné que les homos et même si je ne souhaite pour le moment pas me marier, je trouve inadmissible que le mariage soit réservé aux seuls hétérosexuels.

 

Bref, je ne suis pas convaincu par tes exemples et démonstrations de la différence entre les couples hétérosexuels et homosexuels. Chaque individu est différent de l’autre et chaque couple est a priori différent de l’autre. Un couple homosexuel peut avoir plus de point commun a priori avec un couple hétérosexuel qu’avec un autre couple homosexuel.

 

Et le fait qu’il n’y ait pas d’altérité sexuelle ou que le couple homosexuel ne puisse pas avoir biologiquement un enfant ne devrait pas avoir d’incidence sur la possibilité de se marier ou d’adopter. C’est d’ailleurs le cas dans de plus en plus de pays et j’espère que les choses continueront d’aller dans ce sens même si cela entraîne le réveil de religions sur le déclin.

 

Jérôme M. :

 

« Ce n’est pas parce qu’on te propose la liberté que tous la prennent et en font bon usage 😉 »

 

Certes ! Mais ça n’est, en rien, une raison pour ne pas proposer la liberté !

 

 

Philippe Ariño :

 

Meeeerde, Jérôme, t’es chiant, on avait dit que j’avais pas le temps de bien répondre aujourd’hui !!! lol

 

Tu écris : « Ce n’est pas parce qu’on te propose la liberté que tous la prennent et en font bon usage 😉 Certes ! Mais ça n’est, en rien, une raison pour ne pas proposer la liberté ! »

 

J’ai jamais dit le contraire ! On est bien d’accord ! ;-)…

 

Tu dis que ma vision du mariage était pleine de clichés… mais lesquels ? Ai-je idéalisé le mariage, dit qu’il était idéal, facile (et ce, pour tous les êtres humains) ? JAMAIS. J’ai juste dit qu’il s’appliquait uniquement aux couples intégrant la différence des sexes. Ça n’a rien d’une défense inconditionnelle, d’une idéalisation, d’une image d’Épinal, du mariage et du couple femme-homme. Loin de là !

 

Tu parles de mes références religieuses… mais où les vois-tu exprimées dans mes propos ? J’avoue que là, tu vas chercher loin…lol. Je serais curieux de savoir où tu vois une once de propos « judéo-chrétiens » : moi, je te parle de bon sens, de manière civilisée et humaine ; après, chacun de nous a ses convictions et ses croyances (et puis la culture « judéo-chrétienne » dont tu parles comme si elle était le diable en personne, lol, je te signale que c’est celle dont nous sommes issus, qu’on le veuille ou non. On ne balaie pas d’un revers de main ses origines ; et tant mieux : tout n’est pas à garder, tout n’est pas à jeter : c’est ça la liberté.)

Je suis d’accord sur ce que tu dis sur l’importance de la laïcité. Je suis d’ailleurs un fervent défenseur de la laïcité (et m’oppose à tout « laïcisme » qui vise à annuler les différences, tout ça parce que la laïcité propose une cohabitation pacifique des différences religieuses).

 

Si l’amour n’est pas dans le Code civil (je regrette d’ailleurs qu’il n’en parle pas assez), il est encouragé, tout comme la composition d’une famille, lors du mariage à la mairie. D’ailleurs, le Code Civil, contrairement à ce que tu dis, stipule bien que le mariage concerne l’union d’un homme et d’une femme (sinon, le PaCS n’aurait jamais vu le jour). En revanche, je suis d’accord que la composition d’une famille est présentée comme une option, mais celle-ci est encouragée, non martelée comme une évidence ou une obligation.

 

Je n’ai jamais dit que les personnes dites « hétérosexuelles » devaient obligatoirement « faire des enfants », que la paternité adoptive comptait pour du beurre, et que la différence des sexes ou l’existence des enfants était LA condition sine qua non pour qu’on puisse parler d’amour vrai (on voit assez, autour de nous, des couples incluant la différence des sexes et s’aimant pourtant moins que des couples par exemple homosexuels, ou des couples femme-homme stériles)

 

Quand tu dis « Il se trouve aussi que l’homosexualité ne date pas d’hier et que les homosexuels font des enfants depuis des lustres. », tu peux me dire comment ils font en couple pour avoir leurs propres enfants ? mdr ! Là encore, tu te situes d’un point de vue individuel… mais je te dirais que depuis des lustres, le couple homosexuel n’a jamais été procréatif, et n’a jamais eu d’enfants.

 

Quand tu annonces, comme une prédiction inéluctable, que : « L’adoption par des couples homosexuels, c’est pour demain », je te dirais : ça n’a rien d’une fatalité. C’est pour demain SI ON VEUT. (Tu parles comme un prospectus publicitaire ou une campagne politique ^^) On est libres que ce ne soit pas « pour demain », justement. Certes, il existe, du point de vue des individus, des paternités biologiques chez les personnes homosexuelles ; certes, il existe des paternités adoptives (porteuses de bien des valeurs) chez les personnes homosexuelles au sein de leur couple. Mais ce n’est pas pour cela qu’il faut imposer sous forme de loi et de droit cette possibilité à tout le monde. Désolé, mais pour moi, même si la paternité adoptive peut être bénéfique pour un enfant (et je parle là aussi des familles monoparentales, des célibataires « hétéros » qui adoptent), je crois qu’elle ne remplace pas la présence de deux parents femme et homme qui s’aiment (je prends soin de souligner « qui s’aiment », car l’existence de la différence des sexes ne suffit pas) ni qu’elle lui est équivalente (même les parents adoptifs reconnaissent volontiers que la paternité adoptive, aussi bien vécue soit-elle, n’équivaut pas à une paternité biologique aimante). Ça arrive que, à cause des incidents de la vie, des êtres humains n’ont pas eu la chance de bénéficier des richesses de cette union désirante femme-homme aimants (union faillible, défectueuse, mais « idéale dans son imperfection » à mes yeux) : disparition prématurée d’un des deux parents, divorce, abandon, etc.. Mais ce n’est pas pour ça qu’on doit cesser de la présenter comme un modèle social fondateur, comme la base de toute société humaine, et qu’on doit la substituer par des parodies de « familles » (le mot est fort, mais j’en vois pas d’autres…^^).

 

Tu te gendarmes parce que je dis que le PaCS est un pacte « fourre-tout » et qu’il s’est « hétérosexualisé »… mais pourtant, regarde bien, Jérôme : par exemple, rien que si on considère l’année 2007, sur les 100 000 contrats de pacte civil de solidarité signés en France, 95% ont été conclus par des couples hétérosexuels… Et je ne te parle même pas du nombre de ruptures de PaCS du peu de couples homos qui se sont massivement pacsés au début de la création du contrat…

 

Si tu trouves  » inadmissible que le mariage soit réservé aux seuls hétérosexuels », c’est que tu n’as pas suivi mon explication plus haut qui disait que le couple homo ne cadrait pas avec ce que l’État et l’Église proposent quand ils parlent de « mariage ». « Ne pas correspondre » ne signifie pas « être mauvais » ou « être défectueux » : c’est juste que le couple homo, parce qu’il n’inclut pas la différence des sexes et qu’il n’est pas, de fait, procréatif, est différent et qu’il ne rentre pas dans ce cadre spécifique-là. Je ne dis pas qu’il n’y a pas autre chose à inventer pour les couples homosexuels, mais simplement, le mariage républicain, civil, et/ou religieux n’est pas à la taille des couples homosexuels. Ça ne rentre pas. Ce n’est ni injuste, ni discriminatoire : c’est une réalité. C’est un FAIT.

 

Au passage, je trouve assez bizarre que tu demandes non le mariage mais « le droit de le refuser », ou bien le mariage « pour les autres ». Qui sont ces « autres » que tu défends ? (même si tu n’as pas employé explicitement ce terme) Existent-ils vraiment ou sont-ils des projections de ce que tu voudrais (…refuser) ? Qui est ce « Tout le monde » dont tu te fais le porte-parole ? (l’ensemble de la société ? la communauté homosexuelle ? les rares couples homos qui voudraient se marier ?) Pourquoi vouloir pour les autres ce que tu ne voudrais pas pour toi-même ? Je ne comprends pas trop, là…

 

Je ne comprends pas non plus ta phrase : « Je ne suis pas convaincu par tes exemples et démonstrations de la différence entre les couples hétérosexuels et homosexuels. Chaque individu est différent de l’autre et chaque couple est a priori différent de l’autre. Un couple homosexuel peut avoir plus de point commun à priori avec un couple hétérosexuel qu’avec un autre couple homosexuel. » Ce n’est pas parce qu’entre couples homos il existe ou peut exister plus de différences qu’entre un couple hétéro et un couple homo (ce qui m’arrive parfois de le penser pour certains de mes amis homos en couple) que cela gomme pour autant les différences de faits et de réalités entre les couples « hétéros » et les couples homos…

 

Je ne suis pas d’accord quand tu écris que « le fait qu’il n’y ait pas d’altérité sexuelle ou que le couple homosexuel ne puisse pas avoir biologiquement un enfant ne devrait pas avoir d’incidence sur la possibilité de se marier ou d’adopter » : moi, je crois que si un couple femme-homme par exemple en arrive à demander l’adoption, c’est bien parce qu’il n’arrive pas à avoir d’enfants. Et si une société humaine s’en fichait de savoir si ses citoyens pouvaient avoir des enfants, elle s’en ficherait de son avenir, de son bonheur, et ne serait pas tournée vers la vie (l’indifférence aux enfants, c’est quelque chose de triste). Et si une société défend l’altérité sexuelle, c’est bien qu’elle sait que nous en sommes tous issue et qu’elle est porteuse de vie. Sans la différence des sexes, nous ne serions pas là pour en parler ;-). Elle est le socle de notre origine, identité, et de notre vie (individuelle, sociale). Pour moi, la différence des sexes n’est pas « bonne » en soi : elle n’est un trésor extraordinaire que si elle est couronnée par la liberté (de la vivre ou de la laisser de côté), par le respect à son encontre.

 

Bon, allez, il faut que je continue de bosser… (lol)


 

Paul D. :

 

Oh ben si quand même! ton discours est très judéo-chrétien… d’ailleurs tu écris à plusieurs reprises « église » « religion » et le champ lexical autour. Et les arguments que tu mets en avant résonnent un peu de morale judéo-chrétienne.

 

Je ne dis pas pour autant que ça amoindrit tes arguments. Je dis juste que, consciemment ou non, ton discours se situe de ce côté-là des influences. Mais je suis d’accord avec toi pour dire que c’est notre culture et que, pour ou contre, ça détermine malgré tout ce que l’on est et ce que l’on pense.

 

Sinon je suis vraiment épaté. Mais comment fais-tu pour écrire autant et aussi vite? (Et sinon encore, c’est dans quel arrondissement Savigny?!!!) (et encore sinon, ce serait bien que j’arrive à bosser moi aussi… -c’est trop nul les week-ends!)

 

Philippe Ariño :

 

mdr! gros smack Paul!^^

 

(« arrondissement de Savigny »… ptdr! : c’est la meilleure de l’année, celle-là!lol)

 

(N.B. : VISIBLEMENT, UN « POST » DE JÉRÔME MANQUE, CAR J’Y RÉPONDS PAR LA SUITE, EN LE CITANT… DONC TOUT N’A PAS ÉTÉ PERDU.)

 

Philippe Ariño :

 

Jérôme, je te réponds un peu tardivement (j’avais à bosser par ailleurs).

 

Bon, on va reprendre ton dernier papier (long !lol)

 

Tu écris : « Où je vais chercher tes références judéochrétiennes ? Sans doute dans ta vision du mariage comme réservé aux seuls couples hétérosexuels ». Alors je te corrige tout de suite : c’est pas uniquement « ma » vision (lol) (c’est une réflexion qui est mûrie depuis des années et des années par nos ancêtres), ni celle de ceux à qui tu m’associes comme pour discréditer, voire diaboliser, ce que je pense (les Boutin, et tous ceux que tu juges comme des fondamentalistes et des fachos en puissance… Mais qui sont les fachos, en fait ? Tu sais, j’ai beau ne pas être d’accord avec Christine Boutin, jamais je n’aurai la fermeture de penser qu’elle ne dit que des conneries et qu’elle est le diable en personne ; j’ai beau rejeter les fondamentalismes religieux – tu qualifies presque « les religions monothéistes » de dangereuses sectes -, je ne veux pas basculer dans un athéisme tout aussi fondamentaliste que les fondamentalismes montrés du doigt ; j’ai beau être de gauche, je ne diabolise pas la droite en utilisant Sarko comme un méchant homme-épouvantail pour prouver que tel argument est fermé ou non…). Je n’ai rien inventé : le mariage inclut la différence des sexes. Il n’y a pas de différences des sexes dans les couples homos. C’est la réalité du mariage. Après, si on veut transformer le mariage, on peut le faire. Mais ce ne sera plus le mariage, et il n’en méritera pas le nom. Qu’est-ce que tu veux que je te dise de plus ?lol

 

Tiens, tu me demandais de prouver par la citation que même le Code Civil disait que le mariage était réservé au couple femme-homme. Docilement, je suis allé voir (j’ai qu’ça à foutre, franchement… lol) www.legifrance.gouv.fr, le chapitre intitulé « Des qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage« . En fait, il n’est pas question des couples homosexuels, c’est-à-dire que les expressions employées sont soit « les époux« , soit « l’homme et la femme » (ex : « L’homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus.« , article 144). Il est spécifié d’ailleurs le respect de la différence des générations : « En ligne collatérale, le mariage est prohibé, entre le frère et la sœur. » (article 162) ; « Les mineurs ne peuvent contracter mariage sans le consentement de leurs père et mère ; en cas de dissentiment entre le père et la mère, ce partage emporte consentement. » (article 148). Voilà m’sieur !^^

 

Tu écris : « Tu es bien conscient que je n’ai, à aucun moment, parlé de couple homosexuel mais bien …. d’homosexuels. » C’est bien ce que je te reproche : une vision finalement très individualiste du couple et du mariage ^^. Alors que, quand même, le mariage concerne toujours deux personnes.

 

Tu écris : « Je ne vois pas en quoi une possibilité offerte par le droit est « imposée » à qui que ce soit et encore moins à tout le monde. » Et bien je te dirais que entre la permission donnée sous forme de loi et l’acte, il n’y a qu’un pas. Et que même si la loi ne t’impose rien en soi, n’a pas le pouvoir d’agir à ta place, elle est quand même là pour te dire que quelque chose est possible et souhaitable, elle est là pour te rappeler la réalité et y coller un maximum, et elle peut t’encourager à envisager des réalités qu’elle a cherché à définir. Or, du point de vue uniquement anthropologique, le couple homosexuel n’inclut pas la différence des sexes et n’est pas procréatif. La famille homosexuelle n’est pas une réalité, même si elle est désirée. L’expression « famille homosexuelle » est impossible (au sens propre du terme « impossible »). Pareil pour le « mariage gay ». Les termes « mariage » et « couple homo » sont quasi incompatibles. L’expression « mariage gay » est antinomique. Car, je me répète, la réalité du mariage et la réalité du couple homosexuel ne collent pas ensemble. Leur seul point commun, c’est le couple. Mais un couple (qu’il y ait différence des sexes en son sein ou non d’ailleurs) n’est pas systématiquement synonyme de « mariage » ni de « famille ». Le mariage ne sacre pas le couple : il sacre la différence des sexes qui donne accès à la famille. Le couple homo donne accès à d’autres choses très belles… mais pas à la différence des sexes ni à la famille. Que veux-tu que je te dise d’autre ? C’est pas moi qui ai créé le monde ainsi. ^^

 

Tu écris : « Tu as une conception différentialiste qui me laisse perplexe. Est ce une façon de refuser un modèle que tu considères soit trop petit bourgeois soit trop hétéronormé ? Est ce parce que tu as l’impression que les homosexuels doivent être subversifs que tu leur refuses des droits équivalents ? » Je te répondrai que je ne mets pas mes résistances au mariage gay du côté de la volonté (subversive, « anti-quelque chose », antibourgeoise, anti-hétéro, ou autre…) mais du côté du constat et du bon sens.^^

 

Tu écris : « Je pense, moi, que c’est pour demain, parce qu’il me semble évident que malgré quelques réactions homophobes médiatisées, de plus en plus de pays vont dans ce sens. » Tu sais, quand bien même tous les pays du monde s’accorderaient à dire que le mariage entre personnes de même sexe est possible et juste, ça ne changerait rien à la réalité. Ce n’est pas parce qu’a priori tout le monde croit à un mythe que ce mythe deviendra réel. Il existe des croyances humaines ajustées au réel (ça s’appelle la foi porteuse, humaniste) et puis il y a des croyances peu ancrées dans le réel (ça s’appelle les superstitions, les mythes populaires, les contes, les sectes).

 

Tu insistes à nouveau sur la notion d’égalité (« Il me semble que ça va dans le sens d’une évolution du droit en faveur de davantage d’égalité entre les individus et cela me semble à moi une bonne chose »), comme si le seul emploi du terme « égalité » suffisait à légitimer tout ce qu’elle permettrait, comme s’il était un mot magique. Sache d’une part que nous, les êtres humains, ne sommes pas égaux, tout simplement parce que nous sommes uniques, que nous avons nos limites, et que nous sommes tous différents. Et d’autre part, l’égalité de droits me semble un idéal social à viser DANS LA MESURE OÙ l’inégalité des identités est reconnue. L’inégalité des identités n’est pas systématiquement le fruit d’une injustice (ça peut être le cas, mais pas toujours) : c’est parfois un état de faits. Or, ce qui est gênant, c’est que les fondamentalistes de l’identité ou de l’égalité, à force de vouloir à tout prix une « égalité de droits » (mais sans s’adapter aux gens, aux différences, aux cas par cas, aux réalités), finissent par amalgamer « égalité de droits » (juste) et « égalité des identités » (impossible). Et ça, c’est dangereux. On peut vouloir le « bonheur du monde » sans le monde… et ça, ça a toujours donné des dictatures. L’histoire humaine en atteste sans arrêt.

 

 

Tu écris : « Je ne partage pas ta conception que le droit doit s’appliquer différemment en fonction des différences factuelles. » Je te réponds que si le droit, dans n’importe quelle société humaine qui soit, ne se fonde pas d’abord sur les PERSONNES, leur(s) réalité(s), et ensuite sur leurs rêves humanistes (parce qu’il met les idéaux, les rêves humanistes avant les personnes), il construit des mythes, il accrédite des fantasmes et leur donne corps (un corps législatif), et c’est comme ça que le monde coure à la catastrophe. Il devient une dictature (toute dictature humaine met la vérité avant les hommes, les bonnes intentions avant les personnes… et ne se voit donc plus agir concrètement).

 

Tu écris : « Tu fais des différences entre filiation biologique et filiation adoptive. Je n’ai jamais dit qu’il n’y en avait pas. Je ne vois pas trop ce que ça change, ceci dit, pour l’adoption par des personnes de même sexe. » Ça change que dans le cas des couples homos, il y a de toute façon au moins un des deux membres du couple qui vivra la filiation adoptive, qui n’est pas aussi similaire à une filiation biologique aimante.

 

Tu écris : « Que dire de ton expression (tu reconnais d’ailleurs toi même qu’elle est forte) : « parodie de famille » ? Sache qu’elle viens de te ranger dans mon esprit gendarmesque dans la case « Boutin  & cie » … et pourtant, Dieu (encore lui), sait à quel point je déteste mettre les gens dans des cases .^^ » Tu sais, ce n’est pas parce que j’ai jugé l’expression dure qu’elle ne me paraît pas pour autant juste et que je la changerais. Oui, je persiste et signe : le mariage gay est pour moi une mascarade, quand bien même il soit fait avec sincérité et que je respecterai mes amis homos et que je serai à coup sûr quand même ému par cette mascarade le jour où des couples d’amis m’inviteront à assister à leur mariage. (une chose, c’est ce que je pense ; une autre, ce sont les personnes et l’amitié qui nous lie). Et pareil pour l’idée de famille homoparentale : pour moi, ce n’est pas une famille. Après, le jour où une amie lesbienne à moi m’a présenté, alors que je défilais à la Gay Pride parisienne 2009, son petit bout de chou, je n’ai pas craché à la gueule du gamin, je te rassure !lol (je me suis même extasié devant son petit blondinet… même si ce dernier restera son enfant biologique à elle et pas, comme elle me le disait, l’enfant d’elle et de sa copine). Pareil pour les personnes transsexuelles de mon entourage. On ne me fera jamais avaler qu’on peut changer de sexe, et que la personne qui est en face de moi et qui est née garçon est vraiment une femme parce qu’elle se sent sincèrement femme depuis sa jeunesse et qu’elle s’est fait opérer. Je ne vais pas cautionner un mensonge identitaire, une mascarade, même pour « faire plaisir » ou « récompenser une sincérité ». Après, ça n’empêche que face aux quelques personnes transsexuelles de mon entourage, je ne remets pas sans cesse le couvert sur ce qui m’apparaît comme un mensonge flagrant, et je ris avec eux, discute, les charrie. Il y a ce que je pense (la théorie), et puis les gens (qui comptent plus que la théorie). Mais je n’ai jamais cessé de dire « ils » devant/concernant mes amis transsexuels nés garçons (je n’ai jamais féminisé en « elles »… ce qui les agace parfois gentiment). Ce n’est pas pour faire chier mon monde ni pour être original ni parce que je serais « buté ». Simplement, j’aime coller à la réalité (vivante, mouvante, mystérieuse) et j’aime la vérité. Elle rend service à tout le monde.

 

Quand tu écris à propos du PaCS « Il se trouve que ce qui me plaît dans cette union, c’est qu’elle soit ouverte à tous, sans distinction opérée sur l’altérité sexuelle ou non des membres du couple. Une union homosexuelle serait en plus d’être profondément discriminatoire, complètement stigmatisante. », je suis limite d’accord avec toi ;-). Désuniversaliser le couple homo est dangereux. Mais l’universaliser l’est tout autant. J’ai pas vraiment de moyen terme à proposer, à part, je te dis, une union spécifique aux couples homos (pour qu’ils puissent être protégés et reconnus par la loi quand même) mais qui ne s’appelle pas « mariage » ni « famille ».

 

Tu écris : « Est il vraiment besoin de revenir sur le rôle de l’Église dans un État laïc ? » Ayant été bien formé sur ce qu’est la laïcité lors de ma formation IUFM pour être prof, je peux te parler de la laïcité sans problème. Je crois comprendre que pour toi, un État laïc est un état où les confessions religieuses sont invitées à rester dans le domaine exclusivement privé, et en gros, à se la fermer. Or, ça, c’est du laïcisme. La vraie laïcité n’est pas en faveur d’une indifférence aux religions, d’une disparition des religions, ni même d’un cloisonnement des religions dans la sphère du privé. Elle est pour une juste distinction de l’Église et de l’État (« distinction » ne veut pas dire « séparation totale »), et surtout, elle est en faveur d’une cohabitation pacifique et SOCIALE entre les religions (non une « indifférence mutuelle » ou une exaltation du privé : les religions ont aussi leur mot à dire par rapport aux questions sociales : on vit en démocratie, très cher), tout en respectant la liberté de culte et les traditions ancestrales, culturelles et religieuses du pays où la laïcité est choisie (on ne va pas supprimer le calendrier chrétien en France, par exemple, parce que la France est un pays de tradition judéo-chrétienne). Désolé de te dire que ta position par rapport aux religions n’est, à mon sens, pas du tout « laïque » (dans le sens noble du terme), mais en fait « laïciste » (voire relativiste, méprisante, et laïcarde ^^) puisque tu dis : « Je me moque de la position de l’Église sur le mariage comme je me moque de savoir la position de la Mosquée de Paris, du Conseil Représentatif des Musulmans de France, de l’UOIF ou que sais je encore sur le port du hidjab, du niqab, de la burqa ou de tout voile, intégral ou non. » Je suis sûr que tu peux mieux faire 😉

 

Tu écris : « Le mariage est civil en France depuis la Révolution. » Pardon ??? ^^ Ce n’est pas parce qu’il est possible, depuis la Révolution, de ne pas en passer obligatoirement par l’église pour se marier, que le mariage devient civil en France depuis la Révolution. Le mariage ne cesse pas d’être religieux (en plus d’être civil depuis la Révolution). Il n’est pas que civique.

 

Tu t’étonnes que je trouve bizarre le fait que tu demandes non pas un droit pour lui-même mais pour avoir le « droit de le refuser » ? Eh bien parce que le droit « demandé pour lui-même » est pour moi l’expression d’une vraie liberté, alors que le droit « demandé pour être refusé » est la démarche du conformisme ou du caprice. Et le « droit demandé pour les autres » et non « pour soi-même + les autres » m’apparaît comme l’utilisation des autres comme un bon prétexte (un prétexte en apparence solidaire, altruiste) pour justifier ce caprice.

 

Tu écris : « Quant à savoir si les homosexuels qui souhaitent se marier et adopter des enfants existent vraiment, je me demande dans quelle tour d’ivoire vis tu ? À mon tour de te poser des questions du coup parce que là, j’ai l’impression que nous vivons dans des univers complètement différents ! Ça ressemble à quoi un homosexuel sur la planète que tu vis ? Jamais tu n’as croisé d’homosexuels qui souhaitaient se marier et avoir des enfants. Sérieusement ? » Et bien je ne pense pas vivre dans une toute autre planète que la tienne (lol). Je n’ai pas à me plaindre du point de vue du nombre de rencontres de personnes homos que j’ai faites depuis 9 années dans le « milieu homo » ! et je crois avoir croisé, à travers mes sorties, mes cercles d’amis, grâce à mon livre, au travers de mes engagements associatifs homos divers et variés, assez de gens pour t’assurer que le désir de se marier et de fonder une famille est très minoritaire dans la population homosexuelle (en tout cas chez les gens homos que j’ai rencontrés, qui est un échantillon plus que respectable et représentatif). Tu transformes en « évidences » la paternité ou le mariage gay, alors que je n’ai quasiment entendu que des personnes qui ne voulaient pas s’engager vraiment en couple durable, qui ne voulaient certainement pas (je cite) « s’embarrasser d’un gamin », et qui trouvent le mariage complètement (je cite) « dépassé, anachronique, bourgeois, hypocrite ». À mon tour de te demander dans quelle planète (hétéro, homo, terrestre) tu vis ?^^ (tu me paies le voyage ?)

 

Tu écris : « Que dire à ton ode à la vie et à la famille hétérosexuelle que je n’ai pas déjà dit ? » Alors je t’arrête tout de suite ! lol ! La famille hétérosexuelle, je ne l’ai jamais défendue. Je n’ai, c’est pas dur, aucun bien à en dire de cette famille-là (trouve-moi un seul passage où je défends le couple hétérosexuel, où je l’idéalise). Je ne défends pas le couple hétérosexuel mais uniquement le « couple femme-homme aimant ». Tu vas trouver que je joue sur les termes, mais pourtant, c’est très important : je développe la différence entre « couple hétéro » et « couple femme-homme aimant » pendant plusieurs pages de mon livre, alors je ne vais pas m’étendre ici. Pour te résumer, pour moi, le couple hétéro est violent, ressemble au couple-objet de la médecine légale et de la télé, et n’est pas du tout un modèle social à imiter, par les couples femme-homme d’une part, par les couples homos d’autre part.)

 

Tu conclues en disant « J’ai tout dit. Il ne s’agit pas de lutter contre la famille hétérosexuelle mais d’offrir aux homosexuels la possibilité de se marier et d’adopter des enfants parce qu’ils sont tout à fait aptes à cela ». Et je te demande : Et pourquoi donc ? (^^)

 

Enfin, je voulais terminer par ces quelques mots (car notre échange commence à ressembler à une vraie joute verbale !! ^^). Je voulais juste te dire (et vous dire : je pense à Paul) mon plaisir de discuter avec toi et Paul… à tel point que je me dis que ce serait tout à fait le genre d’échange qui mériterait d’être publié, comme on publierait les discussions d’une table ronde publique, avec la courtoisie/respect de ceux qui échangent sans forcément arriver à tomber d’accord (et c’est pas le but, en fait : on ne tombera pas d’accord sur tout… mais j’aime le plaisir qu’on a à développer un argumentaire, à chercher à affiner notre pensée, à égratigner et charrier l’autre, à bousculer les meubles, à être ensemble tout simplement. C’est pas si courant d’aborder de front des questions qui, mine de rien, sont sans cesse survolées, dans les débats sur l’homosexualité, et qui reviennent pourtant toujours. Alors gardons cette liberté de ton, ce désir de passer au peigne fin notre pensée et les paroles de l’autre. Qui sait ? On en fera peut-être quelque chose, de cet échange Facebook (moi, j’ai mon blog d’écrivain ; Paul est journaliste ; toi, Jérôme, tu as une très belle plume, et un discours fort, pertinent – je dis pas qu’il me ferait presque m’arracher les cheveux, parce que ça te ferait trop de plaisir lol… mais il me pousse dans mes retranchements, et ça m’oblige à être plus prudent, à bien choisir mes mots, et c’est très agréable au final –). Jouons-la comme Ferré/Brassens/Brel, rien que pour le trip !^^ (Faut juste que Paul nous ponde le prochain billet, et qu’il soit brillant et long… ce qui n’est pas gagné… lol)

 

Jérôme M. :

 

Tu es dans l’interprétation la plus totale sur ce que je pense des croyants en général. Il se trouve que je suis croyant et que j’ai longuement eu une pratique religieuse. Il se trouve que ma pratique religieuse n’était pas catholique mais musulmane. C’est une des raisons pour laquelle ta façon de tout faire tourner autour de la religion catholique en semblant ne pas voir les autres traditions religieuses présentes sur le sol français depuis longues dates et en semblant ne pas voir qu’une très grande majorité des français ne se réfèrent aux traditions religieuses que quand la mort les touche.

 

Je n’ai jamais dit dans mes propos que Christine Boutin était le Diable. C’est encore une fois un terme qui n’a de sens que dans la religion. Je n’ai pas non plus dit que c’était une facho en puissance. Je n’ai pas fait de référence avec le fascisme ou le nazisme. Je sais raison gardée et j’évite habituellement de faire de telles comparaisons. Ceci dit on pourrait s’amuser à reprendre les thèmes de Boutin, Vanneste et consorts et à faire un état des lieux sur la partie la plus religieuse de … l’UMP.

 

En ce qui concerne, le Code Civil, dans tes trouvailles, nulle trace d’une définition du mariage qui le définirait comme étant celui d’un homme et d’une femme. En Français et même en droit, « L’homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus« , ça ne signifie nullement que l’homme et la femme ne peuvent contracter mariage ENSEMBLE. Ça veux surtout dire que ni l’homme ni la femme ne peuvent contracter de mariage avant 18 ans révolus, que les deux sexes sont concernés par cette condition d’âge. Inutile cependant de s’appesantir là dessus : nous savons tous que si cette condition n’est pas clairement définie par le Code, le mariage était dans l’esprit des législateurs de l’époque celui d’un mariage entre un homme et une femme.

 

Film « Comme les autres » (2008) de Vincent Garenq

 

« Tu écris : « Tu es bien conscient que je n’ai, à aucun moment, parlé de couple homosexuel mais bien …. d’homosexuels. » C’est bien ce que je te reproche : une vision finalement très individualiste du couple et du mariage ^^. Alors que, quand même, le mariage concerne toujours deux personnes. »

 

–> Quand tu me cites, prends la peine de ne pas sortir les phrases de leur contexte et tu t’apercevras peut être que tes analyses sont erronées. Je parlais d’homosexuels qui ont des enfants. Et j’ai même détaillé vu que tu feignais de ne pas comprendre : je te parlais d’homosexuel(le)s ayant une vie de couple hétérosexuelle et d’autres qui en avaient eu lors d’unions hétérosexuelles et qui pouvaient avoir par la suite une vie de couple homosexuelle voire être célibataires. Il n’en demeure pas moins qu’ils rentrent dans le thème qui est : les homosexuels ne sont pas stériles et peuvent avoir des enfants. Je ne vois pas comment tu peux en déduire que ma vision du couple est individuelle, je ne faisais, dans ce cas précis, que constater un état de fait et non parler de ma conception des choses.

 

Tu te réfères ensuite au bon sens pour justifier ta conception traditionaliste et profondément religieuse du mariage. On tourne en rond, j’ai l’impression. Le mariage étant civil depuis plus de deux cents ans et n’étant pas défini par la loi, ta conception du mariage comme le préambule à la constitution d’une famille.

 

Les hétérosexuels n’ont pas attendu le Pacs pour se passer du mariage pour constituer une famille. Les homosexuels non plus. Et tout ceci n’a rien d’un mythe… L’ouverture du mariage aux personnes de même sexe est déjà une réalité dans de nombreux pays.

 

Tu poursuis en me traitant à demi mots de fondamentaliste après m’avoir dit plus haut que j’assimilais les religieux à des fondamentalistes. On n’est pas loin d’atteindre le Point Godwin, j’ai l’impression ^^.

 

Tu parles ensuite de dictature et là je préfère te laisser dans tes délires. Reviens avec nous Philippe. Je ne te parle que d’ouvrir le mariage et l’adoption aux couples homosexuels à partir du moment où l’homosexualité n’est plus considérée par la loi comme un comportement déviant et où les couples homosexuels sont non seulement tolérés de fait mais où on leur propose d’autres unions légalement reconnues.

 

En parlant de l’adoption, tu écris :  » Ça change que dans le cas des couples homos, il y a de toute façon au moins un des deux membres du couple qui vivra la filiation adoptive, qui n’est pas aussi similaire à une filiation biologique aimante. » Là, je ne te suis pas. Ça ressemble vaguement à un plaidoyer antiadoption et finalement, je vais presque m’excuser de t’avoir comparer à Christine Boutin, tu sembles finalement beaucoup plus réac qu’elle en réalité. ^^ Je t’ai dit l’importance que revêtait pour moi le lien filial mais en même temps, je ne vois pas trop en quoi tu peux qualifier la filiation biologique d’aimante et la comparer à la filiation adoptive sans qualificatif. Une filiation biologique peut très bien être sans amour filial et une filiation adoptive peut s’avérer bien plus riche en amour qu’un lien biologique. Évitons de tomber dans une conception du monde trop fantasmée.

 

Tu dis plus loin : « Je crois comprendre que pour toi, un État laïc est un état où les confessions religieuses sont invitées à rester dans le domaine exclusivement privé, et en gros, à se la fermer. » Fais un effort Philippe. C’est toi l’intellectuel. C’est toi le prof, écrivain à ses heures….. tu devrais réussir à me lire sans tomber dans l’interprétation la plus hâtive. Je n’ai pas dit que les croyants n’avaient pas leur mot à dire. Je n’ai aucun souci avec les croyants les plus ouverts d’esprits et d’ailleurs certains sont tout à fait pour le mariage homosexuel. J’ai juste dit que je me moquais de connaître la position de l’Église sur le mariage, c’est quelque peu différent. Il se trouve qu’entre les hadiths du Prophète Mohammed sur les homosexuels, les versets du Coran, de l’Ancien et du Nouveau Testament sur le sort que les bons croyants sont censés réservés aux homosexuels, je me moque un peu de savoir quelle est la position des religions. Et l’État n’est pas censé gouverner le pays en se référant à la Bible même si Boutin l’a exhibée à l’Assemblée. La fin de ton propos est du même ordre. Tu es dans l’interprétation. À croire que tu ne fais qu’une lecture superficielle de mes propos.

 

Non, je ne suis pas opposé au fait religieux et non je ne suis pas un farouche laïcard. J’ai longtemps eu une pratique religieuse et je m’en suis éloigné depuis, c’est exact. Il se trouve que je ne fais plus la politique de l’autruche, c’est à dire, je ne fais pas le tri dans les textes religieux en fonction de ce qui me dérange ou non. Je peux difficilement faire attraction d’un texte sacré ou des propos d’un envoyé de Dieu appellant à tuer les homosexuels par exemple.

 

Il est évident que je n’ai pas les mêmes rapports que toi à la Laïcité et au fait religieux. Pour moi, il est évident que le mariage est avant tout civil en France parce qu’il se trouve que le mariage religieux n’a aucune valeur. La loi ne parle de mariage religieux uniquement pour rappeler que ce dernier ne peux avoir lieu avant un mariage civil et punir ceux qui procéderaient à une cérémonie religieuse avant un mariage civil. Un mariage religieux n’est aucunement reconnu devant la Loi alors je ne vois pas trop en quoi il devrait continuer d’être la référence pour s’opposer à l’ouverture du mariage civil aux personnes de même sexe. C’est hallucinant !

 

« Tu t’étonnes que je trouve bizarre le fait que tu demandes non pas un droit pour lui-même mais pour avoir le ‘droit de le refuser’ ? Eh bien parce que le droit ‘demandé pour lui-même’ est pour moi l’expression d’une vraie liberté, alors que le droit ‘demandé pour être refusé’ est la démarche du conformisme ou du caprice. Et le ‘droit demandé pour les autres’ et non ‘pour soi-même + les autres’ m’apparaît comme l’utilisation des autres comme un bon prétexte (un prétexte en apparence solidaire, altruiste) pour justifier ce caprice. » Heureusement que des gens comme Badinter, Simone Veil, Victor Schoelcher et tant d’autres se sont montrés « capricieux »…. ^^^

 

C’est sûr que si tu n’as rencontré qu’une très grande majorité d’homos ne voulant pas « s’embarrasser de gamins » et trouvant le mariage comme « petit bourgeois », nous ne devons pas vivre dans le même monde. Non pas que j’insinue que ces personnes n’existent pas. Peut être même constituent elles la majorité. Mais est-ce que cela signifie pour autant que le souhait exprimé par quantités d’homosexuels comme de très très capricieux hétérosexuels d’ouvrir le mariage aux personnes du même sexe est illégitime et non représentatif ? N’est tu pas sûr d’en avoir rencontré ne serait ce qu’un ? Ni dans les milieux associatifs LGBT ? Ni à la lecture de GayClic ou d’autres médias Gays ? Ni sur aucun groupe Facebook ? Ni dans la vraie vie ? Sérieusement ? ^^^^ À mon humble avis, je préfère des gens (hétéros et homos) qui veulent offrir une famille à un enfant qui est privé de la sienne à des gens qui ne veulent pas s’embarrasser de gamins. Si les premiers seraient capricieux, que dire des seconds ?

 

« Tu conclues en disant ‘J’ai tout dit. Il ne s’agit pas de lutter contre la famille hétérosexuelle mais d’offrir aux homosexuels la possibilité de se marier et d’adopter des enfants parce qu’ils sont tout à fait aptes à cela’. Et je te demande : Et pourquoi donc ? (^^) »

 

—-> Parce qu’ils ne sont pas différents des hétérosexuels, ne t’en déplaise. Parce qu’ils peuvent apporter de l’amour et de la stabilité à des enfants. Parce que c’est ce qu’ils font déjà depuis longtemps.  Parce que tous les homosexuels n’aspirent pas tous à une vie de multiplications et d’accumulation de partenaires sexuels. Parce que nombre d’entre eux ne vivent pas différemment de leurs frères/soeurs/amis/relations hétérosexuelles…. Parce qu’ils peuvent très bien avoir les mêmes désirs d’enfants que des hétérosexuels sans que ceux des seconds seraient considérés comme légitimes et ceux des premiers considérés comme des caprices.

 

Ta conclusion est fort sympathique mais il se trouve que le ton enjoué du début se perd un peu. Sans doute la fatigue d’une journée de travail ou l’agacement d’être comparé à un « fondamentaliste » même de la laïcité qui qualifierait de « fachos » les religieux. Je ne sais pas.  J’ai en tout cas apprécié avoir cette conversation avec toi ainsi que les interventions de Paul… J’ai bien conscience que tous les homosexuels ne sont pas favorables au mariage et à l’adoption par d’autres homosexuels. J’ai bien compris les distinctions que tu opères entre couples hétéros et couples homos mais très honnêtement je ne suis pas convaincu.

 

 

 » Au passage, je trouve assez bizarre que tu demandes non le mariage mais ‘le droit de le refuser’, ou bien le mariage ‘pour les autres’. Qui sont ces ‘autres’ que tu défends ? « 

 

Il n’y a rien de bizarre là dedans. En quoi cela est bizarre ? On ne peux revendiquer un droit sans le souhaiter pour soi-même ? Des blancs n’ont-ils pas milités pour la fin des discriminations envers les noirs ? Badinter et d’autres politiciens hétérosexuels n’ont-ils rien fait pour les homosexuels ? J’avoue ne pas comprendre ce que tu veux dire.

 

Quant à savoir si les homosexuels qui souhaitent se marier et adopter des enfants existent vraiment, je me demande dans quelle tour d’ivoire vis-tu ? À mon tour de te poser des questions du coup parce que là, j’ai l’impression que nous vivons dans des univers complètement différents ! Ça ressemble à quoi un homosexuel sur la planète que tu vis ? Jamais tu n’as croisé d’homosexuels qui souhaitaient se marier et avoir des enfants. Sérieusement ?

 

Pourquoi vouloir pour les autres ce que je ne veux pas pour moi-même ? En plus de ce que j’ai déjà répondu plus haut, il se trouve que ce sont des décisions qui se prennent à deux. Dans un couple homosexuel comme dans un couple hétérosexuel. Que mon compagnon a déjà été marié et qu’il ne souhaite pas se marier de nouveau, qu’il a déjà un enfant et qu’il se trouve désormais trop vieux pour concevoir de s’occuper d’un enfant en bas âge. Il se trouve également que le PaCS me satisfait à titre personnel mais que je … « trouve inadmissible que le mariage soit réservé aux seuls hétérosexuels ». Mais je crois l’avoir déjà dit, non ? ^^

 

Pour l’adoption par des hétérosexuels, là encore, nous ne vivons décidément pas sur la même planète. Il existe des couples qui adoptent en plus de leurs enfants biologiques … juste parce qu’ils savent ce qu’est une famille aimante et qu’ils savent que nombre d’enfants sont soit orphelins soit abandonnés par leur famille de par le monde.

 

Que dire à ton ôde à la vie et à la famille hétérosexuelle que je n’ai pas déjà dit ? Rien en fait. J’ai tout dit. Il ne s’agit pas de lutter contre la famille hétérosexuelle mais d’offrir aux homosexuels la possibilité de se marier et d’adopter des enfants parce qu’ils sont tout à fait aptes à cela sans que cela ne soit qu’un caprice éphémère d’enfant gâté.

 

Où je vais chercher tes références judéochrétiennes ? Sans doute dans ta vision du mariage comme réservé aux seuls couples hétérosexuels et dans ta proposition d’instaurer une union civile réservée aux seuls homosexuels mais ne reprenant pas le mot du « mariage » …. Cela correspond aux positions de Boutin et multitude de personnes se revendiquant de religions monothéïstes. Cela correspond également au programme de Nicolas Sarkozy lors des présidentielles. …. (D’où le nom du groupe qui a inspiré cette conversation.) Ceci dit, je peux me tromper. Tu peux tout à fait avoir les mêmes idées que Boutin sans avoir les mêmes références religieuses.

 

Si je t’ai fait rire par ma phrase :  » Il se trouve aussi que l’homosexualité ne date pas d’hier et que les homosexuels font des enfants depuis des lustres. », j’avoue que toi, ta réaction m’a laissé perplexe : « tu peux me dire comment ils font en couple pour avoir leurs propres enfants ? mdr ! Là encore, tu te situes d’un point de vue individuel… mais je te dirais que depuis des lustres, le couple homosexuel n’a jamais été procréatif, et n’a jamais eu d’enfants. »

 

—> Tu es bien conscient que je n’ai, à aucun moment, parlé de couple homosexuel mais bien …. d’homosexuels. J’imagine que tu te doutes qu’il me reste deux ou trois notions de cours de biologie et je ne suis pas sans ignorer la nécessité de gamètes mâles et femelles.

 

J’imagine que tu n’es pas non plus sans ignorer que nombre d’homosexuels ont eu par le passé (et continue encore de nos jours à avoir) des unions hétérosexuelles par souci de se plier à la norme hétérosexuelle de la société, que beaucoup de ses homosexuel(le)s ont eu des enfants. Si le couple homosexuel est par définition stérile, les homosexuel(le)s ne le sont pas. D’ailleurs tu le reconnais quelques lignes plus loin : « Certes, il existe, du point de vue des individus, des paternités biologiques chez les personnes homosexuelles ; certes, il existe des paternités adoptives (porteuses de bien des valeurs) chez les personnes homosexuelles au sein de leur couple. »

 

Tu dis également :  » D’ailleurs, le Code Civil, contrairement à ce que tu dis, stipule bien que le mariage concerne l’union d’un homme et d’une femme ». Tu sembles être sûr de toi. Peux tu me citer l’article du Code Civil qui en dispose clairement ?

 

Plus loin, tu me reprends en disant que l’adoption par des homosexuels, c’est pour demain, uniquement si cela est un choix de société et tu poursuis en disant :  » Mais ce n’est pas pour cela qu’il faut imposer sous forme de loi et de droit cette possibilité à tout le monde. » Je ne vois pas en quoi une possibilité offerte par le droit est « imposée » à qui que ce soit et encore moins à tout le monde. Je ne suis pas franchement convaincu par notre conversation et j’avoue que tes positions et tes propos me heurtent un peu. Tu as une conception différentialiste qui me laisse perplexe. Est-ce une façon de refuser un modèle que tu considères soit trop petit bourgeois soit trop hétéronormé ? Est-ce parce que tu as l’impression que les homosexuels doivent être subversifs que tu leur refuses des droits équivalents ? Je pense, moi, que c’est pour demain, parce qu’il me semble évident que malgré quelques réactions homophobes médiatisées, de plus en plus de pays vont dans ce sens. Il me semble que ça va dans le sens d’une évolution du droit en faveur de davantage d’égalité entre les individus et cela me semble à moi une bonne chose vu que je ne partage pas ta conception que le droit doit s’appliquer différemment en fonction des différences factuelles. À étendre ce raisonnement, les femmes n’auraient toujours pas le droit de vote, les hommes seraient toujours les chefs de famille, les colonies avec des droits différents entre les « français » et les « français musulmans »… Je ne m’étends pas d’avantage sur ce chemin sinon je vais être, très vite, accusé d’atteindre le point Godwin. 🙂

 

Tu fais ensuite des différences entre filiation biologique et filiation adoptive. Je n’ai jamais dit qu’il n’y en avait pas. Je ne vois pas trop ce que ça change, ceci dit, pour l’adoption par des personnes de même sexe.

 

Que dire de ton expression (tu reconnais d’ailleurs toi-même qu’elle est forte) : « parodie de famille » ? Sache qu’elle vient de te ranger dans mon esprit gendarmesque dans la case « Boutin  & cie » … et pourtant, Dieu (encore lui), sait à quel point je déteste mettre les gens dans des cases .^^

 

Tu dis donc que je me « gendarme » du fait que tu qualifies le « PaCS » de  » pacte fourre-tout » et qu’il s’est « hétérosexualisé »… mais tu as dû louper un épisode à notre conversation. Tu as certes dit que le pacte s’était hétérosexualisé et dans ta conception différentialiste des couples, tu l’as regretté, souhaitant au fond la création d’une union hétérosexuelle (« il ne laisse pas vraiment de place au couple homosexuel en tant que tel. »). Inutile de me convaincre que le PaCS soit majoritairement devenu une union hétérosexuelle. Cela m’importe peu. Il se trouve que ce qui me plaît dans cette union, c’est qu’elle soit ouverte à tous, sans distinction opérée sur l’altérité sexuelle ou non des membres du couple. Une union homosexuelle serait en plus d’être profondément discriminatoire, complètement stigmatisante.

 

Quand tu dis plus loin encore :  » Si tu trouves ‘inadmissible que le mariage soit réservé aux seuls hétérosexuels’, c’est que tu n’as pas suivi mon explication plus haut qui disait que le couple homo ne cadrait pas avec ce que l’État et l’Église proposent quand ils parlent de ‘mariage’. « : Je te trouve un poil prétentieux. J’ai tout a fait suivi ton explication et je te rassure sur le fait que j’ai bien compris tes arguments mais je n’ai pas du tout été convaincu par ton argumentaire.

 

Est-il vraiment  besoin de revenir sur le rôle de l’Église dans un État laïc ? Je me moque de la position de l’Église sur le mariage comme je me moque de savoir la position de la Mosquée de Paris, du Conseil Représentatif des Musulmans de France, de l’UOIF ou que sais-je encore sur le port du hidjab, du niqab, de la burqa ou de tout voile, intégral ou non. Le mariage est civil en France depuis la Révolution. Et que dis le Code Civil sur la famille, le couple et le mariage ? Très peu de chose au fond. Est-ce que le Code a évolué ? Oui, sinon les femmes n’auraient pas les mêmes droits que les hommes aujourd’hui. Évoluera-t-il encore ? Inévitablement.