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Interdiction de parler du diable et d’en dire du mal !

Ça paraît incroyable. Mais c’est pourtant vrai. En ce moment, j’ai un ami qui boude, me fait littéralement la gueule, ne veut plus me revoir, simplement parce que j’ai osé utiliser sur les réseaux sociaux le terme « diabolique », de surcroît négativement. Car lui voit le diable comme une invention/projection humaine farfelue, une irréalité, un mensonge. Et s’il admet exceptionnellement son existence, il ne voit en ce dernier que le côté luciférien, lumineux, positif, éclatant, utile à l’action bienfaitrice de Dieu… et peut-être même à l’existence de Dieu lui-même.
 

Alors je veux bien lui concéder que Dieu permet l’existence et l’action du diable, et que ce dernier participe, d’une certainement manière, au plan intégral de Salut de Dieu pour l’Humanité. Mais quand Dieu PERMET (Satan est bien sa créature aussi, au même titre que l’Homme), il n’en DÉSIRE pas pour autant… et en l’occurrence, concernant le diable, Il le tolère/supporte temporairement, et uniquement pour préserver notre liberté à nous Humains. Fondamentalement, Dieu n’a pas besoin du diable pour exister ni pour agir : il se trouve qu’Il « fait avec ». Mais en théorie, Il pourrait agir seul, et sans avoir recours au mal (la violence, la colère, l’autorité, la mort, le châtiment, etc.).
 

Si je résume et je reviens à cet ami, celui-ci m’en veut de reconnaître et de dévoiler l’existence du diable. Le mal, selon lui, ne devrait pas être mal-aimé, ni même dénoncé/désigné comme « mauvais ». Dans sa vision dithéiste, énergétiste, relativiste, bisexuelle/asexuelle et équilibriste de l’Amour et du Monde (quand je dis « équilibriste », je me réfère à l’« équilibre » soi-disant « parfait » et « cyclique » qui existerait entre les polarités du ying et du yang, du négatif et du positif, du masculin et du féminin, de l’Humain et de la Création, de la vie et de la mort, des peines et des joies, de ce qui nous apparaît comme des succès ou comme des échecs, etc. etc.), le bien et le mal n’existeraient pas ou seraient indissociables, partenaires, nécessaires, essentiels l’un à l’autre, complémentaires. Comme des vases communicants. Ledit « diable » serait en réalité notre « meilleur allié ». Le mal ne serait qu’un revers du bien, et inversement.
 

Finalement, cette pensée du « bien par le mal » ou du « mal = Bien » (extrêmement dangereuse car elle sous-entend qu’au nom du Bien et pour le Bien, on peut et on doit en passer par le mal : la fin justifierait les moyens…) nous a été serinée depuis des décennies, à travers ce genre de sophismes/syllogismes/poncifs idéologiques faux, faisant la part belle au diable et au mauvais : « Il n’y a pas de réelles fautes ni d’erreurs ni de péchés : juste des expériences dont on peut forcément tirer profit en les vivant ! Tout est bon ! Le bien est partout, même dans ce qui nous apparaît sur le moment comme négatif ou douloureux ! », « C’est en se trompant qu’on apprend et qu’on ressort grandis ! » ; « On ne fait pas d’omelettes sans casser des œufs ! », « Ce qu’on voit comme mauvais nous aide à avancer : ce n’est qu’une question de point de vue et d’inversion ! ». Si je résume, ce n’est pas l’action de Dieu – se servant même de nos échecs, de nos blessures et de nos péchés qu’Il permet – pour manifester sa Gloire, qui nous sauverait, mais les échecs eux-mêmes ! Totale inversion des valeurs !
 

En fait, nous vivons dans un Monde tellement envahi par le positivisme protestantisé – la fameuse « pensée positive », l’optimisme combatif obligatoire – qu’Il ne veut plus entendre parler négativement du mal (critiques, dénonciations, erreurs, échecs, remords, culpabilité, souffrances, violences, fautes irréversibles, péchés, enfer…) et encore moins des entités démoniaques spirituelles et surnaturelles (les anges déchus ayant suivi Lucifer). « Dans la pensée dite ‘positive’, le mal n’existe pas ou est bon par essence : c’est tout simplement ‘un bon mal’. » (le père jésuite Aleksander Posacki, « Les Voies d’accès actuelles à l’occultisme », dans l’ouvrage La prière de délivrance et d’exorcisme : les attaques du démon contre l’homme, Éd. Bénédictines, 2008, p. 69). Nous n’avons plus le droit de critiquer le mal ou le diable, de dire que le mal est mauvais, que le diable est « diabolique ». C’est quand même incroyable, cette positivité de la « neutralité », qui se veut un pied de nez au manichéisme superstitieux, un chant aux « nuances » (« Dans la vie, rien n’est tout blanc, rien n’est tout noir ; tout est gris et mélangé et divers ; Il n’y a ni de Bien ni de Mal ; ni de bon ni de mauvais ; tout est profitable ; tout est inutilement complexe car finalement la seule évidence, Vérité et simplicité serait l’incertitude, la confusion, la neutralité et l’absence de Vérité discernable et incarnée que serait Jésus. »).
 

En fait, ces adorateurs de la positivité absolue (mélange fusionnel et soi-disant « équilibré/équilibrant » du Bien et du mal) – très présents dans la culture New Age de la religion du dieu « Énergie » mais aussi dans les médias qui nous martèlent que « tout serait possible et positif à partir du moment où on le vit, on se bat, on y croit et on le veut vraiment » – sont des adeptes de Lucifer qui s’ignorent (car ils nient l’existence du diable et interdisent que nous présentions l’action de ce dernier comme mauvaise, destructrice et à ne pas pratiquer). Pourtant, dans leur propre pratique intime d’énergéticiens-thaumaturges-acupuncteurs-magnétiseurs-guérisseurs-masseurs-rebouteux-médiums-coachs de vie aux dons préternaturels, ils savent très bien qu’ils ont joué avec un feu malveillant, à double tranchant, ambigu. Et parfois, ils en souffrent même beaucoup, et en silence. Par exemple, j’ai rencontré en vrai des hommes et des femmes qui se sont faits « canaux énergétiques » lors de séances « bien-être » de tantrisme ou de channelling ou de reïki (en sollicitant, donc, des entités spirituelles et des énergies à la fois « cosmiques », « intérieures », « environnementales », « médiumniques », mais qui ne sont bien évidemment ni Jésus ni l’Esprit Saint ni les sacrements de l’Église Catholique), et qui, en déplaçant le mal et en générant un apparent soulagement ou bien-être ou guérison temporaires, ont finalement chopé de sacrées cochonneries ou des maladies dignes de l’absorption/contagion/transposition/infestation/incorporation/atavisme démoniaque (je pense notamment à une nana qui est immédiatement devenue bossue au contact d’un patient qu’elle a touché en voulant le guérir par le reïki ; à un gars qui, suite à une « séance thérapeutique », a eu l’un de ses yeux qui a rapetissé et a perdu une grande partie de sa capacité ; et je ne parle même pas des guérisseurs sujets aux maux de tête, aux cauchemars nocturnes, aux visions et hallucinations, et autres vexations sataniques). Le milieu du « développement personnel » et des « énergies » sollicite les entités des mondes parallèles, les âmes errantes, les esprits (dits « ancestraux » et « transhistoriques », via la croyance animiste en la réincarnation), et est un culte déguisé à Satan. Je dis « déguisé » car Satan n’est plus identifié ni vu comme mauvais. Il est réduit et appréhendé à/comme un « partenaire ». Il faudrait, pour cette raison, plusieurs séances d’exorcisme pour rompre les liens que certains guérisseurs ou patients ont contractés avec les entités spirituelles des infra et supramondes.
 

Podcast audio sur l’anti-catholicisme dans les dessins animés des années 1980 en France

Voici un podcast de décryptage des dessins animés des années 1980 diffusés sur les chaînes de télé françaises (Youpi l’école est finie ! sur La Cinq, Récré à deux sur Antenne 2, Amuse trois sur FR3, Le Club Dorothée sur TF1, etc.), avec l’angle insolite du catholicisme : « L’anti-catholicisme dans les dessins animés des années 80 ».
 

 

Philippe Ariño vous démontre que cela fait au moins 40 ans que les dessins animés jeunesse nous poussent à mépriser Jésus et la religion catholique, au profit de la religion énergétique.

 

Ce podcast se découpe en 3 parties :

1 – Les dessins animés clairement anti-catholiques

2 – Les dessins animés de la Nouvelle Religion mondiale, fondés sur l’Énergie et l’Or

3 – Les rares dessins animés « cathos-friendly » voire carrément cathos.

 

Vous pouvez retrouver d’autres podcasts de décryptages de Philippe, sur Youtube, comme par exemple celui sur les goûts musicaux homosexuels, celui sur la série Manifest, celui sur la série Sex Education ou encore celui du discours alchimique du Cardinal Sarah.
 

Les manifestations actuelles de possessions démoniaques : les 16 Greta Thunberg à la COP 24

Rassurez-vous : je ne vois pas le diable partout ni ne diabolise les personnes humaines (le diable reste un ange et n’a jamais réussi l’Incarnation humaine longue durée, contrairement à ce qu’a fait Dieu en tout Homme par Jésus). Mais quand les cas de possessions ou d’infestations démoniaques m’apparaissent, quand surgissent des changements de voix suspects, des attitudes arrogantes, des regards azimutés ou qui vrillent ou qui partent dans tous les sens (visibles par exemple chez Idriss Aberkane, certains conseillés papaux, etc.), des discours accusateurs (le diable est, dans la Bible, désigné comme « l’Accusateur »), et d’autant plus quand ces plaidoyers prennent le visage de l’innocence, de la jeunesse, de la justice implacable, de la vérité réaliste (car oui, la perspective d’une fin du monde est réelle), de la menace, de la victimisation orgueilleuse, ma curiosité est piquée et mon attention décuplée (Et de surcroît, je suis français…). Car au-delà du message – juste ou non – délivré, je regarde la manière dont il est édicté. Et à l’occurrence ici, dans le « vibrant » panégyrique de la jeune Greta Thunberg (15 ans) à la COP 24 en Pologne, qui par bien des aspects est assez agaçant de suffisance et de condescendance, je vois des comportements et des indices assimilables à la possession démoniaque (l’Asperger a bon dos). Je ne transformerai pas pour autant cette chère Greta en Chucky la poupée de sang, non non (bien qu’elle ait un petit quelque chose de la Mercredi de la Famille Addams, avec des tresses, à bien y réfléchir…). Mais je peux juste dire ce que je pressens : il y a du démon derrière son discours écologiste et sa démarche justicière punitive. En particulier quand elle prononce le mot « children » (« enfants » en anglais). Regardez la courte vidéo. Je parlerai dans mon prochain livre sur Joséphine ange gardien du succès mondial actuel du personnage de l’Effrontée, d’autant plus à l’ère des concours d’éloquence. Son petit numéro (de charme) est « escalofriante » comme on dit en espagnol (c’est-à-dire fout la chair de poule). Et je suis d’avis qu’il faut nominer cette gamine pour les prochains Oscars… ou au concours des petits despotes en culottes courtes !
 

Voici la palette des 16 Greta (…Garbo) que j’ai sélectionnée pour vous (sachant que la menaçante est ma préférée) :
 

Greta ailleurs


 

Greta cynique


 

Greta contrariée


 

Greta effarouchée


 

Greta émue


 

Greta en colère


 

Greta folle


 

Greta euphorique/hystéro


 

Greta blanche colombe


 

Greta intrigante


 

Greta irritée


 

Greta magnanime


 

Greta menaçante


 

Greta en état de sidération


 

Greta touchante, très zémouvante et déter


 

Greta vengeresse


 

Le film d’animation « The Book of Life (La Légende de Manolo) » (2014) de Jorge R. Gutiérrez et de Guillermo del Toro : antéchristique, sataniste et franc-maçon… mais que presque tout le monde prend pour une innocente et jolie histoire


 

Hier soir, j’ai vu le film d’animation « The Book of Life (La Légende de Manolo) » (2014) de Jorge R. Gutiérrez et de Guillermo del Toro, au cinéma « gratuit » en plein air du Kremlin-Bicêtre (Parc Pinel). Un film bobo et satanique au sens propre (et non social) des termes. Et le tout, en présence de plein de familles, à majorité maghrébine, et d’enfants.
 

Je le dis comme je le pense : je suis sidéré par la propagande antéchristique actuele, et surtout par l’accueil enthousiaste et massif que lui réserve la population mondiale qui ne se doute de rien et ne voit rien de mal dans ce que le Gouvernement Mondial lui sert. Aucune résistance ne lui est opposée. À l’issue de la projection, tout le monde autour de moi applaudissait. J’étais même en compagnie d’adultes qui se croient lettrés… et qui ont adoré le film. Face à tant d’énormités entendues, j’ai préféré me taire plutôt que d’exposer mes constats. J’ai retrouvé dans « La Légende de Manolo » toutes les expressions que j’aborde dans les chapitres « Bobo » et « Apo » de mon nouveau livre : c’en était troublant. En particulier l’injonction au renoncement au renoncement. L’idéologie bobo repose sur la désobéissance, la suprématie de la volonté individuelle. Et dans le film « The Book of Life », la devise qui tourne en boucle, comme un leitmotiv, c’est comme par hasard « PAS D’ABANDON, PAS DE REDDITION ! » La révolte de l’ange luciférien. Ce qui, selon le film, est aussi à vaincre à tout prix, c’est « la peur d’être soi-même ». Pire encore que la peur des taureaux dans l’arène ! Le fondamentalisme de la confiance en soi (plus qu’en l’autre) est de vigueur. Et celui qui s’y oppose est fustigé comme le diable en personne. Il ne faut pas manquer de confiance en soi ! C’est une HÉRÉSIE pour la Nouvelle Religion mondiale !
 

Aujourd’hui, face à la grande majorité des films, tous publics et tous thèmes confondus, j’ai l’impression d’assister au même lavage de cerveau que celui subi par les Allemands sous l’Allemagne Nazie, ou par les pays sous régime communiste… sauf que cette fois, la propagande s’annonce mondiale, pluriconfessionnelle, et comme un humanisme « saint » sans Jésus, un manichéisme équilibré, un dithéisme où le bien et le mal sont équivalents, sont mêlés pour s’annuler, collaborer ensemble et devenir le Dieu « Équilibre » (… en réalité, le dieu « Énergie » et « Individualisme de masse » qu’est Lucifer : « Le Chandeleur maintient l’équilibre entre toutes choses. » dit par exemple la mère du héros Manolo).
 
 

a) Boboland écolo (humanisme intégral et naturalisme intégral) :

 

Le film « La Légende de Manolo » aligne tous les poncifs bobos que je développe dans Les Bobos en Vérité, en particulier la bougie. C’est clairement le Festival des bougies (cf. code n°36). L’un des messages-phare du film est que la musique sauve le monde… sachant que la musique est à entendre comme le « cœur » ou « la musique du cœur ». En plus, il défend la liberté comme un absolu, sans jamais la relier à Jésus, évidemment : « La liberté est à nous ! » (Maria) Ce film est un pu produit des libertaires qui défendent une liberté sans réalité, sans limites, sans sexuation. D’ailleurs, ce sont les femmes qui y dirigent les opérations, qui mènent les révolutions, qui gagnent toujours à la fin. Selon Maria, les « femmes ne sont pas là pour rendre les hommes heureux » ni pour servir ces derniers : elle s’indigne contre Joaquín qu’elle présente comme un gros macho parce qu’il associe la femme au service. Tous les hommes du film sont des violents, des lâches, des menteurs ou des abrutis… et quand ils restent gentils, ils sont émasculés : Manolo est musicien-guitariste. Ce n’est plus le chevalier conquérant, armé. Il n’est armé que de ses bonnes intentions, son antimilitarisme, sa guitare, ses mélodies.
 

C’est surtout à travers l’écologie, ou plutôt la prévalence des animaux sur les Hommes, que le libéralisme de ces films satanistes s’avance. Par exemple, Maria, la princesse bobo par excellence, veut « libérer les animaux » et ouvre les enclos renfermant les porcs (pour que les esprits sataniques prennent corps en eux, sans doute). Le film défend les clichés vegan de la cause animale. Le chasseur ou le torero est présenté comme l’incarnation de l’horreur du pesant patriarcat passé, l’incarnation de la supposée méchanceté des Hommes. « Tuer le taureau c’est mal. » affirme Manolo. Selon les héros et les réalisateurs, « mettre à mort », c’est le summum du mal (les avortements humains de masse, en revanche, les libertariens ne dénoncent jamais : ils trouvent plus scandaleux de manger de la viande de bœuf et de jouer à la corrida que le « mariage homo » et l’avortement des bébés… L’animal compte plus que l’Homme). Le sacrifice (sans que mort concrète s’en suive : c’est juste la simulation de sacrifice qui intéresse… car les personnages ne meurent jamais) est condamné. Sûr que la Croix du Christ par exemple est vue comme une ignominie, un aveu de culpabilité, puisque « mettre à mort » ne doit pas sortir du terrain de la représentation ou du serment sans conséquences fatales concrètes. Plus de tragédie non plus. Plus de Croix. Plus de don concret de sa vie. Le sacrifice devient, aux yeux des libertaires, un délit et un basphème.
 

 

Continuons avec le boboïsme et l’idéologie de la Nouvelle Religion mondiale. Dans « The Book of Life », plein de valeurs humanistes sont véhiculées, et toujours en lien avec les sentiments individuels, la volonté intime et individualiste, la conception personnelle de l’« Amour »… même si ensuite, ça se donnera un verni d’altruisme universel et humanitaires : « N’arrête jamais de te battre pour les bonnes causes. » (dit Manolo à Joaquín) ; « Il est temps d’écrire notre propre destin. » (Manolo) ; « Pour devenir un véritable héros, il faut arrêter de ne penser qu’à soi. » (un des enfants). Ne sont énoncés que des fadaises, des promesses sans consistance (« Quel que soit l’endroit où tu iras, je serai là. », « La seule vérité, c’est que le véritable Amour ne meurt jamais. »), ou bien les valeurs de Jésus mais sans Jésus (cf. la chanson de Manolo sur le « pardon », qui ainsi arrive à amadouer et à vaincre le méchant taureau dans l’arène). Le pardon n’est pas raccordé à Jésus : il est célébré pour lui-même, comme une capacité humaine, un humanisme, une solidarité, une pensée commune et communionnelle.
 

 

En réalité, ce film n’a aucune incarnation, aucune assise christique, aucune identité propre, aucune âme ni consistance. Par exemple, la Chandeleur reprend les mimiques insupportables du show-man cool et pote qu’était le Génie dans le dessin animé « Aladdin » de Disney… mais avec la personnalité en moins. Comme dans tous les dessins animés en 3D actuel, il y a énormément de personnages secondaires, beaucoup trop, et aucun ne se détache par sa profondeur. Ce sont des héros pêle-mêle, sans psychologie, qui se copient les uns les autres, qui n’ont que deux répliques en tout et pour tout à dire. Ils ne représentent qu’une intention, bonne ou mauvaise, mais une seule à la fois (comme dans « Vice-Versa » par exemple), pour ne pas embrouiller le cerveau des spectateurs (car nous sommes bêtes, n’oublions pas). Et finalement, ils ne laissent aucune trace dans le patrimoine culturel et culturel mondial.
 

 

Malgré ses prétentions, ce film n’a pas davantage d’assise géographique, terrestre, locale. Ses réalisateurs flattent un patriotisme romantique : « Le Mexique est le centre de l’Univers. » (reprenant le mythe aztèque del Ombligo de la Tierra). Petit chauvinisme marketing. En réalité, c’est de la panmythologie de bas étage et du superprimivitisme à la sauce technologico-passéiste hollywoodienne, car il n’y a rien de mexicain dans cette production (c’est comme la sauce mexicaine dans les McDo… elle n’a de mexicaine que le nom). Les réalisateurs affichent un nationalisme folklorique apparent, mais en réalité ils défendent un internationalisme sans appui sur le réel (les vrais Mexicains doivent halluciner en voyant une merde mondialiste pareille), une idéologie et un spiritualisme mondiaux centrés sur l’individualisme. D’ailleurs, on voit dans leur film les idées mondialistes, les emprunts à « Aladdin » et à tous les clichés hollywoodiens les plus courus. Des chansons standards du répertoire nord-américain international sont reprises, et remasterisées en version pseudo mexicanisée (Radiohead, Ennio Morricone, UB40, Rod Stewart, Cielito Lindo…). Mais il n’y a absolument rien de culturel dans le sens noble du terme. « La Légende de Manolo » est un bric-à-brac d’éléments folkloriques sans cohérence anachronique ni culturelle. Il laisse même échapper quelques traces de panmongolisme de la Nouvelle Religion mondiale : « Je vous ai pas dit que j’ai appris le kung-fu ? » (Maria)
 

 

Le producteur Guillermo del Toro, malgré son nom hispanique, est un agent de la Franc-Maçonnerie : il voue un culte à l’hétérosexualité et à l’Autre (qui est l’autre nom du diable) : « Je suis mexicain et je sais ce que c’est qu’être l’autre. » a-t-il déclaré tout récemment. D’ailleurs, en ce moment, il sort son nouveau film d’animation « The Shape of Water » à la plus grande gloire des « différences » (sauf la différence des sexes et la différence Créateur-créatures, comme par hasard) et de la Bête (Guillermo del Toro est présenté par la caste hollywoodienne comme le « Maître et créateur des Monstres latinos » : gros foutage de gueule des satanistes), comme le font tous les francs-maçons qui s’ignorent. Et on n’a le droit de ne rien dire, évidemment : le néophyte ne peut pas comprendre la « culture mexicaine »… Là encore, foutage de gueule du relativisme culturel ! Sauf que la culture mexicaine réelle, ce n’est pas ça. Même si les réalisateurs sont mexicains et s’annoncent sincèrement comme les défenseurs de leur propre pays. En réalité, ils sont assoiffés de fric et de pouvoir, et défendent des messages francs-maçons à la plus grande gloire du mythe luciférien de l’individu asexué auto-créé.
 

Guillermo del Toro et Jorge Gutiérrez


 
 

b) Célébration du diable (spiritualisme intégral) :

En effet, dans « La Légende de Manolo », on retrouve plein d’éléments de la Franc-Maçonnerie (les murs et les pierres vivants, les cercles, les triangles, les X, la vénération de la lune et du soleil, la lumière, l’architecture, etc.) mais surtout des éléments du satanisme et du spiritisme luciférien. Ce film vénère Lucifer, l’ange de lumière : d’ailleurs, il est dit textuellement que la ville fictionnelle de « San Angel » est « le centre de la terre ». Il célèbre le Jour des morts comme les 31 octobre au Mexique pour la Fête des morts, sorte d’Halloween hispanisé, et expulsant toute la dimension résurrectionnelle et christique de la Toussaint.
 

 

 

Gutierrez reprend tous les codes et symboles du christianisme, mais pour les vider de Jésus. Par exemple, il est bien fait mention du « Livre de Vie » mais malheureusement il ne s’agit pas de la Bible, et encore moins du Livre de Vie du Jugement personnel de Jésus que nous allons voir au moment de notre mort. Il se limite au contraire à un livre franc-maçon regroupant des mythologies, des légendes (n’oublions pas que la Franc-Maçonnerie se fonde sur le symbolisme et la mythologie). « Le monde est constitué d’histoires. » déclare la guide qui n’est autre que la Muerte. Le film est ni plus ni moins le récit de la damnation d’Adam et Ève qui goûtent au fruit de la connaissance de l’arbre du bien et du mal. Le serpent de la Genèse permet à Manolo et Maria d’accéder à l’éternité.
 

 

 

Dans « La Légende de Manolo », il y a carrément des autels (Arbre de la Connaissance, installations ailées…) érigés en l’honneur du dieu « Amour ». Jésus n’est plus considéré comme la Vie éternelle : il est remplacé par « la médaille de la Vie éternelle » qui rend invincible. Le sacrifice de la Croix est totalement évincé. Il n’y a aucune Foi en Jésus dans ce film. Le seul dieu envisagé est la conscience personnelle. Selon les réalisateurs, c’est le souvenir qui crée l’éternité… et non Jésus. L’enfer est figuré par « le pays des oubliés », et les âmes des morts ne parviendraient à survivre à la mort physique que grâce à la mémoire humaine des vivants. « Tant que nous nous souvenons de nos morts, ils restent avec nous. » (Maria) Cette pensée que c’est la foi ou la conviction de cœur personnelle qui créerait Dieu est anticatholique, protestante ou/et musulmane. C’est une hérésie, car c’est Dieu Jésus qui donne la Foi. Et en théorie, ce dernier n’a pas besoin de notre croyance en Lui pour exister.
 

La Muerte


 

Ce dessin animé est une ode à la mort (et non à la Vie qui est Jésus). La Muerte est le personnage-star. Le dieu féminisé qui finit par triompher. Le fameux « féminin sacré panthéiste » dénoncé par Mgr Léonard. Paradoxalement, la mort réelle n’existe pas. C’est l’image folklorique de la mort qui la remplace. Concrètement, même les personnages tués ne décèdent pas. Et les morts sont comme les vivants : aussi acteurs qu’eux. Il n’y a pas de césure entre le monde des vivants et le monde des vivants. La vie et la mort fusionnent. L’amour et la mort aussi. Par conséquent, il n’y aucun Salut ni aucune Justice. Dans « La Légende de Manolo », on assiste à une véritable vénération des esprits et du royaume des morts : le Jour des mort, tout serait permis, tout serait victorieux ! Comme au carnaval. Les morts, dans ce dessin animé, sont les gentils, ceux qui dispensent la « liberté ». L’« armée des morts » vient prêter main forte aux gentils. L’association vivants et morts (autrement dit les liens sataniques entre mondes visible et invisible), c’est ça qui est considéré comme l’« Amour », la « Victoire » et l’« Éternité ». L’inversion des valeurs atteint à ce point son climax que dans le film ce sont les prêtres qui sont cornus (exemple : père Domingo) ! Et les religieuses sont réduites à un chœur ridicule de tragédiennes apeurées.
 

 

Mais chut ! Il ne faut pas dénoncer le satanisme. C’est « culturel ». On n’est pas né au Mexique et on n’a pas de sang mexicain coulant dans nos veines… Et puis c’est destiné aux enfants. Alors dormez en paix, braves gens.
 

L’Antéchrist, le pacificateur humaniste « sympa », est sur le point d’arriver

Antéchrist 14
 

L’Antéchrist (ou « Antichrist »).

N’ayez pas peur de le nommer, de le connaître. Le Christ lui-même en a parlé. La Bible elle-même en parle. La Vierge Marie aussi. Et peu importe si la seule évocation de son nom vous fait passer pour un fou, un conspirationniste, un alarmiste, un complotiste, un paranoïaque. C’est le but de ce fils humain de satan de passer inaperçu et de vous attribuer, dans son silence, sa propre identité, dangerosité, folie. Et surtout, c’est le but de satan de vous faire perdre l’assurance en vous faisant passer pour lui-même, pour le diviseur. Au contraire : démasquer en vérité cet « homme de péché » proche de venir, qu’est l’Antéchrist, c’est faire œuvre d’unité et de libération… quand bien même cela risque en apparences de vous isoler. Vous n’avez rien à craindre de l’Antéchrist ni de ses futurs défenseurs qui ne le voient pas venir. N’oubliez pas que, grâce à Jésus et à Marie, tout être humain est plus fort que lui.
 

a) Mes sources :


 
 

En plus de la Bible, je me suis appuyé principalement sur 8 sources (6 livres et 2 conférences) :

1) Michael D. O’Brien, Père Elijah : une Apocalypse (1996)

2) Monseigneur André Léonard, Les Raisons d’espérer (2008)

3) Robert-Hugh Benson, Le Maître de la Terre : La Crise des derniers temps (1905)

4) Vladimir Soloviev, Trois Entretiens : sur la guerre, la morale et la religion suivis du Court Récit sur l’Antéchrist (1900)

5) Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie : Recherches sur une religion d’État (2015)

6) Conférence de Maurice Caillet en 2002 sur la Franc-Maconnerie.

7) Philippe de Villiers au micro de Jean-Marie Le Méné, le 9 octobre 2015 sur Radio Courtoisie, à propos de son nouveau livre Le Moment est venu de dire ce que j’ai vu.

8) Père Malachi Martin, La Maison battue par les vents (1996)

Vous pourrez enfin compléter toutes ces lectures par mon livre Homo-Bobo-Apo, sur papier ou en audio.
 

À propos de l’Antéchrist (et le thèmes liés : les prophéties, les apparitions mariales, le NOM – Nouvel Ordre Mondial –, le Gouvernement Mondial, le satanisme, la Fin des temps, etc.), il y a énormément de choses sur Internet maintenant, mais qui sont, pour beaucoup, anxiogènes, sédévacantistes (anti-Pape), ou bien là pour impressionner, faire peur, nous faire rentrer dans une résistance dure et sans Espérance, sans confiance, sans humilité. Et qui finalement jouent le jeu de l’Antéchrist (comme si c’était lui qui avait gagné… alors que non). J’ai donc préféré m’axer sur des livres solides, d’autorité, et même parfois plébiscités (comme c’est le cas du Maître de la Terre) par nos deux papes Benoît XVI et François.
 

b) L’Antéchrist dans la Bible :

angers
 

L’Antéchrist, qui signifie « ennemi du Christ » ou « apostat », est le nom donné, à la suite de saint Jean (1 Jean 2, 18), à un personnage mystérieux qui détient le pouvoir de satan et doit apparaître à la fin des temps pour mener contre l’Église du Christ une lutte suprême. Il est une figure commune à l’eschatologie chrétienne et islamique, mais puise ses origines dans la notion d’anti-messie déjà présente dans le judaïsme. Saint Paul l’appelle « l’homme du péché » et « le fils de la perdition » (2 Thes 2, 3). D’autres termes sont employés dans la Bible : « La bête qui monte de la mer » (Ap 13, 1), « la bête écarlate » (Ap 17, 3), la « bête » (Ap 17 : 8, 16 ; 19 : 19-20 ; 20 : 10), « la petite corne » (la licorne). Il sera élu par un grand nombre de personnes comme le Maître de l’Univers. S’accomplira ainsi la Parole du Christ : « Je suis venu au nom de mon Père et vous ne m’agréez pas ; un autre viendra en son propre nom et vous l’agréerez. » (Soloviev) Au commencement du Jour du Seigneur (l’Apocalypse, la Parousie), la véritable identité de cet homme du péché sera révélée.
 

« Quand les méchants auront mis le comble à leur révolte contre Dieu, s’élèvera un roi dur et expert en intrigues. A cause de sa prospérité et du succès de ses ruses, il aura de l’arrogance dans le cœur, il fera périr beaucoup d’hommes qui vivaient paisiblement, et il s’élèvera contre le chef des chefs ; mais il sera brisé, sans l’effort d’aucune main. » (Daniel 8, 23-25)
 

« Pour ce qui concerne l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ et notre réunion avec lui, nous vous prions, frères, de ne pas vous laisser facilement ébranler dans votre bon sens, et de ne pas vous laisser troubler, soit par quelque inspiration, soit par quelque parole, ou par quelque lettre qu’on dirait venir de nous, comme si le jour du Seigneur était déjà là. Que personne ne vous séduise d’aucune manière ; car il faut que l’apostasie soit arrivée auparavant, et qu’on ait vu paraître l’homme de l’iniquité*, le fils de la perdition, l’adversaire qui s’élève au-dessus de tout ce qu’on appelle Dieu ou de ce qu’on adore, jusqu’à s’asseoir dans le temple de Dieu, se proclamant lui-même Dieu. Ne vous souvenez-vous pas que je vous disais ces choses, lorsque j’étais encore chez vous ? Et maintenant vous savez ce qui le retient, afin qu’il ne paraisse qu’en son temps. Car le mystère de l’iniquité agit déjà ; il faut seulement que celui qui le retient encore ait disparu. Et alors paraîtra l’impie, que le Seigneur Jésus détruira par le souffle de sa bouche, et qu’il anéantira par l’éclat de son avènement. L’apparition de cet impie se fera, par la puissance de Satan, avec toutes sortes de miracles, de signes et de prodiges mensongers, et avec toutes les séductions de l’iniquité pour ceux qui périssent parce qu’ils n’ont pas reçu l’amour de la vérité pour être sauvés. Aussi Dieu leur envoie une puissance d’égarement, pour qu’ils croient au mensonge, afin que tous ceux qui n’ont pas cru à la vérité, mais qui ont pris plaisir à l’injustice, soient condamnés. » (IIe Épître de saint Paul aux Thessaloniciens)
 

* Le mot « iniquité » ou « anomie » qui décrit la nature de l’Antéchrist, signifie sans foi ni loi, qui rejette tout attachement à Dieu et toute norme. C’est une forme de libertinage extrême ou d’anarchie.
 

c) Signes que le règne de l’Antéchrist c’est pour maintenant :

enfer
 
 

J’entends déjà d’ici certains me rétorquer : « Oui, mais quel orgueil que ta démarche ! Nul ne peut prédire l’avenir de Dieu et assurer que c’est maintenant ! De tout temps depuis l’Ascension, le règne de l’Antéchrist a été annoncé et cru vrai ! » Alors d’une part je n’assure rien (seul Dieu le Père sait la date précise de la venue de son Fils), et d’autre part, ce n’est pas parce que nous ne pouvons pas savoir précisément la date et l’heure de l’accouchement que nous ne pouvons pas déjà sentir les contractions (= signes des temps, ou motions de l’Esprit Saint, ou appels pressants de la Vierge Marie et de ses anges). Surtout quand elles sont aussi explicites que maintenant!

 

Je relèverais quatre fortes contractions mondiales qui nous mettent sur la voie de l’arrivée de l’Antéchrist d’une part, et de l’arrivée triomphale du Christ ensuite.
 

1) Le Grand moment d’égarement, comme l’annonce saint Paul : « Dieu leur envoie une puissance d’égarement, pour qu’ils croient au mensonge. »
 

En effet, nous pouvons constater, et ce, de manière assez générale, que depuis dix ans, l’absence de sens critique et de réflexion gagne nos contemporains et même nos élites intellectuelles. Les penseurs qui sont censés nous défendre, voire nous laisser la parole, démissionnent, ou bien occupent les fauteuils des plateaux-télé et du Sénat pour exposer leurs impressions, leurs sentiments comme des droits et des lois « justes ». « Leur pensée se ramène à un enchaînement d’impressions. Je suis bien obligée de dire qu’il y a de nombreux signes d’impressionnisme. » (Anna Benedetti, dans Le Père Elijah, p. 334) ; « Avez-vous remarqué combien peu de grands hommes nous possédons, à présent ? Ce n’est point comme il y a 50 ans, ou même 30 ! Et, à présent, voici cet homme nouveau [l’Antéchrist], que personne ne connaît, qui a surgi en Amérique, il y a quelques mois à peine, et dont le nom est sur toutes les lèvres ! » (le vieux Blackmore parlant de Felsenburgh, dans Le Maître de la Terre de Benson, p. 69) ; « La fin de la civilisation et l’approche concomitante de l’Antéchrist s’accompagnent d’une baisse sensible de la clarté des esprits comme de l’atmosphère. » (Vladimir Soloviev s’exprimant en 1900 dans sa préface aux Trois Entretiens, p. 1) ; « Ce qui est encore plus vrai, c’est que le Diable fait tomber sa brume sur la création avec sa queue. C’est aussi un signe de l’Antéchrist. » (le Général dans les Trois Entretiens de Soloviev, p. 151) ; etc. Il est clair que les esprits sont massivement désorientés en ce moment, au point que ce sont ceux qui voient clair qu’on fait passer pour des « fous » ou des « fondamentalistes ». J’en sais quelque chose…
 

L’« esprit d’égarement » est appelé aussi « l’endurcissement » ou « l’enivrement » (au moment de la venue de la Coupe christique). Il est le fruit de la réaction du pécheur à une venue plus pressante de Dieu. L’intelligence humaine s’emballe, se corrompt et va jusqu’à tuer le juste. Cet esprit d’égarement est un prélude au Jour du Seigneur. Par exemple, le déploiement historique de cet esprit d’égarement est manifesté dans l’Ancien Testament par l’endurcissement de Pharaon, d’Hérode, de Selecias. Le déploiement temporel de cet esprit d’égarement est manifesté dans le Nouveau Testament par l’endurcissement des Juifs et des païens au moment de l’arrivée du Christ. Le déploiement eschatologique de l’esprit d’égarement, c’est l’engourdissement des cœurs et intelligences que nous vivons aujourd’hui.
 

Nous pourrions nous en indigner. Mais en réalité, même si ça ne nous excuse pas d’avoir à dénoncer l’anesthésie générale actuelle, nous devons la comprendre comme un signe des temps puissant auquel consentir dans la paix. L’esprit d’égarement est un appel du pied fait par le Christ pour nous avertir qu’il y a une raison surnaturelle à toutes les tribulations « illogiques » et « hallucinantes » que nous vivons en ce moment. Non, nous ne rêvons pas. L’apostasie et l’endormissement s’étendent à toutes les couches relationnelles de notre existence. Mais ça ne veut pas dire que nous serions dans l’erreur ou que nous deviendrions fous : c’est juste la Fin qui arrive 😉 ! Keep cool.

 

2) La Troisième Guerre mondiale concentrée en Orient.
 

Le Pape François a déjà évoqué plusieurs fois le démarrage de la Troisième Guerre mondiale (une guerre qui ne se déroule pas de la même manière que les deux précédentes). Et nous pouvons comprendre qu’elle constitue le marche-pied logique de l’arrivée de l’Antéchrist, ce pseudo « Pacificateur ». C’est par l’épuisement des troupes mondiales de la Néo-Guerre-Froide (blocs de l’Occident contre le bloc de l’Orient), et sur la base d’une honte et d’un écœurement générés par la reproduction d’une nouvelle Guerre Mondiale concentrée en Orient (alors que les Hommes s’étaient jurés que la Seconde Guerre mondiale serait la dernière !), que l’Antéchrist va précisément asseoir la légitimité de son nouveau règne de Paix, où les frontières, les inégalités, les nations et les querelles seraient abolies. Par exemple, Soloviev annonce (en 1900, rien que ça !) le succès de l’arrivée du panmongolisme (sorte de philosophie bouddhiste venue d’Orient, sorte de synthèse humaniste et pacifiste de toutes les religions) dont l’Antéchrist sera le représentant, après les désastres de l’islamisme : « Il me semble que le succès du panmongolisme sera d’avance facilité par la lutte acharnée et épuisante que certains États européens seront amenés à soutenir contre l’islam réveillé en Asie occidentale, en Afrique du Nord et en Afrique centrale. » (Préface de Vladimir Soloviev aux Trois Entretiens, p. 17) ; « Profitant de ce qu’au début du XXe siècle l’Europe était occupée à mener un dernier combat contre le monde musulman, les Japonais se mirent à la réalisation de leur grand projet de fonder sur l’univers entier le véritable empire du Milieu. […] Cette époque se signale par le mélange général et la profonde interpénétration des idées européennes et orientales. […] Il résulte naturellement de cette évidence que le vieux régime traditionnel des nations perd de son importance. L’Europe du XXIe siècle se présente comme une union d’États plus ou moins démocratique : les États-Unis d’Europe. » (Monsieur Z. dans Trois Entretiens de Soloviev, pp. 153-158). Je développerai plus bas la mise en place du Gouvernement Mondial et du Nouveau Culte Mondial pacifique et a-national qu’est en train d’instaurer l’Antéchrist. La Troisième Guerre mondiale n’est qu’une entreprise sinistre de purification/assainissement/épuisement/soumission des Peuples au New Age humaniste de l’Antéchrist.

 

3) L’attaque mondialisée contre la différence des sexes (famille, mariage), par la croyance généralisée en l’hétérosexualité.
 

Dans sa lettre au Cardinal Caffarra (publié en mars 2015), sœur Lucie, voyante de Fatima, écrivait : « La bataille finale entre le Seigneur et le règne de Satan portera sur le mariage et la famille. » L’attaque contre la famille et le mariage est le voyant rouge final (cf. je vous renvoie à la traduction du texte de Michael O’Brien « La Famille et le totalitarisme » dans le blog Pierre et les loups). L’hétérosexualité, son alibi n°1. Et nous sommes en plein dedans mondialement ! Je vous parlerai de la politique malthusianiste et franc-maçonne du Gouvernement Mondial un peu après.

 

4) Le Figuier (= l’Église) qui ne donne plus les fruits escomptés.
 

« Est-ce que la maisonnée de la foi porte les fruits qu’elle est appelée à porter ? » (Matthieu 24 cité dans le Père Elijah, p. 58) Comme le montre la parabole du figuier ne donnant plus de fruits, Jésus nous indique dans la Bible que le moment où l’Église ne donnera plus les fruits qu’Elle est censée produire sera le moment de Sa venue, et préalablement de la venue de l’Antichrist : chute des vocations sacerdotales, corruption généralisée et tiédeur du Clergé, persécutions anti-chrétiennes, affadissement des publications médiatiques « chrétiennes », etc. Et actuellement (même si la phase descendante a été amorcée depuis la fin du XVIIIe siècle), de plus en plus d’évêques, de cardinaux, de journalistes pseudo « cathos », applaudissent au discours spirituel et humaniste franc-maçon (cf. l’inauguration de la Cathédrale de Créteil, le discours de Cazeneuve aux derniers États Généraux du christianisme, l’omerta sur l’homosexualité, les applaudissements à Juppé, etc.), ou, à l’extrême inverse, au discours complotiste maçonnique de Civitas (cf. la focalisation civilisationniste des francs-maçons). Les cardinaux droits dans leurs bottes s’étonnent même d’être minoritaires dans leur propre maison : « Le cardinal Vettore donne des interviews qui parlaient d’un nouvel âge pour les Églises nationales, publiant des articles, se faisant des amis. ‘Je ne sais pas comment il s’y prend, dit Dottrina. Toutes les portes semblent s’ouvrir pour lui, mais pour nous elles sont toutes fermées. Les liens entre le Siège de Pierre et les Églises locales se rompent l’un après l’autre. L’Église universelle est en désordre. La presse est pleine d’informations concernant les divisions. Évêques contre évêques, cardinaux contre cardinaux. Les efforts pour rallier les fidèles derrière le Pape n’ont eu presque aucun succès. Ils ne lisent pas, ils ne pensent pas ! Les quelques journaux catholiques qui restent orthodoxes sont isolés et dénigrés comme des réactionnaires rigides. Tout le monde pense que les choses sont normales. » (Le cardinal Dottrina parlant du cardinal franc-maçon Vettore, dans le roman Père Elijah, p. 581) Je vous parlerai plus longuement du schisme de l’Église – provoqué, utilisé et alimenté par l’Antéchrist – dans le chapitre sur le Schisme.
 

Le Saint Père se rend compte que le ver est dans le fruit. C’est la raison pour laquelle, de novembre 2015 à décembre 2016 il propose ce temps final de la Miséricorde (« Année de la Miséricorde ») à son Église. Car il sait qu’ensuite viendra le temps implacable de la Justice.

 
 

Certains mauvais esprits, ou esprits apeurés de savoir qu’ils font biologiquement partie de la Grande Génération martyre, vont m’opposer plein d’arguments justes me disant que tout ce que je rapporte a déjà été annoncé dans les sacrements, les Évangiles, la vie du Christ. Et ils n’auront pas tort : dans le temps de l’éternité, tout ce qui va se produire s’est déjà produit et se produit déjà maintenant. Christ hier, aujourd’hui, demain et toujours ! Mais le Jugement Dernier, le bouquet final, la défaite définitive de satan, ont bien un instant T qui se rapproche à mesure que vous me lisez, et surtout qui doit arriver un jour (même si cet instant se déplace sans cesse grâce à nos prières, nos actes de charité et surtout la sainte patience de notre Père des Cieux !). Il est vrai que de tout temps, même à l’époque de Jésus, les gens ont vu des antéchrists et ont cru que c’était déjà la Fin. Par exemple, les Juifs voyaient l’Antéchrist dans le roi Antiochus Épiphane. Plus tard, le Livre de Renan annonçait Néron comme l’Antéchrist. Certains ont identifié en Hitler ou en Staline l’Antéchrist. Et c’est finalement un mirage de toutes les époques historiques humaines : « Aujourd’hui l’Église sombrait encore dans le désordre, mais nulle part aussi terriblement qu’au treizième siècle, à l’époque des Borgia ou à celle de la papauté en Avignon. Les jours sombres de l’occupation nazie de Rome avaient aussi été terriblement mauvais. Et pendant l’époque soviétique, il avait semblé que l’Europe vacillait sur la crête d’une invasion qui ressemblait de plus près au règne de l’Antéchrist qu’aucune autre des tyrannies auxquelles l’Église avait été confrontée pendant ses deux mille ans d’histoire. » (Père Elijah, p. 179) ; « Il y a eu beaucoup d’apocalypses depuis l’époque du Christ – les règnes de Néron, Hitler et Staline par exemple. » (Père Elijah, p. 228) ; « Vous avez entendu dire, mes petits enfants, que viendrait l’Antéchrist et maintenant il y a un grand nombre d’antéchrists. » (le Général citant saint Jean dans l’Écriture, dans Trois Entretiens de Soloviev, p. 109) ; etc. Et le jour de notre mort, nous vivrons tous déjà le Jugement dernier.
 

Néanmoins, il est important d’allumer aujourd’hui plus qu’avant les warning. Monsieur Z., dans les Trois Entretiens de Soloviev, parle de cette « accélération actuelle de l’Histoire » (p. 28). Dans Le Maître de la Terre, Benson lui aussi décrit le calme apparent qui précèdera le Troisième et Ultime Déluge : « Vous êtes-vous jamais trouvé en mer, demanda le Père Blackmore au Père Percy, pendant le calme qui précède un typhon ? Eh ! bien c’est ce calme qui est la chose la plus effrayante ! La mer est comme de l’huile ; vous avez la sensation d’être à demi-mort ; vous ne pouvez rien faire. Et puis arrive la tempête ! Avant toutes les grandes catastrophes, ce calme se produit. Toujours il en a été ainsi dans l’histoire… » (p. 67) Dans le roman Le Père Elijah d’O’Brien, quand le père Elijah demande au cardinal Stato si « la Chute de Rome et les invasions barbares » sont imminentes, alors qu’à d’autres époques elles étaient déjà annoncées, ce dernier lui répond : « À cette époque le monde avait ses maîtres du mal, Néron, Tibère et Domitien. Mais même au milieu de l’effondrement de la civilisation, le monde rampait hors des ténèbres. Nous nous y enfonçons et c’est la différence. » (Père Elijah, p. 432) Un peu plus tôt dans le même roman, Elijah entendait de la bouche du cardinal Dottrina : « Nous sommes probablement en train de faire face à la confrontation finale entre l’Évangile et l’anti-Évangile, entre l’Église et l’anti-Église. Dans le sens de l’ultime Apocalypse. » (p. 55) Le Pape précise aux deux clercs : « Aucun homme ne connaît l’heure ou le jour de la venue du Fils de l’homme. Cependant, chaque génération est appelée à la vigilance. » Puis, quand Elijah souhaite savoir auprès du Saint Père si le Retour du Christ est pour bientôt, ce dernier lâche calmement : « Oui. Je crois que nous sommes au point culminant de l’histoire telle que nous le connaissons. Je crois que le retour du Seigneur est imminent, peut-être d’ici trois ou quatre ans, peut-être une décennie. » (p. 56) Plus tard, Elijah entend le même avertissement dans son entretien avec Davy : « Nous sommes actuellement au cœur d’une immense apostasie. Jamais dans toute l’histoire de l’Église il n’y a eu une perte de foi aussi répandue. Dans quelques années, restera-t-il encore de la foi sur la terre ? » (Père Elijah, p. 111) ; « Et si une génération d’illettrés religieux devenait incapable de faire la distinction entre vérité religieuse et sentiment religieux ? » (Davy s’adressant à Elijah, idem). Quand le père Elijah demande à Davy : « Tu penses qu’on est cette génération ? », celui-ci lui répond laconiquement : « Je le crois. ». À la fin du roman, Elijah s’assure à nouveau, cette fois avec le Père Smith, qu’il n’est pas en train de rêver par rapport à la proximité des « Grands Événements ». Le prêtre américain lui parle sans ambages : « L’Écriture nous avertit que le second déluge sera pire que celui de Noé. Simplement il ne sera pas d’eau mais de feu. […] Nous savons par l’Écriture que le temps de la fin sera désastreux. » (pp. 436-437). Elijah parachève le constat dans l’Espérance du martyr : « Père, c’est tout proche. La fourberie et la mystification seront puissantes. Nous devrions être très petits. Nous devons nous attacher à la Croix. » (p. 440)

 

Oui. Il y a un Grand Final annoncé par saint Jean dans les livres de l’Apocalypse. Et ce Grand Final est imminent pour les 4 contractions (insuffisantes) que je vous ai données plus haut. Le grain de blé (l’Église) doit vivre la Passion du Seigneur, mourir avec Lui pour ressusciter avec Lui et par Lui : « N’a-t-il pas été décrété que l’Église devait un jour vivre une deuxième Pâque ? » (Elijah s’adressant au cardinal Stato, dans Le Père Elijah, p. 432) ; « Tu vois, ce temps doit avoir une fin, dit la voix au Père Elijah. Le mal ne peut pas continuer à dévorer le bien indéfiniment. » (Père Elijah, p. 554) ; « Certains personnages sur la scène mondiale sont en train de se diriger vers le troupeau pour une attaque définitive. Ils approchent du moment où ils mettront tous leurs efforts pour la division et la destruction. Ils crient, paix, paix, mais il n’y a pas de paix. Leurs cœurs sont pleins de meurtre. Ils détestent le troupeau de Dieu, et pourtant de tous côtés on les proclame sauveurs. Cela aussi fait partie du plan de la Providence. Cela aussi, Il le permet, car la confrontation finale entre l’Église et l’anti-Église doit venir. » (le Pape s’adressant à Elijah, p. 59) ; etc. Le récit de l’Apocalypse n’est pas qu’une gentille fiction symbolique dont l’actualisation pourrait être éternellement reportée : « L’apocalypse n’est pas un mélodrame. Si c’était le cas, la plupart des gens se réveilleraient et verraient le danger dans lequel ils sont. C’est notre vrai péril. » (Père Elijah, p. 150) Rome va (doit ?) vraiment tomber. « Percy savait seulement que la ruine [du Vatican] était fatale. » (le Père Percy dans Le Maître de la Terre de Benson, p. 178) La fin des temps est inéluctable. Et loin d’être un fatalisme, le rappeler est une Espérance : « La dernière et extrême manifestation du mal » (Préface de Vladimir Soloviev, p. 14) est couronnée par la Justice plénière du Christ.

 

Dans son livre Les Raisons d’espérer (2008), Monseigneur André Léonard insiste bien sur l’existence d’un point final marqué par le Christ, de l’« ultime confrontation avec l’Antéchrist, qui, en même temps qu’elle réveillera les chrétiens assoupis, conduira à la pleine réunification des Églises et communautés ecclésiales désunies et à la pleine unité du Peuple de la Première Alliance avec celui de la Nouvelle, à la réconciliation achevée de l’Israël de Dieu et de l’Église » (p. 151) ; « Cet achèvement de l’œcuménisme et cette heureuse conclusion du dialogue interreligieux, précèderont la glorieuse nouvelle venue de Jésus, préludant elle-même à l’achèvement de l’histoire et au plein épanouissement de ces cieux nouveaux et de cette terre nouvelle, inaugurés ici-bas, dans la foi et l’espérance, par la résurrection du Christ. » (idem pp. 153-154)
 

Pourquoi le Pape se tait, ne tire pas la sonnette d’alarme, et nous laisse dans l’ignorance alors qu’il sait cette imminence là ? On serait en droit de se poser la question. Et nous trouvons la formulation d’une juste excuse dans Le Père Elijah, quand sa Sainteté déclare à Elijah : « Vous êtes silencieux. Presque certainement, vous ressentez ce que d’innombrables millions de gens ressentiraient si je devais parler de cela depuis la Chaire de Pierre. Ils ne l’entendraient pas avec le bénéfice de votre foi solide. Aujourd’hui, l’homme moderne ne pourrait pas supporter cette connaissance. Il souffre du plus grand mal de notre siècle, une sorte de désespoir subconscient. En conséquence, il ignorerait tout simplement la vérité ou la rejetterait hors d’atteinte. » (p. 56) Il est possible d’entrevoir, avec les yeux de la foi et de la communion fraternelle avec le Pape, la beauté de la liberté que laisse le non-dit papal : « Regarder dans cette obscurité et y voir la victoire du Christ, c’est l’essence même de l’espérance. » (le Pape, dans Père Elijah, p. 57) Par ailleurs, il ne faut pas être sorti de la cuisse de Jupiter pour voir que nos deux papes actuels, avec finesse et prudence, égrènent çà et là des indices pour nous « avertir sans nous faire peur ». À nous d’être attentifs, de comprendre les signes des temps, de nous préparer et de nous convertir.
 
 

d) La carte d’identité de l’Antéchrist :

Antéchrist 4
 

Qui est l’Antéchrist ? Personnellement, je n’ai pas la réponse. Et le jeu de devinettes sur ce sujet est un exercice périlleux qui mérite une grande prudence… car le premier à le mener, ce jeu, c’est précisément l’Antéchrist, qui souhaite se faire passer pour « chercheur de l’Antéchrist » afin de s’innocenter lui-même et surtout de faire carrément passer Jésus pour l’Antéchrist ! Donc méfiance avec cet usurpateur avançant masqué !
 

Potentiellement – et je commencerai par là -, nous pourrions tous, moi le premier, être l’Antéchrist. « Tous les chrétiens, en étant pécheurs, nous nous avérons des antéchrists. » (p. 112) déclare Monsieur Z. dans les Trois Entretiens de Soloviev. Selon 1 Jean 4, 3, ça a le mérite d’être clair : « Quiconque déclare que Jésus n’est pas venu dans la chair est un antéchrist. » Nous sommes tous, à différents degrés, des antéchrists. Parce que nous devenons tous des imposteurs dès que nous n’obéissons pas au Christ, des pécheurs ignorant parfois l’Incarnation christique en l’Homme. D’autant plus si nous nous disons « chrétiens » ou « catholiques ». Car il ne suffit pas d’être catholiques pour aimer l’Église et Jésus (la preuve avec les francs-maçons de Civitas, qui mettent l’adjectif « catholique » partout, pour se justifier de se couper de Rome et pour se justifier de voir dans tous les Papes qui sont venus après le Concile Vatican II des traîtres et des antéchrists). « Il faut mettre au rang des ‘antéchrists’ ceux qui – ici, en France, comme chez nous – se mettent particulièrement en peine du christianisme, s’en font une spécialité et s’attribuent le monopole ou le privilège du nom de chrétien. » (l’Homme politique, dans Trois entretiens de Soloviev, p. 112) Jésus lui-même, en s’adressant à Pierre qu’il désignera pourtant comme le pasteur humain de son Église, le verra à plusieurs reprises comme l’Antéchrist ! (« Arrière satan ! »). Cependant, même si tous les humains – de par notre condition humaine pécheresse – nous sommes des antéchrists en puissance, il n’empêche que l’Antéchrist, le vrai, a franchi un cran au-dessus par rapport au simple pécheur : lui, il est carrément ennemi du Christ. Il le haït.
 

Une fois énoncée cette mise en garde d’humilité, il est toujours intéressant, pour se faire une idée du profil de l’Antéchrist (autant s’informer sur qui il est pour ne pas se faire pas piéger par lui !), de se baser sur la Bible, sur ce que dit Marie dans ses apparitions, sur ce que disent les grands mystiques et saints, sur ce que dit l’Église, et aussi (avec prudence) sur l’imaginaire futuriste (et parfois visionnaire) de certains laïcs et prophètes. C’est d’ailleurs à travers les fictions romanesques sur l’Antéchrist (comme Le Père Elijah, Le Maître de la terre, Voyage en hiver, etc.) que j’ai le plus appris sur l’Antéchrist. Les portraits trop assurés et trop prétendument réalistes d’Internet sont douteux car ils veulent incarner à l’excès celui qui ne s’incarne pas (= satan). Par conséquent, ce n’est pas un hasard que même des évêques sérieux comme Mgr Léonard aient choisi le mode du conte/roman apocalyptique pour parler du sujet, car pour le coup, la fiction annonce sans imposer, sans prétendre nous vendre du « scoop » ou du « portrait-robot » précis. C’est fait tout en douceur et en respectant la liberté des lecteurs. C’est cela, le véritable esprit des paraboles christiques !
 

Maintenant, concernant l’origine de l’Antéchrist, si l’on écoute le message que la sainte Vierge aurait divulgué à la bergère Mélanie à la Salette (en 1851), on entend que l’Antéchrist est d’origine judéo-chrétienne : « Naîtra l’Antéchrist, d’une religion hébraïque [donc une mère chrétienne mais avec des racines juives ?] , d’une fausse vierge qui aura communication avec le vieux serpent, le maître de l’impureté ; son père sera évêque [donc chrétien d’un niveau social élevé ?]. Un enfer règnera sur la terre. Ce sera alors que l’Antéchrist naîtra d’une religieuse: mais malheur à elle ! » Plusieurs prophéties disent aussi que l’Antéchrist régentera le monde pendant trois ans et demi. Pas davantage. Ce sera un dirigeant mondial qui conclura une alliance avec Israël, avant la Fin des Temps. Il se prétendra donc soit juif, soit au moins sioniste. Il est peu probable que ce soit une femme, car il prétend se substituer au Christ… mais l’hypothèse contraire est intéressante, comme on peut le voir dans la série V (à la 45e minute).
 

Dans le roman Le Père Elijah (1996) de Jonathan O’Brien, l’Antéchrist est « un homme distingué dans la cinquantaine. » (p. 20). Il ne porte pas de nom. Il est appelé « le Président ». Et pour cause : il occupe la fonction de « nouveau président pour la Fédération des États Européens » (p. 20), sorte d’Amérique européenne. Il habite « sa propriété de l’île de Capri » (p. 64), une luxueuse demeure, mais vit toujours en déplacement (en hélicoptères notamment). C’est peu ou prou le jumeau de Jésus : « Cet Antéchrist ressemble à nos images traditionnelles du Christ. » (p. 110)… sauf qu’il a une ombre qui traverse son regard de temps à autres (nous verrons cela plus en détails dans le chapitre sur la « Personnalité » de l’Antéchrist, bien décrite par le personnage d’Anna Benedetti).
 

Dans le roman d’anticipation Le Maître de la Terre (1905) de Robert-Hugh Benson, où l’action se déroule dans les années 1970, l’Antéchrist a plus de 32 ou 33 ans. Il surgit de nulle part. C’est vraiment l’inconnu au bataillon. On ne lui connaît aucun passé politique ou médiatique : « On dit que, jusqu’à ces mois passés, il a vécu dans une solitude complète. » (p. 132) Il s’appelle Felsenburgh, et il est souvent baptisé « l’Empereur (d’Occident) ». C’est un homme fascinant, beau, intelligent, excellent orateur. Il se déplace dans un très joli vaisseau blanc, un peu « à la Fantômas » : « Sur le pont central du vaisseau blanc, se dressait, très haut, un siège drapé de blanc, orné d’insignes maçonniques ; et, sur ce siège, une figure d’homme trônait, seule et immobile. L’homme ne faisait aucun signe, ne semblait pas se rendre compte de la présence du monstrueux troupeau humain accumulé au-dessous de lui. Son vêtement sombre contrastait violemment avec la blancheur qui l’environnait. Il avait un visage pâle, très jeune encore, mais fortement accentué, avec des sourcils noirs très arqués, de grands yeux sombres d’un éclat de glace, des lèvres minces, et des cheveux blancs. Puis le visage fit un mouvement ; et le vaisseau, poursuivant sa route, se dirigea vers le palais. » C’est l’archétype de la beauté glaciale.
 

Dans le roman Trois Entretiens et Court Récit sur l’Antéchrist (1900) de Vladimir Soloviev, l’Antéchrist n’a pas de prénom mais est appelé « l’Empereur », le « surhomme ». Il est préfiguré par le personnage du « Prince », un trentenaire tolstoïen, bobo, post-moderne, pacifiste, anti-guerres et anti-nationalismes. Soloviev nous montre un Antéchrist âgé de 33 ans, profondément spiritualiste, ascétique dans son comportement, doué d’une intelligence supérieure, « gros capitaliste » et diplômé d’une académie militaire (il est « savant artilleur de profession »). L’argent et les liens avec l’armée lui sont des outils indispensables pour prendre le pouvoir. Saint Thomas d’Aquin l’avait noté : la puissance du monde, la potencia saecularis, sera le véritable instrument de l’Antéchrist. L’Antéchrist de Soloviev est élu président des États-Unis d’Europe. Dans la vision de l’auteur, l’Europe devient les « États-Unis d’Europe ». L’indifférence religieuse s’étend à la plupart de la population mondiale, si bien que l’Europe Unie ne compte plus que quelques millions de chrétiens authentiques, toujours divisés en catholiques, orthodoxes et protestants, les anglicans s’étant ralliés depuis peu à l’Église catholique à la suite d’une grave crise spirituelle. « Toutefois, l’Antéchrist de Soloviev n’est pas juif, à la différence de ce que veut le plus souvent la Tradition. Mais il est indispensable à la conversion finale des Juifs qu’il les abuse en se faisant passer pour un des leurs. » (Introduction de Bernard Marchadier aux Trois Entretiens de Soloviev, p. 11)
 

Enfin, je ne peux pas terminer cette brève esquisse de l’Antéchrist sans faire mention du bras droit qui seconde cet empereur de pacotille. Je veux parler évidemment du fameux « faux prophète » qui l’accompagne. Il s’agit d’un homme d’Église. Un clergyman. Peut-être un cardinal ou un évêque. Mais certainement pas le Pape, contrairement à ce que croient les sédévacantistes et autres excités de Civitas. Le « faux prophète » est un double de Judas, et non pas un double de saint Pierre !
 

Le télévangéliste Benny Hinn en Inde

Le télévangéliste Benny Hinn en Inde


 

En Ap 13 : 11, la Bible parle d’une « autre Bête sortant de la terre elle-même », c’est-à-dire d’une résurgence moderne du potier qu’est Judas, ce « berger de l’idole », qui au départ n’a fait que prétendre qu’il était un prédicateur de Jésus et de son Royaume, pour finalement se tourner vers satan et le dieu Argent. Le récit de l’Apocalypse (Ap 13, 12) nous décrit un peu plus ce faux prédicateur : « Il avait deux cornes, comme un agneau [= Jésus] mais parlait comme un dragon [= satan]. » Ce Judas Nouvelle Génération semble être chrétien, mais ses paroles ne le sont pas. Il se fait passer pour un disciple de Christ, mais il permet à satan de le posséder, trahissant son maître, et le vendant pour trente pièces d’argent. Luc (22, 3) et Jean (13, 27) mentionnent clairement que « Satan entra en Judas ». La Bible démontre aussi que Judas sera l’infâme faux prophète qui trahira (à nouveau) Jésus pendant la Tribulation, le dénonçant, le blasphémant, et disant au monde que l’Antéchrist est le vrai Dieu et que, par conséquent, c’est lui qu’il faut adorer. Il y aura un jour où Judas finira par payer pour ce qu’il a fait. Selon Apocalypse (19, 20), lui et l’Antéchrist seront jetés tous les deux, vivants, dans le lac de feu (lave d’un volcan ?) pour l’éternité : « Et la bête fut prise, et avec elle le faux prophète, qui avait fait devant elle les prodiges par lesquels il avait séduit ceux qui avaient pris la marque de la bête et adoré son image. Ils furent tous les deux jetés vivants dans l’étang ardent de feu et de soufre. » (Ap 19, 20)
 
Antéchrist 9
 

Le faux prophète sera le « porte-parole » de l’Antéchrist, il agira comme son « bras droit ». Il servira l’Antéchrist et l’exaltera comme le « vrai Dieu », en soutenant que Jésus n’est pas vraiment ressuscité. Qui mieux que Judas peut en effet se permettre d’assurer, tout en restant crédible « Je connais les deux hommes et celui-là est le bon. Il est plus grand et plus puissant que Jésus » ? Judas s’occupait déjà des finances pour Jésus et il fera de même pour l’Antéchrist (Jean 12, 6 ; et 13, 29). Il forcera les gens à se soumettre à l’Antéchrist en déployant le système de la Marque de la Bête. Il « justifiera » sa trahison en disant qu’il savait que Jésus n’était pas le vrai Dieu, raison pour laquelle il l’a livré aux autorités. Il accomplira également de grands miracles en présence de l’Antéchrist. Selon Apocalypse (13, 13), il fera des prodiges, allant même jusqu’à faire descendre le feu du ciel… à la vue de tous. En Luc (9, 54), nous trouvons Jacques et Jean demandant à Jésus : « Seigneur, veux-tu que nous commandions au feu de descendre du ciel…? » Il est clair qu’il s’agit d’un miracle que Judas aurait pu faire comme les autres disciples de Jésus. Mais Jésus leur répond alors : « Vous ne savez pas par quel esprit vous dites cela ! » C’est l’esprit de l’Antéchrist qui donnera à Judas le pouvoir de faire cela, pas le Saint-Esprit ! Mais l’argument décisif quant à la véritable identité du « faux prophète » se trouve en Zacharie (11, 11-17) : « Ce jour-là… je leur dis : ‘Si cela vous semble juste, donnez-moi mon prix…’ alors ils pesèrent mon prix, trente pièces d’argent. L’Éternel me dit : ‘Jette-la au potier, cette somme misérable à laquelle ils m’ont estimé !’ Et je pris les trente pièces d’argent, et je les jetai dans la maison de l’Éternel, pour le potier. » Cette prophétie a été clairement et entièrement réalisée par Judas (Matthieu 26 : 14-15 ; et 27 : 3, 9). Il a vendu Jésus pour 30 pièces d’argent, puis, pris de remords, il a jeté cette somme dans le Temple pour amener les hommes à adorer une idole, l’image de l’Antéchrist, soit exactement ce qui est annoncé en Apocalypse (13, 14-15). Quelle folie, après avoir marché avec le véritable Christ, que de le rejeter pour une pâle imitation ! Judas semblait faire partie du « troupeau » de Jésus, l’Agneau, mais il parle comme satan, le dragon (Apocalypse 13, 12). L’épée frappera son bras et son œil droit, son bras se desséchera et son œil droit sera plongé dans le noir (Psaume 69, 23). Le « faux prophète » fera fabriquer une idole de l’Antéchrist. Il rendra obligatoire l’adoration de cette image, sous peine de mort, en restreignant le commerce d’une manière telle que seuls ceux qui auront fait allégeance à l’Antéchrist, en recevant sa marque, seront autorisés à vendre et à acheter. Selon l’Apocalypse (13, 15), Judas II sera en mesure d’animer l’idole satanique (par hologrammes ?) et de la faire parler. Sans aucun doute, il sera le faux prophète, qui va promouvoir l’Antéchrist et l’adoration de satan. Le publiciste.
 

Diabolo et Satanas dans Les Fous du volant

Diabolo et Satanas dans Les Fous du volant


 

Dans les romans qui m’ont servi de base à l’étude sur l’Antéchrist, le « faux prophète » est une sorte de sbire (si vous préférez, Diabolo accompagnant Satanas dans Les Fous du Volant… mais en moins stupide, bien évidemment), d’Antéchrist dédoublé. Par exemple, dans Le Père Elijah, le « faux prophète » est le cardinal Vettore. Dans Le Maître de la Terre de Benson, c’est un clerc un peu télévangéliste, double du héros le père Percy. Dans Court Récit sur l’Antéchrist de Soloviev, c’est Apollonius, un magicien faiseur de miracles, une sorte de charlatan dont les sortilèges enchantent les foules et qui, comme la seconde Bête de l’Apocalypse, fait la publicité de l’Antéchrist : « Lui et son faux prophète font descendre le feu du ciel, mettent à mort les deux témoins du Christ [Pierre et Jean], exposent leurs corps dans les rues de Jérusalem. » (Préface de Vladimir Soloviev, p. 15). Tout ça se trouve dans la Parole de Dieu : « Le personnage du faux prophète tel qu’on le trouve dans l’Apocalypse et le rôle qui lui est nettement assigné dans ce livre et qui consiste à mystifier les gens au profit de l’Antéchrist exigent qu’on lui attribue toutes sortes de tours de sorcellerie et de magie. On sait de façon certaine ‘que son chef-d’œuvre sera un feu d’artifice’ : il accomplit de grands prodiges jusqu’à faire descendre du ciel, aux yeux de tous, un feu sur la terre (Ap 13, 13). La technique magique et mécanique utilisée par ce faire, nous ne pouvons pas la connaître par avance. » (Préface de Vladimir Soloviev pp. 15-16) L’Apollonius de Soloviev est un grand thaumaturge d’Extrême-Orient, homme indubitablement génial, mi-asiatique, mi-européen, évêque catholique titulaire d’un diocèse fictif in partibus infidelium : « Il sera parvenu entre autres, à maîtriser l’art mi-scientifique mi-magique d’attirer et de diriger à son gré l’électricité atmosphérique, et dans le peuple on dira qu’il fait descendre le feu du ciel. » (Monsieur Z., Court Récit sur l’Antéchrist, p. 168). Il fera descendre un feu du ciel sur Jean, sur Pierre, pour les assassiner. L’Antéchrist choisira alors Apollonius comme remplaçant du Pape, et ce dernier affichera urbi et orbi son œcuménisme frelaté : « Je suis tout aussi véritablement orthodoxe et tout aussi véritablement protestant que je suis véritablement catholique. »
 
Foudre
 
 

e) Que fait l’Antéchrist ? (Gouvernement Mondial)

 
Antéchrist 6
 

Ce que fait l’Antéchrist ? C’est très simple. Propulsé par les sociétés secrètes (Franc-Maçonnerie) qui auront préparé le terrain à son élection, il va instaurer le Gouvernement Mondial (Gog et Magog dans le Coran), appelé aussi NOM (Nouvel Ordre Mondial). Vous savez, la « nouvelle gouvernance mondiale » que Nicolas Sarkozy et François Hollande ont appelée de leurs vœux depuis un bon bout de temps. C’est le règne de l’humanisme intégral dont je parle dans mon futur livre sur le boboïsme : « Les structures de péché nous donnent l’illusion de vouloir un humanisme intégral : c’est cela leur projet affiché. Or l’humanisme intégral ne sera effectif que dans la gloire ! En attendant, sur la terre, l’humanisme n’est pas intégral puisqu’il va falloir souffrir et mourir ! » (le frère Samuel, dans les Attaques du démon contre l’Église, Actes du colloque de Banneux, Éd. Bénédictines, Paris, 2009, p. 80)
 

Le projet de l’Antéchrist est clairement civilisationnel. Le dirigeant satanique vise en effet la fondation d’une Civilisation contre la « Barbarie » belligérante : « J’ai voué ma vie entière aux principes de civilisation. » (p. 524) déclare-t-il solennellement pendant son discours présidentiel dans le roman Le Père Elijah. C’est aussi en cela que le groupe Civitas, même s’il simule la dissidence anti-System, est vraiment franc-maçon. Par exemple, dans Le Père Elijah, le Gouvernement Mondial se nomme « Unitas – Une nouvelle civilisation pour l’humanité » (p. 318). Le Président veut que son ascension au pouvoir soit « reconnue par les générations futures comme un moment décisif dans le développement de la civilisation humaine sur cette planète. » (p. 319) La Civilisation qu’il met en place est centrée sur le « principe de Fraternité Universelle » (Maître de la Terre, p. 124).
 

Mais attention. Pas une civilisation fraternelle qui s’appuierait sur la charité du Christ. Oh que non ! Il s’agit plutôt, par le biais des bonnes intentions désincarnées et angélistes, de faire émerger l’« ordre » par la création du chaos. Un peu comme ces mauvais syndicalistes qui créent les problèmes qu’ils prétendent résoudre, pour s’offrir une légitimité et une bonté. Ou un peu comme le « mariage gay » qui prétend résoudre le problème des divorces, de l’homophobie ou de l’infertilité. Ce qu’il faut retenir, c’est que le mot d’ordre du Gouvernement Mondial est la devise bien connue de la Franc-Maçonnerie : « Ordo ab chao » (« L’ordre par le chaos »). Autrement dit, l’État Mondial invente les solutions radicalisées et pacifiantes aux cataclysmes qu’il aura secrètement provoqués. Et beaucoup Le verront comme le Sauveur de leurs maux !
 

L’Antéchrist va arriver comme une fleur sur une terre rincée par les conflits, et du coup pourra sortir l’artillerie lourde de la PAIX (que déjà quasiment tous les chanteurs actuels ont préparée : « On n’a pas encore poussé le cri de la Paix, mais pour le bien de tous, il faut qu’on s’unisse » chantent par exemple les Neg’Marrons dans « Triste réalité » d’Amadou et Mariam). Peu de peuples terrestres vont avoir la force de voir le mal dans l’appel pressant pour la Paix (vous n’avez qu’à voir la marée multimillionnaire qu’a rassemblée une manif aussi indigente et dénuée de cause que JE SUIS CHARLIE pour vous faire une idée de l’ampleur du futur moutonnage…). Peu de gens vont trouver l’énergie de contrer l’« arme de fraternité massive » (pour reprendre la formule très signifiante de l’humoriste Pierre Fatus) que dégainera l’Antéchrist. Car quel est le mec assez fou pour s’opposer à la « paix », à la « solidarité », au « respect universel », à l’« anti-racisme », et à l’« amour », à moins d’être un gros con dangereux ou un paranoïaque intégriste ?? L’inertie sera (et est déjà) grande.
 

Pierre Fatus

Pierre Fatus


 

Petite parenthèse à propos du one-man-show L’Arme de fraternité massive de Pierre Fatus, que je suis allé voir dernièrement au Théâtre du Gymnase à Paris, et qui est loin d’être un cas isolé de pièces illustrant et alimentant la guerre civile et la haine anti-nationaliste, au nom pourtant de l’amour et de la solidarité (en ce moment le scène des « humoristes » regorge de roquets déprimés et agressifs comme lui, gérant mal leur panique). Ce spectacle est un concentré d’antifascisme moralisant. Nous nous retrouvons face à un pur produit du futur Gouvernement Mondial, prônant un totalitarisme humaniste déraciné : « Fatus est black, blanc, bi, beur, coco, catho, chinois de gauche mais athée tendance rom de droite, avec un côté musulman laïc, un peu juif gay mais toujours humain. » (cf. le résumé du tract)… Pierre Fatus prétend « rejoindre les sentiers lumineux de la fraternité collective » (« lucifiériens » aurait-il pu carrément dire…) Et là encore, le public de la salle, au lieu d’y voir une soumission, une dispersion, une agression, un prémisse clair de totalitarisme, se persuade massivement d’avoir goûté à une vraie transgression révolutionnaire. Au secours… On retrouve cette idée du projet civilisationnel de la « fondation/pacification par le chaos » dans énormément de spectacles et de one-man-shows de nos artistes bobos actuels, de nos anars libertins gauchistes. Les 4 rocs qui fondent l’humain – la différence des sexes, la différence des générations, la différence des espaces, la différence Créateur/créatures -, qui séparent pour mieux incarner l’Homme et le mettre en relation avec les autres, sont envisagés comme des abstractions, des dangers, des fondamentalismes, des communautarismes. Plus de frontières, plus de croyances, plus de sexes, plus de différences, plus de générations, plus de distinction de couleurs de peau, plus de politique, plus de nations, plus de familles, plus de couples, plus de riches et plus de pauvres ! Tout ça viré ! À les entendre, c’est le chaos qui va devenir l’amour et le vrai. Pendant tout le spectacle, le comédien déblatère sa haine de la France. À l’époque où les sirènes de notre système chantent avec leur mandoline « J’ai appris à aimer l’Univers, haïr les frontières. » (Nolwenn Leroy, « Rentrer en Bretagne »). Eh bien mes petits amis, je vous le dis, le monde est de plus en plus prêt à recevoir à bras ouverts le Gouvernement Mondial !
 

Pour l’installer, les actions de l’Antéchrist sont diverses. Spectaculaires mais ponctuelles… car évidemment, en étant le Président du Monde, il aura une vie de « pigeon voyageur presqu’invisible » ! mais très hollywoodienne les rares fois où il fera ses allocutions.
 
Gouvernement Mondial
 

Si l’on s’en tient à la Bible, l’Antéchrist sera possiblement un futur empereur mondial qui doit être « adoré » par toute la Terre. Ou alors un système qui s’oppose (de manière non frontale) à Christ.
 

Dans le Court Récit sur l’Antéchrist (1900) de Vladimir Soloviev, « ‘L’homme-qui-vient’ est élu à la quasi unanimité président à vie des États-Unis d’Europe. On le nomme Empereur romain. En un an les fondements de la monarchie universelle, au sens propre du mot, sont établis. » (pp. 166-167) L’Antéchrist écrit un livre qui plaît à presque tout le monde et que la planète entière s’arrache : La Voie ouverte vers la paix et la prospérité universelle. C’est l’auteur de ce best-seller que le lobby franc-maçon pousse, sans difficulté, à la présidence des États-Unis d’Europe (prélude à l’hégémonie atlantiste de l’OTAN). Chez Soloviev, l’Assemblée constituante internationale de l’Union des États d’Europe se réunit à Berlin. S’il reste toujours des conflits, ils n’opposent plus des nations entre elles, mais des partis politiques et sociaux. L’Antéchrist joue sur l’amalgame entre européanité et universalité (autrement dit, l’adjectif « européen » devient synonyme de « Citoyen du Monde ») pour instiller « l’esprit européen global » (L’Homme politique, Trois Entretiens, p. 99), imposer l’« égalitarisme indifférencié » (idem) et construire « le monde civilisé, ou européen, qui croît peu à peu et s’agrandit pour finalement embrasser tous les peuples en retard sur ce mouvement historique et les inclure dans un unique ensemble pacifique, international et solidaire. L’instauration de la paix internationale éternelle. » (Monsieur Z., pp. 123-124) Devenu empereur et installé à Rome, le Président réalise en 3 ans son programme-bulldozer : il achève l’unification politique de l’Europe, développe le plein-emploi et la paix sociale et veille écologiquement à la protection de toute vie sur la Planète. « Végétarien, il interdit la vivisection et institue une surveillance stricte des abattoirs. » (p. 167) Il encourage les sociétés protectrices des animaux (à l’instar de toutes les civilisations païennes d’ailleurs, qui érigent des cultes à nos amis les bêtes pour remplacer le culte de Jésus, et à l’instar d’Hitler qui de son vivant avait interdit la chasse à cour). Il faut que personne ne manque de rien ! Des jeux et de la bouffe pour tous ! « Il instaure l’égalité la plus fondamentale, ‘l’égalité de la satiété universelle’. La deuxième année de son règne. La question sociale et les problèmes économiques sont définitivement réglés. » (p. 168)
 

Dans le roman Le Père Elijah (1996) de Jonathan O’Brien, le Président anonyme instaure « un eurocommunisme modifié » (p. 54). Les désastres du communisme historique (60 millions de morts) passent totalement à la trappe de la mémoire collective. « En cette ère des plus guerrières, nous sommes invités à une renaissance joyeuse, commença-t-il d’une voix calme. » (p. 321) L’Antéchrist organise également la centralisation universelle de toutes les institutions humaines autour de l’idéologie de l’humanisme intégral. « Par pure force morale, il a rendu possible la transition des anciens États totalitaires vers une communion économique et culturelle avec l’Ouest. Il a réduit les tensions entre d’autres États instables et a réalisé des progrès significatifs dans la lutte contre la faim dans le monde. » (p. 319) ; « Il parle de ‘forger une civilisation globale’. » (p. 20). Il crée « la Banque mondiale » (p. 210), « la télévision mondiale » (p. 328) Il impose de main de maître le monisme, c’est-à-dire une propagande visant à interdire toute opposition, toute contradiction, toute différence, tout conflit, montrés comme des menaces à l’« unité » et à la « paix sociale ». « On crée une philosophie qui place l’unité au-dessus de la vérité. » (p. 161), contrairement au christianisme : « Pour les cathos, l’unité ne peut être authentique que si elle est fondée sur la vérité. Nous ne pouvons pas prétendre qu’il y a deux vérités conflictuelles, les deux étant justes. » (idem) Dans le roman d’O’Brien, le personnage d’Anna Benedetti donne une excellente définition du monisme, puis développe ce qu’est le « néomonisme » (un monisme à la sauce contemporaine) : « Les monistes croient que toutes les divisions sont en bout de compte une illusion, tous les conflits peuvent être négociés, tout dogmatisme est essentiellement une violation de la liberté, et ainsi de suite. » (p. 332) ; « Le néomonisme représente une nouvelle espèce de politicien spirituel. » (p. 332) Si vous préférez, le monisme est en fait une unité sans Vérité : « Le monisme souhaite apporter la paix au monde. Il parle partout d’unité. Mais le monisme n’est que superficiellement affaire d’unité. Il est un concept séduisant. Il produit beaucoup de tendances destructrices dans la société. Certains concepts élaborés par l’homme peuvent sembler humanistes et en même temps entraîner la violation ou la destruction de vies humaines. Peu ont l’appareil intellectuel pour comprendre ce que je vais leur dire. » (p. 333)

 

Dans le roman Le Maître de la Terre (1905) de Robert-Hugh Benson, l’Antéchrist, Felsenburgh est nommé « Président de l’Europe » (p. 176) et se fait « élire à la présidence des deux Amériques » (p. 287) : l’Amérique des USA, et l’Amérique européenne. « L’Orient se montre enthousiaste, tandis que l’Amérique semble partagée. Mais en tout cas, l’Amérique est sans pouvoir : la balance du monde penche trop lourdement sur elle. » (p. 178) L’Antéchrist lance « un mouvement qui tend à supprimer toute distinction de patries ou de classes sociales, après avoir supprimé toute institution militaire. » (le vieux Templeton, p. 5) Toutes les grandes puissances mondiales veulent l’Empereur à leur tête. Par exemple, au Congrès de Paris, « la France a recommencé à s’agiter fiévreusement ; elle a offert au Président d’être dictateur : il a refusé cela aussi. » (p. 132) Très vite, « l’enthousiasme ‘humanitaire’ » (p. 139) conquiert le cœur des quatre coins du Globe : « Cet enthousiasme avait infiniment grandi depuis la venue de Felsenburgh, et la publication de la paix d’Orient. L’homme, tout à coup, était littéralement devenu amoureux de l’homme. Des quantités de personnes s’étonnaient d’avoir jamais pu croire, ou même rêver, que c’était un Dieu inconnu qu’il fallait aimer ; et elles se demandaient par quel étrange sortilège elles avaient pu rester aussi longtemps plongées dans cet aveuglement. Le christianisme, le théisme même, étaient en train de s’effacer du cerveau du monde. » (p. 139) L’élan de pseudo « paix » qui émerge d’un Orient détruit par des guerres effroyables arrive par l’intermédiaire d’un chantage émotionnel imparable. Comme je le signalais en début d’article, il est attribué à l’Antéchrist la paix après une vague de conflits concentrée en Orient, le processus de « Réconciliation de l’Orient avec l’Occident » (p. 97) : « Toute perspective de guerre a disparu, et c’est la paix universelle. » (p. 95) ; « Si l’empire d’Orient se décide à se mettre en mouvement, nos États-Unis d’Europe ne pourront rien contre lui. » (p. 9) avertit le sage Templeton au début du roman. « La question d’Orient est décidément réglée ! C’est Felsenburgh qui a tout fait. » (p. 85) déclare triomphalement Olivier, le député ; « Le Congrès d’Orient est terminé ! La Paix définitive et non la guerre ! la Fraternité universelle établie ! » (cf. une inscription sur une affiche, p. 93) L’Antéchrist passe pour le Gran Libertador : « Ces journaux l’appelaient le Fils de l’Homme, à cause de son cosmopolitisme, le Sauveur du Monde, parce qu’il avait tué la guerre ; d’autres allaient même jusqu’à l’appeler Dieu incarné, parce qu’il était le plus parfait représentant de l’élément divin qui réside dans l’homme ! » (p. 161) ; « Felsenburgh avait aboli la guerre. Il avait découvert un moyen d’assurer librement la nourriture à tous. On avait trouvé le secret de la vie, et les hommes n’allaient plus connaître ni la maladie ni la mort. Oui, et à tout cela, il manquait seulement, – songeait Percy, – ce qui rend une vie digne d’être vécue ! » (p. 136) L’Antéchrist de Benson se situe sur le même registre moniste (= refus des conflits) que l’Antéchrist d’O’Brien : « Au reste, n’était-ce pas cette fusion des individus en une humanité totale qui, seule, pouvait explique la cessation des rivalités de partis et des conflits entre les nations ? » (pp. 291-292)
 

Comme on peut le constater dans ces trois romans et dans la Bible, le régime de l’Antéchrist est totalitaire et désastreux… au point que les gens qui avaient cru qu’il ferait mieux que les « totalitarismes » religieux du passé vont souhaiter mourir : « Ah ! mais il aurait mieux valu mourir !… » (Mabel s’adressant à son mari Olivier, dans Le Maître de la Terre, p. 260) Le but de l’Antéchrist est de conduire l’Humanité à son homicide, à son suicide, à sa perte, mais par le consentement de celle-ci. Ça se fera tout doucement, tout progressivement. « Ordinairement, l’ennemi n’est pas autorisé à terroriser les âmes par des apparences matérielles. Son travail est très largement silencieux. Il est le plus efficace quand il n’est pas vu. À l’occasion, Dieu permet que le diable utilise des armes plus crues, et ainsi se relève tel qu’il est. Il saisit l’opportunité, même s’il sait qu’il perd du terrain en se révélant. Mais sa malice est si grande qu’il ne peut résister. » (Père Élijah, p. 102)
 
Antéchrist 8
 

Quand l’Antéchrist se révèlera, on saura qu’il ne restera plus que trois ans et demi de tribulations. Il ne sera pas difficile à reconnaître : ce sera le premier (et le dernier) homme à mettre en place un Gouvernement Mondial, et les Juifs le reconnaîtront comme leur Messie. La suite du programme est connue, elle a été expliquée par Albert Pike, le grand prophète luciférien du XIXème siècle : « La Troisième Guerre mondiale doit être fomentée en utilisant les divergences que les agents des Illuminati attiseront entre les Sionistes Politiques et les dirigeants du monde musulman. La guerre doit être menée de telle manière que l’Islam (le monde Arabe y compris la religion de Mahomet) et le Sionisme Politique (y compris l’État d’Israël) se détruisent mutuellement. Dans le même temps, les autres nations une fois de plus divisées entre elles à ce propos, seront forcées de se combattre jusqu’à un état d’épuisement complet, physique, moral, spirituel et économique. »
 

Cette guerre ayant démontré une fois de plus l’animosité entre les trois grandes religions monothéistes (Chrétiens, Juifs et Musulmans), les promoteurs du Nouvel Ordre Mondial proposeront la religion mondiale du noachisme via le « faux prophète » dont parle l’Apocalypse. La religion noachide sera présentée comme celle de la « nouvelle civilisation de l’amour », celle de l’Antéchrist et de son bras droit. En somme, une religion universelle et cosmopolite, réunissant tous les hommes devenus enfin frères. Je rentrerai plus en détail sur le contenu de cette Religion Mondiale dans le chapitre qui lui est dédié plus bas.
 

Pour revenir au contexte explosif dans lequel l’Antéchrist va émerger, il convient de regarder de quel chaos le Nouvel Ordre Mondial se nourrit. Comme nous l’explique très bien Louis d’Alencourt, pour s’imposer, le Gouvernement Mondial a besoin d’une crise majeure. Seulement ce n’est pas UNE guerre qui se profile mais CINQ types de guerres différentes :

1) La guerre financière : crise économique, crise monétaire, crise de la dette pour générer la banqueroute universelle (celle-ci est prévue pour la fin 2015 par certains économistes de renom).

2) La guerre conventionnelle, ou militaire. Elle oppose le monde musulman à Israël et ses alliés. Et on sait ce qui déclenchera la Troisième guerre mondiale version militaire : la guerre contre l’Iran.

3) La guerre civile, générée par la guerre financière qui ruinera les populations et multiplier les pillages. « Le sang coulera dans les rues. Le Français se battra avec le Français, l’Italien avec l’Italien. […] On se tuera, on se massacrera mutuellement jusque dans les maisons. » a prévenu la Sainte Vierge à la Salette.

4) La guerre bactériologique. Ce type de guerre est encore peu connu, mais il est très probable. Depuis le coup d’essai de la grippe espagnole en 1917, les laboratoires ont fait beaucoup de progrès, et il faut s’attendre à des virus mortels sélectifs, avec un coup de maître : la vaccination générale, vaccination qui bien entendu portera en elle-même les germes d’un (autre) virus mortel.

5) La cyber-guerre. Cette forme de guerre est redoutable, car elle agit sur des éléments qui nous sont devenus essentiels : l’électricité et les moyens de communication. Plus de liaisons satellites, c’est plus de téléphone, d’internet, de télévision, etc. Un virus informatique ciblant les centrales électriques, c’est plus d’informatique, plus de chauffage, plus d’eau courante.
 
Antéchrist 15
 

Les propos de Philippe de Villiers au micro de Jean-Marie Le Méné, sur Radio Courtoisie le 9 octobre 2015, à l’occasion de la sortie de son livre Le Moment est venu de dire ce que j’ai vu (2015), sont d’une lucidité impressionnante à propos du Nouvel Ordre Mondial (même si je ne le suis pas sur son appui pro-Poutine). Selon Villiers, l’Antéchrist et son Gouvernement travaillent à une unification des États-Unis et de la France (la French American Foundation), entendent « faire péter les nations » et l’Espace Schengen, fonder « une Cité sans frontière et sans racine », « se servir du réchauffement climatique et des mouvements migratoires pour créer un grand Marché Transatlantique qui va tuer l’Europe et tuer les Nations ». Le Président de la Commission Trilatérale, en 1973, a lancé un appel clair à ses eurodéputés : « Aidez-moi à dissoudre les Nations ! » Il a défendu notamment le Rapport de Migrations de Remplacement. « Ces hommes ne veulent pas d’un Super-État. En réalité, ils veulent dissoudre la Politique. Ils veulent l’anéantissement du politique ! » insiste Philippe de Villiers, en évoquant « l’erreur de Maastricht » : « Maastricht, c’est une tentative inouïe de l’anéantissement du politique. ». Selon lui, « ces firmes a-nationales ont deux buts : 1) anéantir les souverainetés ; 2) couper les attachements vitaux c’est-à-dire fabriquer l’homme-nomade. » Il rappelle également la prédominance de l’idéologie hétéro-bisexuelle à la gouvernance de l’Europe actuelle : « Il y a 2/3 du Parlement Européen qui sont membres du LGBT, quand même. » Villiers raconte dans son livre l’insoupçonnée corruption idéologique qui règne à Bruxelles. « Ils veulent marchandiser toute la vie intime, mettre en place un marché planétaire de masse : celui du désir. On va tuer la mort. On va fabriquer des hommes éternels : avec des nanorobots, avec un commerce d’organes. » La sonnette d’alarme est pour le moins tirée !
 

Et le plus dingue, c’est que certains intellectuels applaudissent déjà le Gouvernement Mondial comme LA solution qui va sortir l’Humanité des crises profondes qu’Elle vit. Par exemple, « l’OCDE – Organisation de Coopération et de Développement Économiques – est en train de mettre en place un État de droit planétaire avec contrôle fiscal mondial », annonce, d’une mine réjouie et d’une voix anesthésiante, Jacques Attali début octobre 2015. Cet « économiste » polémiste, qu’on voit actuellement sur tous les plateaux télé français (rien qu’à voir sa tronche, ses yeux mi-clos et son petit sourire en coin, vous comprenez vite qui il défend…) présente ce Gouvernement Mondial comme « le Bien », et le seul moyen d’échapper à la Troisième Guerre mondiale.
 

Jacques Attali

Jacques Attali


 

Le modèle politique idéal du Gouvernement Mondial, vous pouvez le trouver par exemple dans La République de Platon, L’Utopie de Thomas More, La Cité du Soleil de Campanella. Tous ces écrits chéris par la Franc-Maçonnerie. Voici précisément un extrait du livre platonicien (315 av. J.-C.) qui nourrit le néoplatonisme d’aujourd’hui : « Dans cet État parfaitement organisé, la propriété est abolie et les guerriers ne sont que les gardiens de la Cité. On apporte à leur éducation le plus grand soin en les amenant graduellement à la contemplation du Bien en soi. Les meilleurs et les plus désintéressés d’entre eux sont désignés aux plus hauts postes. Tout intérêt individuel est supprimé. Tout est commun : logement, repas, femmes et enfants. Les mariages sont contrôlés par l’État et on laisse mourir les enfants nés d’unions irrégulières, infirmes de naissance ou simplement faibles. Les autres sont élevés par la collectivité de telle sorte que, faute de reconnaître les leurs, tous les parents aiment tous les enfants et réciproquement. Quant aux producteurs, artisans et paysans, un petit bien leur est consenti de peur qu’ils ne sombrent dans la révolte. Platon exalte avec enthousiasme l’harmonie et la pauvreté de cet État ‘savant, fort et juste’, et dans lequel le pouvoir est aux mains des philosophes. » La « civilisation » collectiviste que la Franc-Maçonnerie veut bâtir sera selon toute vraisemblance une synthèse du capitalisme et du socialisme. Elle s’étendra au monde entier. Elle sera démocratique en apparence. Elle aura à sa tête un despote à la fois « roi » et « prêtre » (l’Antéchrist, baptisé aussi « le Grand Architecte » par la « tradition » franc-maçonne : le roman Père Elijah y fait allusion avec le personnage de l’« Arquitecto »), entouré d’une nomenklatura privilégiée, fortement anti-chrétienne. L’Antéchrist veut faire passer Dieu pour un tyran. Et l’Homme deviendrait dieu par le développement des sciences et des techniques. Dans cet univers rationalisé, la famille et le mariage auront disparu. On y pratiquera l’eugénisme et l’euthanasie. À l’unification politique et économique s’ajoutera celle des religions remplacées par un culte unique, celui de la « religion naturelle » dite « de Noé ». (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie : Recherches sur une religion d’État (2015), p. 184). Nous en reparlerons plus tard. Du point de vue de la création d’un hybride politique inédit, Mikhaïl Gorbatchev (président russe de 1985 à 1991), dans son discours du 1er décembre 1989 à Rome, affirme qu’il faut « construire la ‘maison commune européenne’ en la fondant sur ce qu’ont en commun Communisme et Démocratie libérale : l’Humanisme et la Renaissance, c’est-à-dire le culte de l’homme qui se détache du Dieu transcendant et personnel pour créer un Monde Nouveau dont il et lui-même le centre et le patron absolu. » (idem, p. 186-187) Dès 1946, le Frère Riandley, Souverain Grand Commandeur du Suprême Conseil de France (une des principale loges franc-maçonnes mondiales), lève le voile, en défendant « la nécessité d’une organisation totalitaire du monde, d’où toute notion de primauté d’une nation sera exclue » (p. 187). Plus tard, dans le même article, il entre dans le détail : « Par quel moyen cette autorité d’un agent unique s’imposera-t-elle ? Probablement par la guerre, par une troisième et – espérons-le – dernière convulsion mondiale, car l’humanité est condamnée, comme tout ce qui vit, à enfanter dans la douleur et dans le sang. » Quatre ans plus tard, en 1950, le richissime banquier Paul Warbourg confirme devant le sénat américain : « Qu’on le veuille ou non, nous aurons un Gouvernement Mondial. La seule question qui se pose est de savoir si ce gouvernement mondial sera établi par consentement ou par conquête. » (p. 187) La messe diplomatique est dite. Ou presque.
 

L’Antéchrist exalte l’idéal d’autonomie, de liberté individuelle, pour imposer, en fait, une domination masquée. « Voici la vérité ! Le monde, à présent, est Un, et non plus divisé. L’individualisme est mort. » (Olivier dans « Le Maître de la Terre, p. 334) ; « Les masses aspirent à des solutions systémiques au problème humain. Elles veulent du totalitarisme sans brutalité. » (Père Elijah, p. 161) ; « Dix millions de personnes meurent chaque année par avortement ou euthanasie. » (idem, p. 54) ; « Staline : soixante millions de personnes, mortes des mains de ce seul tyran. » (idem, p. 289)
 

L’objectif à plus ou moins long terme des Illuminati du Gouvernement Mondial (ces adorateurs de Lucifer, l’ange de lumière… une lumière coupée de l’Amour, bien évidemment), est de réduire, « pour son confort », l’Humanité de 7 milliards de personnes à 500 millions. Y arriveront-ils en lançant sur Elle des famines, des épidémies, des cracks boursiers, des catastrophes naturelles, des outils technologiques pour le « suicide assisté » ? On ne le sait pas. Mais c’est en tout cas la visée du malthusianisme, cette politique « civilisatrice » inspirée par les travaux de l’économiste britannique Thomas Malthus, qui fut défendue par Pierre-Joseph Proudhon dès 1849, et qui prône la restriction démographique. On retrouve le malthusianisme transhumaniste – c’est-à-dire ce contrôle numérique et technologique de population – dans les trois romans précédemment cités. Par exemple, le Père Elijah raconte comment le Président envisage de « rendre obligatoires les lois anti-population partout dans le monde » (Père Elijah, p. 445). D’ailleurs, au début du roman, Elijah croise dans un avion un jeune cador nord-américain qui lui présente avec enthousiasme et détermination le passage « obligé » de la purification ethnique mondiale : « Le problème majeur dans le monde actuel, c’est qu’il y a trois milliards d’habitants en trop sur cette planète et faut qu’ils dégagent ! » (p. 23)
 
Transhumanisme
 

La perversion de ce programme étatique d’extermination de l’Humanité, c’est qu’il va faire en sorte de tuer les Hommes à petit feu et par eux-mêmes, par l’intermédiaire du libre accès à l’euthanasie et au clonage (petite précision : le premier clonage humain a eu lieu dans l’Oregon, aux États-Unis, en 2013), ou bien de décimer les Hommes en masse mais sous des aspects naturels (cataclysmes environnementaux, bactéries et épidémies impossibles de localiser, canicules, etc.) et des aspects aériens invisibles comme de préférence les guerres nucléaires (parce que le camp d’extermination, ça fait trop Deuxième Guerre mondiale…). La chaleur des enfers va petit à petit gagner l’atmosphère, au point de transformer la terre en brasier : « Les savants affirmaient qu’un courant de chaleur, absolument inattendu, venait de se produire. Cette condition anormale de l’atmosphère avait été accompagnée de désastres : un peu partout, il y avait eu des tremblements de terre d’une violence prodigieuse ; une tempête en Amérique, avait détruit, d’un seul coup, trente-deux cités ; plusieurs îles avaient disparu ; et l’inquiétant Vésuve semblait se préparer pour un dénouement de son aventureuse carrière. » (Le Maître de la Terre, p. 350) ; « un feu qui brûlerait sous la surface de la terre » (idem)
 

Dans le roman Le Maître de la Terre de Benson (publié, je le rappelle, en 1905 !), l’un des thèmes centraux est justement l’euthanasie. « D’un consentement unanime, les êtres inutiles, les mourants, étaient délivrés de l’angoisse de vivre ; les maisons spécialement réservées à l’euthanasie lui prouvaient assez combien un tel affranchissement était légitime. » (p. 273) Olivier, le député à la botte de l’Antéchrist, souhaite l’euthanasie pour sa vieille mère à l’agonie, Madame Brand. Benson décrit également l’existence d’« institutions d’euthanasie » (p. 335) où les gens peuvent se rendre « librement » pour « décider » d’y mourir, l’existence de « grands laboratoires de vivisection » où sont faites « des expériences sur des sujets humains, sur des personnes qui s’étaient séparées du monde, et à qui, dans des maisons d’euthanasie privées, on avait administré des gaz suspendant la vie, au lieu de la détruire… » (p. 349) La femme d’Olivier, Mabel, dégoûtée des pratiques despotiques du Gouvernement Mondial, décide de mettre fin à ses jours dans une de ces « maisons d’euthanasie ». La réduction programmée de la population mondiale est un projet clair et net de l’Antéchrist.
 

Dans l’idée, « l’homme de péché » veut éradiquer l’amour incarné qu’est le Christ en toute vie humaine. « Ne prononcez pas le mot ‘amour’ devant un franc-maçon ! » prévient Maurice Caillet, un ex-franc-mac, lors de sa conférence bretonne en 2002 sur la franc-maçonnerie. « Le projet de la Franc-Maçonnerie est celui-là : Le mariage deviendra une communauté sociale, un contrat. Le mariage n’empiètera pas sur la vie sexuelle. Le géniteur ne sera plus l’amant. » Et la sexualité ne sera plus sexuelle… Mes amis, préparons nous à ceindre notre ceinture aux reins !
 

f) Sa personnalité et sa manière de s’exprimer :

Antéchrist 10
 

Je vais à présent essayer de brosser un portrait non-exhaustif des attitudes et du caractère de l’Antéchrist. Car là encore, on retrouve, d’un portrait à l’autre dressé par ceux qui ont imaginé le personnage, beaucoup de points communs. Ce qui signifie qu’on s’approche quand même de ce qu’il sera vraiment. Toute la difficulté – et aussi l’intérêt – que l’on peut trouver dans l’exercice du teste de personnalité, c’est de résoudre chez l’Antéchrist cet insoluble paradoxe (sous forme d’oppositions… alors qu’idéalement, christiquement, il n’y a pas d’opposition) entre Vérité et Charité, beauté et bonté, fond et forme, moyens et but, qualités et sainteté, intentions et actes, sincérité et Amour. Car oui, l’« homme de péché » a beaucoup de qualités, a une foi en Dieu et une piété réelles, exerce une forme de bonté, possède un capital sympathie indéniable, veut (trop) bien faire, n’est pas le diablotin 100% mauvais des dessins animés, ressemble parfois à s’y méprendre à Jésus. C’est troublant. Et bien prétentieux est celui qui assurera qu’il ne se laissera pas prendre par son double jeu. Il n’y a que Jésus et Marie qui peuvent garder notre conscience en éveil.
 

Voilà où réside toute la perversion du personnage : l’Antéchrist ressemble à s’y méprendre à un saint, bien sous tous rapports (on pourrait même le confondre avec le Roi qui viendra bientôt en France) : « Il était tout à fait classique, et cependant princier à la manière démocratique, plein d’esprit d’une façon qui n’écartait pas la joie. Et plus encore que tout cela, il avait une dignité profonde qui n’était ni pompeuse ni affectée en quoi que ce soit. C’était un individu retenu, posé, d’attitude humble, et pourtant dans cette retenue il y avait une qualité qu’aucune âme présente ne pouvait manquer de comprendre comme de la grandeur. » (Le Père Elijah, p. 320) ; « Un homme monte en pouvoir global. Pour le monde entier, il apparaît comme une sorte de saint laïc. Il est courtisé par les Nations unies comme l’homme qui peut servir de modérateur pour une transition paisible de l’ère des États-Nations à une fédération mondiale. » (le Pape parlant de l’Antéchrist, idem, p. 59) Le fils de satan a le discours rassurant de l’homme de paix apportant la « confiance en soi », du révolté qui veut en finir avec la guerre… mais de manière plus argumentée et moins cucul que Miss France : « ‘Du fait de la violation généralisée des droits de l’homme tout au long du siècle passé, nous souffrons d’un manque de confiance dans l’homme.’ Il rappela aux juristes que l’âge des guerres nationales pour l’acquisition d’un territoire touchait à sa fin. » (le Père Elijah, pp. 20-21) Saint Jean Damascène, dans son Exposé de la Foi orthodoxe (Ier siècle ap. J.-C.), disait déjà à son sujet : « En prélude à son règne, à sa tyrannie plutôt, l’Antéchrist affecte la sainteté. »
 

Dans ses attitudes, ce qu’on sait de l’Antéchrist, c’est qu’il simule au départ la pureté, l’humilité et la discrétion, pour parfaire son camouflage d’agneau sans tache et s’assurer (en coulisses) un bagage linguistico-intello-spirituel solide. Par exemple, dans le roman Le Maître de la Terre de Robert-Hugh Benson, Felsenburgh a vécu dans une obscurité complète avant d’être propulsé sur le devant de la scène. On ne lui connaît aucun antécédent véreux (en gros, l’Antéchrist est presque l’anti-thèse de DSK ou de Bernard Tapie !), aucune liaison sulfureuse : « Sa puissance vient de son incorruptibilité, unie à son génie d’orateur. » (p. 133) Il réunit tous les atouts de la respectabilité et du savoir-vivre. Toutes les langues lui sont familières. Dans Le Maître de la Terre », l’Antéchrist en parle 18 couramment ! De quoi flatter le monde entier. « Le prophète Daniel avertissait que le pouvoir de l’ennemi sur toutes les nations serait obtenu paisiblement et par des flatteries. » (Le Père Elijah, p. 188) Il fait des discours en Espéranto (= la langue universelle), « très brefs et très simples » (idem, p. 118), en l’honneur de la « Fraternité Universelle » et « à la louange de l’Esprit du Monde » : « Il est le produit vraiment parfait de cette nouvelle humanité cosmopolite. » (p. 117).
 

Il arrive sur l’échiquier polico-religieux mondial les mains propres, nickel chrome. C’est « un homme au passé sans tache, n’ayant dirigé aucun journal, n’ayant attaqué personne, soutenu personne. » ; « Il avait pris le peuple par surprise, surgissant des eaux troubles du socialisme américain comme une vision. » (p. 64) Même en étant le Maître du monde, il cultive sa marginalité, son côté outsider désintéressé par les honneurs et par son propre rôle, son côté bohème, sa sobriété, un simulacre d’humilité et de spiritualité : « Le Président avait l’intention de ne point prendre part à la vie politique, sauf pour suggérer de temps à autre, d’importantes mesures dont il remettait l’exécution aux divers gouvernements nationaux. » (pp. 217-218)
 

Derren Brown, mentaliste

Derren Brown, mentaliste


 

Dans le roman Court Récit sur l’Antéchrist de Soloviev, on voit que l’Antéchrist a les talents que procurent en général l’occultisme, la magie noire, l’ésotérisme, la médecine douce, la psychologie… et un peu la Nature, puisqu’il est beau (il est fait allusion à « sa beauté étrange »). L’Empereur s’exprime super bien (il est question de son « éloquence quasi médiumnique »). Il est très intelligent (il a une « facilité intellectuelle », un « génie exceptionnel », p. 159). Il sait embobiner son auditoire puisque la grande majorité de l’Humanité va se faire avoir par ce beau parleur qui fera l’unanimité.
 

Il est un peu la caricature des mentalistes, magiciens, hypnotiseurs, coach mentaux et devins du show business, mais en plus crédible et plus dangereux tout de même, car lui et son « faux prophète » vont réellement mettre le paquet pour nous éblouir de leurs tours, et sans effets spéciaux (en apparence). Ce sera objectivement très troublant.
 

En gros, l’Antéchrist aura la puissance d’impact (pas énorme si on ne s’y laisse pas prendre) d’un mentaliste ou d’un hypnotiseur. D’ailleurs, un ami religieux m’a déconseillé, lorsque l’Antéchrist passera à la télé, de regarder ce dernier dans les yeux. Il n’est pas le diable personnifié, attention, car le diable ne peut pas s’incarner (ne perdons pas de vue que satan est un ange certes magnifique mais qui n’a jamais, comme Dieu, réussi l’Incarnation longue durée en l’Homme et donc en Jésus). Mais il en a quand même les séductions. Des effets discrets de mise en scène nous donneront d’ailleurs l’impression qu’il est vraiment divin. « Il y avait une auréole autour de sa tête. » (Mabel par rapport à Felsenburgh sur l’estrade, dans Le Maître de la Terre, p. 122)
 

Messmer

Messmer


 

L’Antéchrist a un clair charisme de la parole pour galvaniser les foules, leur dire ce qu’elles attendent tout en les surprenant par des mots punchy et apparemment sans concession. Certes, c’est un menteur, mais qui cache sublimement son jeu, si bien qu’on a envie de lui pardonner même ses mensonges. Ses mots auront à la fois la tempérance qui l’empêchera d’être comparé à un Hitler hystérique au micro, et la vigueur cassante qui satisfera le sadisme masochiste des gens qui ne veulent pas d’un mou, qui veulent être un peu maltraitées, qui veulent s’auto-détruire ou qui rêvent de vengeance ou de changement radical. Le bon dosage de la Justice-sans-amour. « Sa popularité reposait surtout sur ses habitudes de franchise : car rien ne plaît tant aux masses que d’être grondées, injuriées, par un homme intelligent, courageux, et doué d’un pouvoir magnétique d’éloquence. » (Le Maître de la Terre, p. 31)
 

Son soi-disant « franc-parler » (je dis « soi-disant », car la franchise, la transparence, la radicalité, la sincérité, ne sont pas toujours gages de Vérité) l’élèvera au rang des pourfendeurs de tabous, au rang des plus grands justiciers et libérateurs que l’Histoire humaine ait comptés. « Le monde qu’il espère est libéré de la domination d’un régime mondial tout-puissant ou d’une bureaucratie mondiale ; sans domination au nom de la religion ; sans contrainte au nom d’un juridisme religieux, dogmatique ou moral. » (Le Père Elijah, p. 40). Il jouera la carte de l’apolitisme, du « président normal » (tiens, ça me rappelle quelqu’un…). Le président est cette sainte-nitouche qui touche à tout avec l’air de ne pas y toucher (pour ne pas se salir trop avec ces sales petits êtres humains !) : « C’était l’homme le plus sincère que j’ai jamais rencontré, après Stefano. Il était toujours humain, apolitique. » (Anna Benedetti dans Le Père Elijah, p. 389) Pourtant, « ce sera le premier à se rallier à un quelconque pouvoir politique mondial, une quelconque tyrannie, pourvu que cela ait l’air d’une libération, que cela le nourrisse et lui permette de jouer le rôle du révolutionnaire. » (idem)
 

Son attitude de dédain du pouvoir lui assurera le soutien de tous les « anti-Système », y compris les « anti-fascistes ». Il sera étonnamment porté par les anarchos bobos gauchistes, les écolos socialistes capables de troquer la Vérité contre la « Justice », comme le montrent clairement les paroles de la chanson « Mestizaje » du groupe SKA.P : « Noir africain, asiatique oriental, Indien d’Amérique, Africain musulman, Blanc européen, Aborigène d’Australie, cinq continents dans un même Cœur. Multiracial, multiculturel ! Des Philippines à l’Amérique Centrale, du Pôle Nord à Madagascar. Pas de frontières, pas de drapeaux ! Non à l’autorité ! Pas de richesses, pas de pauvreté, non aux inégalités. Rompons l’utopie, arrêtons de rêver, le métissage arrive, vivre en collectivité. Je crierai pour que brûlent les drapeaux pour la fraternité. Que tombent le patriotisme et l’hostilité raciale. Culture populaire ! Ay, ay, ay, la Justice, où est-elle, crucifiée dans les autels du capital. Ay, ay, ay, la Justice où est-elle ? Ni ta résidence, ni le credo, ni la couleur, aucune différence ne te rend supérieur. Stupide raciste, désertion de l’être humain, cinq continents dans un même Cœur ! » L’Antéchrist, tout intello qu’il soit, parviendra donc à gagner même le cœurs des gros beaufs dégoûtés des discours trop « prise de tête », des jeunes loups libertins révoltés et dégoûtés par tout.
 

Viktor Vincent, mentaliste

Viktor Vincent, mentaliste


 

Conjointement à ce que je nous dis Benson sur « l’incorruptibilité » de l’Antéchrist, il est à noter que l’« homme de péché » a un côté jusque-boutiste, ascétique, procédurier, méthodique, scientifique, méticuleux, maniaque, implacable, arbitraire, extrémiste, particulièrement déconcertant et efficace. Ce trait de personnalité confine au courage, à l’héroïsme. C’est – semble-t-il en tout cas – un acharné du travail, et du travail bien fait : « Toujours Felsenburgh arrivait et repartait, ainsi, sans prévenir, voyageant et travaillant avec une énergie incroyable. » (Le Maître de la Terre, pp. 371-372) ; « Felsenburgh devait être un homme d’une énergie extraordinaire. » (idem, p. 63) Il a besoin que tout soit ordonné, carré, parfait, réglé comme du papier à musique. Il ne supporte pas le contre-ordre, l’imprévu (insulte à sa propre intelligence de programmateur !), la contrariété, l’imperfection. C’est un psychorigide de base ! Un perfectionniste et un puriste avec un P majuscule ! Tout sauf être vulnérable ! Il incarne « la combinaison de l’extrême tendresse avec l’extrême impitoyabilité » (idem, p. 288). Il y a d’ailleurs dans ce trait de caractère tranchant et non-négociable quelque chose de l’intransigeance de la Nature (comme on le verra dans le chapitre suivant sur la Nouvelle Religion Mondiale, à propos de la place du naturalisme, de l’écologie et de la Nature dans la philosophie de l’Antéchrist). Pas de pitié ! Pas de pardon ! Pas de transcendance ni de Croix ! Pas de quartier ! C’est militaire, avec l’Antéchrist. « Cet homme incarnait la nature. » (idem, p. 289)
 

Par conséquent, le degré d’exigence de l’Antéchrist sera tellement impressionnant que personne n’aura envie de rire devant lui au moment où il ne l’aura pas décidé, personne ne s’aventurera à le contredire ou à lui couper la parole. Il en imposera ! « Certes, il était possible de haïr Felsenburgh, et de le craindre, mais non pas de le dédaigner, ni de sourire d’aucune de ses manifestations. » (Le Maître de la Terre, p. 288) ; « Sa personnalité est d’une sorte qui ne souffre point la discussion. » (idem, p. 290) ; « Pas un seul reporter n’a eu le courage de baisser les yeux sur son papier, pour prendre des notes. » (idem, p. 118) ; etc. Tout le monde – ou presque – voudra observer la même distance que lui impose à tous. D’ailleurs, on peut se demander comment les foules parviendront à gober aussi massivement le mal que l’Antéchrist fera ? Précisément en voyant sa froideur glaciale et son autoritarisme sous l’angle de la « nécessité profonde » (idem, p. 289), sous l’angle de l’implacabilité de la Nature et de la spontanéité « naturelle » : « C’est un homme qui accomplit les préceptes de la Nature. » (idem), à savoir la survivance, le besoin, la nécessité, la légitime défense, le droit de vie et de mort sur le vivant, l’absence de pardon et d’intention mauvaise (aucun animal ne tue pour le mal), etc. Ainsi, toute violence est justifiée par ce fatalisme naturaliste, déterministe, qu’incarne l’Antéchrist ! « Il possède la connaissance la plus surprenante, non seulement de la nature humaine, mais de tout ce qu’il y a, dans cette nature, de proprement divin. Sans que l’on puisse deviner où il a puisé une science aussi universelle. » (idem, p. 117)
 

L’Antéchrist se défend de sa froideur dépassionnée par l’argument de l’inexorabilité de la Nature : « Nous ne pouvons pas expliquer la nature, ni lui échapper par des arguments sentimentaux : la vie n’existe qu’à la condition qu’existe la mort ; et ces choses arrivent malgré toutes les théories qu’il nous plaît d’enfanter. La vie doit être acceptée dans ces conditions, qui seules sont bonnes, car nous ne pouvons pas nous tromper en suivant la nature ; et ce n’est qu’en acceptant ces conditions que nous trouverons la paix, car notre commune mère ne révèle ses secrets qu’à ceux qui la prennent comme elle est. » (Felsenburgh dans Le Maître de la Terre, p. 290) ; « Il y a des moments où la science doit dépasser le reste de l’humanité. Le scientifique doit faire des choses impopulaires, même des choses que d’autres appellent mauvaises, au nom du bien commun. » (le Président dans Le Père Elijah, p. 451) ; etc. On retrouve exactement en lui le naturalisme humaniste d’ Écologie Humaine, de Nos Limites, de Sens Commun. Par exemple, Écologie Humaine, c’est la matérialisation de l’Humanisme intégral (comme je l’ai expliqué maintes et maintes fois). D’ailleurs, Pierre-Yves Gomez, son fondateur, dit bien que « L’Homme doit être au centre de tout, pour un plus grand respect de la Nature », qu’il faut « remettre l’humain au cœur de la société ». Dans ces mouvements d’inspiration chrétienne bien dissimulée, tout est centré sur les « valeurs humanistes » (même vaguement « spirituelles »)… mais sans le Christ comme chef assumé et ouvertement défendu, sans l’Église catholique. Juste un vague message crypto-papal derrière. N’en déplaisent aux pontes d’Écologie Humaine ou de la revue Limite. C’est tout le discours bon ton du Gouvernement Mondial. « Il semblait que le Président fût avant tout un humaniste. » (le Père Elijah, p. 20)

 

Au passage, la pseudo « beauté » de l’inexorabilité « naturelle », défendue par l’Antéchrist, me fait penser à l’esthétisme de la « noblesse » du diable naturalisé, mise en scène dans le film « Suddenly Last Summer » (1960) de Joseph Mankiewicz, incarné par la glaciale Catherine Hepburn (Mrs Venable) : « La Nature est cruelle. Sébastien l’avait toujours su depuis sa naissance. J’ignorais que nous sommes traqués, tous dévorés par l’avide Création. » Si la Nature est indiscutable et bonne en soi, elle devient aussi pour le coup l’alibi idéal pour « mal agir » bien, et autant de fois qu’on le veut !
 

L’Antéchrist est ce « représentant nécessaire de la vérité naturelle. » (Le Maître de la Terre, p. 290). Il combine « un indubitable individualisme uni à un dévouement ardent pour le bien commun, et des principes directeurs d’un idéalisme sublime alliés à des solutions pratiques extrêmement précises et proches de la vie » (Court Récit sur l’Antéchrist, p. 164) Il fait. Que ça plaise ou non. Et puis c’est tout. Il n’y a pas à discuter.

 

Rien ne semble l’atteindre, avoir de prise sur lui. « Tout le monde et personne n’est son intime. » (Anna Benedetti dans Le Père Elijah, p. 391) D’ailleurs, on ne connaît à cet Insaisissable aucune famille, aucun enfant, aucune histoire amoureuse – pas même sulfureuse. Qui l’a touché un jour ? À qui s’est-il donné entièrement ? Personne. C’est là son grand péché secret, pour le coup. L’attraction médusante qu’il opère sur les autres sera due notamment à son inaccessibilité. Dans Trois Entretiens de Soloviev, Monsieur Z. reconnaît chez l’Antéchrist « sa bonhomie sans limites, invincible, et même insensible à toute offense » (p. 122), y compris sa dualité de gentil méchant : « Le ‘scélérat’ n’est pas un concentré de vice sur jambes, c’est le mélange habituel des bons et des mauvais côtés. » (idem) ; « Lui aussi sait être bon. » (idem). Mais si l’Antéchrist se permet d’être gentil, ce n’est pas tant pour défendre le Bien en Lui-même, que pour utiliser ce dernier comme vernis émotionnel de respectabilité et de crédibilité. En effet, l’Antéchrist admet que « le bien est assez fort pour corriger moralement et perfectionner l’homme et l’humanité » (Soloviev p. 148). Néanmoins, il n’envisage pas d’« attribuer au bien une force quelconque hors de la sphère morale » (le Prince dans Trois Entretiens de Soloviev, p. 148). Or le Bien a une supériorité absolue : le Christ !
 

J’imagine que c’est très déstabilisant de se retrouver devant un tel paradoxe sur pattes. L’Antéchrist est capable à la fois de s’émouvoir sincèrement d’un mal et des conséquences dramatiques dont il est l’auteur ou dont il a chéri les causes. Par exemple, dans le roman Le Maître de la Terre, le Président se met à pleurer sur la destruction de Rome (qu’il a commanditée en secret !), un mois après avoir présenté l’extermination comme un moyen qui, parfois, pouvait et devait être employé au service de l’Humanité. « Seulement, ajoutait-il, l’extermination est un instrument qui doit être employé avec délibération, non avec passion. » (p. 289). En gros, un jour il prêche la guerre, l’autre jour la paix et la tolérance. Un jour il joue l’affliction, l’autre la dépassion et la distance pour ce qui l’a fait pleurer. Et tout ça, dans un même mouvement et un calme olympien ! Bluffant. C’est un peu le kapo nazi qui s’émeut lui-même de torturer des innocents, qui croit en sa beauté et en son innocence dans le mal. Le comble de la sincérité !
 

Ce « grand spiritualiste, ascète et philanthrope » (Court Récit sur l’Antéchrist, p. 159) qu’est l’Antéchrist saura savamment camoufler son inflexibilité, son refus de se donner entièrement et de se recevoir des autres, par un vernis de sympathie et de gratuité manifeste (il transpire « le désintéressement et la bienfaisance active », idem), par d’étonnants accès de générosité, d’humour, de camaraderie voire même de bonté, de patience et de spiritualité. Il fera des bonnes blagues au bon moment, vannera gentiment les cardinaux complices. Il saura justement se contenir pour ne pas afficher le moindre faux pas, le moindre emballement, la moindre impétuosité excessive, ou le moindre désir de vengeance. La « très grande tempérance » (Court Récit sur l’Antéchrist, p. 159) qu’il fera preuve attestera qu’il ne se laisse jamais déstabiliser, qu’il ne s’emporte pas, qu’il est maître de lui-même au point de mériter d’être le Maître du monde (En fait, il a confondu « paix » et self-control : c’est juste ça le problème…). « Sa beauté et sa noblesse » (Court Récit sur l’Antéchrist, p. 159) éblouiront, rassureront et charmeront toute l’Humanité. « Il flatte, mais de telle manière qu’on se sente vraiment complimenté. Il exsude la sincérité. » (Le Père Élijah, p. 148)
 

La personnalité de l’Antéchrist est brillante. Ce n’est pas pour rien qu’il est le représentant humain de Lucifer, l’Ange de Lumière ! « Le pape avait étudié avec attention l’analyse du caractère du mystérieux personnage, deux grands traits caractéristiques de la personnalité du Président, sa double faculté de domination sur les mots et sur les faits. Parmi les traits secondaires, la prodigieuse mémoire, son génie linguistique. Il possède à la fois l’œil télescopique et l’œil microscopique, discerne les grandes tendances universelles et les plus menus détails des choses particulières. » (Le Maître de la Terre, p. 287) ; « Il a l’air assez optimiste sur l’avenir de l’homme. C’est un utopiste. C’est un citoyen courageux du monde à venir. Il préserve l’apparence publique de la bonté. » (le Pape parlant de l’Antéchrist, dans Le Père Elijah, p. 61). L’Antéchrist défend « le pouvoir de faire du bien à l’humanité. C’est une chose extraordinairement magnétique. » (idem, p. 63) ; « Le président dit des choses importantes. Des vérités. Il se pourrait bien qu’il fasse vraiment du bien au monde. » (idem, p. 21) Les « vérités » que l’Antéchrist prononce sont en réalité des contre-Vérité, mais qui sur le coup, apparaîtront super belles, super justes et super inédites. Dans Le Maître de la Terre, Robert-Hugh Benson nous a fourni quelques aphorismes antéchristiques très croustillants, car force est de constater que l’esprit catho non-avisé pourrait même s’y laisser prendre : « Nul homme ne pardonne. Ce qu’on appelle pardonner, c’est seulement comprendre. » (p. 288) ; « Il faut avoir une foi suprême pour renoncer à croire en Dieu. » ; « Un homme qui croit en soi-même est seul capable de croire en son prochain. » ; « Pardonner un mal commis, c’est approuver un crime. » ; ou encore « L’homme fort ne doit être accessible à personne, mais tous doivent être accessibles pour lui. ». Relisez bien ces maximes : à première vue, elles semblent vraies.
 
Mentalisme diable
 

En maniant les mots et les concepts idéologiques avec art (ça tient du lavage de cerveau, il faut le dire : un peu de « tolérance » par-ci, de « fraternité » par-là, de « liberté » et d’« égalité » contre les « discriminations »… et le tour est joué !), l’Antéchrist tient un discours focalisé sur l’espoir, l’optimisme, l’humain et la solidarité (top bobo, quoi) : « L’espoir c’est la vie ! » (Le Père Elijah, p. 218) s’exclame-t-il pendant sa démonstration oratoire de tribun de la plèbe. On lui donnerait le Bon Dieu sans confession. Il se dégage sûrement de cet homme, de prime abord, la même impression de « simplicité, silence, pauvreté » (p. 309) que le Père Elijah ressent quand il pénètre le hall de l’Hôtel Victoria Intercontinental pour se rendre au colloque du Palais de la Culture et de la Science, organisé autour du Président justement. L’Antéchrist prend la figure du Rassembleur : « C’est un homme bon, et un homme du peuple. Grands et petits sont les bienvenus à sa table. » (Philippe, le vieux maître d’hôtel, parlant du Président en des termes élogieux, p. 310) Il est même qualifié d’« homme idéal » (p. 313).

 

L’Antéchrist a tout, physiquement et comportementalement, du gendre parfait. Sa clique ministérielle d’agents certifiés conformes aussi. « Ils parlent posément. Ils n’ont rien à perdre, tu vois. Ils ne sont pas sur la défensive comme nous. » (Billy s’adressant à Élijah à propos du Président et de sa cour d’hommes flegmatiques, dans le roman Le Père Elijah, p. 39) Mais il ne faut pas beaucoup de temps pour se rendre compte que leur bonté n’est qu’une façade inquiétante : « Il y a quelque chose de totalement sain en même temps que de totalement psychotique en eux. Ce sont de parfaits gentlemen avec quelque chose de hideux derrière leurs yeux. Cela m’a glacée. » (Anna Benedetti, Le Père Elijah, p. 448)

 

Toujours dans le roman Le Père Élijah, le héros, face à son ami Billy, confesse qu’il a failli être séduit par l’Antéchrist lors de leur première rencontre : « Il se dégage de lui une sorte unique d’humilité. J’étais impressionné. » (p. 151) ; « Apparemment, dans ses discours sur la spiritualité, il fait souvent référence à l’humilité comme l’une des grandes vertus. » Billy se contente de réagir cyniquement : « Je suis toujours mal à l’aise avec les grands hommes qui parlent trop d’humilité… ».
 

En un mot pour résumer la personnalité de l’Antéchrist, il est glacialement SYMPA, objectivement RESPECTABLE. C’est bien ça ce qui nous déchirera intérieurement : ce Super Connard est sympa !!
 
Antéchrist 1
 

Mais le fin mot de l’histoire, c’est que l’Antéchrist n’est en réalité qu’un homme pétri d’orgueil, qui a refusé de mourir à son arrogance et surtout au Christ pour ressusciter avec Lui. Dans le Court Récit sur l’Antéchrist de Soloviev, on le voit très bien au moment de « l’aventure du ravin » (p. 163), épisode initiatique pendant laquelle l’Empereur, juste avant son ascension « glorieuse » aux manettes du monde, se voit au bord de l’abîme, et refuse d’accueillir sa propre finitude, d’expérimenter l’obéissance qui l’aurait sauvé.

 

Une seule chose trahit l’intégrité de l’Antéchrist, et invalide son impressionnant projet de Salut du monde : son regard. « J’ai vu une ombre passer dans ses yeux – derrière ses yeux. » (Anna Benedetti dans Le Père Elijah, p. 392) Philippe Russo avait raison : « Ta magie noire, ha ha. C’est juste une ombre dans ton regard. » (cf. la chanson « Magie noire ») Le roman Le Père Elijah évoque « la noirceur brillante » (p. 576) qu’est et dit l’Antéchrist : « De sa bouche sortit une noirceur brillante. ‘Nous allons bâtir la cité de l’Homme, et transformer nos nuits en jours.’ » Cette fameuse « obscure clarté » qui sert d’exemple à beaucoup de profs de français pour nous expliquer la figure littéraire stylistique de l’oxymore ! ENFIN, elle sert à quelque chose !
 

g) Le Nouveau Culte Mondial :

Le projet de domination planétaire de l’Antéchrist n’est pas tant politique que religieux. Blackmore avait bien senti le coup venir… « Peut-être n’est-ce que cette affaire d’Orient qui s’apprête à tomber sur nous : mais je ne sais pourquoi, il me semble que ce n’est point cela. C’est dans la religion que quelque chose va arriver. » (le Père Blackmore s’adressant au Père Percy, dans Le Maître de la Terre, p. 67) L’Antéchrist travaille à la fondation de ce qu’il appelle « la religion nouvelle » (idem, p. 260), à « l’avènement d’une théocratie » pour « réunir les Églises chrétiennes » (Vladimir Soloviev dans sa Préface aux Trois Entretiens, p. 12), « sous la houlette d’un pape imposteur » qu’il contribuera à installer : le fameux « faux prophète » dont je vous parlais plus haut. L’Antéchrist souhaite ainsi tenir en étau le catholicisme (et plus globalement l’Humanité) entre deux courants spirituels – orientalisme d’une part, et humanisme athée d’autre part – dont il se croit le digne catalyseur : « Pour résumer la situation, il n’y a plus au monde que trois forces qui comptent : le catholicisme, l’humanitarisme, et les religions de l’Orient. » (le vieux Blackmore, toujours dans Le Maître de la Terre, p. 9). « Communisme et œcuménisme sont les deux facettes indissociables qui caractérisent la théocratie d’un Âge d’Or. » (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie : Recherches sur une religion d’État (2015), p. 118)

 

Dans le roman Le Maître de la Terre, il est dit que « le nouveau monde socialiste » (p. 347), « un monde interprété par des forces socialistes, matérialistes, hédonistes » (p. 163) éclôt. Étant donné que ce « monde ne peut pas vivre sans foi, ni un culte, et que Dieu a été enfin trouvé » (p. 203) [sous-entendu : avec l’arrivée de l’Antéchrist], « le culte divin est restauré dans toutes les nations » (p. 200). Il s’agit d’un « Culte Nouveau » (p. 207), qui est rendu obligatoire aux citoyens au-dessus de 12 ans. Il s’appelle « la religion de l’Humanité » (p. 208). Benson en donne une définition concise : « C’est un catholicisme sans christianisme, une divinisation admirable de l’Humanité. » (p. 216) Mais attention. Il faut nuancer sur le caractère humaniste de cet œcuménisme. « L’objet de l’adoration n’est point l’Homme, mais l’idée de l’Homme privée simplement de son élément surnaturel. Le sacrifice lui-même est reconnu, l’offre volontaire de soi, répondant à l’un des instincts fonciers de notre nature ; mais sans aucun caractère de contrainte, – sans l’ombre d’une expiation imposée, par un pouvoir transcendant, à la culpabilité originelle de l’homme. » (p. 217) Dans ce nouveau culte, ce n’est a priori pas très compliqué : on implore « L’Esprit du Monde » (p. 209) dans « un temple consacré non point par de vaines formules sacerdotales, mais par la volonté de l’homme » (p. 210). Il n’y a qu’à « se prosterner devant l’Esprit du Monde et chanter très haut la gloire de la vie, offrir par des cérémonies et le parfum d’encens, un hommage symbolique à la force dont on a tiré son être, et qui, un jour, le lui reprendrait. » (p. 210) L’année liturgique de ce « culte » est ponctuée de quelques fêtes bobos (que nous observons déjà aujourd’hui en France) ou événements communautaires spectaculaires et peu contraignants : la Fête de la Paternité (le 1er octobre), Fête de la Maternité, la Fête de la Vie, la Fête de la Solidarité ; etc. Bref, c’est une religion à la fois festive, émotionnelle et intellectuelle. Un art de vivre. (Je rappelle à nouveau au passage que le livre de Benson date de 1905 !)

 

Si l’on en croit la Bible et tous les romans qui parlent de l’Antéchrist, ce dernier proposera une « nouvelle vision du monde apparemment plus ouverte. Un nouveau concept d’Église. » (Le Père Elijah, p. 370) Évidemment, cette « Église-qui-n’en-porte-pas-le-nom » constituera le couronnement de la Franc-Maçonnerie et des Illuminati. Par exemple, dans Le Maître de la Terre de Soloviev, l’Imposteur doit son élection à la tête du « Comité permanent universel » à ses frères en maçonnerie (sociétés secrètes, « gnosticisme mondain », « salons théosophiques »).

 

Voici, en gros, les idées « spirituelles » défendues par la Franc-Maçonnerie universelle classique :

– une conception cyclique de l’Histoire assimilant parfois le retour « imminent » de l’Âge d’Or à l’avènement du Messie,

– une hostilité profonde à l’égard de l’Église Catholique et de la civilisation héritée du Moyen-Âge,

– un idéal de religion œcuménique impliquant la réconciliation du Christianisme et du Judaïsme,

– le recours constant à des pratiques magiques ou spirites permettant d’entrer en contact avec des entités spirituelles qualifiées d’« anges »,

– un projet de réunification du genre humain sous l’égide d’un Gouvernement Mondial,

– un idéal de société collectiviste,

– la primauté absolue accordée aux sciences et aux techniques, dont le développement est censé permettre aux hommes de retrouver la condition divine qui fut la leur avant la chute originelle.
 
Indila
 

Pour tuer le corps humain, l’Antéchrist va s’atteler à tuer l’âme (son ultime conquête : le sanctuaire inviolable que seul Dieu a pu atteindre en tout Homme… et pas satan !), en instaurant une Nouvelle Religion Mondiale qui désagrègera l’Humanité de l’intérieur. En effet, après avoir désarmé les armées, anémié les forces de l’ordre, décrédibilisé les militaires, neutraliser les conflits extérieurs à l’Homme, interdit les armes et les bombes, après avoir fait croire à la maxime « l’Enfer c’est les autres » de Sartre (pour justifier l’individualisme de masse), la prochaine étape de l’Antéchrist, c’est d’amener l’être humain à se considérer comme son propre ennemi (« L’enfer, c’est moi-même. Je lui appartiens. ») et donc comme son propre terrain de pacification, l’amener à partir en guerre contre lui-même. Se libérer de soi pour atteindre la lumière (de Lucifer)… comme le chante la candide Indila dans « Ego » : « Le seul combat auquel je crois, c’est contre moi moi moi moi moi. Libère ton esprit. Écoute chanter le monde. Pourquoi passer sa vie à courir après une ombre ? Juste une pâle copie, une voix qui t’entraîne, et petit à petit, elle prend ton oxygène. We are the war, the war en nous-même. J’veux voir, j’veux voir, j’veux voir la lumière. Libère-toi. » Ça a l’air joli, comme ça, sur le prospectus. Humble. Ouvert. Libérateur. Spirituel. En réalité, pas du tout. C’est de la haine de soi déguisée en bien-être « religieux », de l’auto-destruction à petit feu, de la fuite en avant vers un Néant cosmique (Comme le détaille fort justement Anna Benedetti dans Le Père Elijah, il s’agit de « projeter son incroyance sur le cosmos », p. 415), de l’auto-dissection par quelqu’un qui se prend pour son propre objet d’étude et de perfectionnement. « Mon atelier, c’est notre bon vieux corps humain. » (p. 22) déclare fièrement le jeune nord-américain gagné à la cause humaniste du Président, dans Le Père Elijah.
 

La « paix » que nous vante la religion de l’Antéchrist n’est pas l’accueil de la Présence de Jésus en soi, mais est entendue comme l’« absence de guerre », l’extinction du désir et du Moi, le vide intérieur, le déni d’épreuve et de combat… alors que la paix véritable n’est certainement pas l’absence de guerre et ne se fera pas sans nous ! Elle est l’affrontement (par la Croix du Christ) avec la mort, le combat victorieux contre une souffrance éprouvée ! Elle passe par un renoncement à soi (mais pas une neutralisation de soi !) et un don entier aux autres par amour. Rien à voir avec la sédation lente et lumineuse proposée par l’Antéchrist et ses prêtres cliniciens en costard.
 

L’Antéchrist élabore le projet œcuménique de « religion naturelle » (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie : Recherches sur une religion d’État (2015), p. 178) Dans son essai Les Raisons d’espérer (2008), Monseigneur André Léonard a parfaitement bien décrit les deux ressorts idéologiques empruntés au New Age sur lesquels va reposer le Culte Mondial : à savoir le naturalisme et le panthéisme. « Le Nouvel Âge est une ‘gnose’ dans la mesure où il propose un chemin de libération réservé à des initiés et dont le ressort est une ‘connaissance’ (‘gnosis’ en grec) permettant de capter à son profit les bonnes énergies de l’Univers. Cette gnose est teintée de naturalisme (l’homme est une pièce de la nature) et de panthéisme (le divin est présent de façon diffuse dans le Tout). » (p. 92) Autrement dit, la Religion Mondiale s’appuie sur le rationnalisme et le déisme. Le panthéisme est une doctrine philosophique selon laquelle Dieu est Tout, et l’Homme se fondrait en Lui (comme un papillon qui crame à la lumière qui l’attire). « Pour Olivier Brand, ‘Dieu’ était la somme, toujours en développement, de la vie créée et l’unité personnelle de chaque individu formait un élément de cet être divin. D’où il concluait que les rivalités individuelles étaient la plus grande des hérésies, et le plus grand obstacle à tout progrès : celui-ci ne pouvant résulter que de la fusion des individus dans la famille, de la famille dans l’État, et des États particuliers dans le grand État universel. » (Robert-Hugh Benson, Le Maître de la Terre : La Crise des derniers temps (1905), p. 28)
 

Le « Cosmique » en question, c’est au fond le panthéisme : Dieu est partout, mais on ne le nomme jamais Dieu. Dans la Religion Mondiale, on ne se préoccupe pas de Dieu. Il se peut qu’il soit fait référence à des réincarnations (innombrables), au karma. « Je suis un canal divin : je suis Dieu. » Mais peu ou pas du Christ. Aux yeux des born again rationnalistes, il n’y a aucune vérité définitive. C’est le relativisme érigé en dogme. La devise d’entrée, c’est : « Aucune vérité n’est indiscutable et aucune croyance n’est à l’abri du doute. » Donc l’initié au Nouveau Culte n’admet pas la Révélation. C’est le relativisme spirituel : pour lui, il n’y a pas de morale. Tout simplement. À travers ce panthéisme dans lequel tout ce qui existe est esprit, et tout ce qui est esprit est Dieu, l’individu expérimenterait la vie intérieure de la Divinité telle qu’elle est exprimée par les formes successives par lesquelles passe la substance de toutes choses. « Par ses vies successives, l’homme se purifie jusqu’à ce que son âme, ayant atteint la perfection, se fonde en Dieu. Le Mal absolu n’existe donc pas et l’Enfer lui-même se transformera, à la fin du Monde, en Paradis. » (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie : Recherches sur une religion d’État (2015), p. 142)
 

Les fidèles de l’Antéchrist ont un « vif intérêt pour la tradition hébraïque et une conception cyclique de l’Histoire » (idem, p. 147). Ils annoncent « l’unification de l’humanité par la conversion de tous les peuples à la religion naturelle » (idem, p. 155) : « La loi doit servir les principes universels de l’homme, basés sur la loi naturelle. » (Anna Benedetti, dans Le Père Elijah, p. 217) Comme l’écrit Campanella, l’un des fondateurs historiques de la Franc-Maçonnerie, « toute règle contraire à la nature n’est qu’une règle fausse et un abus. » (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie , p. 155) La perfection, selon lui, consiste pour l’homme non pas à renoncer à soi-même mais au contraire à « développer toutes ses facultés et à employer toutes les ressources de son génie à l’amélioration de sa condition naturelle, intellectuelle et sociale. » Bienvenue dans le transhumanisme (ou, mieux dit, dans l’en-deça de l’humain… car en soi, le transhumanisme dans le Christ, c’est ce que tout catholique doit viser : c’est la Vie éternelle) !
 

L’objectif officiel de la Nouvelle Religion (qui ne s’appellera d’ailleurs pas « religion » : le mot est trop marqué religieusement, ça tombe sous le sens !), c’est la découverte du « chemin » de la Nature et donc de ses lois. L’Antéchrist veut fonder un État idéal dans lequel la Nature sera étudiée de la manière la plus utile pour le bien de l’Homme. « L’écologie est une des dernières impostures du capital pour nous faire aimer l’économie. » (Francis Cousin, 41e minute).Il veut permettre à l’être humain de s’arracher à l’état d’ignorance, considéré comme une servitude. En d’autres termes, il projette de diviniser l’Homme : « Vous serez comme des Dieux, promet le serpent à Adam et Ève, vous êtes seuls juges d’un bien et d’un mal qui au fond n’existent pas, ou qui sans doute s’équilibrent l’un l’autre pour s’annuler dans la Nature cosmique ! C’est la vie ! ». Dans une prodigieuse confusion mentale entre l’Homme et la Nature, Nature que l’Homme était censé dominer et distinguer de Lui, l’Adam antéchristique va se mettre à « chanter sans cesse la nature en ‘perpétuel progrès’ » (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie, p. 118) et à croire en « l’éternité de la matière » (doctrine condamnée notamment par l’Église catholique au XIIe siècle, il est utile de le rappeler).
 
new Age
 

L’Antéchrist colore son Nouveau Culte (à Lui-même) de culturalité universelle, d’œcuménisme rassembleur, d’un syncrétisme religieux qui ratisse large, et en particulier en s’inspirant, à l’instar de la Franc-Maçonnerie, de quelques traditions religieuses dites ancestrales, comme le Judaïsme, mais également des rituels chamaniques pré-christiques, et bien sûr de la pensée New Age actuelle : « Le Président a eu affaire à toutes les innombrables sectes et castes orientales. » (Le Maître de la Terre, p. 117) Il a puisé sa « sagesse » et sa légitimité de « directeur spirituel mondial » dans l’orientalisme, le bouddhisme, l’histoire et l’archéologie, pour concocter une sorte de best-of religieux prémâché prêt à l’emploi. Avec aussi ce qu’il y a de pire : l’occultisme, la magie noire, la nécromancie, le spiritisme. Il encourage à développer la médiumnité, cette qualité chez une personne de capter le surnaturel (pendule, radiesthésie, yoga, chi-kong, taï-chi, sophrologie, ostéopathie, magnétisme, etc.).
 

La mixture spirituelle du Gouvernement Mondial, Vladimir Soloviev la nomme dans sa préface aux Trois Entretiens « panmongolisme » (p. 11), comme je le signalais en début d’article. C’est une sorte de néo-bouddhisme. Les suiveurs de l’Antéchrist s’appuient sur le bouddhisme (celui-ci fait office d’autorité historique) qui prêche la non-résistance, l’impassibilité, le non-agir, la tempérance, et offre le Salut sans le martyre. Il s’agit d’une religion athée de l’extinction de l’Ego, de l’extinction du désir et de la négation de l’unité du corps. « Les livres saints des bouddhistes annoncent effectivement le vide. » (Soloviev, p. 11)
 

Dans le roman Le Maître de la Terre, avec le personnage de Mabel, la femme du député Olivier Brand au service de l’Antéchrist, on trouve un beau descriptif détaillé du processus de dépersonnalisation « mystique » de la spiritualité antéchristique bouddhisante (et hyper bobo !) : « Mabel se mit à méditer, – à prier – d’après une méthode qui lui était devenue familière. En premier lieu, elle concentra son attention sur elle-même, se détachant de tout ce qui était purement extérieur, transitoire, se refoulant toujours plus au dedans, jusqu’à ce qu’elle eût atteint cette étincelle secrète qui, sous toutes les fragilités individuelles, faisait d’elle un membre effectif de la race divine de l’humanité. Le second degré de sa prière consistait en un acte de pensée. Elle songeait que tous les hommes possédaient cette étincelle ; puis, réunissant toutes les forces de son imagination, elle tâchait à voir les innombrables millions de l’humanité, – les enfants naissant au monde, les vieillards qui en sortaient, les hommes mûrs qui se réjouissaient de pouvoir y vivre. Loin, à travers les siècles, son regard s’étendait, loin à travers ces âges de crime et d’aveuglement pendant lesquels la race s’était lentement élevée de la sauvagerie et de la superstition jusqu’à une pleine conscience de soi ; ou bien elle considérait les temps encore à venir, se dirigeant vers un point de perfection qu’il lui était impossible de comprendre tout à fait, faute d’y être, elle-même, arrivée. Et cependant, se disait-elle, cette perfection a déjà commencé ; les douleurs de l’enfantement sont passées, et déjà est venu Celui qui doit être l’héritier des temps ! Enfin pour un troisième acte de foi, elle se représenta l’humanité entière, le feu central, dont chaque étincelle n’était qu’un rayonnement, cet être divin immense, impassible, qui s’était réalisé à travers les siècles, et que les hommes avaient appelé Dieu, jadis, sans le connaître, mais que maintenant ils avaient reconnu comme la réunion transcendante d’eux tous. Et, à ce point de sa prière, elle s’arrêta, contemplant la vision de son âme, élevée au-dessus de son individualité personnelle, et buvant, lui semblait-il, à longues gorgées, l’éternel esprit d’amour et de vie… » (Le Maître de la Terre de Benson, pp. 250-251)
 

C’est bien beau de faire le vide mental (arrêter de penser, stopper le magnétophone intérieur, s’abandonner). L’ennui, c’est qu’il y a quelqu’un qui peut en profiter pour rentrer en nous : ou l’Esprit Saint (dans ce cas-là, génial !)… ou le Toto (là, c’est plus gênant) ! Certaines méditations font connaître des manifestations surnaturelles réelles, c’est indéniable : les esprits peuvent nous parler, des dons particuliers apparaissent, vous pouvez influencer les autres, etc. On favorise le monde invisible, certes, mais pas le bon côté. C’est bien là le souci !
 

L’autre problème, c’est que la Nouvelle Religion de l’Antéchrist supprime le corps… ou au contraire (ce qui revient au même) l’idolâtre en tant que carcasse uniquement sensorielle et émotionnelle à explorer de fond en comble par l’introspection ou la médecine. Elle supprime également les intermédiaires humains (clergé, prêtres, Pape) et tout ce qui est matériel (et qui sera jugé « idolâtrie »), exactement comme le font les protestants et les bouddhistes : « La théurgie, définie comme une magie supérieure, a pour but de permettre une communication directe avec les dieux. » (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie : Recherches sur une religion d’État (2015), p. 168) Donc concrètement, Elle isole. Il s’agit, selon les plans de l’Antéchrist, que chaque personne rentre dans cette Unité et cet Âge d’Or où le genre humain sera unifié avec lui-même, et coupé du monde auquel il s’imagine pourtant se connecter pleinement. Il n’y aura plus qu’un même genre de vie, qu’une seule forme de gouvernement, qu’une seule langue, qu’une seule foi.
 

L’Antéchrist est hanté par la création d’une pansophie, ou doctrine universelle. Il élabore le projet de synarchie (c’est-à-dire de gouvernement à plusieurs) qui s’étendrait au monde entier. Le Tchèque Jan Amos Comenius (1592-1670) a parlé de la synarchie en ces termes : « Le Conseil de la Lumière veillera à ce qu’il ne se trouve nulle part quelqu’un qui ignore quelque chose d’indispensable… Le Consistoire Mondial veillera à ce que Jérusalem ne soit plus livrée à l’interdit, mais qu’elle soit désormais en sûreté (Zacharie 14, 11) ; c’est-à-dire que toute la terre soit consacrée à Dieu… Enfin, la Cour de Justice veillera à ce que nulle part une nation ne s’élève contre une autre nation. » Ce philosophe, de son vivant, avait préconisé la fondation d’un « Collège de la Lumière » et d’un « Temple de la Sagesse ».
 

L’abandon à la « Lumière de Vie » a beau se faire sans amour, sans volonté (il s’agit d’une volonté de ne pas avoir de volonté, en fait), il n’en est pas moins réglementé par la raison. L’Antéchrist veut créer de la divinité à coup de décision humaine, de volontarisme (plus que de volonté dans le sens de « vouloir le bien »), de combattivité, de raisonnement implacable, de maîtrise et d’art humains, de programmation intellectuelle : « Tout mérite repose dans la volonté. […] Aucun succès ne compte autant que l’obéissance parfaite. » (p. 409) déclare le Président dans Le Père Elijah Il n’envisage pas le Salut éternel comme le don christique gratuit qu’est ce Dernier mais au contraire comme une affaire de « savoir-faire », de cérébralité, de génie humain, de commerce donnant-donnant, de troc… et même pire : de compétition.
 

Parce qu’il y a une ligne intellectuelle assez stricte à suivre, il est logique que la Nouvelle Religion Mondiale soit théorisée et matérialisée par un ouvrage littéraire de référence. Les trois romans d’anticipation (Soloviev, Benson, O’Brien) dont je vous parle depuis le début de l’article, font précisément référence au best-seller en librairie que l’Antéchrist aura rédigé, et qui constituera le substitut de la Bible, le guide spirituel de base du Nouveau Culte Mondial pour atteindre cette paix et cette intelligence humaine pointées par l’Antéchrist. Par exemple, dans le Court Récit sur l’Antéchrist de Soloviev, l’Antéchrist a publié un livre spirituel, La Voie ouverte vers la prospérité et la paix universelle, ainsi que la « morale de facilité » qu’il prêche au monde entier. Selon Bernard Marchadier, il est l’incarnation du « parfait cathare » pour les « masses qui pataugent dans l’exotérisme et le charnel » (Introduction de Bernard Marchadier, Trois Entretiens, p. 12). Il est fort possible que l’ouvrage de référence du Culte Mondial soit tout simplement un film. Ce sera en tous cas un topo clair, attrayant, accessible à tous, une vraie méthode assimil qui permettra à beaucoup de gens de progresser rapidement sur la voie du développement personnel et spirituel.
 

L’adepte de la secte du gourou Antéchrist est appelé à se soumettre à « une paix qui jaillit de la raison » (Le Maître de la Terre, p. 28), autrement dit au rationnalisme le plus scientifique, cartésien, empirique, basique possible. Les fils sataniques des Lumières ont tous vocation à former ensemble et individuellement l’« Être suprême » que serait leur propre intelligence. Dans la pensée du néoplatonicisme, très liée au rationnalisme, il est question de développer les « lumières intelligibles » (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie, p. 193), de manifester universellement la divinité de l’Homme Nouveau, d’inaugurer « une nouvelle étape de l’évolution » (Le Père Elijah, p. 141). L’Antéchrist défend « le mythe de l’évolution de l’intelligence » (le Président-Antéchrist, dans Le Père Elijah, p. 330) : « La raison triomphera malgré tout. » (p. 29) affirme le Prince, dans Trois Entretiens de Soloviev. Le but de l’Antéchrist semble clair : faire de l’intelligence une force plus grande que l’Amour. C’est ce que nous a expliqué avec brio le père Philippe de Maistre lors de sa conférence parisienne sur le diable, aux Cours Wojtyla, le 9 octobre 2015. Pour l’Antéchrist, « il ne faut point que le sentiment domine et entrave la raison. » (Le Maître de la Terre, p. 290). Il raisonne comme au Front National : la « lucidité », le « pragmatisme », la « réalité », avant la Charité et à la place de la Charité ! Aimer, c’est être lâche ! La fin justifie les moyens ! croit le Machiavel-Antéchrist.
 


 

Pour s’assurer une assise rationnelle et culturelle béton, l’Antéchrist se pique d’archéologie. Il cherche – partout sauf dans la théologie catholique, comme par hasard – la Sagesse de l’Histoire. Et il lance toute l’Humanité dans ses fouilles légendaires. Ça fait « Retour aux Racines de soi, aux Origines, à l’Authenticité primitive, à la Terre ». Ça donne à ses suiveurs l’impression d’aller beaucoup plus en profondeur que le christianisme, d’être les nouveaux Indiana Jones ou Templiers de la Divinité Perdue, d’être des experts intelligents et spirituels qui plongent de découverte en découverte, de remonter aux sources de la Première Alliance du temps de Noé avant la Création du Monde. Par exemple, dans le roman Le Père Elijah, le Président organise au « Palais de la culture et de la science » (p. 234) des colloques internationaux d’anthropologie, avec notamment « une conférence sur la restauration de la culture en Occident », un « atelier d’archéologie biblique » (p. 225). Et les Hansel et Gretel que l’Antéchrist parviendra à entraîner dans ses Maisons (cubiques ! genre « l’Homme est son propre casse-tête Rubik’s Cube futuriste ») de la Science seront tellement ébahis face aux trésors culturels et spirituels qu’ils découvriront et qui chantent l’ingéniosité transhistorique de l’Humain, qu’ils se demanderont, encore la bouche pleine, pourquoi diable certains êtres arrivent encore à accorder du crédit à une quelconque divinité transcendantale (tout est déjà si passionnant et riche sur Terre et dans l’Espace !) et aux vieilles superstitions de la religion chrétienne qui ont atrophié les capacités cérébrales humaines depuis des siècles. « Cependant, il y avait encore des hommes qui croyaient en Dieu, devant ce triomphe manifeste de la matière ! Il y avait des hommes qui rêvaient – en bien petit nombre, maintenant, il est vrai, – que la vie de l’âme réclamait des forces supérieures à celles de la matière. » (Olivier dans le roman Le Maître de la Terre, p. 391) Nan mais franchement !
 
Kheops
 

L’archétype des chercheurs employés par l’Antéchrist, c’est le Docteur Félix von Tilman dans le roman Le Père Elijah. Le sujet d’étude de ce chercheur « théologien par excellence » (p. 311) est pour le moins hybride et signifiant : « Archéologie et Spiritualité » ! Le Nouveau Culte Mondial scientifise la foi pour lui ôter sa principale essence : la confiance (et donc la nécessaire incertitude, le nécessaire risque, qui lui sont concomitants !). Dans la Religion Mondiale, on nous promet que Dieu est à la fois une équation inimaginable, insondable, qui ne peut donc pas avoir figure humaine (en Jésus), et paradoxalement qu’Il est quand même résoluble ! En ce moment, dans les documentaires qui circulent sur internet ou à la télévision, on voit de plus en plus de tentatives de psychologiser l’Art ou de transcendantaliser l’Histoire (comme l’explique Federico Mihura Seeber), notamment à travers une science qui s’appelle la « pan-mythologie » (cf. le documentaire sur la Grande Pyramide de Kheops à Gizeh). Et tout ce travail archéologico-superstitieux ne se fait pas tant au bénéfice de Jésus (y compris quand il s’agit du Da Vinci Code et du traitement de thématiques pourtant explicitement chrétiennes) que du paranormal et des extra-terrestres. Les mass médias actuels se penchent par exemple sur l’égyptologie, les civilisations précolombiennes (Plateau de Nazca, le calendrier aztèque, etc.), sur la magnificence des temples. Ils se nourrissent, comme l’écrit Bernard Marchadier à propos du Prince dans la préface aux Trois Entretiens de Soloviev, de l’« utopie d’une post-Histoire », du rêve de « sortir de l’Histoire » (p. 8) : « Le Prince est déjà un post-moderne par sa volonté de se déclasser, par son rêve de dépolitisation, par son aspiration à sortir de l’Histoire, à vivre dans l’utopie d’une post-Histoire, qui n’est évidemment qu’une préhistoire imaginaire, un super-primitivisme, un pacifisme idéologique. » Nos journalistes entretiennent scientifiquement le « mystère » (ça s’appelle la scientologie, non ?). Ils essaient de nous faire croire que les pierres et les édifices ont un « grand Secret » irrationnel à nous délivrer et qui dépasserait Jésus, une origine surnaturelle telle que les extra-terrestres ou des dieux inconnus du traditionnel panthéon sacré universel. On nous vante à la fois la toute-puissance et paradoxalement l’incapacité des mathématiciens à résoudre l’énigme de la construction de ces monuments anciens, pour au final, nous certifier droit dans les yeux et de manière hyper sérieuse, que vraisemblablement ils ne peuvent être que l’œuvre d’« êtres omniscients » encore inconnus. Des Troisièmes Types, quoi ! En clair, nous pouvons déjà être témoins aujourd’hui de cette volonté, chez les membres du Gouvernement Mondial, de résoudre par la science et l’émotionnel, le Mystère de l’origine humaine, et donc de Dieu. Ils essaient de prouver Dieu… sans Dieu et sans Jésus ! Ça risque d’être difficile, éternellement difficile…
 

Cela dit, loin de n’être que sensationnaliste, même si de toute façon elle très sera anxiogène, il y a quelque chose de rassurant dans la pensée rationnaliste du Nouveau Culte Mondial, quelque chose de foncièrement optimiste : si le Bien et mal n’existent pas, personne ne pèche ! Donc ça protège tout le monde du poids du péché et de la culpabilité ! Si la Vérité unique en Christ n’existe pas, je n’ai plus jamais tort et tout le monde a un peu raison. Si tout va bien parce que ça ne doit pas aller mal, eh bien tout va bien, ou du moins tout ira mieux ! « Ça ira mieux demain » comme dirait Koz Toujours. La peur est interdite… pardon… n’a plus de raison d’être ! : « Et surtout, n’ayez peur de rien ! Je vous jure qu’il n’y a plus rien à craindre ! » (Mabel, la perpétuelle femme angoissée dépressive, dans Le Maître de la Terre, p. 127) S’il n’y a plus de prérequis ni de dogmes auxquels se soumettre, c’est la liberté de croyance pour tous, sans les inconvénients de l’Église-Institution ! : « Cette Église Libre ne réclamait qu’une simple adhésion de sentiment. La Bible, dorénavant, avait complètement cessé d’être tenue pour une autorité digne de foi. » (le vieux Templeton dans Le Maître de la Terre, p. 6) L’« obscurantisme chrétien » n’en mène pas large face au « libre altruisme du croyant nouveau, qui ne demandait à la vie que ce qu’elle pouvait donner. » (idem). Y’a pas à dire : au départ, la Universal Religion, c’est comme le Red Bull, ça donne des ailes ! Ça transforme en passionaria révolutionnaire !« Mabel se disait, que, en cet instant, elle aurait été heureuse de tout souffrir, d’affronter la mort. » (idem)
 
Antéchrist 7
 

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le rationnalisme (forcément extrême, par définition) de l’Antéchrist empêche le jugement, c’est-à-dire toute morale, et finalement tout exercice de la raison : « Le jugement, c’est entièrement une création de l’esprit humain. » lâche le Président, dans le roman Le Père Elijah (p. 321). Compte tenu de ce paradigme, la tête est déconnectée du corps qui la porte. L’Homme, selon la logique de l’Antéchrist, est pur esprit raisonnant. Il n’a donc pas à porter de jugement sur ce que l’humain fait, et encore moins à porter la responsabilité des actes que ce dernier pose ! Et comme de toute façon, aux yeux de l’Antéchrist, le Bien et le mal n’existent pas, et que la croyance en ceux-ci empêche de raisonner, autant interdire le jugement et la raison humaine (bien trop limitée, et finalement bien trop entravante aux élans spontanés du cœur) !
 

Arrêtons de penser : vivons ! Aimons ! Émouvons-nous d’être ensemble ! L’Antéchrist ne veut pas s’embarrasser de ses propres excès rationnalistes. Il est capable de passer de la masturbation intellectuelle à la paresse intellectuelle et au discours rose bonbon mystique en un claquement de doigt. Par exemple, dans le roman Le Père Elijah, le Président se félicite de la « convergence psychique ressentie par toute âme sur terre qui vit à cette époque. C’est un moment de bénédiction fabuleux pour l’humanité. » (p. 321) Il ne se gêne pas pour faire sa déclaration d’amour à l’Homme (comme ça, ce dernier ne pourra pas se douter qu’il veut sa mort), sa déclaration à la Déesse « Humanité Naturelle » : « Oh ! Humanité ! s’était écrié le Président, notre mère à tous ! » (Le Maître de la Terre, p. 279) ; « L’univers respire ! » (le Président, Le Père Elijah, p. 321) Il ne se gênera pas non plus pour re-switcher sur le rationnalisme et pour faire sa déclaration d’amour à l’Intelligence humaine, à la Culture humaine (comme ça, les humains prétentieux s’en gargariseront), à la Nature (comme ça, les Écolos seront contents) et à l’Écologie Humaine (comme ça, les écolos cathos seront aussi contents !). « Stefano [le mari d’Anna] parlait de la nécessité de régénérer une vision morale pour la politique européenne. Il appelait cela un humanisme chrétien. » (Anna Benedetti, dans Le Père Elijah, p. 393)

 

L’ambivalence du discours roots, cultivé, raisonnable, et paradoxalement ampoulé, mystique, haut perché aussi, du Président-Antéchrist est particulièrement bien rendue par Jonathan O’Brien dans le passage de la grande conférence télévisée, dans Le Père Élijah : « La terre vit. Et nous qu’elle a créés sommes une part d’elle. Il est temps de forer nos puits profondément dans le sol, et de découvrir dans les profondeurs de notre être ce que toutes les âmes sages finissent par découvrir ; là, nous verrons qu’à la source de tout il y a une rivière souterraine. Il y a des puits africains et des puis européens, des puits aborigènes et des puits soufis, juifs et chrétiens, musulmans et bouddhistes, hindous et jaïns. Il y a des puits gaïa et confucéens, et des puits rouges et noirs et blancs et jaunes. Il y a des puits animistes et wiccans et spiritistes. Et même au-dessous des friches desséchées du fondamentalisme, il y a un puits obstrué, un désir ardent de la seule grande vérité. Chacun est un point d’accès vers l’ultime vérité de la destinée humaine. Là nous découvrirons une crainte primale, un sacré originel. Chaque personne dans cette pièce irradie de cette splendeur ! […] Nous entrerons dans la lumière le jour où nous déposerons nos armes, nos jugements et nos divisions et nous nous regarderons dans les yeux. Parce que dans nos propres yeux, nous verrons enfin le rayonnement de la divinité. Doxa ! Gloire ! Et ce jour-là nous commencerons à adorer en esprit et en vérité !’ […] Il parla avec émotion de la révolution écologique et des divers mouvements humanitaires qui, depuis plus d’un siècle, tâtonnaient autour du problème de l’homme. Il fit leur éloge, chacune et chacun, comme des préfigurations, des précurseurs de cette génération qui convergeait vers un saut de conscience dans l’âge de l’harmonie universelle. Il parla des souffrances des indigènes, des femmes, des pauvres. Il exprima un éclair de juste colère contre ces forces anonymes toujours à l’œuvre dans le monde qui répandent la division et défendent la fracture destructrice dans la conscience humaine. […] ‘Ceux qui sont engagés dans le pessimisme se sont condamnés eux-mêmes à une fin tragique. Ils créent leur propre mort. Les philosophies sociales systémiques, la religion systémique, les économies systémiques, les formes systémiques d’oppression gouvernementale sont toutes en train de mourir, et aucun être humain sur cette terre ne peut leur éviter cette mort. Nous qui sommes appelés à guider vers le nouvel ordre mondial devons laisser les morts enterrer leurs morts. […] Les vieux systèmes et les vieilles solutions ne fonctionnent plus. Dans ces périodes, les individus doués d’une authentique vision doivent travailler ensemble pour restaurer la paix et l’harmonie, doivent s’unir dans un ordonnancement de tous les pouvoirs humains pour répandre une vision mondiale auprès d’une communauté humaine apeurée. […] Les tyrans sont morts. Une race de créateurs naît. De grands penseurs, artistes, maîtres spirituels et mystiques sont apparus tout autour de nous, chacun portant une flamme de cette lumière universelle. Si ce congrès doit aider avec succès à la naissance d’un nouveau monde, alors nous devons mettre de côté nos peurs mutuelles, mettre de côté nos suspicions sans fin, notre dogmatisme, et notre peur cosmique. Il est temps pour l’homme de forger une nouvelle histoire de la création, de réinventer les anciens mythes sans les écarter. En puisant dans les richesses de notre héritage culturel global, nous ferons cela !’ » (pp. 322-324)
 

Dans cette longue citation, je reconnais complètement le boboïsme, c’est-à-dire ce paganisme de l’humanisme intégral ! Cet humanisme sans Jésus, où tout d’un coup « chaque Homme retombe amoureux de l’Homme », où la Justice prétend se supplanter à la Vérité qu’est le Christ. « La foi dans l’homme était l’essence de la religion, la foi dans les éléments les meilleurs de l’homme. » (Le Maître de la Terre, p. 260) D’ailleurs, dans le roman Le Père Elijah, l’Antéchrist confie au héros un cadeau à transmettre au Pape, un objet d’une valeur culturelle à ses yeux inestimable… mais qui concrètement tombe à côté de la plaque (car le Pape, lui, n’attend pas que la Vérité-Charité soit remplacée par la Justice-Culture ou par l’esthétisme matérialiste !) : un exemplaire original d’un des livres perdus d’Aristote, De la Justice. La Justice sans amour, quelle cata ! L’Antéchrist est l’Apôtre de la Justice (au détriment de la Vérité) par excellence. Il prétend « embrasser l’humain dans sa totalité, y compris de l’homme comme un être spirituel » (idem, p. 21). Il montre qu’il a toute « confiance dans la nature humaine » (p. 313). Au sein du Culte Mondial, tout est placé sous l’égide de « la commission des droits de l’homme » (p. 224), sous le régime des « valeurs communes » (p. 141) qui relient les Hommes les uns aux autres. Ces fameux Droits de l’Homme français deviennent sacrés, intouchables, gravés en lettres d’or sur le marbre de la République Démocratique Apatride. « À quelques exceptions près, leurs idées [à l’Antéchrist et à son ordre] peuvent être grossièrement résumées ainsi : ‘Je suis un idéaliste, mais réaliste ; j’espère une solution collective du problème humain ; je ne crois plus (ou n’ai jamais cru) en un Dieu transcendant et une religion organisée. Je crois dans le bien en l’homme. » (p. 39) En quelques sortes, l’Antéchrist veut créer « un monde où chacun est sa propre pape ou son propre ayatollah, où tout le monde est devenu infaillible, sauf le Pape de Rome, bien sûr. » (p. 41)
 
évolution de l'Homme
 

Et il faut reconnaître qu’avec ce discours philanthrope et anthropocentré facile, la Nouvelle Religion Mondiale va remporter, planétairement, un grand succès (y compris dans les rangs dits « catholiques »). Elle réussira le pari de parvenir collectivement à un semblant de paix : « Ainsi la guerre, suivant toute apparence, était désormais éteinte : et ce n’était point le christianisme qui l’avait éteinte ! Les hommes avaient compris que l’union valait mieux que la discorde ; et c’est en dehors de l’Église qu’ils l’avaient compris. En fait, les vertus naturelles s’étaient soudainement épanouies, tandis que les vertus surnaturelles avaient été méprisées. La philanthropie avait pris la place de la charité, le contentement celle de l’espérance, et la science s’était substituée à la foi. » (Le Maître de la Terre, pp. 159-160)
 

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Je sais bien. C’est extrêmement difficile de s’imaginer que le discours christo-centré ou biblico-centré du protestantisme sera celui de la Nouvelle Religion mondiale de l’Antéchrist. Cela a de quoi nous désorienter fortement, ébranler notre foi. Mais c’est fascinant aussi. Nous devons nous y faire et nous entraîner à dépister ce paradoxe de l’Antéchrist. Il est probable que l’Antéchrist et ses prophètes – se présentant volontiers comme des anti-Antéchrist, des hors-Système, et des pourfendeurs du Gouvernement Mondial – défendent ouvertement la Bible et le Christ comme leur seul Sauveur, afin de s’acheter auprès des gens une sécurité et une légitimité imparables. En revanche, comme par hasard, ils envoient balader l’humanité divine de la Vierge, les sacrements, l’Église-Institution catholique, le Pape, le pardon, l’Espérance, le purgatoire, la Croix, l’Eucharistie, la communauté des cathos, etc. C’est à ces « détails » près qu’on peut tout de suite voir qu’ils se servent de Dieu pour ne pas L’écouter.

 

Ce travail extrêmement subtil de travestissement, je l’observe actuellement chez les « chrétiens » complotistes de la bande à Dieudo et Soral par exemple (« Le Christ contre le CRIF ! » déclare le second) : ces chrétiens alternatifs ex-protestants, ces agents anti-antichrist de l’Antéchrist, qui feignent de louer le Seigneur pour finalement s’attaquer à Lui, qui feignent de s’en prendre à l’Antéchrist pour le soutenir inconsciemment, ces représentants de ce « catholicisme identitaire » dont la foi se résume à « la fin justifie les moyens » (cf. les dernières secondes de l’interview de Soral)
 
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Concernant ce surprenant et paradoxal christianisme antéchristique, je voudrais faire un petit encart sur une personnalité hors du commun que j’ai découverte il n’y a pas longtemps : Morgan Priest. La caution prophétique du messianisme bibliste à la Dieudo, justement. Né en 1979 (il a un an de plus que moi), il dit avoir rencontré Dieu en 2012. Il a un look marginal (gothique) qui peut effrayer autant que séduire, car ça le sort du cliché propret du « catho coincé langue-de-bois ». Plus c’est gros, plus ça passe ! Morgan Priest est un homme qui s’habille comme un prêtre, avec la soutane, les boucles d’oreilles, la croix du Christ autour du cou, et qui parle beaucoup des fins dernières dans ses vidéos Youtube. Intellectuel bibliste tout à fait pertinent dans ses dires, ne manquant pas d’humour de surcroît, il développe un discours subtil et souvent vrai, mais très dangereux. Je vous invite à voir le génie diabolique qu’il déploie à travers une de ses allocutions que j’ai regardée en entier et qui m’a bluffé tellement elle pourrait séduire bien des catholiques et prend l’apparence du bien.
 

 

Force est de reconnaître que ce Morgan Priest est très fort. C’est un bon orateur, très nuancé et super sympa, pas du tout caricatural (en apparences) dans ses propos. Il sait détendre l’atmosphère par des petites blagounettes « djeunes » bien placées. Il tutoie son auditoire et on peut le tutoyer. Il sait instaurer une camaraderie collective, un vrai climat de confiance. En plus, il rassure tous ceux qui croient vaguement « en Dieu », en ne s’imposant pas comme le prosélyte religieux mandaté par une religion instituée. Non. C’est un « libre croyant ». Il se définit d’ailleurs comme « chrétien » ni protestant ni catholique, « un chrétien biblique » (je ne connaissais pas cette dénomination : ça vient de sortir). Il a déjà instauré avec ses nouveaux disciples born again plein de petits rituels empruntés aux grandes religions traditionnelles, en proposant une forme de synthèse sincrétique et œcuménique du protestantisme, adaptable à tous : par exemple, pendant sa conférence, il échange « la Paix du Christ » avec certains frères croyants. Et quelques « amen » d’approbation convaincue s’élèvent de temps en temps jusqu’à lui, comme chez les Évangéliques. Morgane Priest est fin connaisseur de la Bible : il la cite abondamment et la connaît sur le bout des doigts. Il assure « prier » souvent. Il chante les louanges de Dieu. Il Le reconnaît même comme « le Seigneur » : « Dieu fait des miracles. Dieu est vivant. Il fait des choses insoupçonnées. Il ne faut pas sous-estimer le pouvoir de la prière » Il défend la prévalence de la liberté dans la pratique religieuse, et donne une image de la foi très accessible et peu contraignante. Il possède un bon bagage théologique, philosophique et même télévisuel. Alors évidemment, c’est très sécurisant pour tout le monde, y compris les incroyants. Il passe d’une émotion à une autre, souvent contraires (joie, tristesse, peur, conviction, rire, etc.), captant ainsi l’attention du spectateur lambda et créant de la sensation forte comme si c’était accidentel.
 

Dans le discours de Morgan Priest, il y a énormément d’optimisme mystique matiné d’humour… mais absolument pas d’Espérance, en fait. Il insiste beaucoup trop sur les faits (on reconnaît là la patte paranoïaque de Soral et des ex-votants FN, dont le pilier idéologique et discursif est « la RÉALITÉ», « la dénonciation des faits », « l’importance d’avoir raison avant d’aimer », « la lucidité », le pragmatisme spiritualiste) et sur la méchanceté du Gouvernement Mondial pour ne pas les appuyer inconsciemment. Car la lucidité n’est pas la Vérité. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Morgan Priest passe davantage son temps à dire que tout n’est qu’apparences dont il ne faudrait pas se fier qu’à défendre les vérités incarnées. Son fond de commerce est la mise en garde. Il joue beaucoup sur l’impression et les effets d’annonce du genre « Attention, ce que je vais vous dire est impressionnant, inédit et secret » (« Là, je vais vraiment vous choquer. » ; « J’espère qu’il n’y a pas d’enfants dans la salle… »). Il s’appuie sur une quantité colossale de chiffres et d’images censées être des documents hyper compromettants et cachés du grand public. « Ce qui m’intéresse, ce sont les faits massifs. » dit-il. Tout cela dans le but de flatter mais aussi d’impressionner son public.
 
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Si j’ai un conseil à donner : ce n’est certainement pas sur son look qu’il faut le contrer, ni même sur les faits qu’il relève. Car tout est mêlé dans son discours : le très vrai et inédit, et puis le très faux. En effet, il prévient de choses que moi-même j’ai étudiées et qui tiennent parfois la route (la puce RFID nommée aussi Blockchain, les documents biométriques, les Illuminati, le Gouvernement Mondial, les réseaux pédo-satanistes, le Projet Bluebeam, les Guidestones, le Projet HAARP, les chemtrails, la faillite des États, la mutation de la crise économique en Guerre Mondiale, les illusions holographiques, les camps de la FEMA aux États-Unis, etc.). Il a le nez creux pour annoncer énormément de prophéties eschatologiques qui m’ont aussi été rapportées par d’autres canaux plus doctrinaux. Par exemple, il a raison quand il prévient contre les travers laïcistes et individualistes de l’Humanisme intégral (« L’athéisme, c’est l’Homme au centre de tout »). Il définit le Gouvernance atlantiste mondiale avec des mots très précis et justes : « Ère de coopération internationale » C’est tout à fait le nom que j’aurais donné à la Nouvelle Religion mondiale, par exemple. Il semble aussi s’approcher du vrai quand il décrit la manœuvre du Nouvel Ordre Mondial de faire en sorte que l’islam et le sionisme politique se neutralisent entre eux. Il évoque plein de scoops qui ont l’air scientifiquement crédibles et que peu de gens connaissent, alors bien évidemment ça fascine les néophytes et l’effet de surprise est garanti dans la salle. Il en fout plein la vue. Et le zapping audiovisuel achève de convaincre les quelques sceptiques.
 

En y regardant de plus près, Morgane Priest n’est pas si scientifique et érudit qu’il le prétend. Car il insiste énormément sur la notion – très satanique, en réalité – de sincérité (notion qui se substitue à la Vérité) et sur celle – non moins satanique – d’autonomie (concept dissident qui se substitue à la liberté dans l’obéissance au Christ et son Église). Et avec un peu de sentimentalisme individualiste et spiritualiste par-dessus tout cela, ça se boit très bien ! : « Dieu, c’est toujours une histoire de cœur. Vraiment. L’important, c’est ce que tu penses dans ton cœur. Si tu as été sincère, c’est ça qui compte. » « Si ton cœur a été sincère », tu seras sauvé !

 

Pour rejoindre le même ordre d’idées, ce qui marque quand on visite le blog de Morgan Priest, c’est que les demandes de fric clignotent de partout. Car oui, la sincérité a un prix (plus élevé que ce que le sincère nous propose sincèrement) ! Cela montre que la gratuité et l’humilité ne sont pas là, et que notre prêtre dissident n’est pas autant au service de son message qu’il le prétend. Car si on l’écoute, on a pourtant l’impression qu’il est complètement désintéressé. Il passe son temps à prévenir contre le Dieu Mammon (Argent), en plus ! Il critique les catholiques et leurs indulgences médiévales, en vantant la gratuité du Salut (« C’est la foi qui sauve. Pas les œuvres, malheureusement. »)… mais dans les faits, il empoche volontiers l’argent sur lequel il crache !

 
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Mais au-delà des considérations matérielles et formelles, c’est vraiment sur son désamour de la Vierge Marie et de l’Église catholique que Morgane Priest finit par se décrédibiliser et par faire tomber son masque. Le masque de l’orchestration misanthrope de l’opposition entre l’Homme et Dieu, entre le Fils (Jésus)/la Fille (Marie) et le Père (Dieu), entre l’Église et Jésus : « Je ne prêche pas l’Homme : je prêche Jésus-Christ Seigneur et Sauveur » affirme-t-il dans une autre de ses vidéos. « Tout le pouvoir est en Dieu et non plus en les hommes » (idem) Sur la fin de sa conférence à la Main d’or, dans les dernières minutes, notre orateur est hallucinant de mauvaise foi, une mauvaise foi s’annonçant comme la vraie foi. Il se met comme par hasard à dévaluer la Vierge Marie, le sacrement du pardon, les neuvaines, le purgatoire, le Pape, tout ça en continuant à chanter les louanges de Jésus et de la Bible : « Je crois personnellement que l’Antéchrist viendra de l’Église catholique. Je pense même que c’est le Pape François. » (2h34) Il qualifie Rome comme « Babylone la Grande » d’où émergera l’Antéchrist. Il est facile de voir que ce touche-à-tout religieux cache un orgueil de ne pas tout contrôler et de vouloir tout savoir (à travers une gnose bibliste pseudo exégétique). « Au départ, avant d’être vraiment et totalement en Christ, j’étais dans le catholicisme. Je priais Marie, je priais le Rosaire. Je faisais plein de choses comme ça. Je comprenais pas tout. Loin de là. C’est bien d’ailleurs parce que je ne comprenais pas tout que j’étais dedans. Et puis après, j’ai connu… Dieu m’a renvoyé vers les protestants : donc j’ai connu les églises évangéliques, pentecôtistes, adventistes, etc. J’ai tâtonné à droite à gauche. Et le Seigneur m’en a sorti aussi, pour devenir juste biblique, tu vois. Parce que j’ai vu qu’il y avait certaines hérésies. Alors c’est important d’être entouré de chrétiens, mais parfois c’est dur de se concentrer et d’être entouré de certaines hérésies. » Fait qui n’est absolument pas anodin : Morgan Priest remet en cause, à la fin de son topo, l’humanité divine de Marie, en prétendant qu’elle n’est que la mère humaine de Jésus, mais pas la mère de Dieu : « Marie n’est pas la mère de la partie divine du Christ. » (2h36) Il invalide les neuvaines à la Vierge devant un auditeur catholique qui lui assurait qu’il avait arrêté le tabac grâce aux neuvaines qu’ils avaient récitées. Il essaie de le décourager : « Les neuvaines, c’est pas biblique. Lis la Bible et tu verras. ». Comme par hasard, il récuse aussi l’existence du purgatoire (so protestant…). « C’est toujours un instrument de pouvoir, le catholicisme. Je ne dis pas qu’ils n’ont fait que des mauvaises choses, loin de là. Ils ont fait de très bonnes choses. Mais ils ont fait croire aussi qu’on pouvait avoir le Salut par les œuvres. » En somme, il ne croit pas en la responsabilité, en la liberté et en la collaboration active des Hommes dans l’œuvre de Salut divin donné par Dieu, ni aux actes de pénitence (qu’il confond avec les indulgences), ni même au sacrement de réconciliation : « Tu ne peux pas racheter tes péchés. Soit tu demandes pardon, et tu essaies de ne plus recommencer… mais c’est pas tes œuvres qui te sauvent. »

 

Son hypocrisie et son apostasie ne s’arrêtent pas là. Morgan Priest balance toutes ces contre-vérités pour, juste après, faire genre qu’il ne les a pas dites avec présomption, et en soutenant qu’il n’est pas sûr de ce qu’il vient de dire. Il habille ses propos d’un vernis d’incertitude et d’humilité : « Tu sais, avec l’eschatologie, il faut être très très humble. Je me suis basé sur du factuel, avec des vidéos. Mais l’eschatologie, c’est très très délicat. C’est mon humble étude, encore une fois. Ne prends pas tout ce que je te dis pour argent comptant. Une seule chose est sûre : c’est que Jésus est notre seul Sauveur, il est le seul à pouvoir nous sauver. » Comme je l’ai déjà précédemment cité, « Je suis toujours mal à l’aise avec les grands hommes qui parlent trop d’humilité… » (Billy Stangby dans le roman Le Père Élijah (1996) de Jonathan O’Brien) Morgan Priest a la finesse de simuler qu’il ne prend pas la Bible au pied de la lettre, en proposant le second degré interprétatif de la métaphore et du symbolisme. Il a la prudence de ne pas s’annoncer comme le dépositaire d’une révélation divine privée qu’il possèderait à lui tout seul et magiquement. Monsieur le Curé dissident se fait généreux et discret : « Je ne suis pas prophète. Je ne suis pas gourou. » Même s’il annonce pleins d’événements du futur, il éteint sa présomption de visionnaire par un semblant d’humilité. Par exemple, concernant la date de la Parousie, il déclare : « Je n’ai pas la date. » C’est presque beau. Et on y croirait quasiment…

 

Ce qui est discrètement choquant chez Morgan Priest, c’est la contradiction entre son discours et les actes. Il dit que Dieu l’a sauvé et qu’il est un ancien sataniste… mais pourtant, il en conserve toutes les caractéristiques. Pendant le temps de conférence, il est saisissant de voir que parallèlement à la jovialité, le prêtre gothique a énormément de mal à écouter. Dans sa manière de s’exprimer, il adopte parfois un ton injonctif (quand il se dirige à son lecteur de la Bible, notamment) très surprenant, qui contraste avec sa douceur d’apparat. Pendant le temps des questions, on peut constater qu’il n’a pas de patience. Il coupe la parole à son auditoire. Mais personne ne semble s’en rendre compte.
 

De plus, il cite la Bible et le Christ, mais sa démarche n’est pas une démarche d’humilité et d’obéissance (à part d’obéissance littérale à la Bible). Il a l’air d’être centré sur le Christ qu’il annonce clairement comme Fils de Dieu et comme Dieu d’Amour. Mais il fait comme les protestants : il nie le corps ecclésial de Jésus qu’est l’Église catholique pour ne réduire Dieu qu’à sa tête (= Jésus).

 

Il met en garde contre les dangers du satanisme, du magnétisme, de la franc-maçonnerie, de la voyance. Du coup, il s’assure une solide couverture. Qui ira suspecter un type passant son temps à dire que le diable est suprêmement intelligent, de se laisser tromper par lui et de le servir ? Qui peut soupçonner un type prévenant les autres contre lui-même de s’attaquer lui-même ? Qui peut soupçonner un type affable et sympa, parlant super bien, s’annonçant comme un ex-sataniste et un ex-franc-maçon, de retomber dans ses anciens travers ésotériques et satanistes ? Personne. Et pourtant, lui-même finit par se comparer au diable. « Satan, il se déplaçait avec ses grandes ailes. Il était majestueux… comme moi ! Non, j’plaisante. » (2h01’30) Il déclare qu’il faut se méfier des faux prophètes et des gens qui se prennent pour Dieu (« C’est énervant de voir que certains se font prophètes. »)… mais c’est pourtant ce qu’il fait en s’habillant comme un prêtre, et en s’autoproclamant prélat par le choix de son pseudonyme ! Bref. Prudence, mes enfants, prudence. Les faux prophètes sont tellement rusés qu’ils sont capables de vous mettre en garde contre eux-mêmes pour s’innocenter à vos yeux.
 

 

h) Attaque ambiguë de l’Antéchrist contre l’Église catholique :

Antéchrist 13

 

Mais il serait complètement naïf de penser que l’œcuménisme de la Nouvelle Religion Mondiale épargnera les catholiques. Si dans un premier temps il leur fout la paix, ce n’est que pour mieux en pervertir certains, mieux croquer – en portions hachées – le reste, et faire en sorte qu’ils s’étripent entre eux pour ne pas avoir à faire la sale besogne. Cet œcuménisme fonctionne vraiment comme la « laïcité à la française » (= le laïcisme idéologique soixante-huitard), je trouve : il privilégie toutes les religions (Juifs, Musulmans, Bouddhistes, et même Protestants) à partir du moment où le catholicisme ne les dépasse pas, voire carrément SAUF le catholicisme. « ‘Toutes les religions sont les mêmes.’ Ils ne le disent pas comme ça directement, mais c’est le message. » (le Père Smith s’adressant à Élijah, dans Le Père Élijah, p. 440) L’œcuménisme du Culte Mondial, qui se veut pour un temps égalitaire, gentil avec tout le monde, reconnaissant et impartial, repose en réalité sur une haine profonde de la préférence religieuse, sur un refus de la primauté du Christ et de son Église catholique (primauté car l’Église catholique est le meilleur chemin de Vérité et a reçu l’entièreté de la Révélation divine), sur un mépris de l’universalité de l’Église (qui, parce qu’Elle est aimante, s’adresse à tous sans exception, sans rejeter personne), sur une haine anticléricale et antichristique féroce. « Les hommes avaient appris la leçon sociale du christianisme, mais en la séparant de son divin précepteur ; ou plutôt même, disaient-il, c’était malgré lui qu’ils l’avaient apprise. » (Le Maître de la Terre, pp. 293-294)

 

Alors vous vous en doutez un peu. Rusé comme il est, l’Antéchrist ne va pas s’en prendre au christianisme et à Jésus frontalement. Il va le diluer peu à peu dans la métaphore (de la Charité, de la spiritualité, de la prière, de l’Eau, de la Lumière, de la montagne, de la Parole, du Soleil, des petits oiseaux, du Cœur, des Larmes, de l’Amour, des bonnes intentions humanistes). Un peu comme dans les chansons du répertoire musical profane actuel (cf. la chanson « Dieu m’a donné la foi » d’Ophélie Winter, « Ma Prière » d’Axelle Red, « Bien après l’au-delà » de Sofia Essaïdi, « Ma Chance » d’Amel Bent) qui parlent de Dieu sans Le nommer. Dans un premier temps, c’est assez fou (et presque drôle si les conséquences sur le long terme n’étaient pas dramatiques) de se rendre compte qu’entre le discours spirituel de l’Antéchrist et le discours catholique officiel, il n’y a en apparence quasiment aucune différence… Pour vous montrer le ravissement subjuguant de la contrefaçon du « magicien » diabolique, je vais vous retranscrire un extrait du Maître de la Terre de Benson, où le Père Percy (le narrateur catholique) se retrouve au milieu d’une assistance qui chante un hymne maçonnique qui ressemble à s’y méprendre à certains chants chrétiens (… de Glorious ou Grégory Turpin). C’est à l’occasion du « 50e anniversaire du vote de la ‘loi des pauvres’ » : « ‘Seigneur, qui habites la terre et les mers…’ Madame Brand lut les vers suivants, composés avec un heureux mélange de zèle et d’adresse pour l’exaltation de l’idée humanitaire. L’hymne entier avait une allure religieuse ; un chrétien même, à la condition de ne pas trop réfléchir, aurait pu le chanter sans scrupule. Et pourtant sa signification était assez claire : c’était la substitution de l’homme à Dieu comme objet du culte. L’auteur y avait introduit jusqu’à des paroles du Christ, disant, par exemple, que le royaume de Dieu résidait dans le cœur de l’homme, et que la plus grande de toutes les grâces était la charité. » (pp. 72-73)

 

La religion-philosophie de l’Antéchrist sera même prête à rendre hommage à Dieu, à Jésus, en le nommant « Seigneur », ou même en citant la Bible (comme satan au désert) et les grands saints. « Ma seule paix, mon seul bonheur, mon seul amour, c’est toi Seigneur » (cf. la chanson « Ma Seule Paix » de Grégory Turpin et Natasha St-Pier). Elle rendra même, dans un premier temps, hommage au Pape en tant que personnage important pour le monde. Le problème, c’est qu’elle n’accepte pas que Jésus-Dieu se soit incarné en tout être humain et pleinement dans l’Église-Institution catholique. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, il est tout à fait possible (même si ce n’est pas souhaitable) de croire en Dieu et en Jésus et aux anges et même au Pape, tout en méprisant l’Humain. C’est subtil. Mais la contrefaçon de la misanthropie panthéiste (= individualisme protestant) nous pend au nez, d’autant plus si nous sommes croyants.
 
Il est possible de croire en Jésus et en Dieu et ne pas croire en eux
 

L’Antéchrist n’a aucun intérêt à éradiquer massivement ni dans l’immédiat tous les catholiques. Il ne connaît que trop bien la dangerosité des vrais et fermes serviteurs humains de l’Armée de Marie ! Et puis il a plutôt intérêt à les imiter, à leur offrir plein de cadeaux et à collaborer avec ceux qui parmi eux sont corruptibles, à s’infiltrer discrètement dans les paroisses et la Curie. Il a besoin de certains laïcs et clercs pour créer la division interne (dont je vais parler dans le chapitre suivant) : « Ils [l’Antéchrist et ses agents] essaient de gagner à leur cause tous les joueurs possibles dans le monde des arts, de la politique ou de la religion. Ils tentent une entière reconfiguration de la culture mondiale. Une grande partie de leur travail est déjà accomplie. Bien sûr que vous êtes important pour eux ! » (le Cardinal Stato s’adressant au prêtre Elijah, dans Le Père Elijah, p. 207) ; « Le président a dit que malgré votre religion vous étiez une personne aux qualités exceptionnelles et pouviez contribuer à quelque chose de valeur pour le nouvel ordre. […] J’ai compris qu’il vous détestait et cependant voulait vous utiliser pour quelque chose. » (Anna Benedetti s’adressant à Élijah, idem, p. 394) La Nouvelle Religion Mondiale, avant de faire tomber son masque, va respecter, et même défendre en apparence le Pape, les cathos, la foi, Jésus (en tant que personnage historique « marquant pour beaucoup de gens ») et les lieux de cultes cathos : cf. Alain Juppé ou Éric Zemmour qui soutiennent les « racines chrétiennes » de la France et de l’Europe, les ministres francs-maçons Bernard Cazeneuve et Claude Bartelone qui viennent inaugurer la Cathédrale de Créteil ou se montrer aux États Généraux du Christianisme à Strasbourg, Manuel Valls qui souligne à l’occasion de la tentative d’attentat de Villejuif que le respect du culte catholique est important et touche au cœur du patrimoine culturel et spirituel de la République, etc. Ça ne coûte pas grand-chose de cirer les pompes des évêques ou du Pape. À partir du moment où ils nous laissent les dominer ! D’ailleurs, le Pape François fait en ce moment symboliquement son entrée triomphale des Rameaux dans Jérusalem, en bénéficiant d’un capital sympathie de la part des journalistes du monde entier… un œil bienveillant qui risque de se fermer assez vite.
 

Pourquoi je me méfie de la sympathie pro-catholiques du Gouvernement Mondial ? Tout simplement parce qu’elle n’est pas entière (elle est mêlée à une jalousie, un cynisme, une méfiance, un mépris qui crèvent les yeux), et que peu à peu le nom de Jésus est zappé. De plus en plus dans les discours officiels, l’Église catholique est reléguée au statut de « patrimoine culturel intéressant », et rangée sur l’étagère du supermarché spirituel au rayon frais en tant que « religion comme une autre »… ET, implicitement, en tant que « religion aussi absurde et plus dangereuse que les autres » ! Dans Le Père Élijah, par exemple, l’Antéchrist traite le catholicisme de « religion simpliste » (p. 418) : « Dans l’un de ses livres, le président dit que toutes les religions sont seulement des mythologies incomprises. C’est pour cela qu’il peut vous envoyer des cadeaux, comme s’il n’y avait pas de contradiction entre ses croyances et la nôtre. » (p. 160) La sympathie catho friendly des suiveurs de l’Antéchrist est purement tactique, scrupuleusement calculée, comme l’illustrent les propos du Cardinal Stato au frère Élijah dans Le Père Élijah : « Nos autocrates ne sont pas des tyrans vicieux. Ce sont les architectes du pouvoir mondial, et ils manipulent toutes les ressources de la psychologie moderne pour contrôler l’âme de l’homme et en faire un instrument à leur service. En un sens, ce sont de rigides puritains. Mais ces puritains font le mal froidement, motivés par ce qui leur semble être les plus grands idéaux. » (p. 432)
 

Une fois qu’aura sonné le glas du dernier grand soubresaut de la Jesusmania et de la Papemania (qui descendront aussi rapidement qu’elles sont montées médiatiquement : à mon avis, les JMJ 2016 devraient être cet ultime soubresaut), Jésus risque même d’être très vite présenté par l’Antéchrist et le Gouvernement Mondial comme l’« idiot utile » des guerres de religions qui auraient défiguré l’Humanité depuis vingt siècles, de passer pour le méchant, le satan en personne. Il faut savoir que la Religion Mondiale, de type prométhéen, oppose un « Dieu Civilisateur », ami des hommes, à un « Dieu Tyrannique », auteur du Déluge et identifiable au Dieu de la Bible. En réalité, satan veut faire croire que Dieu est un tyran qui craint de perdre son pouvoir si les hommes accèdent à la Connaissance. La notion de Bien et de mal gêne visiblement l’Antéchrist : c’est pourquoi il la détourne en enjeu de connaissance des lois de l’Univers, qui accroîtra le pouvoir de l’Homme et lui permettra de se faire Dieu (comme nous l’avons étudié dans le précédent chapitre).
 

Le Nouveau Culte Mondial, après avoir trouvé la foi catholique « mignonne », « touchante » quoiqu’un peu kitsch, va très très hâtivement la transformer en superstition dangereuse et orgueilleuse à éradiquer. Pour le Nouvel Ordre Mondial, il est hors de question de laisser l’Église catholique vaquer tranquillement à ses occupations d’évangélisation et créer de nouveaux « malades ». « La récente encyclique démontre que l’Église de Rome s’attache à maintenir une sorte d’autorité absolue sur la conscience, ce qui nie le concept de liberté personnelle et contredit les objectifs déclarés de l’encyclique. » (une passagère de l’avion que prend Élijah, gagnée à la cause de l’Antéchrist, dans Le Père Élijah, p. 25) ; « Ils [les progressistes antithéistes] veulent que l’Église fasse des excuses publiques aux Musulmans pour les croisades, aux Chinois pour nos missionnaires, aux Indigènes pour la conversion du Mexique, et cetera. Il y a encore un tas de coulpes à battre ; à peine visible derrière tout cela, il y a un mépris pour l’appel évangélique de l’Église. » (le Père Smith s’adressant à Élijah, idem, p. 440) L’Antéchrist et ses adeptes entendent « réformer l’Église de l’intérieur » (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie, p. 155) : « Il s’agit de ramener le catholicisme à la seule loi de la Raison. » (idem).

 

En plus de cela, le Pape est vu comme un obstacle à l’Unité de l’Œcuménisme interreligieux promue par l’Antéchrist (un œcuménisme qui ne veut pas faire de différences entre les cultes, ni de favoritisme en plaçant l’Église catholique au-dessus des autres) : « Le docteur Félix von Tilman, ancien prêtre et actuel directeur de l’Institut d’études religieuses et politiques de Gaia, appelle à ‘l’œcuménisme profond’. Il affirme qu’il y a un consensus parmi les théologiens selon lequel le Pape accorde trop d’importance au concept de vérité absolue au détriment d’un dialogue entre les religions du monde. » (Le Père Élijah, p. 25) L’Antéchrist sous-entend que le Pape serait comme un vieux poisson dans son bocal romain qu’il vaudrait mieux laisser mourir de sa belle mort : « Le président sourit brusquement : ‘Vous avez un proverbe : le Pape est le prisonnier du Vatican.’ S’il vous plaît dites-lui que moi aussi je suis prisonnier – le prisonnier de la civilisation. » (l’Antéchrist s’adressant à Élijah, et trouvant un prétexte pour ne pas se déplacer vers le Pape, idem, pp. 144-145) Le Souverain Pontife est ridiculisé par les mass médias qui le font passer pour un sénile : « Les médecins déclarent le Pape incompétent. » (p. 371) Pire que ça. Comme il est gentil et bon tout en étant supposément dangereux, il est très vite présenté comme un imposteur, comme l’Antéchrist en personne, qui a caché perversement son jeu depuis le départ ! Dans son opuscule Lux in Tenebris (littéralement « La Lumière dans les Ténèbres »), Comenius, précédemment cité, révéla son objectif ultime : « Le Pape est le grand Antéchrist de la Babylone universelle. La Bête à tout faire de la courtisane, c’est l’Empire Romain (Germanique) et spécialement la Maison d’Autriche. Dieu ne tolèrera pas longtemps ces choses ; bien mieux ; il détruira le monde des impies dans un déluge de sang. À la fin de la guerre, la Papauté et la Maison d’Autriche seront détruites. Cette destruction sera le fait des nations fatiguées de leur despotisme. » (Comenius, cité dans Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie, de Jean-Claude Lozac’hmeur, p. 116) On sait que l’un des résultats de la Première Guerre mondiale fut précisément la destruction de l’Autriche-Hongrie. Quant à la crise actuelle de l’Église Catholique, elle sert trop les projets des Initiés maçonniques pour être due au hasard. En décembre 1958, l’UNESCO célébrait avec éclat le troisième centenaire de la publication des œuvres pédagogiques complète de Comenius, qui est l’une des figures de proue de la Franc-Maçonnerie mondiale (quand même !). Je souligne au passage que la Franc-Maçonnerie est à l’origine de toutes lois anticatholiques votées et appliquées en France sous la Troisième République, à savoir : le décret proscrivant les congrégations enseignantes non autorisées (1880), l’expulsion des ordres religieux (1881), la création de l’école gratuite, obligatoire et laïque (1882), le rétablissement du divorce en 1884 (alors qu’il avait été supprimé en 1816 sous Louis XVIII lors de la Restauration), la suppression des congrégations (1904), la séparation de l’Église et de l’État (1905). Et cela continue aujourd’hui avec les lois sur l’avortement, la contraception, l’union libre, l’homosexualité et déjà l’euthanasie et le clonage humain. La Franc-Maçonnerie travaille activement à la progressive « divulgation du complot catholique » (Le Maître de la Terre, p. 255)

 

Globalement, les « athées » autoproclamés de l’Antéchrist partent du principe que l’Église catholique est trop clivante : « Songez comme le christianisme a échoué, comme il a divisé les nations. » (Mabel dans Le Maître de la Terre, p. 126) ; « Avec ses copains, Von Tilman condamne les organes de la religion institutionnelle comme étant les vrais monstres de l’Histoire. » (Le Père Élijah, p. 40) L’Église de Jésus serait terroriste. Elle aurait traumatisé des générations et des générations avec cette histoire obscurantiste et moyen-âgeuse du « mal », du « diable », du « péché », de l’« enfer », pensez-vous ! « Et l’enfer : comment avez-vous jamais pu croire à cette chose horrible ? Rendez-vous compte que cette religion d’autrefois n’était rien qu’un odieux cauchemar ! » (idem, p. 127) Elle ne ferait pas assez corps avec l’Ensemble Cosmique que veut réunir l’Antéchrist : « Il n’y avait au monde qu’une seule religion dont l’existence fût dangereuse, par la prétention qu’elle manifestait à une autorité universelle : la religion catholique. Les sectes de l’Orient, dont chacune gardait son individualité propre, n’en avaient pas moins trouvé, dans l’Homme nouveau, l’incarnation de leur idéal, et, par conséquent, s’étaient soumises à la suprématie du grand corps total dont il était la tête. Mais la religion catholique, elle, avait pour essence la trahison contre la véritable idée de l’homme. […] Les catholiques, délibérément, se retranchaient de ce corps total. Ils étaient comme des membres morts, se soumettant à la domination d’une force extérieure autre que celle qui aurait pu les faire vivre ; et, par cet acte même, c’était le corps tout entier qu’ils mettaient en danger. Le refus des chrétiens de puiser leur vie à la source commune, voilà quel était leur crime ! » (Le Maître de la Terre, pp. 329-330)

 

En plus, la Nouvelle Religion Mondiale trouve depuis un bon bout de temps l’Église trop sexiste, machiste et misogyne. Il ne faut pas perdre de vue que, selon les libertaires, Dieu n’a pas de sexe (Jésus ne compte pas !) ou bien Il est tous les sexes et aucun à la fois puisqu’Il serait un ange de lumière (= Lucifer). Les adeptes du New Age développent depuis toujours le « mythe pansexualiste du ‘féminin sacré’ » (Monseigneur André Léonard, Les Raisons d’espérer (2008), p. 93). « Dieu est une femme lesbienne noire ! » Mais bien sûr…
 

Autre point dogmatique qui « incrimine » les catholiques. Pour l’Antéchrist et sa religion, le pardon n’existe pas, puisqu’il fait injure à la raison et à la « vérité » objective qu’est le réel physique et surnaturel, puisque la culpabilité ne doit pas exister, et que le mal ou le Bien sont des créations du « vieux » christianisme ! : « Ce pardon, nous l’avons tous, puisque nous savons décidément que ce qu’on appelle péché n’existe pas ! Et puis, il y a la communion. Vous vous figuriez qu’elle vous faisait participer à Dieu : eh ! bien, nous participons tous à Dieu, par le seul fait que nous sommes des êtres humains ! Ne voyez-vous pas que votre christianisme était, simplement, une manière d’exprimer tout cela ? Je veux bien que, pour un temps, c’ait été l’unique manière : mais maintenant, il n’en est plus ainsi !’ » (Mabel dans Le Maître de la Terre, 126) ; « Il y avait quelque chose d’infiniment supérieur au repentir : la connaissance des crimes dont l’homme était capable, et la volonté de mettre à profit cette connaissance. » (Conviction des francs-maçons exprimée dans Le Maître de la Terre, p. 279)
 

Les conséquences pratiques des désaccords et des reproches que l’Antéchrist et ses suiveurs font à l’Église catholique, ce sont bien sûr les persécutions (aussi appelées dans le jargon eschatologique « les Tribulations » ou « La Dernière Passion du Christ »). Et celles-ci s’opèrent d’ailleurs toujours pour d’excellentes raisons : au nom de la justice et même de la sainteté et de la charité. « Pour assurer la sécurité de la sainteté de l’existence humaine » (Le Maître de la Terre, p. 255) L’Antéchrist et ses agents athées prônent un assainissement mondial, une épuration ethnique et religieuse complète (cf. le malthusianisme évoqué plus haut) : « Il y a deux problèmes majeurs dans le monde actuel. Le premier, c’est qu’il y a trois milliards d’habitants en trop sur cette planète et faut qu’ils dégagent. Le second problème, c’est l’Église catholique romaine. Et faut qu’elle dégage. » (le jeune Américain, dans Le Père Élijah, p. 23) ; « Votre Église est le seul obstacle pour faire de cette planète un lieu sain. » (idem) ; « Le sempiternel rôle du théologien est révolu. » (p. 24)
 
persécutions
 

Elles se traduisent comment, sur le terrain, ces persécutions ? Par exemple, dans le roman Le Père Elijah d’O’Brien, les protagonistes catholiques sont obligés de se cacher, ils sont surveillés de partout. Élijah, notamment, rencontre le Cardinal Draco dans les catacombes (p. 351) pour ne pas être écouté. « Nul endroit n’est sûr pour des gens comme nous. » (p. 30) lui avoue un de ses confrères prêtres, Billy Stangby. On déplore des « incidents anticléricaux dans la campagne » (p. 383) mais surtout en ville. Élijah est obligé de s’expatrier en Terre Sainte pour sauver sa peau.
 

Dans le roman d’anticipation Le Maître de la Terre (1905), l’Antéchrist planifie une vaste « entreprise de purification » (p. 267) du catholicisme, l’« extermination finale et complète de la peste catholique » (p. 268). Les persécutions anti-cathos sont marquées (c’est logique) par la grande absence de Felsenburgh au moment des forfaits : « Il se livrait au repos et à la méditation dans sa mystérieuse retraite d’Orient. » (p. 269) Comme Ponce Pilate, l’Antéchrist délègue le massacre des chrétiens à son peuple et livre les grandes villes aux mains des athées. « Le Nouveau Peuple en majuscules énormes, affirmait que ‘la ville de Londres était enfin purifiée de tout vestige de l’ignoble et malfaisante superstition de la croix’. » (p. 266) ; « À présent, pas un seul édifice, à Rome, ne restait debout. » (p. 267) Aux yeux des contemporains de l’Antéchrist, l’Église catholique est un vestige de l’obscurantisme, « une preuve de l’hostilité irréconciliable de la superstition contre le progrès » (p. 144). Benson a imaginé dans sa fiction romanesque l’existence d’un « recensement » (p. 351) nommé « le décret nouveau » (p. 351) ou « loi de probation » (p. 378), qui consiste à décerner à chaque être humain un « certificat cultuel » (p. 265) qui le classifie dans telle ou telle communauté de croyances. C’est le rejeton de l’étoile jaune des Juifs des camps nazis, ou encore du triangle rouge pour les cathos et les protestants. Bien entendu, l’issue de ce fichage confessionnel n’est pas clairement dévoilée, mais c’est la mort : « Tous les hommes vont être interroger sur leur croyance en Dieu, et tués s’ils avouent leur croyance. » (Mabel interrogeant son mari Olivier, dont le silence vaut acquiescement, p. 334) À la fin du roman, le Gouvernement Mondial lance carrément son aviation et ses bombes sur la ville de Rome pour l’assiéger et la détruire : il est question de l’« expédition des aériens vers Rome » (p. 255), « des églises incendiées, des catholiques traqués, des corps de l’enfant et du prêtre portés par les rues, de la destruction des églises et des couvents » (p. 259). La violence de la réponse du Gouvernement de l’Antéchrist contre les Chrétiens va même finir par poser un cas de conscience passager à ses suiveurs, qui seront partagés entre le détermination à demeurer dans « leur fidélité à leur foi humanitaire » (p. 258) et « leur haine de ces crimes commis au nom de la justice ». Un mélange entre ténacité et dégoût. Robert-Hugh Benson décline la persécution gouvernementale anti-chrétienne en différentes phases historiques et formelles. « La persécution, dit le père Percy au Pape, est certainement en train d’approcher. […] Jadis, dans les premiers temps du christianisme, l’attaque de Satan s’était produite sur le corps, avec des fouets, et du feu, et des bêtes féroces ; au XVIe siècle, elle s’était produite sur l’intelligence ; au XXe siècle, elle avait eu pour objet les ressorts les plus intimes de la vie morale et spirituelle. Maintenant, il semble que l’assaut va être dirigé des trois côtés à la fois. Cependant, ce qui mérite surtout d’être craint, c’est l’influence positive de l’humanitarisme. […] La persécution, s’écrit Percy, doit être accueillie comme le salut, et demandée à force de prières ; mais il craint que les autorités, dans leur ruse diabolique, ne reconnaissent trop la manière de distribuer l’antidote avec le poison. Sans doute, il y aura des martyres individuels, et en très grand nombre : mais ceux-là auront lieu malgré les gouvernements, et non pas à cause d’eux. Enfin, Percy s’attend à voir, d’un jour à l’autre, l’humanitarisme revêtir le déguisement de la liturgie et du saint-sacrifice ; quand il aura réussi à obtenir l’adhésion des peuples pour ce déguisement sacrilège, c’en sera fait de la cause de l’Église, si Dieu ne consent pas à intervenir ! » (pp. 161-162) Je retraduirais en disant que cette persécution décrite par Benson descend davantage comme une foudre, par des attaques atomisées, isolées, presque invisibles (il nous parle par exemple de la « dispersion des catholiques irlandais, et çà et là, quelques exécutions individuelles et par petits groupes », p. 289) que comme une rafle massive. À noter que, à la fin du roman, le Pape trouve asile en Terre Sainte.
 

Dans le Court Récit sur l’Antéchrist de Soloviev, il ne reste suite aux persécutions plus que 45 millions de chrétiens sur toute la surface de la Terre. Petite note d’Espérance malgré tout : « Le catholicisme avait gagné en qualité ce qu’il avait perdu en quantité. La papauté avait depuis longtemps été chassée de Rome et, après avoir beaucoup erré, le pape avait trouvé refuge à Saint-Pétersbourg, à condition de s’abstenir de toute propagande dans la ville et à l’intérieur du pays. » (p. 169) ; « L’Église protestante ne comptait plus que des croyants sincères. » (p. 170) ; « Le petit reste des fidèles est repoussé au désert. » (Soloviev dans sa préface aux Trois Entretiens, p. 14)
 

Les persécutions, et l’entrée de l’Église Universelle dans la Passion du Christ, sont des réalités bibliques. Si vraiment nous nous disons catholiques et nous assumons pleinement notre foi, il y a fort à parier que le martyr soit incontournable pour nous, et dans un avenir très proche : « Tous les croyants sont potentiellement obligés au martyr. » (Erik Peterson, Essai sur l’Apocalypse (1935), p. 98) Joie ! Vous vouliez mourir utilement et héroïquement, mais vous ne saviez pas comment faire ni à quelle occasion ? Les opportunités ne manqueront pas !
 

Ça a le mérite d’être clair dans l’esprit de l’Antéchrist. Au bout du compte, « son projet est la démolition et la reconstruction complètes de la Maison de Dieu. » (Le Père Elijah, p. 39). Vous avez bien entendu : RECONSTRUCTION. Pas uniquement destruction, contrairement à l’idée reçue. « Il croit qu’il sauve l’Église, alors qu’il est en train de la miner et cela précisément à ce moment de l’histoire où nous aurions besoin de garder tous nos esprits. » (p. 40) Il nous faut – et ce n’est pas facile – entrer dans le paradoxe intentionnel de l’Antéchrist, cette sincérité QUI FAIT LE MAL POUR LE BIEN. Dans sa conférence sur le diable aux Cours Wojtyla (octobre 2015), le père Philippe de Maistre a très bien expliqué que le diable veut sincèrement « aider » Dieu à récupérer sa toute-puissance, à ne pas s’abaisser à l’Humanité, à retrouver sa grandeur et sa royauté d’avant la création des êtres humains et avant qu’Il ne partage « lamentablement » sa couronne avec eux (par son fils Jésus et sa fille Marie), en privilégiant les Hommes aux anges ! « L’homme du péché niera la divinité du Christ et s’élèvera lui-même à Sa place. » (Le Père Élijah, p. 188)
 

Selon Vladimir Soloviev, « l’Antéchrist croit en Dieu, mais surtout en lui-même. Il respecte le Christ, mais le considère comme un simple précurseur de l’ordre nouveau dont lui, le surhomme européen, va être le réalisateur » (Court Récit sur l’Antéchrist, p. 188). « Conscient de posséder en lui une haute force spirituelle, l’Empereur s’était toujours montré spiritualiste convaincu, et son intelligence ne manquait jamais de lui montrer la vérité de ce en quoi on devait croire : le bien, Dieu, le Messie. Il y croyait mais il n’aimait que lui-même. Il croyait en Dieu mais au fond de son cœur il ne pouvait s’empêcher de se préférer à Lui. » (Monsieur Z. dans Court Récit sur l’Antéchrist, p. 159)
 

L’Antéchrist, c’est vraiment l’antithèse de saint Jean-Baptiste. C’est l’annonciateur du Christ qui n’a pas l’humilité de Lui laisser la place, de s’effacer pour Lui. « En un mot, il pensait être ce que le Christ avait été en réalité. » (Court Récit sur l’Antéchrist, p. 159) ; « Initialement, il n’était pas non plus hostile à Jésus. Il reconnaissait Sa dignité et Sa signification messianique mais, sincèrement il ne voyait en Lui que le plus grand de ses prédécesseurs. » (idem) L’Antéchrist est le Messager qui, dans une fulgurante inversion, se substitue à la Bonne Nouvelle qu’il était chargé de délivrer : « La Mission du Christ consistait à annoncer et à préparer ma venue. » (p. 160) a-t-il le culot de prétendre à tous. Force est de constater que la manœuvre malhonnête et orgueilleuse de l’Antéchrist eus égard à Jésus, cette reconnaissance pro-christique mi-honorifique mi-condescendante, on l’observe à l’identique dans l’Islam : « Mahomet, par exemple, considérait ses rapports avec le Christ de façon semblable, et c’était un juste que l’on ne peut accuser de mauvaises intentions. Cet homme imbu de soi se préfèrera donc au Christ et le justifiera par le raisonnement suivant : ‘Le Christ fut le réformateur de l’humanité, mais moi j’ai pour vocation d’être le bienfaiteur de cette humanité en partie réformée et en partie irréformable. Je donnerai aux hommes ce qu’il leur faut. Le Christ, en tant que moraliste, divisait les hommes entre le bien et le mal ; moi, je les unirai par des biens qui sont tout aussi nécessaires aux bons qu’aux méchants. Je serai le véritable représentant de ce Dieu qui fait lever son soleil sur les justes et les pécheurs. Le Christ a apporté le glaive, j’apporterai la paix. Il a menacé la Terre du jugement dernier ; mais le juge dernier ce sera moi.’ » (idem, p. 160) Voilà. On l’aime bien, Jésus, au village/au bled ! On L’« estime » d’un « respect » jaloux et haineux.

 

L’Antéchrist ne s’oppose pas complètement à Dieu. Il réclame juste son initiale seconde place au Ciel ! Il ne veut que dégommer Jésus et devenir Lui. Et il le fera plutôt bien, d’un point de vue bassement terrestre, médiatique, quantitatif et instantané. Saint Cyrille de Jérusalem avait prédit que l’Imposteur « simulerait la prudence, la pieuse clémence et la philanthropie ». L’Antéchrist se reconnaîtra à ce qu’il prétendra clore l’histoire du monde et viendra congédier le christianisme, se comportera moins en païen qu’en post-chrétien. Ce n’est pas pour rien que Saint Hippolyte de Rome l’appelait « le Trompeur ». La contrefaçon a failli être parfaite. « La Franc-Maçonnerie n’est pas athée comme on pourrait le croire, mais bel et bien antithéiste. » (Jean-Claude Lozac’hmeur, Les Origines occultistes de la franc-maçonnerie, p. 125)
 
Christ croix
 

L’attitude de l’Antéchrist vis à vis de l’Église catholique suit un double moment : un rapprochement fusionnel puis une terrible trahison et tentative de meurtre. À l’image du baiser de Judas. Effectivement, l’Antéchrist « souhaite utiliser l’Église autant qu’il en a besoin, dit le Pape. Mais il la méprise, parce qu’il n’a jamais compris sa nature divine. Il ne comprend pas sa force. Il croit que c’est seulement une institution humaine. » (le Pape dans Le Père Elijah, p. 60) ; « Il n’est pas ouvertement contre nous, du moins pas encore, dit le Pape. Mais il se prépare. Il se pourrait qu’il y ait encore du temps. Il y a peut-être de l’espoir au-delà de l’espoir. Je n’appelle personne Antéchrist tant que son âme est suspendue dans la balance, tant qu’il est toujours libre de choisir le bien. Mais avec la plus grande certitude, je vous dis que ses idées évoluent dans le royaume de l’Antéchrist. » (idem, p. 61) ; « Il souhaite qu’il soit vu dans la presse mondiale qu’il ne va pas vers le Pape ; le Pape vient à lui. » (le Pape en parlant de lui-même à la troisième personne, idem, p. 60) Le pire, je trouve, c’est que l’Antéchrist fait croire que Jésus est jaloux de lui, pour ensuite rendre le Sauveur détestable aux yeux des Humains : « Il n’y a plus de lumière dans le monde sauf une, conclut le président hors de lui, celui qui est le porteur de lumière, l’ange de lumière qui a été mis à terre par la jalousie de Dieu ! » (le Président s’adressant à Élijah, dans Le Père Élijah, p. 529) Alors qu’en réalité, c’est lui qui est jaloux du Christ !

 

Je crois, pour finir ce chapitre sur les attaques du démon contre Jésus et les chrétiens, que le gros du litige qui sépare (qui a séparé) le diable du Christ, c’est la Croix de la Vérité, tranchante comme un glaive. « ‘Pensez-vous que Je sois venu porter la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais la division.’ Il est venu apporter sur terre la Vérité et, tout comme le bien, elle divise avant tout. » (Monsieur Z. dans Trois Entretiens, p. 114) En effet, dans le roman Le Maître de la Terre de Benson, un article de journal défendant la présidence mondiale de l’Antéchrist, présente Jésus comme le méchant diviseur parce que la Vérité qu’Il apporte est un glaive et non la paix mondaine : « ‘J’apporte non point la paix, mais un glaive !’ disait le Christ ; et l’on sait combien amèrement vraies se sont trouvées ces paroles. – ‘Je n’apporte pas un glaive, mais la paix !’ est la réponse, enfin nettement formulée, de ceux qui ont définitivement renoncé à suivre le Christ, ou qui jamais n’ont accepté de le suivre. Les principes d’amour et d’union de notre Occident a appris à comprendre et à appliquer, durant le siècle passé, ont maintenant été adoptés aussi par l’Orient. Il n’y aura plus d’appel aux armes, mais à la Justice ; les hommes ne s’adresseront plus à un Dieu qui s’obstine à se tenir caché, mais bien à l’Homme qui a appris sa propre divinité. Nous allons déférer tous nos actes, toutes nos paroles, et toutes nos pensées au Tribunal de l’Amour et de la Justice. Tous les codes auront à être détruits, toutes les barrières à être renversées. Chaque parti devra s’unir avec l’autre parti, chaque nation avec l’autre nation, et chaque continent avec l’autre continent. Rien ne subsiste plus de l’ancienne peur qui pesait sur nous ; nous n’avons plus à craindre ni les dangers de la vie présente, ni ceux d’une soi-disant vie future, dont l’appréhension a paralysé toute l’activité des générations précédentes. » (p. 121) L’Antéchrist n’a pas compris que la seule paix véritable n’est pas l’absence de combat ou de guerre, mais au contraire la Paix du Christ, et donc précisément un combat au service du Christ : « Je vous donne MA Paix. Non pas celle qui vient du monde, mais celle qui vient de mon Père qui est aux Cieux. » dit Jésus.
 
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L’Antéchrist rêve d’une paix factice. Une paix aseptisée telle que la conceptualise comme par hasard l’OTAN, dont le slogan est exactement le même que la réaction qu’auront les gens juste avant l’arrivée du Christ au Jugement Dernier, réaction prédite dans la Première Épître de saint Paul aux Thessaloniciens : « Paix et Sécurité » L’Agent de satan croit en une vérité gentillette, désincarnée, peu exigeante, diffuse partout, sans forme, ne séparant rien, une vérité qu’il distribuerait égalitairement à tous et selon son bon plaisir… parce que, bien entendu, il veut être le principal à distribuer les cartes. Par exemple, dans le Court Récit sur l’Antéchrist de Soloviev, la « Ligue Universelle pour la Paix » (p. 167) impose sa bien-pensance pacifiste à la Terre entière : le mot « guerre » est même banni. L’Antéchrist, via son livre ésotérique La Voie ouverte vers la paix et la prospérité universelle récolte un franc succès car il propose un idéal enthousiasmant qui n’impose aucun renoncement à soi. Il oriente l’Humanité vers des sommets pacifiques auxquels chacun peut avoir accès de plain-pied, sans devoir corriger ses erreurs. Partout, dans ce livre étonnant, les valeurs chrétiennes ou évangéliques sont reconnues et honorées, mais d’une manière telle que chacun peut s’y reconnaître, car leur mise en forme est strictement universelle et correspond aux idéaux de la raison humaine. Certes, quelques chrétiens protesteront, en faisant remarquer que, dans ce livre qui consacre les valeurs chrétiennes (avec plein de belles « leçons de vie »), jamais le nom du Christ n’est mentionné. Mais les chrétiens plus éclairés les feront taire. « Jusqu’ici on a trop parlé du Christ ! Mieux vaut aujourd’hui le protéger d’un zèle excessif. L’essentiel n’est-il pas que les valeurs fondamentales du christianisme soient présentes dans l’ouvrage ? » L’Antéchrist se targue d’être plus gentil, plus pacifique, et moins exigeant que Jésus. Et son maître, satan, a eu au moins le mérite de ne rien lui demander, de ne pas lui imposer la souffrance, la mort, ni une quelconque Croix : « Je t’aime et je ne te demande rien. Je n’exige rien de toi. Par amour pur et désintéressé pour toi, je t’aiderai.[…]Dieu a demandé le sacrifice de la croix, moi, je ne te demande rien, je te donne tout, reçois mon esprit. » (le diable s’adressant à l’Antéchrist, idem, p. 162)
 

Justement, dans les deux opus de Vladimir Soloviev (les Trois Entretiens, suivis du Court Récit sur l’Antéchrist), une grosse partie des débats se concentre autour de la question de la légitimité de la guerre, voire la sainteté de la guerre, précisément au moment où le monde voudrait bannir toute guerre et la diaboliser. « Nous ne voulons que du Pain ! Pas de la Coupe ! Nous ne voulons que de l’Amour ! Pas de l’Épée ! » Chez Soloviev, le personnage du Prince, qui est le doublon de l’Antéchrist, se dit pacifiste et anti-guerres… et c’est pourtant le plus prétentieux et le moins amoureux de la Vérité de tous les convives qui entourent la Dame. Car au fond, il refuse la juste guerre qu’est le don entier de soi. Les autres protagonistes des Trois Entretiens, au contraire, font d’abord le constat amer du désamour mondialisé des êtres humains à l’encontre de la guerre… désamour qui annonce la fin des temps, la démission suicidaire de l’Homme face à Lui-même, et l’émergence d’une Troisième Guerre Mondiale dramatique pour l’Humanité (Car en effet, que vaut la vie humaine sans combat, et sans combat pour Jésus, pour l’Amour ? que vaut le monde s’il ne se bat pas pour sa culture et pour tous les êtres humains sans exception, y compris les plus fragile ? Où est la croissance de l’Homme et son bonheur, sans challenge, sans sacrifice, sans effort, sans renoncement, sans Croix ?) : « La guerre revêt un caractère nouveau : l’absence d’effusion de sang » (l’Homme politique, p. 81) ; « Le duel ainsi que la guerre sont rangés définitivement dans les archives de l’histoire. La civilisation authentique qui exige la complète disparition de toute bagarre entre hommes et entre nations. En tout cas, la politique de paix est le critère et le symptôme de progrès de la civilisation. » (idem, p. 105) ; « La période militaire de l’histoire a pris fin, en Russie comme partout. Partout la guerre a été à un certain moment le moyen principal et inévitable de protéger et de consolider l’existence de l’État et de la nation, et partout, ce but ayant été atteint, elle perd son sens. Demain la guerre n’aura plus de sens nulle part. Il est remarquable qu’à mesure qu’elle perd sa signification pratique, la guerre perd aussi, quoique lentement, son auréole mystique. » (idem, p. 71) ; « Je suis convaincu que la guerre n’est pas le mal absolu, et que la paix n’est pas le bien absolu, ou, simplement, qu’une guerre bonne demeure tout aussi possible qu’une paix mauvaise. » (Monsieur Z., p. 29) Ne serait-ce que parce que le mal existe et qu’il fait souffrir, il mérite, selon Soloviev (et selon son double narratif, Monsieur Z.), que nous luttions pour le combattre, que nous rentrions en guerre. Il nous faut « résister au mal par la force » (p. 187) soutient Monsieur Z.. Sans ça, il ne disparaîtra pas. C’est un devoir divin, une vocation noble et nécessaire, de « résister violemment au mal » (idem). À travers la figure du Général, Soloviev défend le constat particulièrement vérifiable que tous les saints, quand ils ne sont pas moines, sont soldats ! Il est question de « sainteté militaire », de « sainteté soldatesque » (p. 72). La Guerre, du point de vue de Soloviev (que je partage !), est une affaire de Salut ! Pas de manichéisme polarisant la méchanceté d’un côté et la gentillesse de l’autre. Jésus ne possède-t-il pas lui-même une armée ?
 
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i) Schisme dans l’Église catholique (trahison interne) :

Pape François
 

Les catholiques n’y sont absolument pas pour rien dans les persécutions qu’ils « subissent ». Car, comme je viens de le démontrer, l’Antéchrist parvient à utiliser leurs désunions pour les dresser les uns contre les autres, et les désorienter encore plus. Ce qui signifie donc qu’il y a des traîtres parmi eux (pour ne pas dire parmi tous les catholiques, puisque nous sommes tous pécheurs !), et qu’il a un schisme réel, larvé et à mon avis déjà bien consommée dans l’Église catholique même. « Les ennemis extérieurs ne sont qu’une partie du problème. Il y a des problèmes à l’intérieur de la Maison de Dieu. » (le père Billy Stangby dans Le Père Élijah, p. 30) Rien qu’à voir le positionnement des catholiques actuels par rapport à l’Union Civile, je suis bien placé pour me rendre compte que peu obéissent et comprennent vraiment l’Église catholique par rapport à ce seul sujet, pourtant crucial, de l’homosexualité, et finalement aussi du célibat consacré.
 

Ce schisme ecclésial étant tactique et honteux aux yeux des catholiques mêmes (oui, c’est « légèrement » humiliant de découvrir que l’Ennemi satanique est à l’intérieur de sa propre famille), on n’en sait pas grand-chose. On ne soupçonne pas son existence. Un schisme ? Où ça ? C’est ridicule, voyons ! Le dernier Synode sur la Famille (octobre 2015) a noyé le poisson à ce sujet, souri et joué l’unité familiale, pour sauver médiatiquement la face et ne pas prêter le flanc aux attaques extérieures du monde, à l’affût de la moindre faille. Idem pour pendant l’assemblée plénière de la Conférence des Évêques de France en novembre 2015 à Lourdes.Le Gouvernement Mondial, de son côté, par ignorance et surtout par calcul, attend que l’Église implose petit à petit d’Elle-même à cause d’une désunion interne qu’Elle refuse de voir : « L’Église clandestine subit une terrible persécution, mais seul un filet de nouvelles à ce sujet nous parvient. Pendant ce temps, il y a un flot d’interviews de Vettore à propos de l’Église patriotique. » (Le Père Élijah, p. 431) La conclusion papale du Synode laisse pantois : « C’est la fin d’une Église qui juge. » Eh ben les amis, on est cuits dans pas longtemps… Et ce n’est pas la création du Dicastère (qui ne « dit qu’à se taire ») qui va reporter l’échéance et changer quoi que ce soit, à mon avis. Les lots de consolation, ça ne sert à rien quand on n’identifie pas le chagrin et ses causes.
 
dicastère
 

Dans un très prochain temps, beaucoup de catholiques et de prêtres, même fervents, vont tourner le dos à Jésus pour Lui préférer son image « sympa » et/ou « stricte » incarnée par son jumeau l’Antéchrist (même s’ils continueront, pour un temps, à l’appeler « Jésus »). Car en effet, deux courants internes dans l’Église s’opposent à Jésus, au Pape et aux gardiens du Magistère (et même s’ils n’aiment pas se l’entendre dire, il s’agit en fait du même camp) : 1) les conservateurs – frange pharisienne, fondamentaliste, rigide, trouvant Jésus trop gentil, trop laxiste, et le Pape trop convivial – et 2) les progressistes – frange mondaine, idéaliste, émotionnelle, sentimentaliste, trouvant Jésus trop radical et dogmatique et le Pape trop doctrinal. Et pour couronner le tout, 3) s’ajoute au bal de la conspiration progressisto-conservatrice le clan (nombreux !) des pondérés, c’est-à-dire des langues de bois tièdes et suiveuses, des « François Bayrou ecclésiastiques » secrètement très critiques et très râleurs, soi-disant centristes, modérés et confortablement installés dans ce qu’ils appellent le « juste milieu », clan qui en réalité a les dents qui rayent le parquet et qui attaquera en traître le Pape pour le renverser au moment opportun. Dans le roman Le Père Élijah, celui qui incarne la fourberie de ces modérés mi-progressistes mi-traditionnalistes, c’est le cardinal franc-maçon Vettore. À propos de ce dernier, Billy Stangby prévient qu’on ne sait pas par où il va dégainer… mais ce qui est sûr, c’est qu’il va dégainer ! « Tu serais incapable en parlant de lui, ou en lisant ses publications, de dire s’il est libéral ou conservateur. Le résultat c’est qu’il est considéré comme un modéré. » (p. 168) Contrairement aux prévisions des « tradis » de l’Église catholique, qui actuellement préfèrent ne voir le danger du schisme que du côté qui les arrange (à savoir le modernisme : ce loup pratique qui fait diversion) et pas de leur côté (bien évidemment !), la scission dans la famille catholique s’annonce plutôt, à mon avis, par la voie de la tiédeur des centristes et de la soif de « vérité » (sans Charité) des conservateurs. Ces traditionnalistes, tirant la couverture à eux au nom de la conservation/application scrupuleuse de la Sainte Doctrine, sont la résurgence post-moderne des juges et des vieux scribes qui ont voulu recadrer Jésus à son époque, le faire disparaître, et qui veulent maintenant mater la joyeuse spontanéité du Pape François : « Quelques-uns de mes amis aux États-Unis ont rejoint les schismatiques. Ils croient que plus vous êtes conservateur, plus vous êtes orthodoxes. Ils sont plus catholiques que le Pape. » (Le Père Élijah, p. 436) Vlan pour Civitas ! Vlan pour la réacosphère « catholique » ! Et vlan pour les cardinaux modérés carriéristes ! L’aile conservatrice et modérée compte punir le Pape François à ses yeux trop « communiste », « environnementaliste », « pastoral et pas assez doctrinal ». Et ce règlement de comptes s’annonce MASSIF, les gars. « Il faut s’attendre à ce que 99% des prêtres et moines se déclarent pour l’Antéchrist. » (Vladimir Soloviev dans une lettre de mai-juin 1896 à Eugène Tavernier)

 

Jonathan O’Brien se veut à peine plus rassurant que Soloviev dans Le Père Élijah. Quand le frère Élijah demande au Cardinal Stato si « l’infestation » démoniaque est « considérable » au Vatican, et dans quelles proportions, ce dernier lui répond : « Ce n’est pas un groupe très important, probablement une douzaine de cardinaux et autant d’évêques. » (p. 201) Élijah demande alors des précisions : « Des ennemis personnels du Pape ? » Le Cardinal rajoute : « Deux ou trois disent du bien de lui. » Ça fait une petite moyenne ! en plus d’un bel euphémisme. Stato laisse entendre que certains prélats trahissent le Pape non par réelle malveillance mais par ignorance, négligence et manque de recul sur les dangers. Pire : par un optimisme que je qualifierais personnellement de « façade Famille Chrétienne ».
 
Synode pour rien
 

Certains cardinaux, « séduits par une magnifique vision de l’avenir – une vision spirituelle », une positive attitude en quelque sorte, « n’ont pas reconnu le péril » (p. 202) Le vieillissement couplé au choc des générations et des cultures n’aidant pas certains cardinaux âgés à affronter sereinement et courageusement l’accélération réelle de la libéralisation des mœurs à échelle mondiale et à oser l’adaptation aux questions nouvelles (sur l’homosexualité en particulier, mais aussi sur le célibat), toute une partie de la Curie Romaine freine des quatre fers pour ne pas voir que le bateau catholique est objectivement menacé, voire qu’il coule. Elle surjoue le soulagement. Elle n’ose pas le défaitisme et pense que l’immobilisme – avec le discours familialiste et nataliste de bon aloi –, le profil bas, les compromissions et la langue de bois, colmateront les brèches. Le diable profite de l’optimisme arbitraire et scolaire du Vatican pour prendre le Clergé au dépourvu et en péché de peur niée. Et rien de pire, quand il y a des urgences et des problèmes pressants à régler (l’hétérosexualité en était un, l’homosexualité également), que de ne pas les nommer et de continuer à faire comme s’ils n’existaient pas. Rien de pire que les faux effets d’annonce et l’esquive. Car dans un premier temps, c’est sûr que ça rassure. Mais après, la blessure cachée gangrène… et c’est là que l’amputation importante arrive. Le réveil du Synode d’octobre 2015 risque d’être très violent quand le Clergé va se rendre compte que la « Théorie du Genre » cachait l’hétérosexualité, que le dossier des divorcés-remariés servaient de paravent médiatique au traitement de l’homosexualité, que le mariage et la famille prenait la place du célibat consacré. Déjà, rien que lorsque vous voyez la mention du mot « hétérosexualité » ou du mot « espoir » dans les textes, vous pouvez vous dire que ça pue le diable et que rien n’a été réglé ! Le Pape François a choisi la « sagesse » et la « tendresse » (moi, je dirais plutôt la peur). Il est donc fortement prévisible qu’il soit éjecté pour « trop consensuel », pour « mollesse » et pour « refus d’évoluer ». Et cela, par les conservateurs comme par les progressistes comme par les modérés. Le Vatileaks de 2012, à côté, c’est de la rigolade !
 

Dans Le Maître de la Terre de Robert-Arthur Benson, il est carrément question d’ « abjurations d’évêques », d’« apostasies » de la part des cardinaux qui continuent pourtant de revendiquer leur statut sacerdotal… donc ils ne seront pas vus et ne se considèreront pas comme « apostats » ni « traîtres » ! Attention. L’apostasie n’est pas nécessairement consciente d’elle-même. Selon Soloviev, les suiveurs de l’Antéchrist se disent « intellectuels », « chrétiens » : « Ils nomment évangile leur prédication, mais en fait c’est un christianisme sans Christ et c’est un évangile, c’est-à-dire une Bonne Nouvelle, sans cette réalité bonne qu’il conviendrait d’annoncer, sans résurrection. » (cf. la Préface des Trois Entretiens de Vladimir Soloviev, p. 9) ; « Ces gens-là continuent obstinément à se désigner comme ‘véritables chrétiens’ et à recouvrir la prédiction de leur vide par des paroles évangéliques détournées de leur sens. » ; « Ici comme là-bas, ils refusent de dire honnêtement, ni d’une façon directe (par une parole résolue), ni d’une façon indirecte (par un silence éloquent), leur véritable attitude envers le fondateur du christianisme, à savoir qu’Il leur est tout à fait étranger, qu’Il ne sert à rien, et qu’Il ne constitue pour eux qu’un obstacle. » (idem, pp. 10-11) Je vous le confirme parce que je le vois déjà (et que, pour ça, l’homosexualité agit comme un sérum de Vérité extrêmement visionnaire) : ça va être rapidement le gros bordel à la Curie ! Et dans un futur très proche, le chrétien lambda ne saura pas bien quoi penser ni qui soutenir.
 

Je dois vous faire une confidence. Cette désorientation générale est prévue dans le script écrit par Dieu, et est logique quelque part (de la logique surnaturelle, pas de la logique rationnelle humaine). Le très certainement dernier Pape de l’Histoire de l’Humanité, le Pape François, est désarçonnant, car il incarne l’Église de Pierre. Je ne sais pas si vous avez remarqué – je m’adresse ici à ceux qui sont un peu honnêtes sans pour autant avoir basculé dans l’extrémisme sédévacantiste ronchon et passéiste à la Civitas qui ne voit dans les Papes post-concile Vatican II que des « imposteurs » et des « Antéchrists » – mais à la tête de l’Église catho, aujourd’hui, on a un peu « Boulet Ier du nom », si je puis me permettre. Le pape François est comparé, non sans raison, à saint Pierre par la prophétie de saint Malachie (ce dernier lui a attribué la périphrase « Pierre le Romain » et l’a annoncé comme le dernier des Papes). Ce n’est pas du tout un hasard. En réalité, je suis persuadé que ce n’est « Boulet Ier » qu’en apparences, car même s’il manque de formation et a des élans fougueux parfois incompréhensibles et non-protocolaires, il est exactement ce Pape de Fin des Temps qu’il nous fallait et que l’Esprit a choisi, car il est rassembleur, miséricordieux, populaire, fraternel. Et c’est ainsi que l’a été Jésus juste avant de vivre sa Passion, pendant la Sainte Cène (le moment de se réunir et de faire abstraction des querelles internes). Le Pape Benoît XVI, plus docteur que pasteur, est en revanche le disciple de l’Église de saint Jean. L’Église de saint Jean (Église spirituelle, mystique) est résolument plus sage, solide, rapide et visionnaire que l’Église de saint Pierre (Église d’Institution, Église-hiérarchie). Mais elle se plie, par obéissance, à l’Église de Pierre, sans s’opposer à Elle. Il en est exactement ainsi dans la Bible. Jean court plus vite que Pierre au moment d’arriver au tombeau vide du Christ, et il comprend avant Pierre… mais il le laisse passer devant. Idem pour une des pêches miraculeuses : Jean repère plus vite… mais il laisse Pierre jouer son rôle de leader. Voilà pourquoi l’Église a du mal avec les prophètes, car avec l’Église de Jean, Pierre ne maîtrise pas tout (on peut penser à sainte Thérèse de Lisieux qui n’avait pas de père spirituel, à sainte Faustine qui a mis beaucoup de temps à le trouver : en fait, c’est parfois long de trouver des prêtres de l’Église de Jean).
 
minion-priest

 

La fidélité au Christ et au Pape ne sera pas plus brillante du côté des fidèles catholiques. Et je me mets dans le lot ! Entre les carrément hostiles, les indifférents, les peureux et les lâches, on va un peu halluciner de voir la déclinaison massive de trahisons au sein de notre propre confession catholique. Oui, la Vérité n’est pas facile à suivre. Car Elle n’est pas aimée dans notre monde et peut nous attirer beaucoup d’ennemis, voire peut nous coûter la vie. Qui, parmi nous, peut assurer qu’il aura jusqu’au bout le courage du martyr ? Personne.
 

Pour ne pas avoir d’emmerdes et pour sauver leur peau, pile au moment où la catholicité va devenir une question de vie ou de mort, ce que j’appelle les « cathos UMP » (Les Républicains, Sens Commun, et malheureusement aussi parfois Force Vie et le PCD), tout comme les « cathos de gauche » (à la Erwann Binet, François Hollande, Cécile Duflot), ainsi que les « cathos centristes » ou « dissidents » (L’Avant-Garde) ou les « anars de droite » inclassables (du FN jusqu’à Frigide Barjot, Civitas, en passant par le SIEL) vont quasiment tous retourner leur veste au moment de la menace des persécutions, ou bien présenteront leur foi comme une réalité relative, annexe, culturelle, éducative, de leur vie, une valeur ajoutée qui s’accommode très bien de l’œcuménisme unificateur et pacificateur de la Nouvelle Religion Mondiale. « Je suis certes catho… mais si j’étais né dans un autre pays ou dans une autre famille, j’aurais pu tout aussi bien être protestant ou musulman. Il se trouve que je suis catho, c’est vrai, mais je n’en fais pas un étendard. Si on me le demande, je dis que oui et n’en fais pas de mystère. Mais si on ne me le demande pas, je ne m’affiche pas comme catho. Je ne veux pas partir en guerre. Ce n’est pas bon pour mon humilité. La foi, c’est d’abord dans les actes et pas dans les mots, c’est dans le service et la charité du quotidien, c’est dans la présence silencieuse, et non pas une carte politique, ni une étiquette du supermarché religieux qu’on affiche. Je suis contre les étiquettes et les chapelles, de toute façon. Parfois, j’évangélise bien mieux en restant discret que si j’avais affiché directement ma foi et que les gens athées en face de moi se seraient braqués. » Voilà le beau panel d’excuses-bidon que se trouvent déjà beaucoup de catholiques pratiquants pour se dire « chrétiens » plutôt que « cathos ».
 

J’observe, aussi bien chez les catholiques médiatiques que chez les catholiques « ordinaires », aussi bien dans le Clergé que dans les radios et télés dits « chrétiennes », une peur d’annoncer clairement le Christ et surtout sa Croix. Je prendrai deux exemples récents de situations discursives médiatiques où le nom de Jésus « s’imposait » mais a été lamentablement zappé par un discours guimauve. D’abord le passage radiophonique de l’homme politique Franck Margain du (Parti Chrétien Démocrate) le 8 juin 2015 dernier, qui au micro de Jean-Marc Morandini sur le thème de l’euthanasie, au moment où le présentateur lui demandait « Si notre vie ne nous appartient pas et que nous ne pouvons pas en faire ce que nous voulons, elle appartient à qui, alors ? », a été infichu de répondre « À Jésus », et a bredouillé une phrase tautologique d’une stupidité ahurissante « Notre vie appartient à… à… à la Vie ». Ensuite, le passage-télé de Virginie Tellenne (alias Frigide Barjot), le 19 octobre 2015, dans l’émission C à vous sur la chaîne France 5, qui venait présenter son nouveau journal-pastiche Notre Pape François, et qui au moment de devoir expliquer ce que, concrètement, les Papes représentent, à savoir Jésus, s’est emmêlée les pinceaux, a tourné 36 fois sa langue dans sa bouche, avant de sortir une niaiserie rose bonbon complètement plate : « Nos deux Papes défendent la même chose… c’est que nous devons… euh… le fait que l’Humanité ne doit pas oublier d’où elle vient et qu’elle est là aussi pour aimer son prochain. Mais les deux Papes le disent. Et François, lui, est un Pape des pauvres et un Pape du monde entier. ». J’aurais encore sous le coude un troisième exemple de tiédeur cathodique/catholique, avec le discours de Mgr Santier lors de l’inauguration de la Cathédrale de Créteil. Cet évêque a été incapable de prononcer le nom de Jésus. De plus en plus maintenant, le nom du Christ est remplacé par les valeurs qu’on lui attribue : l’amour, l’accueil des pauvres, l’ouverture d’esprit, la gentillesse, le bonheur, la confiance, la prière, l’Espérance, la solidarité, le silence, l’unité, etc. Les occasions d’annoncer clairement la Charité et la Vérité de la Croix, retombent comme des soufflets. Et peu de cathos actuels transforment l’essai.
 
Prophètes attaqués prière
 

Malheureusement, de plus en plus, les catholiques vont renier le Christ et son Église, en ne présentant que le côté Bisounours du catholicisme : Jésus mon ami, « notre Pape François l’ami de tous », « Dieu mon bien-être », etc. C’est une apostasie, même si elle n’est pas franche, car le nom du Christ et du Pape est encore vaguement annoncé, et qu’elle va decrescendo. Mais elle arrive à grands pas. On l’observe très bien dans les mass médias censés représenter les catholiques (cf. mon article sur RDN) et dans le monde de la chanson chrétienne actuelle (cf. la cérémonie des Angels Music Awards, que je qualifierais volontiers d’acte de corruption ou de prostitution : ni plus ni moins !). La meute « croyante » qui se soumettra à l’Antéchrist va par exemple s’arranger pour travestir l’Espérance en ESPOIR et en PROGRÈS, la Charité en SOLIDARITÉ, la Résurrection en IMMORTALITÉ, la prière en MÉDITATION et en PENSÉE, l’Amour de Jésus en AMOUR UNIVERSEL et en SENTIMENT, l’être humain en ANGE, l’Esprit Saint en ÉTAT D’ESPRIT et en LUMIÈRE, la messe en CONCERT, la personne christique en PAROLE BIBLIQUE, le Catholique en CHRÉTIEN, le célibat continent consacré en CHASTETÉ et en SAINTETÉ, la Vérité en INTELLECT et en RESSENTI/OPINION, l’humanité en ÉCOLOGIE, la fidélité au Christ en FIDÉLITÉ AUX AUTRES et surtout en FIDÉLITÉ À SOI-MÊME, l’Amour divin en RESPECT et en BIENVEILLANCE, la Communion eucharistique en COMMUNION HUMAINE, la Croix en FLEUR et en DÉLIVRANCE DE LA CROIX. L’Église de l’Antéchrist va petit à petit supplanter le PAPE au Christ, ou bien – ce qui est tout aussi pervers – supplanter JÉSUS à la Vierge Marie, à l’Eucharistie, aux saints, et à l’Église catholique (comme le font les protestants).
 

Les noms de « Dieu » et de « Jésus » seront pourtant au départ invoqués partout, à toutes les sauces. Il y aura tout ce que vous voulez en actions de grâce et en louanges (Je crie fort vers toi, mon Dieu, et tu entends ma voix. Coule en moi, Esprit de Feu ! Je te bénis, tu es vraiment présent ! Je glorifie le Seigneur, je chante le Seigneur tout mon être ! Jésus mon Sauveur. Tu es ma source, ma lumière, la force me guide mes pas. Je te bénis mon frère, et je crois en toi !)… mais Dieu n’y sera pas concrètement, ne sera pas reconnu sous toutes ses formes incarnées (les sacrements, le clergé ministériel, la Croix, Marie et les saints, les prières traditionnelles, etc.). Et bientôt, Dieu ne sera plus nommé du tout. On l’appellera « gentil précurseur », « prophète », « fraternité », « énergie de vie », « unité », « valeurs », « esprit de vie », « Espérance », « Foi ». Il n’y a qu’à voir aujourd’hui toutes les fois où, dans les mouvements politiques ou sociaux d’obédience catholique, le nom de Jésus est maquillé par le mot « Vie » : Alliance Vita, La Marche Pour la Vie, les revues La Vie ou La Croix (la croix de quoi ? la croix gammée ? la croix rouge ? la croix de bois croix de fer si je meurs je vais en enfer ?), Force Vie, etc. C’est toujours pareil : les idées à la place de Celui qui les porte. Je veux bien admettre, parce que c’est Lui-même qui l’a déclaré, que « Jésus est le Chemin, la Vérité et la Vie », mais quand même, faut pas pousser ! La Bible n’est pas qu’un gentil corpus de belles « valeurs » ! Et Jésus n’est pas un idéologue, ni un simple « porteur de valeurs pour le Bien commun ». Non. Jésus est le Fils de Dieu, crucifié par nous et ressuscité pour nous ! Ce n’est pas un gros mot ! C’est un grand mot qui s’est fait tout petit par amour pour nous (petit mais pas invisible).
 

La Nouvelle Religion Mondiale, et tous ses suiveurs soi-disant « catholiques », passent Jésus à la machine barbapapa, pour le tuer et n’en garder que les « valeurs humanistes » qui les arrangent, et qui surtout n’exigent quasiment rien d’eux, à part une adhésion de principe. « La foi, la patience, l’espoir, voilà les armes par lesquelles nous vaincrons ! » (Olivier dans Le Maître de la Terre, p. 260) ; « Même les croyants peuvent réduire la foi à un système philosophique. Ils peuvent garder les formes extérieures de la religion et en perdre le cœur. » (le Pape dans Le Père Élijah, p. 157) Comme dans la chanson « Je crois en toi » chantée à l’Olympia en 2015 par le chanteur catholique… pardon… chrétien, Grégory Turpin, en duo avec Grégoire, Jésus et la catholicité sont noyés dans l’implicite. Par les cathos en personne ! Et toujours pour d’excellentes raisons charitables et stratégiques, en plus ! (= éviter le prosélytisme, ne pas instrumentaliser Jésus et Le faire connaître à un maximum de gens pas cathos, ne pas imposer sa foi, rester des cathos humbles et discrets, évangéliser « aux périphéries », conserver ses entrées dans les sphères médiatiques pour toucher le plus de monde possible, etc.). En écoutant Grégory Turpin affirmer qu’il a à cœur de partager sa foi, qu’il réduit spectaculairement à des « valeurs comme l’amour, la tolérance, le bonheur, dans lesquelles 99% des gens, même non-croyants, pourront se reconnaître », je me demande si on aime le même Dieu. S’il vous plaît : le jour où je me fais l’apôtre du Dieu « Tolérance », dites-le-moi vite. C’est un service que je vous demande. Pour le bien de la communauté.
 

Lors des grands événements, les laïcs ne seront pas les seuls à lâcher en masse – et discrètement, les yeux pleins d’étoiles – le Christ. La légitimité du Pape sera remise en cause, y compris par ses proches cardinaux : « Nous ne pouvons plus attendre qu’un deus ex machina descende du ciel. L’homme doit construire la Cité de Dieu. Je crois dans une religion qui trouve le salut dans le monde, non au-dessus dans un lointain château en Espagne.[…] Je ne suis pas surpris de ce que vous êtes. Vous êtes pitoyablement transparent. Vous êtes le Grand Inquisiteur de Dostoïevski. Vous voulez régner sur un système féodal où tout le monde baisse la nuque devant vous. C’est du pharisianisme. Vous êtes un homme doué. Mais vous êtes piégé par votre passé tragique. Ces expériences vont ont blessé. Vous ne jugez pas correctement la situation actuelle. » (le Cardinal Vettore s’adressant dédaigneusement au Pape, dans Le Père Élijah, pp. 503-504) Le Vatican est rempli de traîtres et de pratiquants qui bâillonnent le Pape. Il faut le savoir (sans grossir à l’excès le complot interne) : « L’occultisme : Rome en est remplie. » (p. 348) déclare le père Smith, toujours dans Le Père Élijah. Aussi surprenant que cela puisse paraître, beaucoup de prêtres, d’évêques et de cardinaux ont peur de défendre le bonheur dans le célibat consacré continent… car en réalité, certains ne veulent pas imposer aux autres ce qu’ils ne se croient pas capables de vivre eux-mêmes ! : « C’est incroyable comme peu de gens, je veux dire même des personnes religieuses, croient que le bonheur du célibat est possible » (le père Billy Stangby, idem, p. 42)
 

Encore dans le roman Le Père Élijah, les médias pourtant « catholiques » vont se déchaîner pour « faire évoluer » leur Église, ou au contraire pour La « conservatiser » et L’empêcher d’ajouter la Charité à la Vérité. « Le Père Elijah ouvrit son exemplaire du Worldview et chercha la rubrique religion. Sous le titre ‘Rejet de la dernière encyclique papale par les théologiens du monde’.L’Association internationale des théologiens catholiques, a asséné une réponse définitive à la dernière encyclique papale. » (idem) Le « légalisme du Pape » (Le Père Élijah, p. 328) est sévèrement critiqué et ringardisé. La « presse catholique progressiste » (p. 362) fait pression pour imposer les théories féministes, LGBT, modernistes, aux pasteurs de l’Église : « La conférence mondiale sur la vie religieuse demande une plus grande implication des femmes dans la législation de l’Église. » (pp. 370-371) Le père Smith, qui travaille comme pigiste dans un quotidien prétendument « catholique », souffre de voir ses articles édulcorés dans un ensemble journalistique corrompu au progressisme et au relativisme religieux ambiants, foncièrement anticlérical : « Dans ce seul numéro, il y avait treize articles qui montraient l’Église sous un jour défavorable et démontraient la vitalité supposée des Églises régionales. Il y avait cinq articles qui pouvaient être interprétés de loin comme orthodoxes. Ils étaient courts et insipides. […] Techniquement parlant, on ne pouvait reprocher au journal d’être déloyal ; pourtant il était au premier plan de la révolte. » (p. 371) Smith se rend bien compte qu’on l’a mis dans une voie de garage pour l’empêcher d’être « nuisible » et de trop « l’ouvrir » :« On me cache comme une tare. On m’a demandé de couper tout morceau de texte qui ne ferait même qu’évoquer la controverse. Le résultat c’est une tarte à la crème si parfaitement insipide et dépourvue de toute valeur nutritive que ça ne mérite pas le nom de journalisme catholique. Jour après jour, je suis assis à émonder toute note un peu forte de ces articles. On a été stérilisés, Élijah, et je n’aime pas ça. Pas du tout. » (p. 373)

 

Par ailleurs, dans l’Église, les bonnes intuitions des prophètes du Christ sont également rejetées en masse (c’est le lot de tous les prophètes !). Dans le roman Le Maître de la Terre, le père Percy propose la création d’un nouvel ordre religieux, celui du Christ Crucifié, qui avait tout son sens, mais qui finalement fera un flop : « De jour en jour, l’Église s’écroulait. Le nouveau spasme de ferveur qu’avait produit la création de l’ordre du Christ Crucifié, Percy ne pouvait s’empêcher de le regarder comme un feu de paille, bientôt éteint. » (pp. 242-243) Dans le roman Le Père Élijah, le héros est invité à un colloque scientifique pour présenter ses travaux pourtant sérieux et fidèles au magistère. Eh bien son topo est complètement déserté et désavoué par ses propres collègues : « Parmi le millier de délégués, pas plus d’une douzaine ne remplirent la salle. L’un d’eux, remarqua avec joie Élijah, portait l’habit blanc de l’ordre de saint Dominique […] Le dominicain se leva théâtralement dans son habit blanc tourbillonnant, et dit d’un ton irrité en français : ‘Êtes-vous en train de dire que ceux qui questionnent votre notion simpliste de Dieu vivent dans le péché ? C’est un non-sens fondamentaliste !’ Il sortit d’un pas raide. » (p. 330)
 
Prophète attaqués empêcher la montée à Jérusalem
 

Le prophète fidèle qui avertit du schisme au sein de l’Église, ou qui met en garde contre les discours de l’Antéchrist, que très peu de catholiques sont prêts à reconnaître (car ce sont eux-mêmes d’hypocrites agents de l’Antéchrist, désirant empêcher le Pape de monter à Jérusalem et de vivre la Passion de Jésus), se verra volontiers traîné en procès de mythomanie, de désespérance, de manque de foi, de division. Alors que c’est précisément lui qui fait œuvre d’Unité, mais une Unité dans la Vérité. Suprême inversion des valeurs ! Il faut vraiment se méfier de ceux qui n’ont que les mots « unité », « confiance », « foi », « humilité », « Espérance » et « prière » en bouche, c’est moi qui vous le dis !
 
Prophètes attaqués schisme
 
Prophètes attaqués prière
 
Prophètes attaqués diviseur
 

Les trahisons internes qui ébranleront l’Église ne sont pas que du fait des catholiques. Rassurons-nous un peu. Elles viennent aussi des frères religieux venus des autres religions, qui s’accommoderont très bien du Nouveau Culte Mondial de l’Antéchrist. Par exemple, comme l’explique parfaitement Maurice Caillet, ex franc-maçon, les Témoins de Jéhovah et les Mormons se sont donnés initialement pour objectif de saboter le christianisme. Ils insufflent à leurs adeptes des règles morales bonnes, mais interprètent la Bible à leur façon. Les Musulmans, quant à eux, applaudiront à l’arrivée de l’Antéchrist : « Une foule mahométane l’a acclamé comme le dernier Messie. » (Le Maître de la Terre, p. 117) ; « Les mahométans croyaient en Dieu. En tout cas, et peut-être en reste-t-il encore quelques-uns pour y croire aujourd’hui. Mais fort peu : tout le reste est devenu ‘ésotérique’, comme ils disent. » (Francis dans Le Maître de la Terre, p. 334) Les Musulmans ne reconnaissent pas Jésus comme Dieu et Fils de Dieu. Donc qu’Il soit célébré ou non par la Religion Mondiale, peu leur importe. L’illuminisme émotionnel des protestants (réformés et évangéliques) contribuera aussi à l’ascension de l’Antéchrist au pouvoir : « Il y a des connivences entre la Franc-Maçonnerie et le protestantisme. Il y a une responsabilité des protestants dans les origines de la Franc-Maçonnerie. » (Maurice Caillet, pendant 15 ans franc-mac, lors de sa conférence en 2002) J’ai écrit un article sur ce curieux et futur mariage arrangé. Quand j’écoute les paroles des soupes de la pop évangélique et les paroles des chansons narcissiques de Glorious (groupe pseudo catholique : je dis pseudo catholique car vous ne les entendrez jamais s’opposer au « mariage gay » ou à l’Islam, ni aborder tous les sujets sociaux qui fâchent. Les Chrétiens d’Orient, ça ne compte pas dans les « sujets qui fâchent », désolé), je ne vois aucune différence. L’angélisme sentimentalo-spirituel des Évangéliques a gagné une large partie du catholicisme séculier. Quand Dieu ne sera pas qu’une fête, mais un bûcher collectif, je ne sais pas s’il restera grand monde de la foule fêtarde, reggae et pleurnicharde « catholique ». « Quand le Fils de l’homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » (Luc 8, 8) Je n’ai pas la réponse. Mais si Jésus a posé la question, c’est qu’Il ne se faisait pas beaucoup d’illusion là-dessus.

 

Ce qui me rassure quand même, et qui au bout du compte me maintient dans une Espérance inextinguible, c’est que les forces du mal ne l’emporteront jamais sur l’Église catholique, que Jésus est avec ses fidèles brebis (dont j’espère que je suis) jusqu’à la fin des temps et jusqu’à l’abattoir, et surtout que le Pape François (même si à un moment donné il se laissera corrompre, à cause de sa trouille et des mauvais conseils de son entourage ecclésial) finira par être fidèle à l’Esprit Saint (contrairement à ce que prétendent ces mauvais de Civitas qui le considèrent comme un « pape illégitime », voire même comme l’Antéchrist ou le faux prophète en personne). À mon humble avis, les « deux témoins » dont parle l’Apocalypse de saint Jean (Ap 11, 1-13), le binôme des grands hommes qui verront la Seconde et définitive Résurrection du Christ, ce sont nos deux saint Jean et saint Pierre New Generation : le Pape Benoît et le Pape François. C’est quand même unique dans l’histoire de l’Église que nous ayons à la tête de notre Famille Sanctifiée deux pasteurs en même temps ! C’est dire si l’imminence du Retour du Christ est là, si la période que nous vivons est extraordinaire !
 

L’avènement du schisme, loin de nous désespérer, doit au contraire nous faire réaliser que nous n’avons jamais autant collé au Plan d’Amour de Dieu pour l’Humanité que maintenant. Et c’est une grande joie que de voir que malgré tout, les pasteurs de l’Église, aussi humiliés et minables soient-ils (si le Pape François est le saint Pierre des temps modernes, il va falloir s’attendre aux trois reniements de sa part ! sans compter bien évidemment les nôtres !), seront courageux et incorruptibles ! On retrouve bien cela à travers l’un des trois romans d’anticipation que je vous cite régulièrement depuis le début de cet article. Dans le Court Récit sur l’Antéchrist (1900) de Vladimir Soloviev, lors du « concile » que l’Antéchrist organise à Jérusalem, dans le vaste Temple de l’Unité de tous les cultes, afin de dissiper toutes les divisions entre chrétiens, et surtout afin de corrompre chacune des trois délégations chrétiennes (catholiques, protestants et orthodoxes) en leur offrant des cadeaux (Il promet aux orthodoxes la création à Constantinople d’un musée mondial de l’archéologie chrétienne, destiné à promouvoir la connaissance des icônes et de la sainte liturgie, il promet aux protestants la création d’un institut d’études bibliques mondial voué à la recherche sur l’Écriture Sainte, il promet au Pape son rétablissement à Rome, « à la condition qu’ils le reconnaissent tous comme leur unique défenseur et protecteur »), la très grande majorité des fidèles et du Clergé se laisse séduire et abandonne le Christ. Presque tous les cardinaux et évêques ainsi que la majeure partie des moines et des laïcs rejoignent l’Empereur sur son estrade. Restent insoumis le pape Pierre II et quelques moines et laïcs irréductibles, et des orthodoxes rebelles (Pierre et Jean correspondent, dans l’intrigue, aux deux témoins de l’Apocalypse). Dans cette nouvelle de Soloviev, il faut souligner que ce sont les chefs légitimes des Églises chrétiennes qui rejettent l’Antéchrist et restent à la tête de la minorité qui confesse le Christ : le pape Pierre, le starets Jean (qui est aussi évêque) et le professeur Pauli. Le catholicisme, pour Soloviev, est pétrinien, l’orthodoxie est johannique, le protestantisme est paulinien. L’Antéchrist se montre plein d’arrogance envers ces trois « chrétiens rétrogrades », leur faisant bien sentir qu’ils sont ridicules et minoritaires : « Que puis-je encore faire pour vous ? Race étrange ! Qu’attendez-vous de moi ? Je l’ignore. Dites-moi donc, vous les chrétiens abandonnés par la majorité de vos frères et de vos chefs, vous que le sentiment populaire a condamnés : qu’est-ce qui vous est le plus cher dans le christianisme ? » Ils répondent : « Le Christ ». Et en voyant que l’Antéchrist est incapable de défendre Jésus comme son Maître et comme le Fils de Dieu, Jean s’écriera solennellement devant toute l’assistance, en pointant du doigt l’Empereur : « Mes petits enfants : l’Antéchrist ! »
 

Nous allons voir à présent quels sont les moyens concrets qui nous sont donnés à nous, catholiques, pour nous préparer d’ores et déjà au combat ultime entre l’Armée de Marie (en apparence minoritaire et désarmée) et l’Armée de l’Antéchrist.
 
 

j) Comment combattre l’Antéchrist ?

Armée
 

Bien souvent conscients de leur impuissance politique, artistique, médiatique, humain, beaucoup de cathos se rabattent par défaut, dégoût, défaitisme, passéisme et misanthropie, sur la notion de « combat spirituel », sans appréhender ce dernier avec l’enthousiasme et le réalisme qu’il mérite. Ils en parlent de manière trop spiritualiste. Alors que je pense qu’en effet, d’une part les grands événements que nous vivons ont une logique humaine régie par des mécanismes et des stratégies rationnels mais surtout une logique surnaturelle appartenant à Dieu, d’autre part le vrai combat spirituel devrait nous faire rentrer dans une grande joie : quand on sait quel est notre ennemi (l’hétérosexualité niée par ceux-là même qui la prônent), quand on sait qui le soutient, et comment le combattre, tout notre investissement s’en trouve bouleversé positivement. Le combat spirituel devient quelque chose. Ou mieux : Quelqu’un ! Quand le conflit paralyse (cercle vicieux), le combat, lui, procure au contraire la paix du Christ et vitalise (cercle vertueux) !

 

Et puis le combat spirituel ne s’arrête pas à la vie humaine : il se prolonge pendant et après la mort : au Ciel. Le Paradis, ce n’est pas peinard, comme certains se plaisent à le croire. Les saints, les anges et les âmes humaines sauvées sont en plein entraînement para-militaire en ce moment ! Ça ne chôme pas !

 

J’ai mesuré un peu ce que représentait le combat spirituel terrestre qui nous attend quand j’ai écouté le formidable topo du père Verlinde, intitulé « L’heure du combat spirituel », traitant de ce qui va nous arriver juste au moment de notre mort… et les 40 jours de tentations au désert qui le suivront peut-être (je vous paierais cher pour que vous preniez le temps d’écouter entièrement cette conférence !). La description du voyage de notre âme entre la Terre et le Paradis (les « douanes » ou « péages aériens » ou « télonies » entre le troisième et le neuvième jour après notre décès, les démons se disputant notre âme face à notre ange-gardien et l’ange psychopompe/psychagogue qui prennent notre défense, etc.), est d’une précision telle que ça nous donne une claire idée de ce qu’est le purgatoire que nous allons vivre au Jugement Dernier, une claire idée de la grandeur du Sacrement de Réconciliation, une claire idée de ce que sera le combat des fins dernières au service de l’armée de Marie, une pleine conscience de l’efficacité de nos anges gardiens !

 

Alors, une fois que nous avons pris connaissance de ce combat, qu’est-ce qu’on fait ? Un combat, ça se prépare ! D’une part par un entraînement régulier, physique mais aussi intellectuel (formation costaude) et spirituel (la prière), d’autre part en recevant la force de l’Esprit Saint et des sacrements et en maniant les armes qui plaisent au Seigneur. Car ce serait faire erreur que d’imaginer qu’un catholique doit être « gentil » et non un guerrier, du simple fait qu’il « tend la joue gauche » si on le gifle, du simple fait qu’il obéit au commandement de ne pas tuer, du simple fait qu’il renonce aux armes terrestres classiques, du simple fait qu’il a un devoir de Charité et de pardon envers ses ennemis. Le piège d’une certaine approche du combat spirituel, c’est d’exacerber (surtout en cette période de l’année de la Miséricorde inaugurée par le Pape François, de décembre 2015 à novembre 2016) la Miséricorde de Dieu (« On ira tous au Paradis… Il nous sauvera donc COOL la Vie ! Pas de combat ! Il faut éviter les confrontations avec autrui ! ». C’est d’oublier que Dieu est aussi Justice ! « Je ne suis pas venu apporter la Paix mais le Glaive. » (Matthieu, 10, 34). Le catholique est un véritable soldat : vaillant, tonique, enthousiaste, debout, ferme, vigoureux, inventif, audacieux, intransigeant concernant la Vérité, habile, tacticien, doux quand il faut, fort quand il faut. Certainement pas un mou angéliste… ni un Rambo !

 

Comment savoir quelles sont les bonnes armes que nous devons porter pour mener un combat qui plaît au Seigneur et qui signeront Sa Victoire contre l’Antéchrist et satan ? C’est très simple. Jésus et ses disciples, l’Esprit Saint et Marie, nous ont déjà fourni toutes les clés. Dans l’Évangile selon saint Luc, il est question de l’heure du combat décisif : « Jésus leur dit encore : ‘Quand je vous ai envoyés sans bourse, sans sac, et sans souliers, avez-vous manqué de quelque chose ?’ Ils répondirent : ‘De rien’. Et il leur dit : ‘Maintenant, au contraire, que celui qui a une bourse la prenne et que celui qui a un sac le prenne également, que celui qui n’a point d’épée vende son vêtement et achète une épée. Car, je vous le dis, il faut que cette parole qui est écrite s’accomplisse en moi : Il a été mis au nombre des malfaiteurs. Et ce qui me concerne est sur le point d’arriver.’ Ils dirent : ‘Seigneur, voici deux épées’. Et il leur dit : ‘Cela suffit.’ » (Luc 22, 35-38) C’est également dans l’Épître de saint Paul aux Éphésiens que nous pouvons trouver une description claire de l’armure du fidèle combattant du Christ, sachant que l’essentiel des armes est prodigué par l’Esprit Saint (« le glaive de l’Esprit qui est la Parole de Dieu », Ep 6, 17) : « En définitive, rendez-vous puissants dans le Seigneur et dans la vigueur de sa force. Revêtez l’armure de Dieu, pour pouvoir résister aux manœuvres du diable. Car ce n’est pas contre des adversaires de sang et de chair que nous avons à lutter, mais contre les Principautés, contre les Puissances, contre les Régisseurs de ce monde de ténèbres, contre les esprits du mal qui habitent les espaces célestes. C’est pour cela qu’il vous faut endosser l’armure de Dieu, afin qu’au jour mauvais vous puissiez résister et, après avoir tout mis en œuvre, rester fermes. Tenez-vous donc debout, avec la Vérité pour ceinture, la Justice pour cuirasse, et pour chaussures le Zèle à propager l’Évangile de la paix ; ayez toujours en main le bouclier de la Foi, grâce auquel vous pourrez éteindre tous les traits enflammés du Mauvais ; enfin recevez le casque du Salut et le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la Parole de Dieu. Vivez dans la prière et les supplications ; priez en tout temps, dans l’Esprit ; apportez-y une vigilance inlassable et intercédez pour tous les saints. Priez aussi pour moi, afin qu’il me soit donné d’ouvrir la bouche pour parler et d’annoncer hardiment le Mystère de l’Évangile, dont je suis l’ambassadeur dans mes chaînes ; obtenez-moi la hardiesse d’en parler comme je le dois. » (Saint Paul, Lettre aux Éphésiens 6, 10-20) Les armes charnelles ne sont pas les bonnes : c’est le bâton de la foi qui fait gagner. Jésus, au Jardin des Oliviers, invite saint Pierre à ranger son arme humaine. « Ce n’est ni par l’épée ni par la lance que l’Éternel sauve. » (1 Samuel 17, 47) C’est l’assurance intérieure de la Résurrection christique qui est notre principale arme pour le combat.
 
Combat soldat
 

Pour gagner le combat spirituel, il ne va pas falloir se comporter en va-t’en-guerre cinématographique, jusque-boutiste, armé jusqu’aux dents, revanchard, hargneux comme le sont les croisés de Civitas ou les islamistes djihadistes. Non. Nous devons partir non pas la fleur au fusil mais avec le rosaire pour fusil. Quitte aussi à consentir à rentrer dans une forme d’abandon et de paix qui, au regard du monde et des cathos rigides, passera pour de la passivité, de la compromission et de la lâcheté. « Tous les saints ont préconisé la fuite, mais pas n’importe quelle fuite. Pas la fuite par peur, mais par stratégie. » (Alain Noël, Manuel de combat spirituel (2014), p. 211) : pensons à la fuite de saint Jean de la Croix dans Nuit obscure, la fuite de Marie et Joseph en Égypte, la fuite de Jésus au désert, la fuite de Moïse au désert pour échapper à Pharaon, l’exil des Chrétiens d’Orient d’aujourd’hui, etc. La meilleure défense n’est pas toujours l’attaque. Surtout quand il s’agit de lutter aux côtés du Christ qui est l’Amour en personne. S’éloigner de l’Ennemi, cela peut être une action courageuse. Et Jésus, sans se dérober, a accepté l’humiliation de la Croix et nous a montré que la non-réponse au mal était d’une part le signe de la non-contamination au mal et d’autre part la victoire sur le mal. Comme l’explique très bien le père de Maistre dans sa conférence sur le diable, l’humilité nous rend invisible et insignifiant aux yeux du diable : il ne nous voit plus, et c’est donc grâce à elle que, comme David face au géant Goliath, nous pouvons nous faufiler entre les pattes du méchant et le frapper à mort, sans qu’il n’ait aucune prise sur nous. « C’est lorsque je suis faible que je suis fort » disait saint Paul. D’où l’importance de l’humilité. Nous ne devons pas aller sur le terrain du diable. Il faut se savoir faible… ce qui ne veut pas dire que nous devons nous installer ni succomber à notre faiblesse.
 

Le livre d’Alain Noël, Manuel de combat spirituel (2014), constitue un bon décryptage/complément des Évangiles. Il s’annonce comme un manuel d’« initiation au maniement des armes » (p. 20) : ça a le mérite d’être dit ! Alain Noël nous parle de « l’entraînement spirituel » (p. 74) et nous appelle à l’Espérance, surtout (et c’est paradoxal) au moment où nos raisons d’espérer auront apparemment disparu : il nous invite à « voir les jours mauvais comme un combat à mener » (p. 74). L’une des manœuvres guerrières les plus efficaces, c’est l’aumône, le jeûne, la prière (Marc 9, 29). Le combattant du Christ est appelé à se dépouiller lui-même pour se laisser purifier par Jésus. « L’aumône efface les péchés. » (Ben Sirac le Sage 3, 30) C’est en prenant davantage de temps pour le Seigneur et en posant des actes de Charité concrets au service des autres qu’il aide le Seigneur à faire fuir les démons. Nonobstant, notre Salut n’est pas le résultat de notre mérite. Nous le recevons. Nous nous battons non pas pour être sauvé, mais parce que nous sommes sauvés ! Alain Noël évoque également la puissance des sacrements. « L’homme spirituel combat avec des armes spirituelles. Son armure, c’est l’onction qui l’unit à Dieu, c’est l’onction de son baptême. » (p. 144) La réception régulière du Sacrement de Réconciliation est capitale pour rentrer dans le bon combat. Regardons par exemple sainte Jeanne d’Arc, qui se confessait tous les jours à un prêtre et qui est une des plus grandes guerrières de l’Église ! En plus des sacrements, il nous faut prier dans l’Esprit, chanter/parler en langues, louer Dieu à tout instant (de préférence avec des phrases courtes, tirées de la Bible). Aucun charisme ne reste s’il n’est pas exercé. Et le Verbe se fait constamment chair et prière. « Le fourreau de notre épée, c’est notre bouche. » (p. 186) Si la Vérité n’est pas annoncée, notre épée ne coupera pas. Si nous savions combien la louange et l’action de grâce repoussent l’Ennemi, nous louerions davantage ! Nous bénirions davantage ! Nous rentrerions dans la joie de la Guerre Sainte ! : « Tu iras au combat comme à la fête et non comme à l’abattoir. » (p. 97) ; « Les justes rendent grâces. Tandis que les injustes pestent. » (p. 186) Le chapelet est la fronde, une arme redoutable. Ce n’est pas par hasard si récemment le Rosaire marial a pris la forme d’un glaive tendu par Jésus à un évêque nigérian. Alain Noël nous parle également des risques encourus pendant la Grande Guerre spirituelle : « Il est quasiment impossible de combattre sans être plus ou moins gravement blessé. » (p. 197) Les péchés (véniels, mortels) des autres et les nôtres vont nous faire extrêmement souffrir : ils sont les coups et les blessures que nous recevront. Heureusement, comme dans toutes armées, nous ne serons pas seuls (malgré les apparences) : l’armée des Saints, la Communion des Saints (ignorée ou négligée des protestants), vont nous être d’une précieuse aide. Combien de fois, personnellement, j’ai pu authentifier dans ma vie l’intercession de mon saint patron (saint Philippe), de saint Antoine de Padoue, de saint Joseph, du Padre Pio, de l’Archange Saint Michel, de Marie, et bien sûr de mon ange gardien ! Nous avons tous un ange gardien attitré, à notre service (même à nos ordres !), et nous ne le sollicitons pas assez ! « Testons l’action de l’ange gardien » (p. 66) Nous pourrons également compter sur le soutien de nos frères chrétiens qui pâtissent aussi des persécutions : les binômes de combattants sont préconisés par le Christ lui-même. Le soutien deux par deux est puissant. Chacun est gardien de son frère.
 

Ne perdons pas non plus de vue qu’une armée marche au pas. Et quoi de mieux que de marcher au pas de l’Esprit Saint ? Le combattant pour le Christ prie sans cesse et sans se décourager. C’est à son obéissance à l’Esprit et à Marie, à son humilité et à son Espérance que se mesureront son agilité, sa souplesse, sa force (qui ne viennent pas de lui). En discutant avec des moines et des prêtres au courant des fins dernières, ils nous préviennent aussi que Marie, en tant que cheftaine suprême de l’armée de son Fils, en tant que Reine du Ciel qui écrasera le serpent, est en ce moment même en train de réunir son armée céleste et humaine (alors que jadis elle avait tendance à isoler ses prophètes). De plus en plus de catholiques, avec la sérénité et la prudence qui conviennent, se mettent à étudier la fin des temps. Marie, en plus, teste (comme pour les alarmes incendie et les simulations de tremblements de terre) la réactivité de ses troupes, notre acuité, notre courage face aux épreuves, nous sensibilise à la prière, nous aide à ne pas craindre ses apparitions-avertissements. Et il y a fort à parier qu’à l’heure où vous me lisez, au Ciel, elle donne des cours aux saints et que ça s’entraîne dur !

 

Et bien sûr, le meilleur pour la fin, c’est Jésus Fils de Dieu qui nous fera gagner : « Gardez courage ! J’ai vaincu le monde. » (Jean 16, 33) Nous sommes appelés à Lui laisser la place pour qu’Il plante Sa victoire en nous, à « revêtir le Christ » (saint Paul aux Galates 3, 27).
 

Le saint Jean-Baptiste de Cabanel

Le saint Jean-Baptiste de Cabanel


 

Pour terminer sur la question du choix des armes pour le bon combat, je finirais par être aussi très prosaïque et terrestre. Dans les débats actuels auxquels nous risquons d’être confrontés devant les juges contemporains de la bien-pensance, nous allons nous retrouver face à deux colosses idéologiques travestissant et détruisant d’une part la différence des sexes (la sexualité) et d’autre part la différence Créateur/créatures (l’Église) : à savoir le mythe de l’hétérosexualité et le mythe spiritualiste du bonheur (bonheur dans l’« amour », il va sans dire). Je crois personnellement que les meilleurs des combattants de l’armée du Christ seront ceux qui se risqueront à affronter de manière argumentée l’hétérosexualité et qui ne se laisseront pas impressionner par la rhétorique du bonheur amoureux dans laquelle le monde entier se laissera entraîner. Cela présuppose une véritable catéchèse préalable sur l’hétérosexualité et sur la joie de la Croix ! Sans parler d’hétérosexualité, le diable ne risque pas d’être démasqué.
 

Idem par rapport à la mise à l’épreuve de la solidité de notre foi en la divinité de Jésus. Lorsque le combat arrivera à son paroxysme et que le martyr de sang pointera le bout de son nez pour nous, nous serons tentés de nous demander pourquoi Dieu attend autant de temps pour nous libérer, et pourquoi il ne se rend pas tout de suite visible et vainqueur. « S’il nous aime vraiment, pourquoi reste-t-il silencieux et permet-il que nous souffrions tout cela ? » Vous voudrons même remonter le syllogisme au Christ même : « S’il est le Fils de Dieu, pourquoi a-t-il accepté d’aller jusqu’à la Croix et n’a-t-il pas manifesté sa divinité avant ? » En plus de la douleur du péché, c’est bien sur l’invisibilité (temporaire) du Christ que l’Antéchrist va s’appuyer pour nous faire douter de l’amour et de l’existence de Dieu. Il va nous falloir vivre avec l’intime conviction que si Dieu ne se laisse pas voir, c’est pour préserver notre liberté. Si nous pouvions le voir, notre liberté n’existerait plus. À ceux qui vous disent « Si ton Dieu existait, Il apparaîtrait, il serait visible ! », vous pouvez déjà répondre « S’Il était visible, Il ne nous aimerait pas. Car Il rendrait évidente son existence et ne nous permettrait pas de prendre le risque de la confiance, de la foi en Lui. Il nous enlèverait illico notre liberté et son Amour. » C’est sur le fil de l’amour de notre petite liberté que nous allons devoir marcher comme des funambules. Au plus noir du combat spirituel et physique, nous allons être amenés à crier vers le Ciel : « Seigneur Jésus, Fils de Dieu, je sais que tu existes, même si tout, y compris moi-même, me porte à croire le contraire ! Je n’ai que ma foi en toi, Seigneur ! Je n’ai que ma foi que tu m’aimes libre ! » Le silence de Dieu n’a pas fini de nous désarçonner. Robert Hugh Benson l’a bien saisi : « Et le père Percy sentait qu’aucun mot ne serait dit du haut des cieux ; les anges eux-mêmes avaient reçu l’ordre de mettre l’épée au fourreau, et d’attendre l’éternelle puissance de Dieu ; car l’agonie était à peine commencée, et mille horreurs devaient se produire encore avant qu’arrivât la fin, la somme dernière de la crucifixion…[…] Il ne fallait plus que veiller et attendre, jusqu’au jour où le corps mystique sortirait décidément du tombeau. » (Le Maître de la Terre, p. 57)

 

Enfin, l’autre gageure logique de notre combat contre le mal, c’est, face aux événements objectivement confus et effrayants qui nous arrivent, de tomber dans le piège facile de la révolte, de la haine, de la panique, de la violence, de la désespérance. Pour répondre et résoudre humainement ce mal que nous verrons. « L’ennemi peut remporter une autre sorte de victoire en nous faisant perdre la paix. S’il peut nous acculer à la rage, il nous a attirés dans ses ruses. » (Père Smith, Le Père Élijah, p. 373) Eh bien il va falloir nous faire violence pour ne pas répondre rationnellement au mal par le mal. Autrement dit, il nous faut accepter que, dans ce qui va se dérouler très prochainement, il y a une raison surnaturelle. En cela, nous pouvons imiter saint Jean au moment de la sainte Cène, quand, en voyant Judas trahir Jésus, il a penché sa tête contre le cœur de son Maître, et n’a pas fait humainement ce que son cœur avait compris. Quoi qu’il arrive, nous devons garder à l’esprit la vulnérabilité et l’humilité de Jésus pendant la Sainte Cène et surtout à la Croix. C’est la clé de la victoire contre le mal. Jésus n’a pas laissé le mal contaminer son Sacré Cœur. C’est son absence de réponse au mal qui l’a fait gagner. « Chaque fois que nous acceptons de porter cette croix et d’être cloué dessus […] , c’est là que nous battons satan. Par le sang de l’Agneau ! » (Don Matteo dans Le Père Élijah, p. 102) Nous devons faire de même. Et ce n’est pas évident ! Car nous vivons une période de grands troubles. C’est la phase terminale du règne de Satan : l’intégralité des démons descend maintenant des enfers pour envahir la Terre. Les esprits sont troublés et échaudés, y compris le nôtre. La mauvaise foi est généralisée. Il va y avoir un moment où contre toute logique, il nous faudra pourtant, plutôt que de rentrer tête baissée dans le combat, penser à l’unité, baisser les armes humaines, choisir l’arbitraire de la confiance désarmée, lâcher la résistance humaine. Laisser paisiblement la Croix arriver et s’emparer de nous, sans riposter, dans une forme de consentement muet et aimant des situations qui nous sont imposées. Car le diable fait déjà tout pour brouiller les pistes et nous faire croire que nos meilleurs amis sont nos pires ennemis, que le bien c’est le mal, pour qu’on transforme notre peur en violence et en révolte, et qu’on se bouffe les foies entre catholiques sans qu’il ait besoin d’intervenir et de poser des actes qui l’incriminent. Le jeu du diable, c’est d’intervenir le moins possible. Et de tuer en nous l’humilité christique qui le mettra à mort. Le meilleur moyen d’obtenir le Salut, c’est, comme pour le Christ, de ne pas nous dérober à la Croix. J’oserais même dire : Savourer l’instant. Savourer les sanglantes fiançailles. Avec cette assurance intérieure et joyeuse que c’est Dieu qui nous sauvera, de toute façon. « Le péché est seulement dans la volonté. Que choisissons-nous de faire avec votre colère ? Nous devons convertir ces sentiments. Prier pour nos ennemis. Souffrir en silence. Quand le temps viendra, vous direz la vérité devant vos accusateurs, mais vous devez le faire sans rancœur. Offrez vos souffrances au Seigneur. Il les utilisera comme une arme puissante pour confondre le stratagème de votre ennemi. Croyez en la victoire ultime, et alors votre souffrance deviendra joie. » (Le Père Élijah, p. 462)

 

Nous devons, malgré la forme spectaculaire que va prendre cette dernière Passion, rester dans la confiance. Plus le Seigneur nous en fait subir, plus grandes seront les aides et les grâces reçues. Il ne nous fait jamais porter plus que nous ne pouvons porter. Et Jésus est même allé jusqu’à promettre aux Hommes, au moment de son premier départ au Ciel, que nous ferions des prodiges encore plus grands que les siens, grâce au Paraclet (l’Esprit Saint). Nous ne sommes donc pas en reste : « Nous avons l’avantage de deux mille ans de recul. Plus important, nous sommes les enfants de Dieu venus après la descente de l’Esprit Saint. » (Le Père Élijah, p. 157) De plus, les pouvoirs de l’Antéchrist sont limités. Aussi impressionnant soit-il, l’Antéchrist n’est que créature, et n’est pas Dieu. Il y a donc beaucoup de talons d’Achille, de points faibles. Notamment celui de ne pas être humble. Notamment celui de ne pas pouvoir accéder à notre esprit humain, la seule citadelle de notre être que Jésus peut pénétrer si nous Lui en laissons la possibilité. « Vos pouvoirs sont limités, et vous ne pouvez plus piéger mon esprit. » (Élijah s’adressant au Président, Le Père Élijah, p. 530) Comme le fait remarquer le père Gabriele Amorth, exorciste du Vatican, dans ses Confessions, « le démon, par lui-même, n’arrive pas jusqu’à l’âme. Il peut provoquer des troubles physiques, mais pas atteindre l’âme. Il l’atteint si l’homme la lui offre et lui permet de s’en emparer. » (p. 254) ; « Quand quelqu’un vit dans la grâce de Dieu, s’il a une vie de prière, un maléfice aura beaucoup de mal à l’atteindre. Beaucoup de mal. » (p. 266) ; « Le démon a la faculté de tuer, mais si et seulement si – et c’est déjà beaucoup ! – Dieu lui en donne la permission. » (idem)

 

Une fois dit cela, quel va être concrètement le scénario de la Victoire finale du Christ sur le diable, et de la réunification du Ciel et de la Terre ? Le déroulement « exact » a été donné par Jésus lui-même dans la Bible (c’est toute la vie de Jésus, et sa Passion vers la Résurrection, que l’Humanité va revivre) et surtout par saint Jean dans l’Apocalypse (mot qui signifie « Révélation » et non « fin du monde »), même si l’un comme l’autre ne connaissent pas la date exacte du grand Avènement. Jésus se fera même surprendre par son Père !

 

Cependant, grâce aux apparitions mariales et aux motions de l’Esprit Saint, nous ne sommes pas totalement démunis. Je vous invite, pour ma part, et parce que cela m’a été conseillé de source fiable par des religieux humbles, à rester attentifs à ces principaux signes des temps-là (sans pouvoir trop rentrer dans les détails) :
 

1) Un astéroïde qui pourrait frôler la Terre, qui ne serait repéré par les astro-physiciens que quelques heures avant l’Avertissement, et qui reviendrait la percuter que trois ans après pour les 3 Jours de Ténèbres.

2) L’Avertissement (appelé aussi « Illumination des Consciences »), sorte d’extase proche des Near Death Experience où Dieu se donnerait à connaître à tout le monde, et qui nous avertirait de ne pas accepter la puce électronique (vraisemblablement la « marque de la Bête », dans l’Apocalypse ; je vous renvoie à cet article).

3) Le Grand Miracle. Probablement 6 mois après l’Avertissement. Dans les lieux mariaux reconnus, la Vierge obtiendrait la guérison de tous les malades.

4) L’attaque de Rome après le Schisme, et la Passion du Pape François, probablement le dernier Pape, décrite dans le Troisième Secret de Fatima.

5) L’arrivée d’un Roi en France, monarque qui ne proviendrait pas des 3 branches royalistes actuelles.

6) Les Trois Jours de Ténèbres : analogue de l’épisode du passage de Dieu terrassant tous les premiers nés des Égyptiens dans l’Ancien Testament ; analogue aussi de la mise au tombeau de Jésus dans le Nouveau Testament.

 

Saint Michel Archange

Saint Michel Archange


 

À propos de la bataille finale entre les forces du Bien et les forces du mal, parmi les différents romans d’anticipation sur lesquels s’est basé mon travail sur l’Antéchrist, c’est le Court Récit sur l’Antéchrist de Vladimir Soloviev qui est le plus prolixe, même si Benson fait finir son roman Le Maître de la Terre en Terre Sainte, et pareil pour O’Brien avec Le Père Élijah. Logique : Armageddon (petit mont en Galilée dans la région nord de l’État d’Israël) est, d’après l’Apocalypse, le nom du lieu où s’accomplira la victoire suprême du Christ sur la Bête.

 

Dans le Soloviev, il est raconté qu’au départ, l’Antéchrist semble avoir largement le dessus sur l’armée du Christ : « L’Antéchrist faisait plein de prodiges. Il fit savoir que, détenteur de pouvoir des clés, il avait ouvert les portes qui séparaient le monde terrestre de l’au-delà et, effectivement, les relations entre vivants et morts, ainsi qu’entre hommes et démons, devinrent chose courante. La débauche mystique et la démonolâtrie prirent des formes inouïes. » (p. 187) Les chrétiens fidèles au Christ sont obligés de se retirer dans le désert de Palestine, où ils sont l’objet d’une terrible persécution. Pendant ce temps, l’Empereur (l’Antéchrist), après le concile œcuménique qu’il a organisé et pendant lequel il a renversé le pape Pierre II (chef des catholiques) ainsi que le vieillard Jean (chef des orthodoxes), fait élire comme pape, par ceux qui se sont ralliés à lui, Apollonius, déclarant, une fois élu, qu’il est aussi bien catholique qu’orthodoxe et protestant… un œcuménisme de charlatan. « La troisième année, l’apparition du grand mage provoqua chez de nombreux orthodoxes, catholiques et protestants des antipathies et des craintes sérieuses. On se mit à lire avec beaucoup plus d’attention et à commenter avec ardeur les textes de l’Évangile et des Épîtres sur le Prince de ce monde et l’Antéchrist. » (Court Récit sur l’Antéchrist, p. 171) Le professeur Pauli (chef des protestants) parvient, cependant, pendant la nuit, à s’approcher des corps du pape Pierre II et du starets Jean. Voici qu’ils reprennent vie (cf. Ap 11, 11) ! Et tous trois, réunis dans la même confession du Christ, célèbrent l’unité dans la foi retrouvée face à l’Antéchrist. À ce moment apparaît au ciel, dans la nuit, une femme, vêtue de soleil, avec la lune sous ses pieds et, sur sa tête, une couronne de 12 étoiles (cf. Ap 12). Tous les trois la prennent comme guide. C’est alors que tout se renverse.
 

Les Juifs, qui depuis quelques années étaient revenus en Palestine au nombre de 30 millions, et qui, dans un premier temps, avaient accueilli l’Antéchrist comme leur Messie, apprenant qu’il n’était pas même circoncis, se révoltent contre l’Empereur et s’apprêtent à l’affronter avec son armée lorsque la terre s’entrouvre et engloutit l’Antéchrist, l’antipape et toutes leurs troupes.
 

« Un malheur s’abattit sur l’Empereur, surprenant tout le monde : les Juifs se soulevèrent. Cette nation, qui comptait alors plus de 30 millions d’individus, n’était pas tout à fait étrangère à ce qui avait préparé et consolidé le succès universel du surhomme. Quand donc il s’était installé à Jérusalem, entretenant secrètement dans les milieux juifs des bruits selon lesquels son but principal était d’instaure le règne universel d’Israël, les Juifs l’avaient reconnu comme le Messie, et le dévouement enthousiaste qu’ils lui montraient ne connut pas de limites. Et voilà qu’ils se soulevaient soudain découvrant qu’il n’était pas un parfait israélite et qu’il n’était pas même circoncis. Surpris par cette explosion, l’empereur perdit contenance et fit paraître un édit qui condamnait à mort tous les Juifs et Chrétiens insoumis. Ceux qui n’avaient pas eu le temps de s’armer furent massacrés sans pitié par milliers et par dizaines de milliers. Mais bientôt une armée d’un million de Juifs s’empara de Jérusalem et bloqua l’Antéchrist dans Kharam ech-Cherif. Il ne disposait que d’une partie de la garde, qui ne pouvait vaincre la masse ennemie. Avec l’aide de l’art magique de son pape, l’Empereur parvint à traverser les rangs des assiégeants, et bientôt il réapparut en Syrie, à la tête d’une armée innombrable de païens de toutes tribus. Les Juifs s’avancèrent à sa rencontre, sans grandes chances de succès. Mais à peine les avant-gardes des deux armées étaient-elles en contact qu’il se produisit un tremblement de terre d’une puissance inouïe : sous la Mer Morte s’ouvrit le cratère d’un énorme volcan, et des torrents de feu engloutirent l’empereur avec ses multiples soldats. Entretemps, les Juifs s’étaient enfouis en direction de Jérusalem. Ils étaient déjà en vue de la Ville Sainte quand, dans un éclair, le Ciel s’ouvrit de l’Orient à l’Occident, et ils virent le Christ descendre vers eux dans ses habits royaux, avec les plaies des clous sur ses mains écartées. En même temps, la troupe des chrétiens conduits par Pierre, Jean et Paul, avançaient du Sinaï vers Sion, et, de divers côtés, accouraient vers eux d’autres foules enthousiastes : c’étaient tous les Juifs et les Chrétiens exécutés par l’Antéchrist. Ils avaient repris vie, et régnèrent avec le Christ pendant mille ans. » (p. 188)
 

Ce final fait d’ailleurs merveilleusement écho au psaume 106 de la Bible : « Dans le camp ils ont jalousé Moïse et Aaron, l’homme consacré au Seigneur. La terre s’ouvrit et engloutit Dâtan, elle recouvrit la bande d’Abirâm. Un feu consuma leur bande, une flamme dévora les impies. » Les Juifs reviennent vers Jérusalem pour y faire cause commune avec les chrétiens fidèles, mais, à cet instant, le ciel s’ouvre de l’Orient à l’Occident, et ils voient le Christ descendre vers eux avec ses habits royaux et les plaies de sa passion. C’est le retour de Jésus dans la Gloire.
 

 

k) Principal message des prophéties : la fermeté et l’humilité dans la Confiance en Marie

Apparitions à Fatima (Portugal)

Apparitions à Fatima (Portugal)


 

J’aurais peut-être dû commencer par là. Tant pis. Je finirai cet article sur l’Antéchrist (qui ressemble à un livre entier !) par cette notice concernant les fins dernières, les prophéties et les apparitions mariales. N’en ayez pas peur, et abordez-les avec la prudence et la joie qu’elles méritent. Car trop souvent, elles sont méprisées par ceux-là même qui devraient en parler (Mat 10, 7).

 

Sous prétexte que Jésus a dit clairement que « Nul ne sait le jour ni l’heure » où Il reviendra sur Terre (Mat 24, 36), qu’elles ne composent pas l’essentiel de notre foi, et que certains esprits faibles s’en servent pour (se) faire peur et leur faire dire l’inverse (la désespérance) que ce à quoi elles nous appelle (l’Espérance), les prophéties des fins dernières ne jouissent pas d’une très bonne réputation, y compris auprès des catholiques qui y ont accès. Je comprends leurs réticences. Les prophéties – et le bavardage Internet qu’elles inspirent à des sites superstitieux ou sédévacantistes – s’annoncent comme un terrain glissant, voire diabolique et prétentieux, un domaine qui mérite la prudence et le discernement. Et pourtant, si on les aborde avec humilité et dans l’Esprit Saint, elles sont l’occasion unique de laisser développer en nous sept grands trésors : le silence, la Crainte, l’Espérance, l’obéissance, l’humilité, la dévotion aux deux cœurs sacrés de Marie et Jésus (demandée notamment à Paray-le-Monial, à la Rue du Bac, à Kerizinen, en Pologne à sœur Faustine, à Fatima, à Pellevoisin), la Charité.
 
Marie M
 

Avec toutes les révélations ce que j’ai reçues à propos des fins dernières, je me suis vite rendu compte de la dangerosité et de la grandeur de mon enquête. De ma petitesse aussi ! J’ai vite compris que je ne pourrai pas tout dire aux autres. Pire, que je ne dirai presque rien. Et que si je me risquais à dévoiler quelque chose, ce sera, comme Jésus, imprécis, et à une infime minorité d’amis, ceux qui auront vraiment accueilli dans leur cœur les trois blancheurs de Don Bosco (= l’Église, l’Eucharistie et Marie). Les autres, ça leur passera au-dessus et ils ne retiendront que le côté effrayant et sensationnaliste des prévisions. Cette prudence et pudeur, gages de mon obéissance mais également de ma soumission à Dieu, c’est : déjà pour mon humilité (la tentation diabolique par excellence, c’est la connaissance ; et c’est le fait de chercher à « tout savoir puis à dire tout ce qu’on sait parce qu’on croit que ça nous appartient ») ; aussi parce que tous les pouvoirs et les clés du Salut appartiennent au Seigneur ; et parce que je ne serai ni reçu ni compris par tous, et que certains peuvent même se servir mal ou contre l’Église de ce que je suis en train d’apprendre. Donc en gros : vive le secret ! Je suis un pauvre ignorant aux lèvres et aux pensées impures. Le seul scoop à donner, c’est que la Croix du Christ, c’est-à-dire l’amour et l’humilité de Jésus, a vaincu la mort. Et en Elle : tous pouvoirs ! Le Cœur de Jésus a gagné contre satan, car il n’a pas répondu au mal par le mal, son Cœur n’a pas pu être pénétré par le diable. Plus il m’est donné de savoir des choses sur les fins dernières, plus il m’est demandé de les abandonner, de les offrir en actes de Charité et d’humilité, de laisser la victoire du Christ se planter en moi. Ce n’est pas moi, par mes propres moyens qui vais combattre et gagner quoi que ce soit, contrôler quoi que ce soit. C’est le Christ qui va gagner en moi. Le « comment » des Événements n’est qu’accessoire. Le plus important, c’est la confiance en Dieu. Tout ce qu’il y a à savoir se trouve déjà dans la vie terrestre du Christ, racontée dans les Évangiles. Les apparitions répétées de la Vierge aux 19e et 20e siècles (surtout en France) ne sont là que pour nous appeler à la conversion, à la pénitence, à la guérison, à l’humilité, à la consécration de notre cœur aux deux cœurs sacrés de Jésus et de Marie, à l’attachement à la Passion du Christ. C’est tout. Marie est le cou entre la tête (Jésus) et le corps (l’Église). Elle veut nous faire rentrer dans la pédagogie de son Rosaire et de son Cœur immaculé (par exemple, l’avant-dernier mystère du Chapelet c’est l’Assomption… d’où ses apparitions à San Damiano ; le dernier mystère du Chapelet c’est Marie Reine de la Paix… d’où ses apparitions à Medjugordje), tout comme Jésus veut faire rentrer son Église dans le Mystère de sa Passion et de sa Résurrection.
 
Marie Marthe Robin
 

La Vierge Marie est dépositaire du Mystère de la Croix. Elle est celle qui permet à Jean d’être au pied de la Croix et d’en vivre. Ces grands Événements lui sont remis, elle doit préparer l’Église à cela et initier l’Église à la compassion. Il n’y a pas de révolte de Marie à la Croix. Elle-même ne laisse pas le mal envahir son cœur. Comme son Fils, elle choisit d’aimer et ne laisse pas le diable entrer en elle. C’est pour cette raison qu’il nous faut nous consacrer à Marie pour rentrer dans ces Événements, ne pas se laisser troubler. Il nous faut regarder la façon dont la sagesse de Dieu s’y est prise pour nous faire rentrer doucement dans ce Mystère. La meilleure des armes contre les attaques mondiales de satan, c’est le Rosaire (Jésus l’a bien montré récemment à cet évêque nigérian) et notre soumission priante au Sacré-Cœur de Jésus et au Cœur immaculé de Marie. Nous devons, aux quatre coins du monde, faire comprendre la nécessité de cette dévotion, et pourquoi pas, organiser des cérémonies officielles (par exemple à Paris, à la Basilique du Sacré-Cœur ou à la Chapelle de la Rue du Bac) pour réciter en groupe l’acte de consécration ci-dessous.
 
Coeurs
 

ACTE DE CONSÉCRATION AUX DEUX CŒURS DE JÉSUS ET DE MARIE

Divin Cœur de Jésus, transpercé par Amour pour nous,

et Cœur Immaculé de Marie,

embrasé de la même flamme d’Amour,

Me voici avec le désir sincère de me consacrer

à vos Deux Saints Cœurs

par un Pacte d’Alliance total et absolu.
 

Je veux ainsi adhérer pleinement

à l’Alliance de vos Deux Cœurs,

totalement consacrés au dessein de Salut

du Père des Cieux

pour l’humanité et la création entière.
 

Alors je vous en supplie

Envoyez sur moi, maintenant,

L’Esprit Saint pour embraser mon Cœur

de l’Amour même de vos Deux Saints Cœurs Unis.
 

Par l’Intercession du bienheureux Saint Joseph,

le premier des consacrés à l’Alliance de vos Deux Cœurs,

veuillez accueillir et faire fructifier mon humble consécration.
 

« Tout à Toi, par Marie, la Rose des roses. » (Totus Tuus, per Mariam Rosam rosarum.)

« Pour Servir ou périr. » (Servire aut perire.) Amen.
 

Faut-il délaisser les prophéties, sous prétexte que leurs interprétations peuvent nous éloigner de Dieu et être dangereuses (car récupérées), qu’elles sont pour la plupart imprécises, qu’elles n’ont pas valeur de dogmes et qu’elles ne sont pas toutes validées par l’Église ? Non. Déjà parce que l’Esprit Saint continue d’agir dans nos vies et d’inspirer de plus en plus de nos contemporains (Pourquoi donc freiner l’élan de Pentecôte que nous connaissons aujourd’hui ?), d’autre part parce que ça rendra triste la Vierge (comme à la Salette) de voir que nous ignorons ses appels pressants plein d’Espérance.

 

Il est clair que nous ne devons pas chercher à tout savoir. Si nous savons certaines choses, si nous cherchons à en savoir davantage, si certaines informations nous sont données, tant mieux. À partir du moment où elles nous rendent plus libres et plus joyeux ! Si, en revanche, ces révélations – ou cette quête des révélations – se transforment en fièvre ou en trophée qui font parler Dieu à sa place et qui ne nous amènent pas à l’humilité, ça ne va plus.

 

Dieu nous invite à sa fête, à ses noces avec l’Humanité. Il est donc tout à fait logique qu’Il réserve des cadeaux et des surprises à ses invités, et qu’Il n’ait absolument pas envie de nous forcer à venir, de nous prédire exactement tout ce qui va se passer (sinon, où seraient notre liberté et sa propre liberté ? où serait la confiance mutuelle ? où serait notre joie et la surprise ? où serait l’inattendu pardon ?), ni qu’on s’immisce excessivement dans Ses préparatifs. C’est Sa Fête. C’est lui le Roi. Même la Vierge Marie et Jésus ne sont pas au courant de la date exacte) ! Ils ne sont juste chargés que de nous inviter à nous préparer et à rentrer dans la joie de l’Événement. Si l’un de nos proches nous prépare un cadeau, va-t-on le lui réclamer avant qu’il n’arrive ? Va-t-on chercher à savoir coûte que coûte ce que c’est, combien il a coûté, où l’a-t-il acheté, décide-t-on du moment où nous allons le recevoir ? Va-t-on flipper comme des malades, le refuser, ou au contraire l’arracher des mains de notre ami ? Non. Une fête, ça s’honore avec la pudeur du secret, avec l’humilité de l’ignorant, avec la joie, avec la confiance, avec le respect à l’égard de notre Bienfaiteur. Il en est de même avec les fins dernières et les prophéties.

 

Il y a un grand principe qu’il ne faut jamais oublier : Dieu est pudique. Il n’aime pas qu’on cherche à savoir comment se font ses miracles. Si nous cherchons à savoir, nous empêchons Dieu d’agir dans notre vie. C’est important de laisser à Dieu faire ce qu’Il doit faire. S’il veut multiplier, il multipliera. Tout comme pour les miracles, ce n’est pas sur les prophéties que doit reposer notre foi. Celles-ci ne sont que des bonus, des extras (Sainte Thérèse de Lisieux l’a bien compris puisque son livre de chevet était La Fin du monde présent de l’Abbé Arminjon !). En aucun cas elles ne doivent se substituer à la vie du Christ, être utilisées pour impressionner ou effrayer, être mises au-dessus de la Bonne Nouvelle de la Résurrection mondiale dans laquelle Jésus nous entraîne, être prises au pied de la lettre, devenir un prétexte pour que nous devenions encore plus matérialistes et individualistes (« Vite, je me crée des réserves de bouffe pour trois ans, déménage en Bretagne, me fais mon stock de cierges bénis, achète de l’aubépine et de l’argile verte !!! »). Si Dieu veut nous sauver, Il nous rejoindra là où nous sommes et opèrera des choses extraordinaires. Comme disait Saint Augustin, nos prières sont toujours exaucées par Dieu, car Il fait toujours au mieux pour nous, ici et maintenant. Nous ne devons pas en douter. Celui qui veut garder sa vie la perdra, verra sa maison pillée par les voleurs ; celui qui perdra sa vie pour Dieu la gagnera. Concernant les prophéties, il faut faire attention à ce que l’on dit : certains peuvent travailler du chapeau, et calquer leur vie terrestre en fonction de tout ça, en suivant trop matériellement les prédictions. Si nous n’arrivons pas à remplacer les prophéties lues sur Internet par un message positif « Jésus je t’aime », c’est que nous n’écoutons pas ce qu’elles ont à nous dire. Beaucoup de gens sont au courant des temps derniers. Y compris les athées qui farfouillent sur Internet. Ils lisent plein d’articles, pillent du « scoop » apocalyptique, paniquent, cherchent une sécurité humaine, font des réserves. Nous, au contraire, nous devons toujours essayer de rassurer, de ramener les gens sur un chemin d’amour du prochain. La seule conversion, c’est l’amour du prochain. Toutes les révélations privées, ce qui va se passer, ce n’est pas ça qui convertit quelqu’un, ce n’est pas ce qui me nourrit. La vraie nourriture, c’est la rencontre avec Jésus, l’Esprit Saint, Marie. La Vierge Marie connaît ses enfants et elle les conduit. Communiquer les Événements (même si c’est utile), ce n’est pas ça qui nourrit les gens. Le véritable rôle des prophéties, c’est de faire avancer vers le Christ. Si je fais des provisions et que je ne sais pas partager, ce sera stérile et on me les piquera ; si je sais les partager, je ne manquerai de rien. Le meilleur moyen de garder, c’est de donner, car Dieu nous appelle à la Charité. Et c’est en multipliant les actes de Charité, de service, de réconciliation, d’oraison, de miséricorde (ce n’est pas pour rien qu’à la veille du temps de la Justice – temps irréversible où le Jugement de Dieu tombera -, le Pape François inaugure l’Année jubilaire de la Miséricorde, le 8 décembre 2015 jusqu’au 20 novembre 2016) que nous nous préparerons au mieux aux fins dernières. C’est le moment ou jamais d’aller se confesser à un prêtre, de pardonner, de faire des grands projets de Charité !
 
Vierge couronnée
 

Bref, j’aurais envie de dire : les prophéties parlant de la fin des temps nous avertissent que nous ne devons rien changer à notre vie de serviteurs fidèles du Christ. Si la Vierge et les prophètes nous apparaissent, c’est simplement pour que nous continuions à nous convertir comme avant, et parce que nous tardons à le faire. Ainsi, pour nous tous, contemporains de la même période, pas de grands scoops outre mesure ni de surprises à l’horizon ! Désolé de vous décevoir. Jésus, de tous temps, nous a prévenus (en mode toujours conditionnel) des conséquences de nos manques de confiance en Lui. Les prophéties ne dérogent pas à cet appel répété à la confiance, à l’abandon, à l’assurance dans la joie et la foi. Elles travaillent davantage à notre éducation spirituelle atemporelle qu’à notre éducation temporelle et matérielle, qu’à notre savoir et notre connaissance du futur. Soyons prudents sans être sourds.

 

Il arrive que certaines prophéties paraissent floues et inexactes. Non pas qu’elles ne soient pas valides ni à être étudiées : mais il convient de les recevoir pour leur juste valeur, comme des élans bibliques (Livre de Daniel, Évangiles, Apocalypse, etc.) et des élans de l’Incarnation de l’Esprit en nous, en sachant que si elles ne se réalisent pas exactement, c’est que soit elles ne viennent pas de l’Esprit, soit la Miséricorde de Dieu, l’action de nos prières et de notre pénitence, l’intercession de la Vierge et de l’armée de ses saints et de ses anges, les ont déplacées et reportées. C’est pourquoi il ne faut pas les mépriser ni s’en méfier. Comme le dit la Lettre de saint Paul aux Thessaloniciens (5, 19-21), nous avons juste à en prendre ce qu’il y a de bon, et laisser le reste de côté. « N’éteignez pas l’Esprit. Ne méprisez point les prophéties. Éprouvez toutes choses ; retenez ce qui est bon. »

 

Que nous reste-t-il donc à faire avec tout ça ? Face à la courte échéance qu’annoncent beaucoup de prophéties sur les fins dernières, nous pouvons juste nous réjouir et nous apaiser de l’immense privilège que Dieu nous offre de faire partie de LA Génération humaine qui connaîtra en « live » et de son vivant le Jugement Dernier et la Venue de Jésus sur Terre. À moins d’une conversion massive et collective de l’Humanité, les « Événements » (comme on dit dans le jargon), c’est vraisemblablement pour les dix prochaines années à venir. Pas davantage. C’est fou, je sais bien. C’est effrayant à certains égards, mais fondamentalement réjouissant et grandiose : nous qui voulions d’une grande vie et d’une mort héroïque, les occasions de martyr, d’évangélisation, de miracles, de signes à observer dans le Ciel et dans notre cœur, de cadeaux divins, de conversions inattendues, d’entraide, de surprises et de grands bouleversements planétaires, d’amitiés fortes et de communions accélérées, vont se présenter comme à nulle autre époque pareille ! Quelle chance ! Mais oui, quelle chance de faire partie de ce siècle et d’être aussi proche des portes du Ciel ! Nous allons voir Marie et Jésus, et toute leur armée, de notre vivant. C’est dingue. Nous allons assister au Combat final. Les films américains à gros budget et les jeux vidéo, à côté, c’est de la gnognote !

En nous attaquant, satan prétend nous sauver de nous-même ! #foutagedegueule

En ce moment, sur les réseaux sociaux, certains persifleurs trouvent le moyen, pour se justifier de calomnier sur mon compte, de me rêver « en souffrance ». Étant donné que je parle beaucoup du lien entre homosexualité et souffrance (en réalité, du lien entre pratique homosexuelle et souffrance : la nuance est de taille !), je serais donc, selon eux, « un homo perturbé », « à sauver de la dépression ». Ignorent-ils qu’on n’est pas ce qu’on dénonce ? Et que la souffrance de l’homosexualité réside surtout dans la mise en application de son désir homosexuel ? Et le comble, c’est qu’ils me descendent tandis qu’ils m’assurent sincèrement de prier pour moi ! Leur médisance à mon encontre leur apparaît comme une « solidarité », un oeuvre de charité, un magnifique moyen de manifester leur « compassion » pour ma « douleur ». Alors qu’ils s’affairent précisément à créer cette même douleur qu’ils m’imputent, ils prétendent m’en délivrer ! Non mais là, sur ce coup-là, satan est fort de café dans l’hypocrisie !^^

Code n°4 – Amant diabolique (sous-codes : Faust / Regards / Langue au chat / L’Autre)

Amant diabolique

Amant diabolique

 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

Aussi surprenant que cela puisse sembler, ce n’est pas parce que les artistes et les intellectuels homosexuels (souvent athées auto-proclamés) tentent maintes et maintes fois de prouver que l’amour homosexuel est merveilleux et positif qu’ils en construisent un portrait idyllique dans leurs créations. Tout le contraire ! C’est sous les traits du diable qu’est décrit par le héros homosexuel – et parfois par les personnes homosexuelles athées elles-mêmes, c’est ça le comble ! – l’amant tant désiré. Cet être-sans-nom, appelé mystérieusement « L’Autre », au regard pénétrant et troublant, peut s’incarner partiellement en un jeune adulte innocent, magnifique, muet, qui fait signer à la personne qu’il subjugue un contrat à l’encre sympathique, lui imposant ainsi une perverse loi du silence. Il est possible que le mythique héros faustique homosexuel, qui vend son âme à ce perfide « amant double » félin sous la pression de ses vils instincts, en perde sa langue… puisqu’il donne, littéralement, sa langue au chat. La métaphore du diable est une manière, pour de nombreuses personnes homosexuelles, de dire tout bas l’ambiguïté de l’amour (des amours) qu’elles sont en train de vivre : il a le goût et la forme de l’Amour vrai, mais il n’en est pas un exactement. Et c’est cette confusion qui ressemble à une lente descente aux enfers dans le couple homosexuel.

 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Première fois », « Coït homosexuel = viol », « Se prendre pour Dieu », « Vampirisme », « Violeur homosexuel », « Liaisons dangereuses », « Homme invisible », « Regard féminin », « Désir désordonné », « Chat », « Oubli et amnésie », « Homosexuel homophobe », « Se prendre pour le diable », à la partie « le diable au corps » du code « Ennemi de la Nature », à la partie « Fixette sur un amant perdu et déifié » du code « Clonage », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 
 

Pour accéder au menu de tous les codes, cliquer ici.

 
 

FICTION

 
 

a) L’amant homosexuel prend les traits du diable :

Film "Hellbent" de Paul Etheredge-Ouzts

Film « Hellbent » de Paul Etheredge-Ouzts


 

On peut voir dans les œuvres artistiques suivantes que le personnage homosexuel a le diable pour amant : cf. le roman Le Diable en personne (2001) de Robert Lalonde, le film « Chloe » (2009) d’Atom Egoyan (avec la belle call-girl lesbienne intrusive), la nouvelle Ernesto (1953) d’Umberto Saba, le film « Armaguedon » (1976) d’Alain Jessua, le film « The Devil’s Playground » (1976) de Fred Schepisi, le film « Diaboliquement vôtre » (1967) de Julien Duvivier, le tableau Ange au couteau de Michael Sebah, le film « Hellbent » (2005) de Paul Etheredge-Ouzts, le film « Nowhere » (1997) de Gregg Araki, le roman L’Ange en décomposition (1970) de Yukio Mishima, le roman Méphisto (1936) de Thomas Mann, le roman Y De Repente, Un Ángel (2005) de Jaime Bayly, le film « Le Messager » (1971) de Joseph Losey, le film « Adrien et le loup » (1999) de Sylvie Lazzarini, le film « Madame Satã » (2001) de Karim Ainouz, le film « Les Amants diaboliques » (1943) de Luchino Visconti (avec Gino, l’étranger diabolique), le film « Aniel » (1997) de Francois Roux (avec Aniel, celui par qui le trouble arrive), le film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho » (« Au premier regard », 2014) de Daniel Ribeiro (avec Gabriel, le nouvel élève débarquant à l’improviste et dont personne ne connaît l’origine), le film « Fraulein Doktor » (1968) d’Alberto Lattuada, le film « Rendez-vous de satan » (1972) d’Anthony Ascott, le film « L’Amant bulgare » (2003) d’Eloy de la Iglesia (avec Kyril, la figure de l’étranger), le film « Intrusion » (2003) d’Artémio Benki (avec Florence, l’étrangère démoniaque), le film « L’Inconnu du Nord-Express » (1951) d’Alfred Hitchcock (avec Bruno, l’intrusif amant), le film « Teorema » (« Théorème », 1968) de Pier Paolo Pasolini (avec l’étranger qui détruit une famille bourgeoise entière), le roman L’Inattendue (2003) de Karine Reysset, le film « L’Inattendue » (1987) de Patrick Mimouni, le film « Trop (peu) d’amour » (1997) de Jacques Doillon, le film « Dallas Doll » (1993) d’Ann Turner, le film « When The Right Hand Sleeping » (2002) d’Hiroyuki Oki, le film « Nettoyage à sec » (1997) d’Anne Fontaine, le film « En route » (2004) de Jan Krüger (toujours avec la figure de l’étranger diabolique), le film « The Grotesque » (1995) de John-Paul Davidson, le film « Ti Kniver I Hjertet » (1995) de Marius Holst, le roman La Vallée heureuse (1939) d’Anne-Marie Schwarzenbach, le film « Amor Maldito » (1986) d’Adelia Sampaio, le film « A Un Dios Desconocido » (1977) de Jaime Chavarri, le film « Gypo » (2005) de Jan Dunn, la chanson « I Fell In Love With The Devil » dans le film « Wild Side » (2003) de Sébastien Lifshitz, la chanson « La Légende de Rose Latulipe » de Cindy et Ronan dans le comédie musical Cindy (2002) de Luc Plamondon, la chanson « La Beauté du diable » de la Diva dans la comédie musicale La Légende de Jimmy (1992) de Michel Berger, le film « Lucifer Rising » (1974) de Kenneth Anger, le film « Shoot Me Angel » (1995) d’Amal Bedjaoui, le film « Love Is The Devil » (1998) de John Maybury, le film « The Demon Fighter » (1982) de Chu Yin-Ping, les photos Anges et Démons de Jean-Daniel Cadinot, le film « À cause d’un garçon » (2001) de Fabrice Cazeneuve, la chanson « L’adorer » d’Étienne Daho, le film « Le Masque du démon » (1960) de Mario Bava, le film « Mort à Venise » (1971) de Luchino Visconti (avec le jeune Tadzio), le film « Wishing Stairs » (2003) de Yun Jae-yeon, le film « Créatures célestes » (1995) de Peter Jackson, la chanson « Bohemian Rhapsody » du groupe Queen, le roman Cœur de démon (2003) de Claude Neix, le roman Petite cuisine du diable (2004) de Poppy Z. Brite, le film « The Pollen Of Flowers » (1972) d’Ha Kil-jong, le roman Un Ange cornu avec des ailes de tôle (1994) de Michel Tremblay, les romans L’Ange maudit (2000) et L’Innocence du diable (2001) d’Eyet-Chékib Djazari, le roman Un Ange est tombé (2000) de Claude Neix, le film « Amour et mort à Long Island » (1997) de Richard Kwietniowski, les tableaux Les Démons de Manu (1998) et Bouc et mystère (1991) de Michel Giliberti, le roman Quand tu vas chez les femmes (1982) de Christiane Rochefort, le film « Speed Demon » (2003) de David DeCoteau, le dessin animé « South Park, plus long, plus grand et pas coupé » (1998) de Trey Parker (avec le couple gay Saddam Hussein/Satan), le roman La Colline de l’ange (1989) de Reinaldo Arenas, le roman L’Homme de ma mort (2002) de Jonathan Denis, le film « Chambre 666, n’importe quand » (1982) de Wim Wenders, le roman La Sombra Del Humo En El Espejo (1924) d’Augusto d’Halmar (avec la description de Zahir), le film « Rimbaud Verlaine » (1995) d’Agnieszka Holland, le film « Bloody Mallory » (2002) de Julien Magnat, le poème « L’Ange double » de Carson McCullers, la chanson « La Java du diable » de Charles Trénet, le roman L’Étranger de la famille (2001) d’Olivier Lebleu, le roman El Ángel Descuidado (1965) d’Eduardo Mendicutti, le film « Le Serpent » (1972) d’Henri Verneuil, le film « De Duivel Te Slim » (« Plus Malin que le diable ») (1960) d’Edith Kiel, le film « Toto Che Visse Due Volte » (1998) de Daniele Cripi et Franco Maresco, le film « Lucifer-Sensommer : Gul Og Sort » (1990) de Roar Skolmen, le film « L’Ange noir » (1993) de Jean-Claude Brisseau, le roman Le Garçon sur la colline (1980) de Claude Brami, le dessin L’Ange à l’envers (1976) d’Endre Rozsda, le tableau Coït subliminal (2003) de Nikolaï Saoulski, les tableaux de Priscilla Cuvelier, la photo Le Diable – Pierre (1997) de Pierre et Gilles, la photo Les Affranchis (2003) de J.-P. David Ponce-Blanc, la photo Ange ou démon… car qui veut faire l’ange fait la Bête de Patrick Sarfati, la photo Regard d’un ange (1986) de Jean-Claude Lagrèze, le film « Le Dénommé » (1988) de Jean-Claude Dague, le film « Le Sang du poète » (1930) de Jean Cocteau (avec l’ange noir), le film « L’Étranger » (1967) de Luchino Visconti, le film « My Brother The Devil » (2012) de Sally El Hosaini, les films « Les Diables » (1971) et « Le Messie sauvage » (1972) de Ken Russell et Derek Jarman, la chanson « Dile A Tu Amiga » de Dalmata (avec le diable charmant le couple de lesbiennes et le chanteur), le film « The Devil Wears Prada » (« Le diable s’habille en Prada », 2005) de David Frankel, le film « Kaboom » (2010) de Gregg Araki (avec Loreleï, l’amante diabolique et accaparante), le film « Portrait de femme » (1996) de Jane Campion (avec Osmond, le mari d’Isabelle), le roman Le Diable à Westease (1947) de Vita Sackville-West, le film « Birthday » (2010) de Jenifer Malmqvist (avec le personnage de Fredrick), la série Ainsi soient-ils (2014) de David Elkaïm (dans l’épisode 3 de la saison 1), le film « Respire » (2014) de Mélanie Laurent (avec Sarah, l’une des héroïnes lesbiennes, la nouvelle élève qui débarque dans la classe de Charlène, et qui va la détruire), le film « Un Beau petit Diable » (« Handsome Devil », 2016) de John Butler, la chanson « Parce que » de Daniel Darc et Bill Pritchard, la chanson « Imprudentes ! » de Georgius, le téléfilm « Un Noël d’Enfer » – « The Christmas Setup » – (2020) de Pat Mills, etc.

 

« ’L’enfer n’existe pas’, dit Jane. ‘Avant, je faisais des cauchemars à propos des Russes, et après, j’ai fait des cauchemars dans lesquels Greta Mann m’attirait à une fête avec le diable. Parfois, les rêves se mélangeaient et les Russes étaient là avec Greta, en train de m’attendre. » (Frau Becker et Jane l’héroïne lesbienne, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 215) ; « Un Russe, messager de l’Enfer. » (la figure de Sergueï Eisenstein, homosexuel, dans le film « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway) ; « J’ai passé deux enfers à vous aimer ! » (Anthony, le héros homosexuel s’adressant à son amant Scrotes, dans le roman At Swim, Two Boys, Deux garçons, la mer (2001) de Jamie O’Neill) ; « On parle du loup, on en voit la queue. » (Jefferey Jordan dans son one-man-show Jefferey Jordan s’affole, 2015) ; etc.

 

B.D. "Fallen Angels" de Cuho et Cantero

B.D. « Fallen Angels » de Cuho et Cantero


 

Dans certains films, il arrive que des personnages disent à leur amant homosexuel qu’ils voient en lui une créature qu’ils n’arrivent pas à identifier, autrement dit l’androgyne : « C’est quelque chose en toi qui me dégoûte. Je ne pense pas que ce soit directement lié au physique » entendons-nous dans le film « La Confusion des genres » (2000) d’Ilan Duran Cohen. « Vous êtes une fille étrange. Tombée du ciel. » (Carol, l’héroïne lesbienne s’adressant à son amante Thérèse, dans le film « Carol » (2016) de Todd Haynes) ; « Mon ange. Tombé du ciel. » (idem) Dans le film « Le Cimetière des mots usés » (2011) de François Zabaleta, Denis, l’un des héros homosexuel, parle « du démon qu’il s’est choisi ». Parfois, la menace satanique vient directement d’un personnage homosexuel qui au départ s’adresse à son amant sur le ton de la blague, mais qui finit par s’exécuter sérieusement à la fin, comme Mona dans le film « My Summer Of Love » (2004) de Pawel Pawlikovsky. Le diable cinématographique est invisible, et pourtant, certains personnages lui parlent. « Suppôt de Satan ! Étron de Belzébuth ! » (le Père 2 s’adressant à son futur gendre, dans la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud) Par exemple, dans le film « Espacio 2 » (2001) de Lino Escalera, Roberto, pendant qu’il se masturbe tout seul dans son salon, s’adresse à quelqu’un que nous ne voyons pas à l’image mais qui le malmène (« Va te faire foutre connard ! Fils de pute ! »). Dans le film « À trois on y va ! » (2015) de Jérôme Bonnell, Michel dit à la femme qu’il aime, la très bisexuelle Mélodie, qu’elle est « diabolique », ce à quoi elle lui répond : « J’ai aucune envie d’être diabolique. C’est la vie qui est diabolique. ». Quelques voix narratives laissent entendre qu’elles ont fini par se prendre pour des êtres ayant vendu leur âme à l’antéchrist, et devenant, par contamination, le diable en personne. Dans le film « The Talented Mister Ripley » (« Le Talentueux M. Ripley », 1999) d’Anthony Minghella, Dick reconnaît chez Tom, l’homme amoureux de lui, le diable : « C’est démoniaque. Tu fais toujours ça avec ton cou. » Il finit par lui donner des idées puisque cette présomption se révèlera concrète : Tom va effectivement le tuer.

 
 

Hubert – « De toute façon vous m’aviez déshonoré bien avant d’avoir déshonoré ma famille. Quant à ma sœur Adeline, ne vous en formalisez pas, je l’avais déshonorée bien avant vous.

Cyrille – Vous êtes diabolique, Hubert. »

(Copi, Une Visite inopportune, 1988)

 
 

Dans la pièce Confessions d’un vampire sud-africain (2011) de Jann Halexander, Pretorius tombe amoureux de Dracula (nom qui signifie « diable »). Dans le one-man-show Parigot-Brucellois (2009) de Stéphane Cuvelier, « Big Demon » est le nom du prostitué transsexuel travaillant au Bois de Boulogne. Dans la pièce Bill (2011) de Balthazar Barbaut, Lucifer est l’amant homo SM de l’archange Raphaël, défini comme « une pédale », et super efféminé. Dans le film « My Summer Of Love » (2004) de Pawel Pawlikovsky, dont j’ai fait référence un peu plus haut, Mona s’adresse à son amante Tamsin en des termes explicites : « Je suis le diable et je suis venu pour te tuer. » À la fin du film, elle cherchera d’ailleurs à la noyer. Dans le film « OSS 117 : Rio ne répond plus » (2009) de Michel Hazanavicius, l’amant homosexuel apparaît comme le tentateur du personnage joué par Jean Dujardin, avec sa pomme d’amour qu’il déguste langoureusement (c’est d’ailleurs pour cette raison que l’espion lui répondra : « Serpent, je ne mange pas de ce pain-là. ») Dans le film « Saisir sa chance » (2006) de Russell P. Marleau, Chance, le héros homosexuel, est attaqué dans son lycée, en début de film, par deux camarades déguisés en diable. Dans le roman Cosmétique de l’ennemi (2001) d’Amélie Nothomb, Texor est l’étranger diabolique qui s’introduit dans la vie de Jérôme. Dans le film « Moonlight » (2017) de Barry Jenkins, Chiron, le jeune héros homosexuel, et son amour de jeunesse, Kevin, se retrouvent à l’âge adulte à cause d’une chanson qui a réactivé leurs souvenirs et leur « amour, et qui commence ainsi : « Salut l’Inconnu ». Dans le film « Social Butterfly » (2012) de Lauren Wolkstein, une Américaine de 30 ans fait irruption dans une soirée d’adolescents sur la Côte d’Azur et aucun d’entre eux ne comprend les raisons de sa troublante présence. Dans la pièce Lettre d’amour à Staline (2011) de Juan Mayorga, Staline est le tentateur homosexuel pénétrant dans le couple Boulgakov/Boulgakova. Dans le film « Tenue de soirée » (1987) de Bertrand Blier, Bob, un cambrioleur, débarque dans la vie d’un couple ordinaire, Antoine et Monique, pour initier Antoine à l’homosexualité, et créer le désordre. Dans la pièce L’Autre Monde, ou les États et Empires de la Lune (vers 1650, adaptée en 2008) de Savinien de Cyrano de Bergerac, le héros est visité par « le démon de Socrate », autrement dit l’amour platonicien grec. Dans la pièce Happy Birthday Daddy (2007) de Christophe Averlan, l’amant androgynique, mi-homme mi-femme, de par sa dualité, est décrit comme diabolique. Dans la comédie musicale Angels In America (2008) de Tony Kushner, Joe, en évoquant les illustrations d’une Bible pour enfants de sa jeunesse, dit qu’il s’est depuis toujours identifié au Jacob en lutte contre un séduisant ange blond. Dans la pièce Un Barbu sur le net (2007) de Louis Julien, la relation homosexuelle est décrite comme un « enfer », et l’amant prend la forme d’un « démon ». Le héros du ballet Alas (2008) de Nacho Duato voudrait « pouvoir être capable de s’enthousiasmer avec le diable ». Dans la pièce Hétéropause (2007) d’Hervé Caffin et de Maria Ducceschi, Hervé appelle son copain Alex « la Créature ». L’androgyne diabolique, c’est l’être invisible qui parle à l’intérieur du personnage du roman Les Mauvaises Pensées (2005) de Nina Bouraoui (« Je porte quelqu’un à l’intérieur de ma tête », p. 9) ou bien l’« implacable maître » intérieur évoqué par Truman Capote dans sa préface de Musique pour caméléons (1979). Dans les chansons de Mylène Farmer, il est fréquemment question de la rencontre avec l’ange diabolique : « Il est entré dans mon lit sans un bruit, sans même troublé la nuit… L’Ange m’a fait croire au bonheur. » (cf. la chanson « L’Annonciation ») ; « L’Inconnu a meurtri plus d’un cœur. » (cf. la chanson « L’Innamoramento ») ; « Ange, parle-moi. De voir qu’en lui, ils étaient deux. Je sais ce que mentir veut dire pour moi. […] Don’t let me die, l’Ange, don’t let me die, l’Archange. Tu sais Dieu a rompu son pacte avec cet étranger. » (cf. la chanson « Ange, parle-moi ») Dans la pièce Angels in America (2008) de Tony Kushner, Prior prend son amant Louis pour un fantôme. Dans le roman La Confusion des sentiments (1928) de Stefan Zweig, l’amant homosexuel, ce « cher fantôme » (p. 7), est comparé à un « hôte inquiétant » (p. 85), à « une inquiète déchirure » (p. 28) à « un homme au double aspect » (p. 34) : « Sa voix chaude et compatissante ouvrait en moi quelque chose comme une blessure. » (p. 108) Dans la chanson « Paradize » du groupe Indochine, l’amant diabolique est le double narcissique : « Toi, tu viens par ici. Je dis toi regarde moi Toi. Si tu me vis Oui. Toi, suis-moi au paradis – so far a wheel – s’éclaircir pour la dernière fois à s’introduire juste au dessus de moi et tu verras ce qu’il nous reste à faire/on revient de loin. » Voltaire, dans L’Anti-Giton (1714), parle de l’amant homo comme un imposteur amoureux : « Ce pauvre dieu courut de ville en ville […] quittait les cieux pour éprouver les hommes. […] D’un beau marquis il a pris le visage. […] Trente mignons le suivent en riant. […] Ce faux amour, […] cet enfant jaloux, il vole parmi nous. » Dans le film « Rose et Noir » (2009) de Gérard Jugnot, Saint Loup voit son amant-ennemi dans son propre lit. Dans le film « La Mante religieuse » (2014) de Natalie Saracco, Greg, le héros homosexuel, taquine le couple lesbien Jézabel/Erika en les qualifiant de « deux diablesses ». Dans la pièce Un Cœur en herbe (2010) de Christophe et Stéphane Botti, Olivier essaie de dissuader le jeune Mathan de croire en l’amour homo, car ses onze années de couple avec Jacques ont été visiblement éprouvantes : « J’espère que ça ne te fait pas rêver. C’est l’enfer. » Dans le roman At Swim, Two Boys (Deux garçons, la mer, 2001) de Jamie O’Neill, Anthony, l’homosexuel âgé, essaie de jeter le jeune Jim dans les bras du jeune Doyler : « C’est un ami qui va venir. Pas un étranger. Quand on aime quelqu’un, il n’y a rien à faire. » Dans le film « Thelma » (2017) de Joachim Trier, la belle Anja va attirer dans ses filets la jeune et timide Thelma. Leur liaison donne lieu à des phénomènes physiques (crises d’épilepsie d’une grande violence pour Thelma) mais également surnaturelles, de nature démoniaque. Dans la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn, Adam, le héros homosexuel, se targue de regarder des films satanistes sur Porn Hub où par exemple « un démon en images de synthèse baise un cheval. » (c.f. épisode 1 de la saison 1). Dans l’épisode 3 de la saison 1, l’Inquisiteur extraterrestre de la B.D. de Lily fait son coming out : « ‘Je suis gay !’ dit l’Inquisiteur. » Dans l’épisode 4 de la saison 1, Tanya et son amante Ruthie regardent un docu sur les requins (à défaut de pouvoir faire l’amour), et Tanya regarde Ruthie en souriant de toutes ses dents, d’un air diabolique et concupiscent. Dans le téléfilm Under the Christmas Tree (Noël, toi et moi, 2021) de Lisa Rose Snow, les deux amantes lesbiennes Charlotte et Alma se rendent à une fête de Noël démoniaque où l’une est déguisée en démon et l’autre en ange.

 

Dans la pièce Gouttes dans l’océan (1997) de Rainer Werner Fassbinder, Franz, le jeune héros homosexuel, garde un mauvais souvenir de son premier baiser homo qu’un certain Joachim lui aurait arraché dans un foyer de garçons : « Je me suis senti très mal. » Plus tard, il suit dans la rue un homme de quinze ans de plus que lui, Léopold, qui l’entraîne chez lui. Avant de passer à la casserole, Léopold propose à Franz de jouer aux petits chevaux… et il s’amuse, quand il lance les dés, de tomber trois fois de suite sur un « 6 » (je rappelle que 666 est le chiffre attribué au diable). Ensuite, Franz lui raconte le cauchemar qu’il a fait à propose de son beau-père, qu’il a pourtant désiré sexuellement : « Puis il est venu dans mon lit. J’avais l’impression de devenir de plus en plus petit. Comme une fille. Puis il est rentré en moi. » Excité par son histoire, Léopold commande à Franz de revivre son humiliation fantasmatique : « Déshabille-toi et j’arriverai. Comme l’homme du rêve. » L’un comme l’autre s’utilisent et se piègent : « Vous m’avez pris de court. » (Franz à Léopold) ; « Je me suis bien fait avoir. » (Franz après avoir couché avec Léopold) ; « Vous m’avez bien eu. » (Léopold à Franz) ; « C’est drôle, je n’ai pas l’habitude d’être dans la peau d’une marionnette. » (Franz)

 

 

Dans le film « Call me by your name » (2018) de Luca Guadagnino, Oliver, l’Américain, est l’étranger qui débarque dans la famille Perlman. Ce Don Juan va y séduire tout le monde, et en particulier le père (Sammy), et bien sûr le jeune fils de 17 ans Elio, avec qui il va avoir une liaison. Une fois qu’Oliver initie Elio à l’homosexualité, il essaie de le convaincre de déculpabiliser (« On n’a rien fait de honteux. » ; « Fais pas l’enfant. Rendez-vous à minuit. »)… même si Elio en pleure. Il l’embobine, lui fait croire à l’amour le temps d’un été, et après, disparaît pour toujours de la vie du jeune adolescent de 17 ans, afin de se marier. C’est pourquoi Elio le qualifie à deux reprises de « traître ». Le personnage d’Oliver incarne la beauté satanique insaisissable, inconstante : il se passionne d’ailleurs pour les « entités » occultes chez les Grecs. À un moment nocturne, Oliver est submergé par des images en négatif, de couleur rouge, de son jeune amant Elio, comme une vision psychédélique et satanique se superposant au réel. Oliver provoque à diverses reprises la chute d’Elio, ou bien lui-même chute (à vélo, dans le plan d’eau, etc.). À la fin du film, Elio sera transformé lui-même en diable : dans les dernières images, on voit en gros plan son visage éclairé par le feu de cheminée rougeâtre, qui passe des larmes au défi démoniaque.
 

Dans la pièce Géométrie du triangle isocèle (2016) de Franck d’Ascanio, Lola trompe sa copine Vera d’un commun accord avec Nina. Un trio diabolique s’organise autour des calculs machiavéliques de Vera : « Lola a une espèce de fascination pour vous. » (Nina s’adressant à Vera) ; « À cet instant, j’avais décidé que tu serais à moi. » (Vera s’adressant à Lola à propos de leur première rencontre) ; « Lola, tu sais que j’ai toujours eu ce que je voulais. » (idem) ; « En général, elle se plie à ma volonté. » (Vera parlant de Lola à Nina) ; etc. Lola se rend compte de l’identité satanique de sa compagne : « Cette femme est diabolique. Elle a trouvé le moyen de me déculpabiliser. » ; « La femme avec qui je m’épanouis sexuellement est une conne ; et la femme avec qui je vis est une lumière. » Mais elle consent à son aliénation : « D’une manière générale, je suis à ta disposition. J’éprouve une réelle volupté à laisser diriger ma vie par toi. » (Lola s’adressant à Vera) Quant à Nina, elle finit par ne plus supporter l’emprise de Vera sur Lola : « Si je comprends bien, ma relation avec Lola est sous ton contrôle ? » (Nina s’adressant à Vera) ; « Je me demande si tu ne manœuvres pas dans l’ombre pour manipuler Lola. » (idem) ; « Ta dépendance et ta soumission avec cette fille me gêne profondément. » (Nina s’adressant à son amante Lola, idem)
 

Dans le film « Que Viva Eisenstein ! » (2015) de Peter Greenaway, Sergueï Eisenstein, homosexuel, se fait sodomiser par Palomino : « Ça fait mal. Ça pique ! Je vais vomir. Je saigne ! ». Ce dernier le rassure un peu : « Une vierge est censée saigner. » Avec une jouissance malsaine, il lui parle de la syphilis, maladie transmise aux Russes, et qui se serait appelée « le mal mexicain ». Palomino semble se venger de la domination coloniale des Occidentaux sur les Orientaux en inversant, par la sodomie, la domination, comme s’il rééquilibrait le sens de l’Histoire : « Tu es l’Ancien Monde. Je suis le Nouveau Monde. Je veux jouir de ton cul russe et virginal. »
 

Le diable ressemble parfois au phallus ou au désir qui endurcit le sexe génital pour les personnes de même sexe : « Satanas, sors de mon slip ! » (Didier Bénureau dans son spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons, 2012)

 

DIABLE Tadzio

Tadzio dans le film « Mort à Venise » de Luchino Visconti


 

Dans le roman Le Moine (1796) de Matthew Lewis, le diable prend la forme d’un jeune homme d’à peine 18 ans, au visage et au corps parfait, complètement nu, avec une étoile scintillante sur son front, des ailes rouges, des boucles de cheveux soyeuses attachées par un ruban de feu multicolore qui brûle autour de sa tête. La grâce angélique de cet éphèbe est seulement trahie par la férocité de son regard et son aspect mélancolique. On retrouve cette beauté du diable dans les romans de Philippe Besson, et notamment dans Un Garçon d’Italie (2003), avec la description de Leo : « On s’y laisse forcément prendre, à cet air angélique, à ces manières de Christ, à cette négligence dans la posture, à ces yeux qui fouillent au-dedans de nous alors qu’ils paraissent à peine nous regarder. Oui, on a envie de le prendre entre nos mains, ce visage d’enfant de chœur à qui on ne donnerait pourtant aucun bon Dieu sans confession, à ce sourire qui creuse des fossettes et qui ramène à l’adolescence, à ce que nous avons perdu. » (p. 98) ; « Les yeux fardés jusqu’au mépris. » (Luca, le narrateur homo du spectacle musical Luca, l’évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès) ; etc.

 

Dans le film « Rosa la Rose : Fille publique » (1985) de Paul Vecchiali, Paulo se demande par rapport à Pierrot s’il n’est pas homo : « Il est pas de la jaquette ? » Gilbert, intrigué, lui demande : « À quoi tu vois ça ? » Paulo lui rétorque : « Il regarde. »
 

Le diable est véritablement diabolique de ressembler dans un premier temps à Dieu : cf. le poème « Howl » (1956) d’Allen Ginsberg (avec l’ange blond qui perce avec son épée), la pièce Un Ángel Para La Señora Lisca (Un Ange pour Madame Lisca, 1953) de Copi, etc. Par exemple, dans le film « Respire » (2014) de Mélanie Laurent, la belle Sarah, tout de rouge vêtue, maltraite son amante Charlène, révèle les secrets de celle-ci aux autres, la harcèle au téléphone, la manipule. Elle la menace même de mort si jamais Charlène avoue sa véritable origine sociale : « Si t’en parles, je te tue. » Dans la pièce Quartett (1980) d’Heiner Müller (mise en scène en 2015 par Mathieu Garling), Merteuil se dit attirée par le « derrière virginal » de Cécile Volanges, « cette vierge que le diable a recrutée contre elle ». Dans le film « Stand » (2015) de Jonathan Taïeb, Audrey, le bel agresseur homophobe, drague Anton, le héros homosexuel, avant de l’attirer dans un get-apens. Dans le film « Jongens » (« Boys », 2013) de Mischa Kamp, Marc est le jeune et beau séducteur diabolique qui matte Sieger pour le déstabiliser. Dans l’épisode 268 de la série Demain Nous Appartient diffusée sur TF1 le 13 août 2018, lorsque Bart demande à Hugo son amant « Tu viens d’où ? », ce dernier lui montre le ciel (« De là. »), ce à quoi Bart plaisante : « T’es du genre un ange tombé du ciel, quoi… »

 

« À la première seconde, je savais que j’allais l’aimer, que j’allais souffrir. J’ai voulu faire durer cette imposture le plus longtemps possible. La douleur est éblouissante, très pure. » (Stéphane parlant de son ex-amant, le jeune et beau Vincent, dans la pièce Un Tango en bord de mer (2014) de Philippe Besson) ; « Suivre les yeux fermés notre hôte de charme. » (cf. la chanson « Les Chiens perdus » du Beau Claude) ; « Chaque dimanche tu apportais ta mousse au chocolat. Tout le monde disait ‘Il est humain’, blablabla. […] Tu attendais qu’au ciel les guirlandes d’étoiles guident tes pas pressés, rôdeur dominical, t’attirent hors de chez toi. » (cf. la chanson « Tu étais si gentil » du Beau Claude) ; « Ce petit, c’est ma damnation. » (Jacques, l’écrivain homo quinquagénaire ayant couché avec le jeune Mathan de 18 ans, dans la pièce Un Cœur en herbe (2010) de Christophe et Stéphane Botti) ; « J’voulais dire. T’es comme un ange. Un ange qui passe… » (Ryan dans la pièce Bang, Bang (2009) des Lascars Gays) ; « Le Dieu des Hommes […] s’éleva de 7 mètres au-dessus de nous, allant se placer haut à l’intérieur de l’aiguille de la Sainte-Chapelle dont les vitraux à mille et une couleurs produisaient sur lui (un barbu blanc aussi poilu qu’un ours polaire) un effet de kaléidoscope très agréable. » (Gouri, le narrateur bisexuel du roman La Cité des Rats (1979), p. 85) ; « Malcolm se leva et fit signe à Adrien de le suivre. Il le conduisit dans une petite pièce adjacente. Il alluma la lumière et tendit le bras : ‘Regarde, c’est beau non ? Tu vois, ça c’est celui je préfère ! Adrien s’approcha. Un enfant dont le visage n’était pas vraiment celui d’un enfant, plutôt celui d’une créature sortie d’un monde fantastique, mi-homme mi-volatile, chevauchait une bicyclette aux roues enflammées. La chevelure abondante, prise au vent, ressemblait à un plumage d’oiseau. Le plumage d’oiseau qui vole à contresens. Le rouge et l’orange dominaient. » (Hugues Pouyé, Par d’autres chemins (2009), p. 30) ; « J’ai regretté quelquefois de l’avoir écouté. J’ai même pensé qu’il avait pu être l’instrument du diable. Je sais maintenant qu’il a été comme un ange, un messager. Un ange que j’aurais, peut-être, dû laisser passer, avec qui je n’aurais pas dû combattre et dont je n’aurais gardé que le souvenir du passage… Oui, j’aurais peut-être dû le laisser filer, l’enfant-oiseau à la bicyclette enflammée ! » (Adrien à propos de Malcolm, idem, p. 49) ; « Plus beau que jamais, il ressemblait à un ange… à mon ange. » (Ednar, le héros homosexuel du roman autobiographie Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste) ; « [Jonathan Brockett, le personnage homo] Brockett était intelligent, il était d’une intelligence diabolique. » (Marguerite Radclyffe Hall, The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928), p. 307). « C’est pourquoi Brockett écrivait de si belles pièces, des pièces si cruelles ; il alimentait son génie de chair vive et de sang ! Génie carnivore ! » (idem, p. 308) ; « un homme absolument vicieux et cynique, un homme dangereux aussi parce qu’il était brillant » (idem, p. 351) ; « Derrière la porte, souriait de toutes sa nacre un garçon enjôleur que n’importe qui d’un peu novice aurait immanquablement trouvé joli. Laurent resta pétrifié sur le seuil de la porte. » (le narrateur homosexuel de la nouvelle « Cœur de Pierre » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 47) ; « Un ange éploré était accroupi à la base d’une grande croix, les bras levés vers le ciel dans une posture suppliante. Ses ailes étaient aussi longues que son corps, son visage beau et torturé, évoquant un Jésus féminin. Le sculpteur avait fait du bon travail ; une impression de lumière se dégageait des plis de pierre de sa robe, laquelle épousait ses formes athlétiques mais manifestement féminines. Jane s’aperçut que son regard s’attardait sur les fesses de l’ange. Elle rit et murmura : ‘ Du porno de cimetière. ’. » (Jane, l’héroïne lesbienne du roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 46) ; etc.

 

Par exemple, dans son roman La Dame à la Louve (1904), Renée Vivien évoque la séduction mortifère de l’amante lesbienne : « C’était un être bizarre. Lorsque je m’approchai d’elle pour la première fois, une grande bête dormait dans les plis traînants de sa jupe. » (p. 19) Dans le film « Children Of God » (« Enfants de Dieu », 2011) de Kareem J. Mortimer, Johnny n’arrête pas de s’entendre dire de son amant Romeo qu’il est « étrange ». C’est bien par le biais de la beauté que le diable se rend acceptable : « Elle est canon, toi tu lui donnais le bon Dieu sans confession. » (cf. la chanson « JBG » d’Alizée) On retrouve cette fausse innocence du diable dans la chanson de Dalida plébiscitée par la communauté gay, « Il venait d’avoir 18 ans » : « Il m’a dit ‘c’était pas si mal’ avec la candeur infernale de sa jeunesse. » Dans le film « Toto qui vécut deux fois » (1998) de Daniele Cipri et Francesco Maresto, Pietrino considère son amant Fefe (qui va le détruire) comme « un ange merveilleux ». Dans la comédie musicale HAIR (2011) de Gérôme Ragni et James Rado, Claude tombe sous le charme d’un adolescent candide et diabolique. Dans sa chanson « Vie de couple avec un chien », Jann Halexander parle d’un mystérieux inconnu à l’air ingénu. Dans son roman En l’absence des hommes (2001), Vincent a tout de Lucifer, le roi de la lumière (il s’appelle d’ailleurs « Vincent de L’Étoile ») : il est jeune, blond, et il tente Proust (« Je vous écoute dire cela : vous êtes un ange, parler de mon angélisme. », p. 54). Dans le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha, Rudolf décrit Pierre, son amant qui vient de le larguer, à un ange de lumière à qui il s’adresse encore nostalgiquement comme un ange solaire : « Et toi, t’étais assis dans ce rayon toute la journée. Je me souviendrai longtemps de ce rayon. » Dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, le héros gay Jason est l’archétype du diable magnifique qui conduit à la mort : « Jason venait de faire son apparition. Il se tenait debout sur le rocher au-dessus d’eux, les mains sur les hanches, la jambe gauche s’avançant légèrement dans le vide. Il était doré comme un croissant. Ses boucles blondes flottaient dans la brise légère. Corinne, assise à ses pieds, l’observait, incrédule. Avec son maillot de bain qui représentait des têtes de mort sur fond noir, il ressemblait vraiment à un messager des dieux de l’enfer. ‘Encore une beauté d’archange’, songeait Corinne. » (p. 83) Plus loin, le roman se poursuit avec la description du couple Jason/Mourad, où Mourad, tué symboliquement/oniriquement par son amant, prend le masque satanique à son tour : « Jason avait d’abord rêvé de Mourad, debout dans un paysage enneigé. De ses lèvres coulaient avec abondance un sang très rouge, et de ses yeux des larmes se mêlaient au ruisseau rubis. Jason voulait s’approcher de Mourad pour le consoler, mais ce dernier éclatait soudain d’un rire moqueur, puis disparaissait en quelques instants, fondant avec la neige. » (p. 279) Dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, Bryan dit à son amant Kévin : « Tu es beau, calme, irrésistible, mais pas de doute : envahissant. » (p. 210) Il le décrit comme un ange torturant (p. 144) : « Comment fais-tu ? T’es trop beau. T’es infernal. » (p. 317) ; « Je t’ai vu descendre du ciel, un matin d’hiver. Je t’ai vu seul, sombre et silencieux. » (p. 453) Dans son roman Par d’autres chemins (2009), Hugues Pouyé décrit toute l’ambiguïté du bel amant homosexuel Malcolm, qui subjugue le héros Adrien, et qui lui semble pourtant diabolique : « J’ai regretté quelquefois de l’avoir écouté. J’ai même pensé qu’il avait pu être l’instrument du diable. Je sais maintenant qu’il a été comme un ange, un messager. Un ange que j’aurais, peut-être, dû laisser passer, avec qui je n’aurais pas dû combattre et dont je n’aurais gardé que le souvenir du passage… Oui, j’aurais peut-être dû le laisser filer […] ! » (p. 49) Dans le roman Vincent Garbo (2010) de Quentin Lamotta, Garbo est précisément la figure du tentateur. Il détourne d’ailleurs un prêtre qui « ne voit pas sous le masque de l’adolescent timide les deux ronds de perversité qui enluminent la gueule d’ange. » (p. 133) Dans son roman Génitrix (1928), le héros de François Mauriac narre le chantage sentimental cruel de l’ange adolescent : « Il fredonnait : ‘Non, tu ne sauras jamais – ô toi qu’aujourd’hui j’implore – si je t’aime ou si je te hais… » (p. 25) Dans le film « Love Is Strange » (2014) d’Ira Sachs, Ian, le bel homme, est décrit par le couple homo Ben/George qu’il a aidé à trouver un nouveau logement, comme « l’étranger », « l’Ange » bienfaiteur. Dans le film « Rosa la Rose : Fille publique » (1985) de Paul Vecchiali, lorsqu’Yvette tombe sur Paulo, elle s’exclame : « Tiens ? Qui va là ! La Tentation en personne ! »

 

Étant donné que le diable est un ange, il est normal qu’il n’ait pas de sexe, ou qu’il offre le visage de l’androgyne bisexuel, mi-homme mi-femme : « Quel est cet homme-femme ? L’absurde Charnel, ‘plus-que-Charnel’ ? Qui était cet homme que tu as aimé jusqu’aux larmes. […] La Divine est ici. Elle est entrée. Elle sourit. Elle est assise à côté de moi. » (la voix narrative de la pièce Arthur Rimbaud ne s’était pas trompée (2008) de Bruno Bisaro) ; « Et puis j’ai senti que je n’étais pas seul. Un être se tenait là. […] Puis j’ai entendu sa voix. Grave. Forte. Virile. Et pourtant une voix de femme. Elle m’appelait par mon prénom. Nous avons longuement discuté. Je lui ai promis de garder le silence sur tout ce qu’elle m’apprenait. […] Cela fait longtemps que je discute avec Dieu, il n’y a rien là de surprenant. Seulement c’est la première fois qu’il m’apparaît sous la forme d’une femme. » (Cyril dans le roman Pavillon noir (2007) de Thibaut de Saint Pol, pp. 60-63) ; « J’ai pris l’habitude de ses visites nocturnes. […] Une étreinte ferme et invisible qui se voulait rassurante. » (idem, p. 97) ; « J’irai au bout de la mission qu’il m’a confiée. […] La tentation est toujours plus forte. » (idem, p. 98) ; « Qui peut croire par exemple que des esprits peuvent communiquer avec nous ? Que des démons peuvent entrer dans notre chair ? Moi, j’y crois. » (idem, p. 99) ; « Michael est le charme… désincarné. » (Harold, le héros homosexuel parlant de son colocataire gay, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; etc.

 

Dans la pièce La Thérapie pour tous (2015) de Benjamin Waltz et Arnaud Nucit, Benjamin raconte à son psy sa première rencontre homosexuelle avec son amant Arnaud, à qui il a fait volontairement un croche-patte, alors que le tableau est idyllique : « C’était comme au cinéma. C’était au bord de la plage. C’est alors qu’il m’est apparu. Un petit air de Ryan Gosling… avec le corps d’Élie Sémoun. » De son côté, Arnaud donne une autre version des faits au psychanalyste, en partant sur le quiproquo incestueux que le thérapeute lui parlait de sa première cuite : « Ma première fois, c’était avec mon oncle dans sa cave. ». « Je comprends le traumatisme… » interrompt le psy. Arnaud poursuit : « J’avais 12 ans. J’étais consentant. […] C’était un Cabernet d’Anjou. Ma première cuite. » Réalisant qu’il y a eu malentendu, il se reprend : « Je sortais du cinéma. Il faisait 40° C. Ça puait la pisse. Je passe par Paris-Plage. Et là, avec le soleil qui m’aveugle, je me prends Ben en pleine gueule. Mais bon, moi j’ai le mal de mer, alors je lui en veux pas. »
 

Dans le film « Jonas » (2018) de Christophe Charrier, Nathan, le futur amant de Jonas, fait irruption en retard dans l’amphi le jour de la rentrée des classes au collège, en gênant la prof qui parle et en dirigeant un clin d’œil à Jonas qui le met dans l’embarras. Il s’assoit en cours à côté de ce dernier, en jartant Caroline qui pourtant était là avant lui. Le papa de Jonas met en garde son fils contre Nathan : « Fais gaffe, Jonas. ». Mais ce dernier ne suivra pas son conseil et sort avec Nathan. Quand Nathan fait croire à Jonas qu’il a été abusé par un prêtre à l’école primaire, non seulement il lui ment mais il le menace de l’égorger si jamais il trahit son « secret » (on découvrira que la balafre que Nathan porte sur sa joue ne vient pas d’un coup de calice donné par le prêtre, mais d’un lynchage collectif qu’il a subi aux autos tamponneuses à l’âge de 9 ans dans un parc d’attractions appelé Magic World). Nathan dévergonde le petit garçon sage qu’est Jonas… ce qui le transformera en homme drogué et instable à l’âge adulte. Il se moque de lui parce qu’il n’a pas d’amis au collège : « Pourquoi t’as pas d’amis ? », et le force à avouer qu’il était amoureux de son unique ancien ami, Nicolas, qu’il a perdu. De plus, pour embrasser Jonas, il le fait fumer dans la salle de sport du collège (ce qui deviendra une dépendance pour Jonas à l’âge adulte). Pour se venger d’un camarade de classe homophobe qui lui taxe toujours des clopes, Nathan empoisonne celles-ci afin de le rendre malade… et ça marche. De plus, Nathan ment à Jonas, l’humilie, le manipule, au point que ce dernier a peur et le croit fou : « T’es dingue. ». À l’âge adulte, Jonas finit, par contamination, par devenir aussi mauvais que son amant d’adolescence qu’il n’a plus jamais revu. Pourtant très sage et introverti à l’adolescence, il est devenu un vrai junkie : il est amené au poste de police pour avoir déclenché une baston dans un club gay, The Boys. Il pénètre dans un hôtel de luxe, L’Arthémis, et le standardiste, Léonard, le prend pour un faux doux, un criminel armé, et préfère lui fouiller son sac : « Je sais pas. Je vérifie que t’aies pas d’arme, de couteau. J’en sais rien. Si je reviens et que tout le monde est mort, et que t’as buté tout le monde, on fait comment ? » Jonas enfreint toutes les règles et fume dans sa chambre d’hôtel. Les deux amants, Nathan et Jonas, sont finalement devenus des bad boys au contact l’un de l’autre. Des petits diables.
 

Dans la pièce Sallinger (1977) de Bernard-Marie Koltès, le Rouquin apporte une vérité satanique, c’est-à-dire une vérité fondée non plus sur la Vérité en elle-même (en tant que priorité victorieuse sur le mal) mais sur la dénonciation des petits défauts et des faux-semblants des autres. Par purisme perfectionniste de la Vérité, il en arrive paradoxalement à détruire ce qui est juste. Son regard sur les êtres humains est dénué d’émerveillement et d’espérance. Sa « vérité » n’est pas aimante. Elle est pure opposition au Bien, jugé naïf et trop soumis. Il s’agit d’une vérité cynique qui consiste simplement à mettre son essentiel à prouver le mensonge. C’est en quelque sorte une « vérité par défaut ». L’inconnu du film « Teorema » (« Théorème », 1968) de Pier Paolo Pasolini, lui aussi, est présenté comme ce messager de la Mauvaise Nouvelle : il se contente de révéler aux autres leur bonheur illusoire, et la vanité de leur existence.

 

DIABLE Main marionnette

 

L’amant homosexuel diabolique est parfois un marionnettiste qui donne l’impression au manipulé d’être marionnettiste de son marionnettiste : « Il me traitait à la fois comme sa marionnette et son propre marionnettiste. » (Fermín dans la nouvelle « Primavera » de Claudia Schvartz, incluse dans le recueil Historia De Un Deseo (2000) de Leopoldo Brizuela, p. 278) ; « Petra et elle s’étaient écartées l’une de l’autre et se tenaient à présent face à face sur le canapé, comme si elles s’apprêtaient à entamer un match de boxe ou un jeu de ficelle. » (Jane, l’héroïne lesbienne en couple avec Petra, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 54) ; « Je me demande s’il n’y a pas quelqu’un qui prend possession de moi. » (Delphine en parlant de son amante Elle, dans le film « D’après une histoire vraie » (2017) de Roman Polanski) ; « J’ai l’impression que tu t’es infiltré dans mon esprit. Je suis habité, envahi, possédé, obsédé par toi. » (William s’adressant à son amant Georges, dans la pièce Sugar (2014) de Joëlle Fossier) ; « Nous sommes des dieux, Scrotes, et ces deux jeunes hommes sont nos jouets. » (Anthony s’adressant à son amant, par rapport au jeune couple homo naissant Jim/Doyler, dans le roman At Swim, Two Boys, Deux garçons, la mer (2001) de Jamie O’Neill) ; « Il me tire à lui, je te dis, et je ne peux pas rompre l’emprise qu’il a sur moi. » (Pawel Tarnowski, homosexuel continent, parlant du jeune David qui l’attire, dans le roman Sophia House, La Librairie Sophia (2005), p. 175) ; « Sur l’oreiller du mal, c’est Satan Trismégiste, qui berce longuement notre esprit enchanté. Et le triste métal de notre volonté est tout vaporisé par ce savant chimiste. C’est le diable qui tient les fils qui nous remuent. » (c.f. la chanson « Au lecteur » de Mylène Farmer, reprenant Charles Baudelaire) ; etc. La même chose se produit dans la pièce L’Autre Monde, ou les États et Empires de la Lune de Cyrano de Bergerac (précédemment citée), dans le film « Le Roi et le Clown » (2005) de Lee Jun-ik, dans la pièce Jerk (2008) de Dennis Cooper, dans le ballet Alas (2008) de Nacho Duato, dans le spectacle Vu duo c’est différent (2008) de Garnier et Sentou, etc. Dans le film « Une Histoire sans importance » (1980) de Jacques Duron, Philippe se sent manipuler et incompris par Claude : « Tu aimes en moi ce que je n’aime pas. » Dans le film « Portrait de femme » (1996) de Jane Campion, un jeu de séduction malsain s’établit entre la jeune Isabelle et la vénéneuse Serena Merle qui téléguide la vie de la première à sa place. Quand Isabelle s’en rend compte, parce qu’en réalité elle a gâché sa vie en se mariant à un homme (Osmond) vers lequel Serena l’a poussée, elle se tourne vers Serena en l’identifiant comme un démon manipulateur : « Mais qui êtes-vous ? Qu’avez-vous à voir avec moi ? » ; Serena lui répond : « Tout ». Plus tard, Serena avouera à Osmond, le mari d’Isabelle : « J’étais la proie du mal. » Dans le roman À ta place (2006) de Karine Reysset, Cécile a passé son temps à décrire sa copine Chloé comme un pantin. Et, surprise, à la fin de l’histoire, c’est elle qui se fige en objet : « Je suis pétrifiée, à mon tour je suis devenue statue. » (p. 157) La poupée et le diable fusionnent souvent ensemble : « Jean-Jacques n’était pas un chef. Il n’était qu’un pantin dans tes mains perverties. » (Jean-Paul s’adressant à Jean-Marc, le héros homo infiltré, en lui parlant de son amant, dans la pièce Les Virilius (2014) d’Alessandro Avellis) ; « Khalid était à moi. Il s’enfonçait dans ma bouche. Je continuais de voyager dans la sienne. Des voies. Des ruelles. De l’obscurité. Des lumières, rares. J’étais devenu un sorcier : le fils de Bouhaydoura. » (Omar, le héros homosexuel du roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 141) ; etc. Le héros devient cet amant diabolique par atavisme. « S’il se souvient de moi et qu’il se retourne vers moi, pour moi, je le sauverai, je redeviendrai un ange, juste un petit diable, le petit pauvre. » (Omar après avoir tué son amant Khalid, idem, p. 169) À la fin du roman Les Illusions perdues (1837-1843) d’Honoré de Balzac, Lucien comprend qu’il ne contrôle plus son propre destin. Il écrit à propos de Carlos Herrera, son amant homosexuel : « Au lieu de me suicider, j’ai vendu ma vie. Je ne suis plus maître de moi-même. Je ne suis que le secrétaire d’un diplomate espagnol. Je suis sa créature. » (Gregory Woods, Historia De La Literatura Gay (1998), p. 673) Dans le roman Les Faux-Monnayeurs (1947) d’André Gide, le héros n’est pas lâché par le diable : « La famille respectait sa solitude ; le démon pas. » (p. 11) Dans la pièce Fixing Frank (2011) de Kenneth Hanes, que ce soit le psy (le Dr Apsey) ou le petit copain (Jonathan), ils sont tout deux les petites « voix » (diaboliques) de la conscience de Frank, le héros homosexuel : ils le manipulent à distance, comme s’il était leur marionnette. C’est pour ça que Frank dit de son amant Jonathan qu’« il le force à faire des choses qu’il ne veut pas faire. » Jonathan confirme : « Oui, je te manipule. » Le psy fait de même, et fait dire à Frank ce qu’il veut quand celui-ci pense être tout seul avec son copain Jonathan. Dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin, Michael, le héros homosexuel, force tous ses amis gays, par jeu, à téléphoner à leur premier grand « amour » homo pour leur montrer la vanité de celui-ci. Cela les plonge dans la nostalgie minante de l’arroseur arrosé : « Pourquoi j’ai appelé ? Pourquoi j’ai fait ça ? Je n’aurais pas dû ! » se lamente par exemple Bernard après avoir joint par téléphone son amant disparu, Peter. Quand Bernard dit qu’il a perdu « sa dignité » suite à ce coup de fil raté, Michael affiche un rire sardonique. Dans le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, Adrian, le jeune délinquant homosexuel, a identifié l’homosexualité du père Adam, et joue au chat et à la souris avec lui au point de l’outer. Dans le film « Free Fall » (2014) de Stéphane Lacant, Engel (l’ange blond) est le tentateur de Marc, l’homme marié et futur père : ce dernier lui reproche d’avoir « bousillé sa vie » en lui ayant fait découvrir les plaisirs homosexuels. Dans la pièce Gothic Lolitas (2014) de Delphine Thelliez, Juna étouffe ses amies (Suki et Kanojo) à distance, pendant un combat de magie qu’elle finit par perdre avec Kanojo qui lui adressera un dernier éloge mortuaire : « Mon amour, mon ange noir, pardonne-moi. »

 

En général, le héros homosexuel est pris de court (ou fait comme si il l’était, en jouant la vierge effarouchée) : « Tout ceci est déroutant. Toi ici ?… » (André par rapport à Laurent, qui revient à lui après l’avoir lâché et rompu une relation de 10 ans, dans le docu-fiction « Le Deuxième Commencement » (2012) d’André Schneider) ; « J’suis hétéro. J’ai dérapé. J’allais pas bien. Il était là. » (Didier en parlant de Bernard ans la pièce À quoi ça rime ? (2013) de Sébastien Ceglia) ; « Es-tu un frère ? Es-tu un rêve ? À des milliers d’âmes anonymes. » (cf. la chanson « J’ai essayé de vivre » de Mylène Farmer) ; « Je suis vraiment gêné de faire irruption comme ça. » (Alan qui vient menacer le couple Larry/Hank, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; etc.

 

Parfois, le personnage homosexuel se sent habité par une force diabolique qui le rend semblable à elle : cf. le film « Stranger Inside » (2001) de Cheryl Dunye, le vidéo-clip de la chanson « Montero » de Lil Nax. « Elle est rentrée en moi. J’ai cru que j’allais exploser. » (Irène après sa première relation lesbienne, dans la pièce Ma première fois (2012) de Ken Davenport) ; « Le jeudi, j’ai fait quelque chose de mal. […] J’ai senti la culpabilité me brûler le visage tandis que je demandais la chose en question, et dans ma tête une petite voix disait : ‘Celle-là, elle n’est pas pour toi. […] Tu essaies de voler ce que tu ne désires même pas. Parce que tu t’y connais, en désir ? Ça, au moins, c’est notre domaine, pas le tien. Et pourquoi tu parles de voler ? Je l’ai trouvée la première. » (Ronit, l’héroïne lesbienne qui entend une voix maléfique avec qui elle dialogue, au moment où elle prétend voler le cœur d’Esti, la femme mariée, dans le roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, pp. 223-224) ; etc.

 

« Face à cette fille sans coquetterie, je me voyais dans la peau d’un diable venu pour la tenter. […] Sachant qu’elle allait partir, avec une énergie et une détermination qui m’étonnèrent moi-même, je me précipitai pour lui prendre un baiser. Elle n’en fut pas surprise et se laissa faire, mais sans participer en rien. Aussi furtif que fût ce baiser, je compris qu’elle n’avait jamais embrassé personne avant moi. J’en ressentis instantanément comme une sorte de tristesse et j’eus le sentiment qu’il émanait d’elle une pureté à jamais inaccessible. » (Alexandra, la narratrice lesbienne cherchant à draguer une jeune religieuse dans un train, dans le roman Les Carnets d’Alexandra (2010) de Dominique Simon, p. 223-224)

 
 

b) Le regard diabolique est échangé entre les amants homosexuels :

On retrouve le motif du regard diabolique dans différentes œuvres homo-érotiques : le film « L’Œil du diable » (1960) d’Ingmar Bergman, le roman Dans œil de l’ange (1998) d’Andrea H. Japp, la chanson « Les Yeux androgynes » de Jeanne Mas, les chansons « Je te rends ton amour » et « Beyond My Control » de Mylène Farmer, le roman Les Yeux silencieux (2003) de Michel Giliberti, la chanson « Les Yeux d’un ange » de Pascal Sevran, etc. Le regard du viol imposé par l’amant homosexuel diabolique est frénétique, triste, noir, angoissé, mécanique, sans tendresse, cannibale. On le voit particulièrement dans des films tels qu’« Une Vue imprenable » (1993) d’Amal Bedjaoui et « Espacio 2 » (2001) de Lino Escalera ; ou bien dans des chansons comme « Black Eyed » du groupe Placebo, « Les Yeux noirs » du groupe Indochine, et « Sans contrefaçon » de Mylène Farmer (où il est fait référence au regard noir), le film « L’homme blessé » de Patrice Chéreau (avec les regards fiévreux et inquiets dans la gare), le film « Reflection In A Goldeneye » (« Reflets dans un œil d’or », 1967) de John Huston, le film « Hoje Eu Quero Voltar Sozinho » (« Au premier regard », 2014) de Daniel Ribeiro (avec Gabriel, l’intrus au visage d’ange, « vu » par son futur amant Léo, le protagoniste aveugle), la chanson « Les beaux yeux des garçons » du Beau Claude, etc.

 

Les yeux du violeur ne sont pas forcément désagréables d’ailleurs : ils peuvent être, comme le décrit Marcel Jouhandeau dans Carnets de Don Juan (1957), « plus graves qu’une nuit d’amour » : « Non, je n’ai jamais été violé et abandonné comme par ce regard en une seconde et en pleine rue, subtil, sagace, sûr de son harpon et sans remords… Cet homme… s’est retourné tout d’un coup et, me dévoilant son visage d’Archange, m’adressa face à face ce message d’une langueur, d’une ferveur et à la fin d’une férocité qui n’avaient plus rien d’humain… » (p. 96)

 

« Tout passe par les yeux. » (cf. une réplique de la pièce Les Gens moches ne le font pas exprès (2011) de Jérémy Patinier) ; « Son visage était fin, la peau, foncée sans être noire, était belle mais ce fut surtout la couleur et la forme des yeux qui le frappèrent. Ils étaient noisette, presque verts, légèrement dessinés en amande. Le regard le rassura. » (Adrien parlant de son amant Malcom, dans le roman Par d’autres chemins (2009) d’Hugues Pouyé, p. 27) ; « Je découvris la douceur des regards complices de ces androgynes que sont parfois les adolescents. » (le narrateur homosexuel parlant de ses années collège, dans la nouvelle « La Chaudière » (2010) d’Essobal Lenoir, pp. 18-19) ; « Ton regard… tes yeux. […] J’ai besoin de m’y perdre, de m’y noyer. » (Bryan s’adressant à son amant Kévin, dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 317) ; « Pour tes regards éperdus, ton regard d’amour désespéré, mon sperme s’est répandu. » (Luca dans le spectacle musical Luca, l’évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès) ; « Il jouit en moi comme il s’en retire, sans un bruit, sans un regard pour moi, sans un mot ou un geste. Je le regarde partir se laver dans la salle de bain dans une odeur de merde chauffée, le cul endolori, la bite encore dure, avec un sentiment violent de frustration. Il revient, s’installe pour dormir, me repousse quand je veux me coller à lui en m’expliquant Ah non, ça m’empêche de dormir, d’avoir quelqu’un collé à moi.’ » (Mike, le narrateur homo parlant à son amant Léo, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 98) ; « C’est l’œil de judas qui cligne, le nouveau péché original. » (le narrateur queer parlant de la sodomie, dans la pièce La Fesse cachée (2011) de Jérémy Patinier) ; « On raconte que quand les ‘Boludos’ vous regardent dans les yeux vous restez figé dans la même position pour l’éternité. On a trouvé sur leur chemin d’innombrables statues en lave représentant des êtres humains et des animaux à l’expression effrayée. » (Copi, « La Déification de Jean-Rémy de la Salle » (1983), p. 58) ; « Tu n’arrives pas à partir. Comme pour un accident. On ne peut regarder ni détourner le regard. » (Michael, le héros homo parlant de l’attraction homosexuelle, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « Il a touché mon visage, et ses yeux sont devenus plus sombres. » (Arthur, le personnage homo, parlant d’un de ses premiers amants anonymes, dans le roman Harlem Quartet (1978) de James Baldwin, mis en scène par Élise Vigier en 2018) ; etc.

 

Par exemple, dans le film « La Vie d’Adèle » (2013) d’Abdellatif Kechiche, les deux héroïnes, Emma et Adèle, ont un drôle de premier contact : c’est l’échange inquiet des regards impérieux sur un passage clouté qui révèlera à Adèle son attrait pour les filles. Dans le film « Petit cœur » (2012) d’Uriel Jaouen Zrehen, le temps d’un regard dans le métro, une fille est troublée par une autre fille. Dans le roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, le narrateur homosexuel identifie ses pairs homosexuels à leurs « regards insistants », à « cette façon languide de se tenir » (p. 28). Quand ils se trouvent à l’opéra, il joue au Grand Seigneur lorgnant de manière méthodique sur ses proies sexuelles (qui instaurent le même jeu de regards que lui !) : « Il y avait des jeunes gens comme moi, amoureux fous de l’opéra, conscients ou non de leur différence, qui scrutaient chaque nouveau visage, beau ou laid, se présentant aux doubles portes d’entrée, à la recherche d’un signe de reconnaissance, d’un regard un tant soit peu insistant, peut-être même d’un sourire. Je tombais moi-même amoureux aux trente secondes, convaincu que tel ou tel spectateur regardait dans ma direction, plantait son regard dans le mien, hésitait à m’aborder. » (idem, p. 43) ; « Je choisissais les plus beaux et vivais une intense aventure de dix secondes avec chacun. » (idem, p. 44) ; etc. Dans le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, Les regards entre Lukacz et Adam sont le détonateur de l’ambiguïté homo-érotique, et comme par hasard, ils sont échangés au milieu des flammes d’un feu de camp.

 

Le diable homosexuel, en général, ne parle pas. Son unique moyen de communication est le regard (Comme en boîte de nuit gay ou dans le contexte furtif du voyage en métro) : « Déjà ce soir-là Méphisto incognito guettait sa victime en rasant les murs. Dans les vitrines se croisent leurs regards, miroirs qui se font signe, sans parole et sans signature. » (cf. la chanson « Les Trottoirs de Los Angeles » de la comédie musicale La Légende de Jimmy de Michel Berger) ; « Il a changé votre vie. Son regard pénétrant vous hantera jusqu’à la fin de vos jours. » (Thibaut de Saint Pol, N’oubliez pas de vivre (2004), p. 246) ; « Il me dévisagea de ses grands yeux bleus comme le ciel et impitoyables. » (Garnet Montrose décrivant Daventry, dans le roman Je suis vivant dans ma tombe (1975) de James Purdy, p. 43) ; « Il avait un drôle de truc dans l’œil. » (Henry parlant de Michel, le tueur homosexuel homophobe de l’île, dans le film « L’Inconnu du lac » (2012) d’Alain Guiraudie) ; « Diego fut fasciné, sans pouvoir détourner le regard de ce demi-dieu qui l’observait et se laisser observer. Ils n’échangèrent pas un mot : l’autre le prit par le bras, le retourna contre le mur et le posséda. ‘Je suis rentré au dortoir ma bougie éteinte, mais éclairé de l’intérieur, et avec le pressentiment d’avoir soudain compris le monde’, dit-il. » (Senel Paz, Fresa Y Chocolate (1991), p. 22) ; etc. Par exemple, dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin, Emory, le héros homosexuel efféminé, parle de son premier amour, Delbert, un amour impossible, non-réciproque, qui le torture autant qu’il le ravit : « Je l’ai aimé dès que mes yeux se sont posés sur lui. J’étais au collège et lui au lycée. »

 
 

c) Le personnage homosexuel faustique vend son âme au diable en l’échange de l’immortalité :

DIABLE Claudine Candat Diabolo Pacte

 

Beaucoup d’auteurs homos réactivent le mythe de Faust, ce personnage qui a signé un pacte avec le diable pour devenir l’égal de Dieu, c’est-à-dire l’Amour-même : je pense en particulier au ballet Notre Faust (1976) de Maurice Béjart, au film « La Comtesse aux Pieds nus » (1954) de Joseph Mankiewicz, au roman Docteur Faust (1983) de Thomas Mann, au roman Faust (1990) de Fernando Pessoa, au roman Docteur Faustroll (1898) d’Alfred Jarry, à la pièce Dans la solitude des champs de coton (1985) de Bernard-Marie Koltès (avec l’amant diabolique insistant), à la pièce Nietzsche, Wagner, et autres cruautés (2008) de Gilles Tourman, au roman Le Portrait de Dorian Gray (1891) d’Oscar Wilde, au roman Faust (1594) de Christopher Marlowe, au personnage de Fausto dans le roman Portrait de Julien devant la fenêtre (1979) d’Yves Navarre, au film « Doctor Jekyll And Sister Hyde » (1971) de Roy Ward Baker, au film « Morgane et ses nymphes » (1970) de Bruno Gantillon, au film « Ma Vie est un enfer » (1991) de Josiane Balasko, au roman L’Autre Faust (2001) de Didier Godard, la pièce Perthus (2009) de Jean-Marie Besset, le film « Don Juan et Faust » (1922) de Marcel L’Herbier, le concert Le Cirque des Mirages (2009) de Yanowski et Fred Parker, etc.

 

« Faust est un emblème, l’expression d’une donnée agissante. » (un des héros de la pièce Et puis j’ai demandé à Christian de jouer l’intro de Ziggy Stardust (2009) de Renaud Cojo) ; « Ne commence pas à vendre des bouts de toi-même à des gens comme Shane. » (Zach s’adressant au jeune Danny, avec qui il a couché et qui maintenant se laisse entretenir par Shane, dans le film « Judas Kiss » (2011) de J.T. Tepnapa et Carlos Pedraza) ; « On lui a volé son âme ! » (Fifi et Mimi s’adressant à Pédé dans la pièce Les Escaliers du Sacré-Cœur  (1986) de Copi) ; « De Gounod, je ne connaissais que l’inévitable Faust pour lequel j’avais eu une passion pendant toute mon adolescence. » (le narrateur homosexuel du roman La Nuit des princes charmants (1995) de Michel Tremblay, p. 27) ; « Dès les premiers mots, j’ai su que ce que nous venions de vivre intensément ensemble, cet échange, cette fusion, cette transformation, ce pacte, cette forêt noire. » (Omar parlant de lui et de son amant Khalid, dans le roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 165) ; etc.

 

D’ailleurs, le titre du roman El Lugar Sin Límites (1966) de José Donoso est un clin d’œil au Docteur Faust de Christopher Marlowe où Méphistophélès déclare que l’enfer n’a pas de frontières. Dans la pièce de Lorca La Tragi-comédie de Don Cristóbal et Doña Rosita (1935), Doña Rosita est prise de souhaits faustiques : « Ah… Si je pouvais vendre mon âme au diable… » Dans les œuvres homo-érotiques, le dialogue amoureux homosexuel prend très régulièrement la forme d’un échange commercial diabolique : « As-tu vendu ton âme au diable, Jimmy Dean ? » (cf. la chanson « Les Trottoirs de Los Angeles » dans la comédie musicale La Légende de Jimmy de Michel Berger) ; « J’ai pas eu de jeunesse. Ma jeunesse, je l’ai vendue. » (Jacques Nolot dans son film « La Chatte à deux têtes », 2002) Le héros homo de la pièce La Fesse cachée (2011) de Jérémy Patinier parle de son sentiment d’avoir été leurré par le diable : « Les papous ne s’embrassent jamais, ils ont peur qu’on leur vole leur âme… Moi je me sens papou bizarrement certains matins… » Dans la comédie musicale La Nuit d’Elliot Fall (2010) de Vincent Daenen, le Baron homosexuel donne du poison à Elliot, pour mieux le posséder. Dans la comédie musicale Sauna (2011) de Nicolas Guilleminot, Benji s’adresse avec impuissance à son amant Maxence qui lui a fait perdre son innocence et sa virginité : « Mon cœur, tu l’as volé, et sans détour. » Dans le roman Le Portrait de Dorian Gray (1890) d’Oscar Wilde, Dorian Gray, par sa beauté et ses yeux captivants, inspire la « terreur » à Lord Henry ainsi qu’à Basile, le peintre qui le portraiture : « J’avais l’impression d’avoir donné mon âme à un être qui met une fleur à sa boutonnière. » (Basile) Dans la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud, Négoce est le héros homosexuel entremetteur, un mafieux crapuleux, un chasseur de têtes engagé par des « couples de pères homos » pour arranger des mariages homos entre des jeunes hommes célibataires : « Merci. Vous savez mon fond de commerce… »

 
 

d) Le personnage homosexuel donne sa langue au chat diabolique :

N.B.: Je vous renvoie également aux codes « Douceur-poignard », « Première fois » et à la partie « Tendresse » du code « Drogues » dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.

 

Il n’est pas rare de voir que l’amant homosexuel est comparé à un chat. C’est le cas dans le roman N’oubliez pas de vivre (2004) de Thibaut de Saint Pol : « Où est le chat ? C’est lui la solution. » (p. 107) Entre la voix narrative et ce « félin cajoleur » (idem, p. 204), c’est l’histoire d’une possession : « Vous êtes tout à lui. Il a gagné. » (idem, p. 234). D’ailleurs Quentin, l’amant homosexuel de l’histoire, a un « sourire félin » (idem, p. 247). Dans le film « Giallo Samba » (2003) de Cecilia Pagliarani, Monica la lesbienne discute avec son meilleur ami, Joaquim, qu’elle compare à un « chat ». Dans le film « Presque rien » (2000) de Sébastien Lifshitz, Mathieu, le héros homosexuel, dit à son chat qu’il « est son p’tit Prince charmant maintenant ». Dans le concert Le Cirque des mirages (2009) de Yanowski et Fred Parker, le diable a un chat prénommé « Chacha ».

 

Film "Jennifer's Body" de Karyn Kusama

Film « Jennifer’s Body » de Karyn Kusama


 

Il est absolument fascinant de découvrir le nombre de fois dans les œuvres homosexuelles où l’expression « donner sa langue au chat » est employée, au moment précisément du premier baiser du personnage homosexuel à son amant, qui apparaît avec un masque félin : c’est par exemple le cas dans le roman La Confusion des sentiments (1928) de Stefan Zweig, le film « Embrasser les tigres » (2004) de Teddi Lussi Modeste, la chanson « La Langue des anges » de Catherine Lara dans l’opéra-rock Sand et les romantiques, dans la B.D. Journal (1) de Fabrice Neaud, la chanson « Ma langue au chat » d’Élodie Frégé, etc. Dans le roman Cosmétique de l’ennemi (2001) d’Amélie Nothomb, Isabelle, la femme violée, dit à Texor Texel qu’elle « donne sa langue au chat. » Dans la pièce L’Opération du Saint-Esprit (2007) de Michel Heim, la Vierge Marie, en parlant du diable, dit que « c’est une méchante langue ! » Dans la pièce Transes… sexuelles (2007) de Rina Novi, Jacques parle de « donner sa langue à la chatte ». Donner sa langue au chat est une pratique fictionnelle homosexuelle assez courante : « Il m’a fallu l’impasse, donner ma langue au chat pour contrer l’existence. » (cf. la chanson « Méfie-toi » de Mylène Farmer) ; « Fais attention ou j’t’arrache la langue avec ma chatte ! » (Vaginette à Diego, dans le one-(wo)man-show Le Jardin des dindes (2008) de Jean-Philippe Set) ; « Entre moi, entre toi, ta langue de fer ou langue de chat. » (cf. la chanson « La Chevauchée des champs de blés » du groupe Indochine) ; « C’est pas d’ma faute, et quand je donne ma langue au chat, je vois les autres tout prêts à se jeter sur moi. » (cf. la chanson « Moi… Lolita » d’Alizée) ; « Je titille à présent son sexe, à demi dressé, de coups de langue lents et mesurés, à la manière d’un félin. » (Éric dans Albert Russo, L’Amant de mon père (2000), p. 36) ; « Sven se mit à lécher la hampe, par petites touches, comme un jeune chat qui découvre une nouvelle friandise. » (idem, p. 98) ; « J’ignorais qu’un chat pouvait sourire. » (le père d’Alice dans le film « Alice In Wonderland », « Alice au pays des merveilles » (2010) de Tim Burton) ; etc.

 

Dans le roman Journal de Suzanne (1991) d’Hélène de Monferrand, le dialogue entre Manuela, la sœur d’Héloïse, et Suzanne, l’amante d’Héloïse, est plutôt signifiant : Suzanne, parlant des aventures amoureuses lesbiennes d’Héloïse, déclare : « Je me suis dit que cette pauvre Héloïse […] allait y passer. Que son sort allait être réglé en deux coups de dents, et que… » Manuela l’interrompt brusquement : « Tu as de ces expressions ! » Suzanne poursuit : « Pardon. En deux coups de langue… » À nouveau, Manuela, offusqué s’interpose : « Manuela ! » Suzanne surenchérit malicieusement : « Ben quoi ! Un chat est un chat. » (p. 249) CQFD.

 

« Un jour l’amour décline, tous nos mots se mêlent, Ange. Ta douce langue se fourche. […] Ce qui était à toi, il faut que je le vende. » (cf. la chanson « Ange » du Beau Claude) ; « Le pire membre chez l’homme, c’est la langue. » (Vincent Nadal dans sa performance Des Lear, 2009) ; « Il consent à une rencontre, chez moi, mais il ajoute ‘Les yeux bandés. Tu ne dois jamais voir ma laideur repoussante.’ J’accepte. Les jours qui précèdent la rencontre, je les passe dans un état de surexcitation incroyable. Le jour prévu, à l’heure prévue, il frappe trois coups contre la porte, notre code secret. Je place mon bandeau, et j’ouvre en me demandant si je n’ouvre pas ma porte à un voleur, un tueur de sang froid ou un violeur. Peut-être que j’en aurais envie… […] Je referme la porte et tout de suite nous portons nos mains sur le visages de l’autre, pour sentir le bandeau, pour être sûr que le contact est respecté. Il sourit, je sens sous mes doigts sa bouche tendue. Moi aussi je souris. On se prend dans les bras l’un de l’autre et on cherche nos bouches, qu’on s’embrasse voracement, qu’on viole avec la langue. Après un instant, en reprenant notre souffle, il dit ‘Ouhaou, c’est chaud !’ Je le prends par la main. Je me glisse devant lui, et ensemble nous marchons comme un seul homme dans l’appartement, Vianney parfaitement collé à ma nuque, mon dos, mes fesses, mes jambes. » (Mike racontant son aventure avec un certain Vianney, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 84) ; « Ce fut un innocent coup d’œil en arrière qui perdit le fils. L’homme, que le père semblait fuir, lança au fils un baiser aérien, et ce baiser percuta avec une telle violence l’innocence de ses pensées qu’il faillit tomber à la renverse ; mais le fourmillement délicieux que cette collision déclencha le laissa sur sa faim. » (le narrateur homosexuel de la nouvelle « À l’ombre des bébés » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 30) ; « Cette nuit, je te l’ai pris, ce baiser que tu n’as pas voulu me donner. […] Je suis encore troublé par ce baiser volé. » (Kévin s’adressant à son amant Bryan, dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 207) ; « Khalid s’est avancé vers moi et il m’a embrassé. Sur la bouche. Avec la langue. Longtemps. Les yeux fermés, j’ai pris sa bouche, ses lèvres en moi. Et, triste, amer, j’ai joué violemment avec sa langue. Il n’a pas protesté. » (Omar après avoir tué son amant Khalid, dans le roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 168) ; « Que signifiait le baiser qui l’avait tant troublé : défi, ou mépris ? L’homme les avait-il pris, son père et lui, pour des invertis ? » (le narrateur homosexuel de la nouvelle « À l’ombre des bébés » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 31) ; etc.

 

Si la langue de l’amant homosexuel n’est pas toujours celle du chat, en tout cas elle est souvent dangereuse ou diabolique, associé au baiser traître de Judas : cf. le roman Baiser de sang (2008) de Tony Mark, le film « Kiss Me God Damn It ! » (2006) de Stian Kristiansen, etc. Par exemple, dans le film « Judas Kiss » (2011) de J.T. Tepnapa et Carlos Pedraza, Danny Reyes a réalisé un film intitulé « Judas Kiss », littéralement le baiser de Judas.  Dans le roman Je suis vivant dans ma tombe (1975) de James Purdy, la langue de l’amant homosexuel est comparée à celle du serpent (p. 65). Dans le film « Keep The Lights On » (2012) d’Ira Sachs, Paul embrasse son amant Erik pour lui donner une bouffée de drogue.

 

« Le pire membre chez l’homme, c’est la langue. » (Vincent Nadal dans sa performance Des Lear, 2009) ; « Il consent à une rencontre, chez moi, mais il ajoute ‘Les yeux bandés. Tu ne dois jamais voir ma laideur repoussante.’ J’accepte. Les jours qui précèdent la rencontre, je les passe dans un état de surexcitation incroyable. Le jour prévu, à l’heure prévue, il frappe trois coups contre la porte, notre code secret. Je place mon bandeau, et j’ouvre en me demandant si je n’ouvre pas ma porte à un voleur, un tueur de sang froid ou un violeur. Peut-être que j’en aurais envie… […] Je referme la porte et tout de suite nous portons nos mains sur le visages de l’autre, pour sentir le bandeau, pour être sûr que le contact est respecté. Il sourit, je sens sous mes doigts sa bouche tendue. Moi aussi je souris. On se prend dans les bras l’un de l’autre et on cherche nos bouches, qu’on s’embrasse voracement, qu’on viole avec la langue. Après un instant, en reprenant notre souffle, il dit ‘Ouhaou, c’est chaud !’ Je le prends par la main. Je me glisse devant lui, et ensemble nous marchons comme un seul homme dans l’appartement, Vianney parfaitement collé à ma nuque, mon dos, mes fesses, mes jambes. » (Mike racontant son aventure avec un certain Vianney, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, p. 84) ; « Ce fut un innocent coup d’œil en arrière qui perdit le fils. L’homme, que le père semblait fuir, lança au fils un baiser aérien, et ce baiser percuta avec une telle violence l’innocence de ses pensées qu’il faillit tomber à la renverse ; mais le fourmillement délicieux que cette collision déclencha le laissa sur sa faim. » (le narrateur homosexuel de la nouvelle « À l’ombre des bébés » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 30) ; « Cette nuit, je te l’ai pris, ce baiser que tu n’as pas voulu me donner. […] Je suis encore troublé par ce baiser volé. » (Kévin s’adressant à son amant Bryan, dans le roman Si tu avais été… (2009) d’Alexis Hayden et Angel of Ys, p. 207) ; etc.

 

Cette langue du diable peut être la représentation de l’emprise invisible exercée par un chanteur ou une chanteuse : « Il montre du doigt la langue de Janis Joplin qui sort de sa bouche comme un sabre ensanglanté. » (cf. une réplique de la pièce Jerk (2008) de Dennis Cooper)

 

Symboliquement, le fait de donner sa langue au chat démontre qu’un pacte du silence et du déni du mal est instauré entre les deux amoureux homosexuels. Ils s’utilisent l’un l’autre en se jurant de prouver à la face de la Terre que ce qu’ils vivent est de l’amour… même si, concrètement, ça n’en sera pas. C’est la raison pour laquelle le diable homosexuel des fictions prend la forme de l’action des sorcières de William Shakespeare dans la pièce Macbeth (1623), c’est-à-dire d’« un faire qui n’a pas de nom » (Acte IV, scène 1, p. 163). Le contrat est conclu à l’encre sympathique : « La signature finale est illisible. » (Élisabeth Brami, Je vous écris comme je vous aime (2006), p. 101) ; « J’ai fait des études de lettres. De lettres anonymes, bien sûr. » (Michel dans la pièce Le Cheval bleu se promène sur l’horizon, deux fois (2015) de Philippe Cassand) Dans sa chanson « Les Passagers », Étienne Daho nous parle bien du « passager de plus qui n’a pas de nom, pas de prénom, anonyme » et qui s’immisce discrètement dans le couple homosexuel. « C’est le chat de gouttière le plus anonyme du monde. », rajoute Jean-Pierre Belone, l’homosexuel du film « Le Placard » (2001) de Francis Veber. Dans le roman de Julien Green Si j’étais vous (1947), Fabien rencontre précisément incognito l’énigmatique et diabolique Brittomart, « l’inconnu aux yeux noirs » : « La rencontre était anonyme. » (p. 23) ; leur pacte identitaire est scellé sans contrat visible : « Cette parole que vous venez de prononcer nous tiendra lieu de tous les parchemins traditionnels signés de notre sang, voulez-vous ? De telles billevesées ne sont plus de notre temps, pas plus que ce mot de diable qui vous a échappé, tout à l’heure et que vous bannirez de votre vocabulaire. » (Brittomart à Fabien, idem, p. 75)

 

Le diable peut distraire de tout, y compris de lui-même (n’oublions pas qu’il se déteste et qu’il ne veut surtout pas entendre parler de lui !). Certains personnages homosexuels, en lui donnant leur langue, souffrent d’amnésie et ne peuvent plus parler (cf. le dessin du monstre félin dans le journal intime d’Hervé dans le film « Un Año Sin Amor » (2005) d’Anahi Berneni). « Toi et moi, on ne s’est jamais rencontrés, ok ? On ne se connaît pas. » (Zach parlant à Danny, suite à la nuit de sexe qu’ils ont vécue ensemble sans même prendre le temps de se connaître, dans le film « Judas Kiss » (2011) de J.T. Tepnapa et Carlos Pedraza) ; « On n’a même pas eu le temps de se présenter… » dira Dany (idem) Leur voix intérieure leur impose cette maxime : « Dis que tu viens d’un monde effacé… monde de songe… » (Manuel Puig, El Beso De La Mujer-Araña, Le Baiser de la Femme-Araignée (1976), p. 219) ; « Je ne me souviens plus de son prénom. Même son visage est flou » (Vincent s’adressant à son ex-compagnon Stéphane, qu’il a trompé en n’assumant pas du tout son acte d’infidélité, dans la pièce Un Tango en bord de mer (2014) de Philippe Besson) ; « Je suis le plus redoutable et le plus doux des dieux. […]Je suis peut-être pire que les autres dieux. […] Je ne m’attaque qu’à ceux qui doute de ma nature divine. » (Bacchus dans le film « Métamorphoses » (2014) de Christophe Honoré) ; etc. Les mots du contrat diabolique tiennent en une consigne toute simple que Pascal Bruckner rappelle dans La Tentation de l’innocence (1995) : « Tu adopteras mes méthodes tout en me reniant. » On la retrouve édictée dans le film « Hedwig And The Angry Inch » (2001) de John Cameron Mitchell : « Deny me and be doomed. » (« Renie-moi et sois maudit. ») Elle apparaît aussi dans la bouche de Tirésias, le pédiatre du film « Métamorphoses » (2014) de Christophe Honoré, conseillant, par un pacte, à la mère de Narcisse de noyer l’identité de son fils : « Il aura une vie longue et heureuse s’il ne se reconnaît pas. »

 

Par exemple, dans le spectacle musical Luca, l’évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès, Luca ressent une culpabilité indicible : il fait allusion à une douleur qui semble physique mais qu’il ne voit pas et qu’il n’identifient pas « Mais de quoi étais-je donc le complice ?? […] Mais de qui étais-je donc complice ? […] Sur mon poitrail, aucune cicatrice. » Dans la série Ainsi soient-ils (2014) de David Elkaïm, Emmanuel, l’un des séminaristes, noir et homosexuel, a dirigé des fouilles archéologiques à Carthage pour le Musée du Louvre, et a vécu là-bas sa première expérience homosexuelle avec un homme anonyme : « Il était grand, costaud. Je sais même pas s’il était beau. Je ne me souviens même pas de son visage. […] Les détails s’imposent à moi de façon démoniaque. Pourquoi je me sens si coupable ? » Dans le film « Test : San Francisco 1985 » (2013) de Chris Mason Johnson, lorsque Frankie demande à son amant Todd comment s’appelle le dernier « plan cul » de ce dernier (« Il n’a pas de nom ? »), Todd répond cyniquement « probablement que si », parce qu’en fait il n’a pas la réponse.

 

Le diable fait oublier le prénom tout en donnant au personnage qu’il habite l’impression de l’unifier. « Homonymes… Anonymes. » (cf. la chanson « Les Passagers » d’Étienne Daho) Dans le film « Chloé » (2009) d’Atom Egoyan, Catherine baptise son amante Chloé de « Personne ». Dans sa nouvelle « La Queue du diable » (2010) d’Essobal Lenoir, le narrateur homosexuel finit par connaître l’envers du décor amoureux de son bel amant : « Le sourire éthéré dont s’auréola le visage de l’ange me fit soupçonner quelque chose de pas catholique. » (p. 114) ; mais cela ne l’empêche pas de « tirer par la queue le beau diable qui se débat derrière lui » (p. 116) ; et il conclut ainsi : « Mon histoire finit là, car avant de nous ramener dans le monde des vivants, il nous fit signer un pacte promettant le silence sur ce que nous vîmes. » (cf. la dernière phrase, p. 118) Dans la pièce Dans la solitude des champs de coton (1985) de Bernard-Marie Koltès, le tentateur explique sa tactique : « J’ai le langage de celui qui ne se fait pas reconnaître. » Et celui qui se laisse tenter se plaint sans se plaindre, comme un parfait amnésique : « Je souffre de ne pas savoir quelle blessure vous me faites. »

 

Dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin, les personnages homosexuels enchaînent les relations sexuelles sans lendemain, dans la clandestinité et l’anonymat : « On s’est vus aux bains et on a couché ensemble, sans se parler, sans connaître nos prénoms. » (Donald à propos de Larry) « Peu après mon arrivée, j’avais emballé un mec dans les toilettes de la gare. Je suis tombé sur un gars sympa. Je ne l’ai jamais revu ensuite. […] Ce qui est drôle, c’est que je ne me rappelle pas son nom. […] Après, ce fut plus facile. On s’améliore avec la pratique. » (Hank racontant sa « première fois ») ; etc.

 

Même si le diable viole le héros homosexuel, ce dernier vit comme un envoûtement, un ravissement qui le privent de mots et même de la conscience d’être possédé : « Et Dieu ? Et ses anges ? Et le diable : est-il toujours le diable ? » (Omar, le héros homosexuel du roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 177) ; « Un jet de semence issu de la verge du mari fusa en une parabole lactée au pied de la pauvre épouse, tel un Mercure ailé dont le message était transparent. » (le narrateur homosexuel de la nouvelle « La Chambre de bonne » (2010) d’Essobal Lenoir, p. 61) ; « Un voyage onirique au cœur de l’inconscient et de ses mécanismes de défense, tel que le déni, ici, celui du viol dont Anne a été victime dès son plus jeune âge. À la recherche d’elle-même, mais aussi de l’autre, lui, qu’elle prend pour ce qu’elle croit être un ange. » (cf. le commentaire du film « Incidences » (2012) d’Andromak, sur la plaquette du 18e Festival Chéries-Chéris au Forum des Images de Paris, en octobre 2013) ; « On s’est quittés aux aurores sans avoir échangé un mot. Je ne me rappelle plus de sa tête. » (William après son aventure avec un inconnu, dans la pièce Sugar (2014) de Joëlle Fossier) ; etc. Par exemple, dans le film « Die Mitter der Welt » (« Moi et mon monde », 2016) de Jakob M Erwa, Phil, le héros homo, voit débarquer (au ralenti) le beau Nicholas dans sa salle de classe, et c’est tout de suite le coup de foudre. L’écran se teinte de rouge à ce moment-là. Et il se trouve que Nicholas le trahira sexuellement avec Katya, la meilleure amie de Phil. Mais Phil est subjugué.

 

Le discours du diable tend à enfermer le héros homosexuel dans une identité ou une pratique homosexuelle factices, même s’il s’affaire précisément à justifier que ce serait le rejet de cet enfermement qui serait diabolique : « Tu es un homme triste et pathétique. Tu es homosexuel et tu ne veux pas l’être. Mais tu ne peux rien y faire. Toutes les prières du monde, toutes les analyses n’y changeront rien. Tu sauras peut-être un jour ce qu’est une vie d’hétérosexuel, si tu le veux vraiment, si tu y mets la même volonté que celle de détruire. Mais tu resteras toujours un homo. Toujours Michael. Toujours. Jusqu’à ta mort. » (Harold, le héros homosexuel machiavélique parlant de manière anesthésiante et culpabilisante à son colocataire gay Michael, non moins sournois, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin)

 
 

e) Le personnage homosexuel évoque la présence d’une créature (généralement diabolique) appelé « L’Autre » :

B.D. "Femme assise" de Copi

B.D. « Femme assise » de Copi


 

Comme le héros homosexuel a donné sa langue au chat, ou a demandé sa langue à son partenaire, il ne peut plus identifier son agresseur comme le diable. En général, la parade inconsciente qu’il trouve, c’est qu’il appelle son énigmatique amant « l’Autre », ou bien qu’il se fait appeler ainsi. Pour illustrer mon observation, je vous renvoie notamment à la pièce Journal d’une autre (2008) de Lydia Tchoukovskaïa, au roman L’Autre (1971) de Julien Green, à la chanson « Cœur déjà pris » d’Alizée, à la chanson « Si j’avais au moins » de Mylène Farmer, à la pièce À trois (2008) de Barry Hall, au film « L’Un dans l’autre » (1999) de Laurent Larivière, au film « La vie des autres » (2000) de Gabriel de Monteynard, au roman Le Nid d’autrui (1894) de Jacento y Martinez Benavente, à « L’Autre » dont parle Jean Guidoni lors de son concert à la Boule Noire à Paris en avril 2007, à la pièce musicale Arthur Rimbaud ne s’était pas trompée (2008) de Bruno Bisaro, à la pièce L’Autre Monde, ou les États et Empires de la Lune (vers 1650, adaptée en 2008) de Cyrano de Bergerac, au film « Le frère, la sœur… et l’Autre » (1970) de Douglas Hickox, au tableau L’un de l’autre (2004) de Charles-Louis La Salle, au roman L’Un et l’Autre (2006) de Mathieu Riboulet, à la pièce Perthus (2009) de Jean-Marie Besset, au roman L’Autre Dracula contre l’Ordre noir de la Golden Dawn (2011) de Tony Mark, au roman L’Autre homme de ma vie (2010) de Stephen McCauley, le roman Un homme et un autre (1928) d’Henri Deberly, la nouvelle La Nuit est tombée sur mon pays (2015) de Vincent Cheikh, la pièce L’un dans l’autre (2015) de François Bondu et Thomas Angelvy, la chanson « Autonome » de Catherine Lara ; etc.

 

Dans la chanson « L’Autre » de Mylène Farmer, « l’Autre » est l’androgyne, le jumeau narcissique (« Toi et moi du bout des doigts nous tisserons un autre : un autre Moi. »). Il est présenté comme une créature angélique prenant forme humaine (« Mais qui est l’Autre ? Quel étrange messager ! »). L’Autre est un dieu : « Tu m’as toujours paru si fort, si indépendant ! Tu ne faisais pas de compromis. […] En t’observant, je ne pouvais m’empêcher de me sentir affreusement corrompu, impur : je suis si différent ! » (Christopher Isherwood, Rencontre au bord du fleuve (1982), p. 11) ; « N’avoir d’autre voeu que l’Autre, même un instant. » (c.f. la chanson « City of Love » de Mylène Farmer) ; « Et sans l’Autre on a quoi ? Qu’un pauvre miroir. » (c.f. la chanson « On a besoin d’y croire » de Mylène Farmer) ; « Quand on a tant besoin de l’autre, faire quoi ? » (c.f. la chanson « Retenir l’eau » de Mylène Farmer) ; etc. Mais il s’agit d’un être imaginaire qui n’a pas vraiment réussi à s’incarner totalement : « Oh, il y eut d’autres gens pour venir, ça oui. Je ne peux pas me les rappeler tous. […] mais vous comprenez, l’autre est venu, et c’est la vraie raison pour moi d’écrire dans ma tête ce journal. » (Garnet Montrose dans le roman Je suis vivant dans ma tombe (1975) de James Purdy, p. 39)

 

La référence à l’autre renvoie au mépris, à l’extase, à la haine de soi et des autres (qui, par moment, apparaît comme une fuite ravissante et ludique) : « Et si on changeait de noms ? Je veux dire échanger nos prénoms, juste nos prénoms… […] On ferme les yeux dix secondes. Après, chacun de nous deux sera l’autre. Je deviendrai toi, TU deviendras moi. » (Omar proposant à son amant Khalid un jeu sylvestre mortel, dans le roman Le Jour du Roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 138) ; « Le corps extase, envie, mon corps genre, sexe, orgasme, comme un médium de plaisir, le terrain des amours et des haines, de soi et des autres, le terrain de l’autre. Le corps autre. » (la voix narrative dans la pièce Mon cœur avec un E à la fin (2011) de Jérémy Patinier) ; « Elle est partie avec l’Autre ? » (Pierre parlant de Benoît, le copain d’Isabelle, sa potentielle mère porteuse, dans la pièce Le Fils du comique (2013) de Pierre Palmade) ; « Je ne vous aimais pas. C’était l’Autre. » (Cyrano s’adressant à Roxane dans la pièce Cyrano intime (2009) d’Yves Morvan) ; « Je veux vous dire que, lorsque je déclare que ceux qui aiment et ceux qui ont du plaisir ne sont pas les mêmes, je signale simplement que, dans une relation amoureuse, souvent, il en est un qui donne et l’autre qui prend, un qui s’offre et l’autre qui choisit, un qui s’expose et l’autre qui se protège, un qui souffrira et l’autre qui s’en sortira. C’est un jeu cruel parce qu’il est pipé. C’est un jeu dangereux parce que quelqu’un perd obligatoirement. » (la figure de Marcel Proust à son jeune amant Vincent, dans le roman En l’absence des hommes (2001) de Philippe Besson, pp. 164-165) ; « Du reste, ‘l’autre non plus n’y comprend rien, retournée dans son pays là-bas. » (Élisabeth Brami, Je vous écris comme je vous aime (2006), p. 12) ; « l’autre là-bas » (idem, p. 23) ; « Varia, c’est l’autre. » (Jason, le héros homosexuel décrivant Varia Andreïevskaïa, sorte de dangereuse Vampirella, dans le roman L’Hystéricon (2010) de Christophe Bigot, p. 64) ; « Je ne suis pas fils d’un roi… mais bien fils d’un Autre. » (Djalil dans la pièce Frères du Bled (2010) de Christophe Botti) ; « Trans, c’est pas moi… c’est une autre. » (un des héros homosexuel de la comédie musicale Encore un tour de pédalos (2011) d’Alain Marcel) ; « N’avoir d’autre vœu que l’Autre, même un instant. » (cf. la chanson « City Of Love » de Mylène Farmer) ; « J’ai l’impression d’avoir volé la place d’un autre. » (John parlant de son existence et ne se sentant pas légitime pour vivre, dans le film « Ma Vie avec John F. Donovan » (2019) de Xavier Dolan) ; « Je supporte pas d’être chez moi. J’ai l’impression que je suffoque ; comme si je vivais dans le corps d’un autre, comme si je m’enfonçais dans la vie d’un autre. » (Jackson élevé par deux lesbiennes, dans l’épisode 7 de la saison 1 de la série Sex Education (2019) de Laurie Nunn) ; « Dominique, c’est l’autre. » (Mireille parlant du « mari » de Marcel, dans la pièce Drôle de mariage pour tous (2019) de Henry Guybet) ; « Chez lui, c’est chez l’autre. » (c.f. la chanson « C’est la misère » de Dick Annegarn) ; etc. Par exemple, dans le film « Guillaume et les garçons, à table ! » (2013) de Guillaume Gallienne, Guillaume, le héros bisexuel, dit au médecin militaire qu’il a fait une tentative de suicide « parce que l’Autre a essayé de le noyer ». Dans le film « La Belle Saison » (2015) de Catherine Corsini, Delphine reçoit Carole, son amante (habillée en rouge), dans sa maison familiale en rase campagne. Ce n’est pas du tout du goût de sa mère, Monique, qui, une fois le pot aux roses découvert, chasse les deux femmes, et traîne en procès de sorcellerie Carole : « Vous l’avez détraquée. Sortez !! Vous êtes le diable dans ma maison ! » Plus tard, Monique surnomme Carole « l’Autre ».

 

L’Autre renvoie également à une étrangeté horrifiante (et diabolique) que les amants homosexuels identifient à demi-mot entre eux : « J’ai l’impression que depuis toutes ces années, j’ai vécu avec quelqu’un d’autre. » (Sandrine Lazzari face à sa compagne et « femme » Laurence Moiret jugée pour meurtre, dans l’épisode 298 de la série Demain Nous Appartient, diffusé le 24 septembre 2018 sur la chaîne TF1).
 

 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 
 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) b) c) d) L’amant diabolique (regard/Faust) :

DIABLE Lorelei

Lorelei, la lesbienne diablesse dans le film « Kaboom » de Gregg Araki


 

Depuis bien longtemps déjà, Platon avait dépeint la figure du diable angélique bisexuel et androgyne par le biais du personnage fictionnel d’Alcibiade : « Dans les pages du Banquet, Socrate cherche à se laver de tout soupçon en décrivant le bel Alcibiade, couronné de violettes, essayant vainement de séduire. Il nous le montre sous les traits de l’inverti constitutionnel, cultivé et mondain, tout semblable à ceux de nos jours : ‘Il est en tout excessif, intelligent jusqu’à la subtilité, amoureux des arts jusqu’à l’esthétisme, élégant jusqu’à l’affection… Fils de noble qu’environne une coterie, c’est un causeur étincelant qui, en tous lieux, soigne ses effets et veut qu’on le remarque. Sa suprême jouissance est de scandaliser…’ » (Jean-Louis Chardans, Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970), p. 124) ; « Dimanche 30 mars 1919. Ai oublié hier par fatigue de noter que ce jeune élégant qui ressemble à Hermès et qui m’avait fait une si forte impression il y a quelques semaines assistait à la conférence [au club]. Son visage, allié à sa légère silhouette de jeune homme, à par sa joliesse et sa folie quelque chose d’antique, de ‘divin’. Je ne sais comment il s’appelle, et ça n’a pas d’importance. . » (Philippe Simonnot, Le Rose et le Brun (2015), p. 122) ; etc.

 

Mais rassurez-vous. La fantasmagorie homosexuelle du diable n’est qu’un code qui traduit un fantasme ou un délire gothique genre Gay Pride, bien avant de décrire une réalité fantasmée : cf. le docu-fiction « New York City Inferno » (1978) de Jacques Scandelari (avec l’homme au masque de diable). Évidemment, il ne s’agit pas de diaboliser l’union homosexuelle concrète ni les individus homosexuels (ils le font déjà bien assez par eux-mêmes !). En revanche, il me semble tout de même important de souligner que l’incorporation de l’androgyne, toujours incomplète, en soi ou en la personne aimée, n’est pas toujours uniquement symbolique. La créature mythique diabolique habite fantasmatiquement les personnes humaines qui veulent se quitter elles-mêmes et se détruire par amant interposé. « J’aimais un homme et voulais qu’il me tue » écrit Olivier Py dans L’Inachevé (2001). Le personnage de l’amant homosexuel diabolique nous dit tout bonnement que le désir homosexuel tourmente.

 

Toujours Lorelei dans "Kaboom"

Toujours Lorelei dans « Kaboom »


 

La présence du diable dans l’iconographie homosexuelle, si elle n’est envisagée que dans son sens symbolique, obéit en réalité à un régime de causes inconscient qui, à l’inverse de la logique de coïncidences qui lutte contre les déterminismes, peut s’actualiser dans la réalité concrète à travers un jeu amoureux libertin souvent machiavélique. Je vous renvoie par exemple au journal L’Ange sauvage de Cyril Collard, au documentaire « Devil In The Holy Water » (2001) de Joe Balass, à l’amant diabolique anonyme dans La mauvaise vie (2005) de Frédéric Mitterrand (p. 159), etc. « On ne lutte pas avec les anges. » (Patrick Dupont, le chorégraphe, dans l’émission Prodiges sur la chaîne France 2 le 29 décembre 2016) Dans l’essai Rimbaud, la double vie d’un rebelle (2011) d’Edmund White, Rimbaud est défini comme « l’époux infernal » de Verlaine, sa beauté fatale qui le hantera toute sa vie. Dans son autobiographie Prélude à une vie heureuse (2004), Alexandre Delmar aborde bien ce malaise perceptible dans beaucoup de couples homos réels, cette guerre de marionnettistes que se mènent les semblables sexués entre eux : « Mais à quoi joue-t-il à la fin ? […] J’ai beau être persuadé que je le manipule, j’en arrive quand même à me demander si ce n’est pas moi le pantin dans l’affaire. » (p. 50) L’enfer pavé de bonnes intentions s’expriment en beauté sous la plume d’Oscar Wilde dans De Profundis (1897) : « Les Dieux sont étranges. Ce n’est pas uniquement de nos vices qu’ils font des instruments pour nous châtier. Ils nous mènent à la ruine par ce qu’il y a en nous de bonté, de douceur, d’humanité, d’amour. » Dans son essai autobiographique La Vie dure : Éducation sentimentale d’une lesbienne (2010), Paula Dumont illustre tout à fait le jeu interchangeable marionnette/marionnettiste qui s’exerce dans beaucoup de relations amoureuses homosexuelles réelles : « Catherine pensait-elle que j’étais une marionnette dont elle pouvait tirer les ficelles à son gré pour la faire gesticuler selon ses humeurs ? » (p. 124) C’est parfois à la beauté du diable que certaines personnes homosexuelles succombent, parce qu’elles-mêmes agissent à certains moments sous une emprise maléfique : « Sous un physique d’angelot, il cachait à peine une nature de gamin démoniaque. » (Frédéric Mitterrand, La mauvaise vie (2005), p. 204) ; « Jack Kerouac leva la tête de l’oreiller et me regarda par-dessus mon épaule ; juste à notre gauche, la lumière du néon rosé donnait à la chambre une couleur légèrement diabolique. » (Gore Vidal, Palimpseste – Mémoires (1995), p. 351) Cathy Bernheim, dans son autobiographie L’Amour presque parfait (2003), évoque précisément « le petit chat échaudé qui repose en son amante » (p. 142) ; « Je me laisse piéger. Et là, je suis dans un engrenage infernal. » (Christian, le dandy homosexuel de 50 ans, parlant de sa faiblesse par rapport à la masturbation face à un prêtre qui l’a initié aux plaisirs homosexuels quand il était jeune adulte, dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz) ; etc.

 

Vidéo-clip de la chanson "Thriller" de Michael Jackson

Vidéo-clip de la chanson « Thriller » de Michael Jackson


 

Les regards jouent un rôle prépondérant dans la chute infernale que vivent les personnes homosexuelles apparemment consentantes avec leur(s) amant(s) lunatiques, joueurs, menteurs, paradoxaux, traîtres, homophobes refoulés : « Je me promène aux Champs. Je n’accoste personne, jamais. C’est les types qui viennent. Vous voyez bien quand un type vous regarde. Remarquez, on ne peut jamais savoir ; il y en a qui restent là à vous regarder pendant cinq minutes, et si vous leur parlez, ils disent : ‘Qu’est-ce que vous me voulez, ça va pas non ?’. Des refoulés. » (Pierre Benichou pour le journal Le Nouvel Observateur, cité dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 44) La douceur également joue un rôle capital : « Mon ancien camarade de classe me met sous les yeux deux photos de Janson, cinquième et quatrième, toute la classe. […] Moi, mince, l’air silencieux, innocent d’une innocence évidente. Cela m’a ému, car depuis… Et tout à coup, le visage de Durieu que j’avais oublié et qui m’a arraché un cri : un visage d’ange résolu. Silencieux aussi celui-là, on ne le voyait pas, il disparaissait, je ne pouvais pas m’empêcher de ressentir sa beauté comme une brûlure, une brûlure incompréhensible. Un jour, alors que l’heure avait sonné et que la classe était vide, nous nous sommes trouvés seuls l’un devant l’autre, moi sur l’estrade, lui devant vers moi ce visage sérieux qui me hantait, et tout à coup, avec une douceur qui me fait encore battre le cœur, il prit ma main et y posa ses lèvres. Je la lui laissai tant qu’il voulut et, au bout d’un instant, il la laissa tomber lentement, prit sa gibecière et s’en alla. Pas un mot n’avait été dit dont je me souvienne, mais pendant ce court moment il y eut entre nous une sorte d’adoration l’un pour l’autre, muette et déchirante. Ce fut mon tout premier amour, le plus brûlant peut-être, celui qui me ravagea le cœur pour la première fois, et hier je l’ai ressenti de nouveau devant cette image, j’ai eu de nouveau treize ans, en proie à l’atroce amour dont je ne pouvais rien savoir de ce qu’il voulait dire. » (Julien Green, L’Arc-en-ciel, Journal 1981-1984, avril 1981, pp. 23-24)

 

Ne pensez pas que ce n’est que du délire paranoïaque, cette affaire. La rencontre avec le diable, je le crois, peut se faire régulièrement dans les lieux d’homopratiques ou à travers les personnes de même sexe qui cherchent à coucher avec nous. Ce sont mes propres amis (certains, grands consommateurs de sexe) qui me le confirment : « Une fois, je me retrouvais seul dans la backroom et j’ai vu une ombre bouger. J’étais terrifié. Je te raconte ça parce que j’ai eu d’autres témoignages de personnes homosexuelles qui ont vécu la même expérience que moi. » (Gianni, un ami homosexuel de 26 ans, sur le chat de Facebook, le 25 août 2014). Pour ma part, j’ai été aussi le témoin vivant de phénomènes réels à caractère démonologique, comme je le raconte le soir de la saint Valentin de 2019.

 

« Pendant que mon cousin prenait possession de mon corps, Bruno faisait de même avec Fabien, à quelques centimètres de nous. Je sentais l’odeur des corps nus et j’aurais voulu rendre palpable cette odeur, pouvoir la manger pour la rendre plus réelle. J’aurais voulu qu’elle soit un poison qui m’aurait enivré et fait disparaître, avec comme ultime souvenir celui de l’odeur de ces corps, déjà marqués par leur classe sociale, laissant déjà apparaître sous une peau fine et laiteuse d’enfants leur musculature d’adultes en devenir, aussi développée à force d’aider les pères à couper et stocker le bois, à force d’activité physique, des parties de football interminables et recommencées chaque jour. » (Eddy Bellegueule simulant des films pornos avec ses cousins dans un hangar, dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 153)

 

Dans son autobiographie Le Flamant noir (2004), Berthrand Nguyen Matoko raconte sa rencontre en boîte avec le premier homme qui va le sodomiser sauvagement (on voit peu à peu que la fascination laisse vite place au désenchantement) : « Il m’avait paru beau garçon, sûrement le plus beau de la soirée. Sa démarche faite d’ondulations dures, comme une danse sévère, attirait les yeux des femmes. […] Son corps vêtu de feu  […] Son torse apparut nu après une salsa endiablée. […] Nos regards se croisèrent à plus de deux reprises et chaque fois, l’effet en fut brûlant et bouleversant. » (p. 65) ; « J’observais imperceptiblement ce manège avec une étrange fascination, reprochant toutefois à mon complice son silence et la manière dont il manifestait avidement ses envies. » (idem, p. 66) Cet amant ne porte pas de nom : on sait juste que Berthrand Nguyen Matoko est « troublé par l’attirance vers cet inconnu » (idem). Leur coït qu’ils vivent est décrit comme un viol. « Plus tard, à l’approche de la première lumière qui annonce le grand jour, je me retrouvais dans sa chambre sans trop savoir pourquoi. Sa forte ombre qui tournait autour de moi bourdonnait des mots incompréhensibles, tel un chanteur aux mâchoires serrées. […] La sensation de beauté qui m’avait ébloui la veille, laissa la place à un visage banalement masculin, pas nécessairement très beau mais sexy, avec un air d’ivresse dans les yeux. » (idem, pp. 66-67) ; « Je sentais chaque centimètre de mon corps me distendre et m’étirer. Indéfiniment. De me sentir possédé, je me mis à pleurer. » (idem, p. 69) ; « J’attendais. Mieux que ça, je rêvais. Un rêve comme celui du Bon Dieu qui couche avec Satan. » (idem, p. 72)

 

Parfois, le diable aperçu par certaines personnes homosexuelles en l’amant est uniquement le reflet de leur propre déception vengeresse sur un homme fantasmé qui ne s’est pas laissé totalement faire homosexuellement par elles, ou bien juste le reflet de la violence inconsciente de leur indécente audace. Par exemple, dans son autobiographie Une Mélancolie arabe (2008), Abdellah Taïa décrit le regard diabolique de son cousin Chouaïb dont il est amoureux, mais qui ne l’aime pas en retour : « Il était à côté de moi. Ses yeux étaient rouges, furieux. Ils me fixaient. Ils ne voyaient que moi. Ils ne m’aimaient pas. » (p. 19)

 

Concernant les rapprochements réels avec le mythe de Faust, on note aussi quelques correspondances troublantes : dans l’Espagne des années 1940 en Espagne, Juan Soto interprète des chansons du répertoire de la revue Si Fausto Fuera Faustina ; en France, Émilienne d’Alençon tient le rôle principal du Petit Faust (1898) à l’Opéra-Comique de Paris ; Ernst Röhm, durant l’été 1919, crée le Eiserne Faust (le Poing de fer), une organisation nationaliste révolutionnaire, où il attire un certain Adolf Hitler qu’il découvre à cette occasion. Diverses personnes homosexuelles parlent explicitement du diable dans leur vie. C’est le cas de Franco Brusati, qui le met en relation avec son homosexualité : « L’homosexualité m’intéresse dans la mesure où elle suppose un rapport tout à fait spécial avec sa propre image, un combat entre le réel et l’imaginaire. Le combat avec l’ange… » Jean Cocteau, quant à lui, déclare qu’il est parfois « poussé par le diable. » (cf. le spectacle musical Un mensonge qui dit toujours la vérité (2008) d’Hakim Bentchouala) Christophe Tison, dans son autobiographie Il m’aimait (2004), décrit l’homme qui l’a violé comme un jumeau de Belzébuth : « Il était de dos, dans cette maison tranquille et silencieuse, et j’eus soudain terriblement peur. Peur qu’il ne se retourne en ayant un autre visage. (Le visage du diable.) » (p. 48) Gaël-Laurent Tilium, dans Recto/Verso (2007), fait un rapprochement entre son amant Sébastien, malade du Sida, et l’ange diabolique : « Sébastien me serrait la main avec la force de l’amour qu’il avait pour moi, avec la rage de la culpabilité, celle d’avoir invité parmi nous cette chose indésirable qu’il nous fallait combattre. » (pp. 238-239) ; « Il n’y a pas de possibilité. Il ne peut rien se passer. On s’aime trop. Il est trop jeune, trop mignon, c’est un ange. » (idem, p. 235) ; « J’avais près de moi l’ennemi et l’ami, la tentation et l’innocence, le plaisir et le danger. » (idem, pp. 159-160) Dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, Eddy Bellegueule raconte comment, au collège, il a instauré un pacte tacite entre lui et ses deux agresseurs : « Ils sont revenus. Ils appréciaient la quiétude du lieu où ils étaient assurés de me trouver sans prendre le risque d’être surpris par la surveillante. Ils m’y attendaient chaque jour. Chaque jour je revenais, comme un rendez-vous que nous aurions fixé, un contrat silencieux. […] Uniquement cette idée : ici, personne ne nous verrait, personne ne saurait. » (p. 38)

 

Film "Les Amitiés particulières" de Jean Delannoy

Film « Les Amitiés particulières » de Jean Delannoy

 

Par exemple, dans le documentaire « Vivant ! » (2014) de Vincent Boujon, Pascal, homosexuel et séropositif, raconte qu’avant d’attraper le VIH, il avait été prévenu par un inconnu quand il faisait le tapin, et que ce serment qu’il n’a pas tenu le hante : « Je faisais les quais, en 1984. Un homme m’a demandé de faire une promesse. ‘tu tombes dans une génération où vous allez tous tomber. ’ Et à chaque fois que je couchais, je me rappelais : ‘T’as pas tenu ta promesse… T’as pas tenu ta promesse… »

 

Dans notre monde contemporain, on a l’occasion de retrouver de nombreux signes de demande de possession diabolique de la part de la communauté homosexuelle : exemple avec le magazine des sexualités gays qui s’intitule Prends-moi. « Je débarquais dans la véritable délinquance avec une grande aisance, sans l’infime doute de me heurter aux barrières de la vie, sans avoir auparavant développé un sens aigu de la relativité des choses. En vendant ainsi mon âme au diable, je me baladais pendant des heures entières à travers des songes inassouvis… » (Berthrand Nguyen Matoko, Le Flamant noir (2004), p. 53) ; « Ce qui fait faillite dans le Faust de Gœthe, ce sont les valeurs du patriarcat. C’est le genre masculin qui s’effondre. » (Jacques Le Rider, lors de la rencontre-débat Atelier de la Pensée sur le thème « Quand commence la signature d’un pacte avec le diable ? » animée par Laure Adler, à l’Odéon Théâtre de l’Europe le 6 juin 2009) ; etc. Par exemple, dans son Journal (1889-1939), André Gide définit l’inverti comme celui qui « dans la comédie de l’amour, assume le rôle d’une femme et désire être possédé » (p. 671).

 
 

e) L’Autre :

Album de photos "La Beauté du diable" de Joseph Dupouy

Album de photos « La Beauté du diable » de Joseph Dupouy


 

C’est bien parce que la grande majorité des personnes homosexuelles rejette en bloc la différence des sexes qu’elles établissent un rapport excessif (et diabolique, pour le coup !) d’adoration/répulsion vis à vis de l’Altérité : cf. l’association L’Autre Cercle, le collectif Autrement Gay (à saint Étienne), l’Altercorpus (association de défense des personnes intersexes), etc. Cela me semble faux de dire que les personnes homosexuelles, du seul fait de ne pas intégrer dans leurs couples la différence des sexes, n’acceptent pas les différences : au contraire, elles les idolâtrent ! Comme l’écrit à juste titre Jean-Paul Sartre à propos de Jean Genet dans Saint Genet (1952) : « Étranger à lui-même, il ne peut aimer qu’un Autre-que-soi, car c’est lui-même dans son absolue altérité qu’il aime sous les espèces de l’autre. […] Il se fascine sur l’Autre et fuit sa propre conscience de soi. » (p. 109 et p. 169) Les personnes homosexuelles vouent un culte aux différences (à défaut de vouer un culte à LA Différence, celle des sexes), et entre autres à l’hétérosexualité. Pour elles-mêmes déjà, puisqu’elles vont se rêver ultra-originales, voire divines (le Tout-Autre, c’est Dieu Lui-même). Par exemple, Emilio Barón, dans Luis Cernuda Poeta (2002), insiste sur la recherche d’altérité absolue chez le poète espagnol : « Fidèle héritier de la tradition romantique, Luis Cernuda se présente comme l’exilé, le marginal, ‘l’Autre’. » (p. 11) Mais cette quête fiévreuse d’altérité va se faire aussi pour les autres, et dans leur recherche amoureuse : « Quand je vois un homme différent de moi, je n’en reviens pas ; je suis ébloui, émerveillé par la différence des autres. » (Jean Genet cité dans Tahar Ben Jelloun, « Une crépusculaire odeur l’isole », dans Magazine littéraire, n°313, septembre 1993, p. 30) Comme l’écrit très justement Jacques André, « l’homos-sexualité n’est pas la méconnaissance de l’altérité, elle en serait plutôt le savoir excessif » (Jacques André, « Le Lit de Jocaste », dans Incestes (2001), p. 18). Ce rapport excessivement proche à l’altérité aborde de front, et sans même que les personnes homosexuelles le verbalisent consciemment, la problématique de l’inceste ou du viol, qui surviennent justement lors de l’effacement des différences par une exaltation de celles-ci : « L’Autre, c’est cet étranger qui s’est immiscé dans ma vie et dans mon corps. » (Martine Cauvent, Guérir de l’inceste (2006), p. 17) ; « Combien de fois, à l’aube, alors que, sur les vieilles toitures de Clermont, l’affreux ciel des petits matins pâles cherchait sa vie, n’ai-je pas été saisi de nausées ? Tandis que je procédais à une toilette minutieuse, toujours comme ces femmes dont je me moque tant, j’ai vu dans mon miroir l’être de cendre que je suis vraiment. Par la porte entrouverte, j’apercevais un étranger, couché dans mon lit, satisfait après notre affreuse passion. Qui était-il ? qui nous avait poussés l’un vers l’autre, comme ‘les autres’ vers les putains ?… Quelle impasse ! » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 98) ; « Je vais être obligé d’avouer quelque chose d’un peu personnel. Moi, j’ai toujours été attiré par les pissotières, par ce contact, par ce qui se passe entre des corps étrangers qui se rencontrent au départ pour uriner, et au bout de quelques secondes, de quelques minutes, ça se transforme en autre chose. J’ai toujours trouvé ça très poétique, très entraînant, et je dois avouer que ça me rappelle la sexualité enfantine de groupe que j’ai eue avant l’âge de 12 ans. Et cette fascination pour les pissotières rejoint un peu ça : ce côté gentil, bienveillant, ce côté étranger et tout d’un coup on se donne l’un à l’autre, pendant un p’tit moment, et complètement dans l’interdit… Malheureusement, il n’y a plus de pissotières à Paris. » (Abdellah Taïa, romancier homosexuel, dans l’émission Homo Micro de Radio Paris Plurielle, le 25 septembre 2006) ; « Autre… mais indétectable. Presque un shoot. » (la narratrice transgenre F to M dans le one-woman-show Mâle Matériau (2014) d’Isabelle Côte Willems) ; etc.

 

Le fanatisme homosexuel pour les différences cache au fond un mépris de l’altérité concrète (beaucoup de personnes homosexuelles tiennent d’ailleurs le double discours paradoxal : « Il faut respecter toutes les différences… et les différences n’existent pas puisque nous sommes tous égaux. »), et plus largement une schizophrénie diabolique, une misanthropie. « Ma maison avait deux tours : l’une plongée dans la lumière et l’autre obscure. » (l’écrivain homosexuel Hugues Pouyé parlant de son enfance dans le site Les Toiles roses en 2009) ; « J’ai un mec à l’intérieur de moi qui me dit : ‘Il faut pas que t’aies un mec à l’intérieur de toi ! » (Shirley Souagnon dans son concert Free : The One Woman Funky Show, 2014) ; « Jamais on n’a autant célébré l’Autre. C’est l’Autrisme. Et jamais l’autre n’a eu aussi peu droit de cité. » (Élisabeth Lévy dans l’essai Festivus festivus : Conversations avec Élisabeth Lévy (2005) de Philippe Muray, p. 28)

 

Enfin, je terminerai ce chapitre délicat sur les liens étranges entre désir homosexuel et démonologie par ce constat. Aux vues des nombreuses attaques et manifestations d’ordre surnaturel que j’identifie autour de moi en ce moment, je peux dire qu’actuellement, dans notre monde d’aujourd’hui, le diable a spécialement élu domicile dans l’homosexualité (homosexualité en tant qu’acte et en tant que mot ou étiquette). Pourquoi ? C’est très simple. L’homosexualité est la seule chose qui est objectivement violente, mauvaise (elle exclut la différence des sexes qui est le fondement de notre existence humaine, de notre identité et de notre amour) mais que pour autant notre Monde et nos contemporains sont capables de massivement/passivement reconnaître comme une identité humaine ou un amour magnifiques, banals et indiscutables. Autant l’avortement, la contraception, le vol, le divorce, l’euthanasie, la GPA, le clonage, la prostitution, l’adultère, les guerres, sont un peu plus unanimement reconnus comme « mauvais » par la masse, autant le seul sujet de société qui divise et anesthésie les gens, ce sera uniquement l’homosexualité. Il est alors logique que le diable se serve de l’homosexualité comme principal pare-feu, comme voile pudique, comme rideau rose fleuri derrière lequel il pourra planquer toutes les souffrances et toutes les violences humaines dont il est l’auteur : il sait que très peu de personnes se risqueront à analyser ce rideau rose et à le soulever (il n’est pas du tout content, d’ailleurs, quand quelqu’un s’en approche de trop près !). Et il fait tout pour que tout le monde applaudisse les speakerines parlant devant ce cache-misère fleuri et qui sont prêtes à se caricaturer en « homos » ou en « hétéros gay friendly » pour faire diversion, pour faire leurs intéressantes ou jouer les victimes indignées d’elles-mêmes. J’ai compris que l’homosexualité était la planque privilégiée du diable d’une part quand j’ai perçu l’importance universelle de la différence des sexes (importance que la pratique homo remettait directement en cause), et puis surtout quand je vois qu’après mes conférences, ou bien dans les mails que je reçois, les gens me racontent tous leurs malheurs et leurs souffrances, y compris ceux qui n’auraient a priori rien à voir avec l’homosexualité. C’est donc que l’homosexualité éclaire et fait écho à toutes les souffrances humaines, sans exception. Non pas que l’homosexualité serait à l’origine de tous les maux de la Planète. Mais en tous cas, elle en est le signe et l’alibi n°1. C’est la raison pour laquelle il est central de prendre ce sujet très au sérieux, et même d’en faire LA priorité de nos combats contre le transhumanisme homicide et cet humanisme intégral prônant l’Homme sans Dieu et sans différence des sexes.

 
 

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Code n°76 – Focalisation sur le péché (sous-code : Péché « originel »)

focalisation

Focalisation sur le péché

 
 

NOTICE EXPLICATIVE :

 

Pédé = Péché ?

 

Pièce Homosexualité de Jean-Luc Jeener

Pièce Homosexualité de Jean-Luc Jeener


 

« Pédé » n’est pas synonyme de « péché »… même si ces deux mots riment et que, par haine d’elle-même, la communauté LGBT, pourtant persuadée qu’elle ne croit ni en Dieu ni en l’existence du péché, essaie de les faire fusionner.

 

En effet, les personnes homosexuelles pratiquant leur homosexualité passent leur temps à parler du « péché », à dire que ce sont les autres (et surtout les catholiques) qui le font, qui les jugent, qui les réduisent et les enferment dans leurs actes peccamineux, alors qu’en réalité, c’est leur propre pratique qui les exclut de l’Église et du Salut, alors que ce sont elles seules (et leurs « amis » hétéros-gays friendly) qui se focalisent sur le péché, elles seules qui s’étiquettent « pécheurs », « exclus du Salut et du Pardon de Dieu », et « maudits », pour se tenir chaud dans la victimisation et ne surtout pas se remettre en cause, alors qu’au contraire les vrais catholiques rejettent le péché mais aiment le pécheur et défendent la distinction cruciale entre personne homo et acte homo. Ils savent que la Miséricorde de Dieu pour les personnes homosexuelles est immensément plus grande qu’elles ne L’imaginent.
 

Vidéo-clip de la chanson "Je te rends ton amour" de Mylène Farmer

Vidéo-clip de la chanson « Je te rends ton amour » de Mylène Farmer


 

Pour une inversion incroyable et malhonnête, le diable réussit à faire croire aux esprits faibles et blessés qui lui obéissent que le péché le plus grave qui va faire mourir l’Homme, c’est la différence des sexes, donc le corps sexué, le mariage d’amour entre la femme et l’homme, la procréation aimante, et le célibat sexué consacré à Dieu. Alors que dans les faits, et aux yeux de Dieu, c’est la différence (des sexes) qui nous permet d’aimer, de Le connaître, et d’aimer totalement ; c’est l’accueil respectueux de la différence des sexes qui sauve vraiment tout être humain du péché. La sexuation, le mariage aimant entre la femme et l’homme, le célibat consacré, et parfois (si c’est donné) l’engendrement biologique dans la différence des sexes, ce sont les plus grands actes d’amour neutralisant le péché.

 

Les personnes homosexuelles, rejetant la différence des sexes de par leur désir sexuel, actualisent souvent cette inversion diabolique entre péché et sainteté (et d’autant plus quand elles pratiquent leur homosexualité et s’y identifient identitairement), au point de considérer que la différence des sexes est diabolique, et qu’elles deviendront saintes (ou des « pécheurs sanctifiés » !) une fois qu’elles l’auront évacuée de leur vie ou qu’elles chercheront à la détruire. Parfois, elles se rendent compte que le véritable péché réside dans la destruction et le mépris de la différence des sexes… et dans ces cas-là, elles sombrent dans une dépression de Drama Queen surjouant la victimisation de l’héroïne maudite et damnée, se confondant en excuses et en remords. Mais la plupart du temps, elles ne s’en rendent pas compte, et clament que le péché est une invention venant de l’Église, une création des gens « saints… et hypocrites ». Pire : elles considèrent qu’elles sont encore plus divines et éloignées du péché depuis qu’elles se prennent pour l’Incarnation du plus grand des Pécheurs, depuis qu’elles se prennent pour l’Incarnation vivante et individuelle de la différence des sexes, depuis qu’elles sont en couple homo, depuis l’opération chirurgicale leur ayant mutilé leur corps sexué, depuis leur divorce. Leur focalisation verbale sur le péché, qui se veut un pastiche ironique drôlissime et subversif de la bien-pensance « hétéro-patriarcale », une instrumentalisation camp de la culpabilité que la société ferait peser sur elles, est en réalité un appel et un rappel inconscient que l’éjection de la différence des sexes dans leur identité et dans leurs actes sexuels est concrètement peccamineuse et qu’elle les fait souffrir. C’est la raison pour laquelle elles reviennent sans arrêt, dans leurs créations artistiques, sur l’épisode de la pomme et du péché « originel » d’Adam et Ève raconté dans la Bible, épisode auquel elles s’identifient (y compris celles qui prétendent ne pas croire en Dieu). Nous devons écouter cet appel et le comprendre comme une illustration que les actes homosexuels sont vraiment des péchés graves dont pâtissent ceux qui les posent.
 
 

N.B. : Je vous renvoie également aux codes « Homosexualité noire et glorieuse », « Blasphème », « Emma Bovary ‘J’ai un amant !’ », « Clown blanc et Masques », « Cour des miracles », « Se prendre pour Dieu », « Désert », « Mort », « Mort = Épouse », « Jardins synthétiques », « Ennemi de la Nature », « Je suis différent », « Icare », « Vampirisme », « Déni », « Homosexuel homophobe », « Milieu homosexuel infernal », « Appel déguisé », « Désir désordonné », « Amant diabolique », « Femme et homme en statues de cire », « Femme vierge se faisant violer un soir de carnaval ou d’été dans un bois », « Se prendre pour le diable », « Curé gay », « Vierge », et « Attraction pour la ‘foi’ », dans le Dictionnaire des Codes homosexuels.
 
 

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FICTION

 

a) Le péché est partout et je suis un damné du Jardin d’Éden :

Film "La meilleur façon de marcher" de Claude Miller

Film « La meilleure façon de marcher » de Claude Miller


 

Dans les fictions homo-érotiques, il est souvent question du péché : cf. la chanson « It’s A Sin » du groupe Pet Shop Boys, la chanson « Such A Shame » du groupe Talk Talk, la photo La Faute énorme de Duane Michals, le roman El Último Pecado De Una Hija Del Siglo (1914) d’Álvaro Retana, le roman El Pecado Y La Noche (1910) d’Antonio de Hoyos, la pièce Homosexualité (2008) de Jean-Luc Jeener, le film « Sin In The Suburbs » (1964) de Joseph W. Sarno, le film « The Sins Of Rachel » (1972) de Richard Fontaine, le film « Ordinary Sinner » (2001) de John Henry Davis, le film « Saints And Sinners » (2004) d’Abigail Honor et Yan Vizinberg, le film « Pecata Minuta » (1998) de Ramón Barea, le film « Preaching To The Perverted » (1997) de Stuart Urban, la pièce Confidences entre frères (2008) de Kevin Champenois, le film « Dirty Little Sins » (« Sale petit péché », 2005) de Kett Blakk, la pièce Dans la solitude des champs de coton (1985) de Bernard-Marie Koltès (où il est fait mention des 7 péchés capitaux), le film « Le Fil » (2010) de Mehdi Ben Attia, le film « Paresse » (2000) de Frank Mosvold, le film « The Children’s Hour » (« La Rumeur », 1961) de William Wyler, la série It’s a Sin (2021) de Russel T. Davies, etc.

 

Film "Los Abrazos Rotos" de Pedro Almodovar

Film « Los Abrazos Rotos » de Pedro Almodovar


 

C’est l’épisode biblique du jardin d’Éden perdu et du « péché originel » d’Adam et Ève qui semble obséder le héros homosexuel : cf. le film « Fruits amers » (1967) de Jacqueline Audry, le film « Secret Garden » (« Jardin secret », 1987) d’Hisayasu Sato, la chanson « Sapho et Sophie » d’Alain Chamfort, le film « Big Eden » (2000) de Thomas Bezucha, Le film « Expelled To Eden » (2005) d’Eran Koblik Kedar, le film « The Stepford Wives » (« Et l’homme créa la femme », 2004) de Frank Oz, la chanson « 1er novembre (Le Fruit) » du Beau Claude, la chanson « Quand tu m’appelles Éden » d’Étienne Daho, le film « Mon fils à moi » (2006) de Martial Fougeron (avec la scène incestueuse finale de la pomme entre Julien et sa maman), la pièce À quoi ça rime ? (2013) de Sébastien Ceglia (avec le thème de la chute de la pomme), le recueil de poésies Sombra Del Paraíso (Ombre du Paradis, 1944) de Vicente Aleixandre, le roman Le Jardin des chimères (1921) de Marguerite Yourcenar, le roman Éden, Éden, Éden (1970) de Pierre Guyotat, le roman La Busca Del Jardín (1978) d’Héctor Bianciotti, le film « The Apple » (2008) d’Émilie Jouvet, la chanson « Paradis inanimé » de Mylène Farmer, le film « The Gardener Of Eden » (1981) de James Broughton, le film « Minuit dans le Jardin du Bien et du Mal » (1997) de Clint Eastwood, le roman Invitados En El Paraíso (1958) de Manuel Mujica Lainez, les jardins picturaux des toiles de Pierre et Gilles, le film « Les Enfants du Paradis » (1945) de Marcel Carné, le film « Adam et Ève » (1995) de Joaquim Leitao, le film « Bug » (2003) d’Arnault Labaronne, le film « Les Majorettes de l’Espace » (1996) de David Fourier, les fresques La Création du Monde, Adam, Le Paradis de Michel-Ange (1475-1564), le film « Sotvoreniye Adama » (« La Côte d’Adam », 1993) de Yuri Pavlov, le roman Le Jardin d’acclimatation (1980) d’Yves Navarre, le film « De la chair pour Frankenstein » (1994) d’Antonio Margheriti et Paul Morrissey, le vidéo-clip de la chanson « Tristana » de Mylène Farmer (avec la pomme empoisonnée), le film « Je t’aime toi » (2004) d’Olga Stolpovskay et Dmitry Troitsky, le film « La meilleure façon de marcher » (1976) de Claude Miller, le roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude, le film « Paradis perdu » (1939) d’Abel Gance, le film « Eden’s Curve » (2003) d’Anne Misawa, le roman Del Huerto Del Pecado (1909) d’Antonio de Hoyos, le film « Les Filles du botaniste » (2006) de Daï Sijie (avec le meurtre du père dans la serre par le couple lesbien), le roman The Rubyfruit Jungle (1973) de Rita Mae Brown, le one-man-show Le Jardin des dindes (2008) de Jean-Philippe Set (avec Blanche-Neige se faisant poursuivre par le chasseur Rocco), la chanson « Miss Paramount » du groupe Indochine (avec la mention du film « Le Jardin des Tortures »), le film « Naissance des pieuvres » (2007) de Céline Sciamma (avec le croquage de pomme filmé comme un péché acté), la pièce La Journée d’une rêveuse (1968) de Copi (avec la métaphore du Jardin d’Eden inversé, avec une Ève violée : « Mon parc est semé de gens morts ! »), le film « Adam And Eve » (2006) de Stian Kristiansen, le roman Vincent Garbo (2010) de Quentin Lamotta, le roman La Pérdida Del Reino (1972) de José Bianco, la chanson « J’veux pas être jeune » de Nicolas Bacchus (où les amants homosexuels se rendent « jusqu’au jardin désert qu’ils n’avaient pas cherché »), le film « Chéri » (2009) de Stephen Frears, le one-woman-show Karine Dubernet vous éclate (2011) de Karine Dubernet (avec la comédienne arrivant sur scène en Éve), le vidéo-clip de la chanson « Only Gay In The World » de Ryan James Yezak, le film « Gan » (« Un Jardin », 2003) de Ruthie Shatz Adi Barash (racontant l’histoire de deux jeunes prostitués de Tel Aviv), le film « Notre Paradis » (2011) de Gaël Morel, le film « Teens Like Phil » (2011) de David Rosler et Dominic Haxton, le film « Tchernobyl » (2009) de Pascal Alex-Vincent (filmant le dépucelage de deux adolescents dans une forêt), la pièce Folles Noces (2012) de Catherine Delourtet et Jean-Paul Delvor (avec la mention de la pomme et du serpent), la chanson « Jardin d’Éden » de Zaho, etc.

 
FOCALISATION Adam & Steeve
 

« En réalité, je préfère les représentations du péché originel. Cette faute que nous continuons de payer, elle m’a toujours intéressé. Et le cri silencieux d’Ève chassée du paradis, il m’apparaît tout à coup que cela pourrait être le mien. » (Luca, l’un des héros homosexuels du roman Un Garçon d’Italie (2003) de Philippe Besson, p. 43) ; « Sur un arbre, je veux croquer la pomme. » (Philippe par rapport à Bernard, dans la comédie musicale La Belle au bois de Chicago (2012) de Géraldine Brandao et Romaric Poirier) ; « J’ai enfin trouvé mon alter ego. Car c’est moi qui fais l’homme. Accroche-toi comme tu peux à ma ceinture. Viens croquer dans la pomme. » (cf. la chanson « C’est moi qui fais l’homme » de Ginie Line) ; « Serpent, je ne mange pas de ce pain-là. » (OSS 117 s’adressant à son amant diabolique lui tendant sa pomme d’amour, dans le film « OSS 117 : Rio ne répond plus » (2009) de Michel Hazanavicius) ; « Ses yeux étaient immenses, ses cheveux tombaient en désordre sur ses épaules. La peau de son ventre faisait des plis, rentrait en elle-même. Je me suis rendu compte que nous étions nues. » (Ronit et Esti, les deux amantes du roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, p. 243) ; « Nous étions seuls au monde. La forêt nous avait éloignés de tout et, plus ou moins, libérés de tout. Nous étions nus. Nous avions enlevé nos vêtements rapidement. » (Khalid et son amant Omar, dans la pièce Le Jour du roi (2010) d’Abdellah Taïa, p. 137) ; « Melocotón et boules d’or, deux gosses dans un jardin. » (cf. la chanson « Melocotón » de Colette Magny) ; « Après l’avoir laissée dans le bâtiment Pouchkine, je sentis mon cœur déborder d’un savoir que je ne sus pas identifier sur-le-champ. J’avais tant de fois imaginé ce qu’avait dû ressentir Newton quand la pomme lui était tombée sur la tête, lui révélant brusquement les lois de l’attraction universelle. […]J’aurais aimé qu’il y ait eu un objet tout simple comme une pomme, quelque chose de palpable que je pourrais observer de près et tenir en main, humer et mordre. » (Anamika, l’héroïne lesbienne parlant de son émoi homosexuel, dans le roman Babyji (2005) d’Abha Dawesar, p. 11) ; « Stephen [l’héroïne lesbienne] avait erré jusqu’à un vieux hangar où l’on rangeait les outils de jardinage et y vit Collins et le valet de pied qui semblaient se parler avec véhémence, avec tant de véhémence qu’ils ne l’entendirent point. Puis une véritable catastrophe survint, car Henry prit rudement Collins par les poignets, l’attira à lui, puis, la maintenant toujours rudement, l’embrassa à pleines lèvres. Stephen se sentit soudain la tête chaude et comme si elle était prise de vertige, puis une aveugle et incompréhensible rage l’envahit, elle voulut crier, mais la voix lui manqua complètement et elle ne put que bredouiller. Une seconde après, elle saisissait un pot de fleurs cassé et le lançait avec force dans la direction d’Henry. Il l’atteignit en plein figure, lui ouvrant la joue d’où le sang se mit à dégoutter lentement. Il était étourdi, essayant doucement la blessure, tandis que Collins regardait fixement Stephen sans parler. Aucun d’eux ne prononça une parole ; ils se sentaient trop coupables. Ils étaient aussi très étonnés. […]Stephen s’enfuit sauvagement, plus loin, toujours plus loin, n’importe comment, n’importe où, pourvu qu’elle cessât de les voir. Elle sanglota et courut en se couvrant les yeux, déchirant ses vêtements aux arbustes, déchirant ses bas et ses jambes quand elle s’accrochait aux branches qui l’arrêtaient. » (Marguerite Radclyffe Hall, The Well Of Loneliness, Le Puits de solitude (1928), pp. 38-39) ; « Le jardin, au lever du soleil, lui sembla tout à fait étranger, comme un visage bien connu qui se serait soudain transfiguré. […]Elle prit soin d’avancer doucement, car elle se sentait un peu fautive. » (idem, p. 135) ; « La femme est l’avenir des pommes. » (Didier Bénureau dans son spectacle musical Bénureau en best-of avec des cochons, 2012) ; « Dans toute femme, il y a une Ève malveillante qui sommeille. » (Rodin, l’un des héros homosexuels dans la série Joséphine Ange-gardien (1999) de Nicolas Cuche, épisode 8 « Une Famille pour Noël ») ; « Hedwig, tu me donnes un bout de pomme ? » (Tommy s’adressant au héros transgenre M to F Hedwig, dans le film « Hedwig And The Angry Inch » (2001) de John Cameron Mitchell) ; « Moi je suis comme le vent, j’emporte mon secret dans un jardin d’Éden, m’allonger dedans. » (cf. la chanson « L’Alizé » d’Alizée) ; « Mathilde et moi, c’est un drôle de paradis, un jardin luxuriant. » (la narratrice lesbienne dans le roman Mathilde, je l’ai rencontrée dans un train (2005) de Cy Jung, p. 29) ; « Nunca me ha llamado la atención lo de Eva y la manzana, porque de Eva soy hermana y tentarse es cosa humana. » (cf. les paroles d’une chanson de Tita Merello, citée dans la pièce L’Ombre de Venceslao (1978) de Copi) ; « Nous [les Rats] lui [le serpent] exprimâmes notre admiration sincère et la Reine des Rats l’invita à passer les vacances de Pâques enroulé dans notre arbre si jamais à Pâques, lui, l’arbre et nous-mêmes nous nous trouvions encore en vie et en liberté. […]Le serpent répondit qu’il était hermaphrodite et qu’il se fécondait tout seul. » (Gouri, le narrateur bisexuel du roman La Cité des rats (1979) de Copi, pp. 76-77) ; « Tant pis pour la Bible. Je veux mettre ma dent dans la pomme d’Adam. J’aime les filles et les garçons, j’aime tout ce qui est bon. Je suis bi-zarrement faite. » (Anne Cadilhac dans son concert Tirez sur la pianiste, 2011) ; « Je cherche un Adam pour croquer ma pomme. » (cf. la chanson « Avis au sexe fort » de Zazie) ; « Prions que l’enfer ne nous sépare pas. » (Valmont s’adressant à Merteuil, dans la pièce Quartett (1980) d’Heiner Müller, mise en scène en 2015 par Mathieu Garling) ; « Mon prof d’éducation physique… Moi, il m’a tout appris. C’est lui qui disait : ‘Un hétéro, c’est un homo qui s’ignore tant qu’il n’a pas goûté au fruit défendu.’. » (Fabien Tucci, homosexuel, dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch, 2015) ; « Comme disait ma grand-mère, à force de croquer la vie à pleine dent, on en perd son dentier. » (idem) ; etc.

 

Le « péché » dans le jardin, dont il est beaucoup question au sein de la fantasmagorie homosexuelle, en plus d’être un esthétisme décadent « innocent et folklorique », peut figurer le viol entre la femme et l’homme, ou bien l’acte homo, ou bien la perte de l’innocence, ou tout simplement la découverte de la différence des sexes. Par exemple, dans la pièce Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens (2007) de Gérald Garutti, Ève est présentée comme l’origine d’un monde pécheur. Dans la pièce musicale Érik Satie… Qui aime bien Satie bien (2009) de Brigitte Bladou, Érik Satie dit qu’il est un mélange d’Adam et d’Ève, « des paresseux sans doute ». Dans le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, la pulpeuse Eva, la belle tentatrice, essaie de faire succomber le jeune prêtre Adam, secrètement homosexuel. Dans le film « Boys Like Us » (2014) de Patric Chiha, Sissi, une cantatrice fantomatique transgenre des montagnes, raconte que, lorsqu’un de ses fans lui a lancé une pomme en plein concert, elle « en a perdu sa couronne » au moment où elle a croqué le fruit. Dans le film « New York City Inferno » (1978) de Jacques Scandelari, après leur coït adultère, les deux amants (dont Paul) croquent la pomme ensemble. Dans la comédie musicale Adam et Steeve jouée à l’intérieur du film « The Big Gay Musical » (2010) de Casper Andreas et Fred M. Caruso, le couple homo formé par Adam et par Steeve remplace et répare le péché originel opéré par « les hétéros homophobes » Adam et Ève, le couple femme-homme défectueux : ce nouvel amour sans différence des sexes est qualifié de « Vérité du Ciel » même s’il n’est pas écrit dans la Bible. Le film « Mommy » (2014) de Xavier Dolan nous montre en premières images la mère de Steve, le héros homosexuel, cueillant une pomme sur un arbre. Dans le film « Test : San Francisco 1985 » (2013) de Chris Mason Johnson, l’amour entre Frankie et Todd est mis sous le signe du péché originel dès le départ. Dans la cuisine, ils se parlent de « la cire sur les pommes pour les faire briller ». Puis ils rejouent la scène du jardin d’Éden dans un parc de la San Francisco, où Frankie, près de l’arbre où ils s’abritent, menace son amant de l’attraper dans sa toile d’araignée, telle une Ève maléfique. Dans le film « Carol » (2016) de Todd Haynes, Thérèse, l’héroïne lesbienne, croque une pomme rouge dans la voiture que conduit sa compagne Carol.
 

Quand le personnage homosexuel a l’humilité de reconnaître son désir homosexuel comme un « signe de péché », et l’acte homosexuel comme un péché, c’est-à-dire une action qui rejette la différence des sexes et Dieu, il parle ouvertement de « péché »… et ce n’est pas si rare, surtout chez les héros homosexuels croyants qui ont un tant soit peu la crainte de Dieu : « Longtemps, il [Adrien, le héros homosexuel] avait cru ce penchant, ce mauvais penchant, surmontable. Dieu serait plus fort que son désir. Il saurait même dissiper, extirper jusqu’à sa racine ce mal profond. Il avait bien fini par comprendre, de guerre lasse, que la blessure resterait longtemps. » (Hugues Pouyé, Par d’autres chemins (2009), p. 25) ; « Vous comprendrez que de tels péchés parfois sont difficiles à avouer. » (cf. la chanson « Partenaire particulier » du groupe Partenaire particulier) ; « Je m’étais peu intéressé au péché, à ce que ça signifie vraiment. Cette fois, c’est sûr, j’en ai fait un. Les gens qui croient ont raison de dire qu’il faut toujours expier. » (Bjorn, l’un des héros homosexuels du roman Riches, cruels et fardés (2002) d’Hervé Claude, p. 154) ; « La vie que je mène n’est pas parfaite, mais c’est ma vie, je l’ai façonnée d’après mes rêves en veillant à la tenir à distance du terrible glaive de Dieu. » (Michael, le narrateur homosexuel du roman Michael Tolliver est vivant (2007) d’Armistead Maupin, p. 90) ; « Une brebis égarée, j’en suis une depuis un petit bout de temps… » (Luc, l’un des héros homosexuels du roman Le Cœur éclaté (1989) de Michel Tremblay, p. 234) ; « Tous mes idéaux, des mots abîmés. […]Pourtant, je voudrais retrouver l’innocence. » (cf. la chanson « Désenchantée » de Mylène Farmer) ; « De ses flèches j’étais la cible. Je n’ai pas eu le choix. Renoncer me met au supplice. Mes prières montent vers toi. Dieu, pourquoi me sentir si coupable ? Pourquoi sentir l’orage en moi ? Dieu du Coran ou de la Bible. Donne-moi la force et la foi, enfin. C’était un amour impossible… Pourquoi me sentir coupable ? Pourquoi sentir l’orage en moi ? Pourquoi me sentir misérable ? Pourquoi sentir l’orage en moi ? » (cf. la chanson « L’Orage » d’Étienne Daho) ; « C’est une espèce de malédiction. Tu penses qu’on va aller en enfers ? » (Bryan s’adressant à son amant Tom, dans la pièce Les Vœux du Cœur (2015) de Bill C. Davis) ; « There’s no place in Heaven for someone like me. » (c.f. la chanson « No Place in Heaven » de Mika) ; etc.

 

Par exemple, dans le one-man-show Elle est pas belle ma vie ? (2012), Samuel Laroque raconte qu’il taille une pipe à un prêtre exorciste qu’il compare à Shrek. Dans le film « In & Out » (1997) de Frank Oz, Howard, découvrant son homosexualité, file en panique au confessionnal. Dans le roman N’oubliez pas de vivre (2004) de Thibaut de Saint Pol, le narrateur homosexuel croit en son « existence pécheresse » (p. 137) Dans le film « Rafiki » (2018) de Wanuri Kahiu, Kena, l’héroïne lesbienne, accepte de recevoir des prières de délivrance et d’exorcisme de sa communauté catholique kenyane qui la croit possédée parce qu’ils ont découvert son homosexualité : « Tu oublies les démons qui possèdent cette enfant ! » dit Mercy, sa mère, à son mari John. Le pasteur de l’église où Kena se rend tous les dimanches fait répéter à tous les fidèles qui imposent leurs mains sur la pauvre jeune femme : « Nous brisons ses liens avec les démons ! ».

 

Dans la pièce Géométrie du triangle isocèle (2016) de Franck d’Ascanio, Lola trompe sa copine Vera d’un commun accord avec Nina. Se profile la culpabilité : « Vera, est-ce que tu considères que ma liaison avec Nina est une faute ? » s’interroge Lola. Vera acquiesce : « Peut-être même un péché. » Lola conclut : « Cette femme est diabolique. Elle a trouvé le moyen de me déculpabiliser. »
 

Mais chez le héros homo, la reconnaissance du péché est souvent bien trop pleurnicharde et théâtrale pour être repentante et vraiment coupable. C’est un petit caprice sincère, une mise en scène pour pleurer le péché sans agir concrètement contre. « Je me suis baladé dans la rue des péchés. Tout ce que je peux te dire, c’est qu’ils peuvent se les garder, leurs pèches ! » (Arthur, le personnage homosexuel à Atlanta, dans le roman Harlem Quartet (1978) de James Baldwin, mis en scène par Élise Vigier en 2018) Par exemple, dans la série Ainsi soient-ils (2014) de David Elkaïm (dans l’épisode 3 de la saison 1), Emmanuel, l’un des séminaristes, noir et homosexuel, confesse auprès d’un prêtre sa première expérience homosexuelle passée avec un homme anonyme à Carthage (« Les détails s’imposent à moi de façon démoniaque. Pourquoi je me sens si coupable ? »)… pour mieux se justifier de succomber ensuite au péché dans les bras d’un autre séminariste, Guillaume. Dans le film « Lilting » (« La Délicatesse », 2014) de Hong Khaou, Richard reproche à Junn, la mère de Kai son amant décédé dans un accident, d’avoir culpabilisé ce dernier au point de le maintenir dans le secret de son homosexualité et de l’avoir conduit à la mort. Celle-ci semble se défiler… mais en réalité, elle souligne une culpabilité justifiée et inconsciente chez les eux amants homos : « C’est votre culpabilité. Je ne vais pas jouer au psy. […] Cette culpabilité, il l’a toujours ressentie. Je n’ai pas étouffé Kai. »

 

En général, c’est par la voie du sarcasme et du ricanement que le personnage homosexuel dramatise/croit dramatiser ses actes homosexuels en utilisant des termes religieux anachroniques/cinématographiques diabolisants qui ne correspondent pas (ou qui correspondent trop !) à ce qu’il a fait ou à ce que son entourage en aurait dit. Le héros homosexuel est soit affolé par l’existence du péché (le péché étant entendu comme la rupture avec Dieu ou l’absence de Dieu), soit excité (même sexuellement) par le péché (et l’interdit/l’orgueil qu’il génère) : « Je suis le roi des péchés. » (sa Majesté Ignace dans la pièce Iwona, Księżniczka Burgunda, Yvonne, Princesse de Bourgogne (1938) de Witold Gombrowicz) ; « Si vous aimez le show, vous brûlerez en enfer avec nous ! » (les héros homosexuels de la comédie musicale Adam et Steeve dans le film « The Big Gay Musical » (2010) de Casper Andreas et Fred M. Caruso) ; « Tu ne m’emmèneras pas sur la voie du péché ! » (Nathalie face à Tatiana avec qui elle rêve de faire l’amour, dans le one-woman-show Wonderfolle Show (2012) de Nathalie Rhéa) ; « I’m a sinner. I like it that way. » (cf. la chanson « I’m A Sinner » de Madonna) ; « Pietro veut devenir carmélite pour expier mes péchés. Mais je n’ai pas de péchés ! Bien sûr j’ai des péchés, des très grands péchés, lui-même n’est-il pas un de mes péchés ? » (le narrateur homosexuel parlant de son amant Pietro, dans le roman Le Bal des folles (1977) de Copi, p. 146) ; « Et voici la star des péchés, Ada la violente ! » (Cherry s’adressant à son amante Ada dans la pièce La Star des oublis (2009) d’Ivane Daoudi) ; etc.

 

Avant même d’avoir pris le temps de laisser parler la Miséricorde, le héros homosexuel décrète à la place de Dieu qu’il ira en enfer. Par exemple, dans le téléfilm « Prayers For Bobby » (« Seul contre tous », 2009) de Russell Mulcahy, Bobby, le héros homosexuel, joue sa drama queen écartelée, pour mieux se justifier d’une part de pratiquer son homosexualité, et d’autre part de se suicider : malgré ce qu’il prétend (« Je ne veux pas choisir le péché. »), en s’étiquetant « homosexuel » et en s’engageant dans une pratique homosexuelle, il veut absolument être pécheur, et ce, malgré les tentatives de sa mère pour lui apprendre la Miséricorde de Dieu (« Je crois qu’Il aime le pécheur, pas le péché. » lui dit-elle) : « Je ne voulais pas aller en enfer mais j’irai quand même. […]Tu as raison maman, je suis condamné à brûler en enfer. Je suis damné. Je voudrais ramper sous une pierre et dormir pour toujours. […]Je sens Dieu qui me regarde les yeux remplis de pitié. Il ne peut pas m’aider car j’ai préféré le péché à la vertu. » Dans le spectacle musical Luca, l’Évangile d’un homo (2013) d’Alexandre Vallès, le héros homosexuel se filme entouré de flammes dans un monastère, et passe son temps à soutenir qu’il est maudit : « Nous, les monstres du Créateur. » Même la bande-annonce du concert indique que « Luca est condamné à mort à cause de son homosexualité ». Le comédien sur scène se met à pasticher des phrases que les « homophobes catholiques » ou que Dieu auraient prononcées, et qu’il reprend à son compte : « Le Sida est la punition divine sur les homos et les drogués. » Dans le film « The Boys In The Band » (« Les Garçons de la bande », 1970) de William Friedkin, Michael est le prototype du catho homo sans cesse culpabilisé par sa foi (… en réalité par sa propre pratique homosexuelle en discordance avec sa foi) : « Je vais mourir !!! »
 

 

Quand le héros parle de la découverte de son homosexualité, le spectateur ne sait pas s’il cite les gens de son entourage, ou les pensées qu’il leur prête, ou les propos qu’il aurait entendus, ou même s’il dit ce qu’il est le seul à penser (tout semble mélangé) : « La Bible dit que nous sommes des pécheurs. » (l’un des amants de Paul, dans le film « New York City Inferno » (1978) de Jacques Scandelari) ; « Parfois, je pense que Dieu me punit. À cause de ce qu’on a fait ensemble. » (Esti, l’héroïne lesbienne juive, s’adressant à sa compagne Ronit, dans le roman La Désobéissance (2006) de Naomi Alderman, p. 144) ; « Saïd est mort, tué par l’orage, un signe peut-être que Dieu n’approuve pas ce que les garçons s’apprêtaient à faire ce soir. » (Saïd et Ahmed, le couple homo maudit, dans le roman Accointances, connaissances, et mouvances (2010) de Denis-Martin Chabot, p. 48) ; « Quel péché ai-je commis pour être ainsi châtié de mon vivant ? » (le Jésuite dans la pièce La Pyramide ! (1975) de Copi) ; « Les rares condamnations à mort concernent le péché de tribadisme, c’est-à-dire d’homosexualité. » (la comédienne transgenre F to M dans le one-woman-show Mâle Matériau (2014) d’Isabelle Côte Willems) ; « Qu’est-ce que tu préfèrerais ? Qu’on se torture pour les péchés de nos ancêtres ? Mon grand-père était un nazi. Tu veux que je me suicide ? » (Petra, l’héroïne allemande s’adressant à son amante Jane, dans le roman The Girl On The Stairs, La Fille dans l’escalier (2012) de Louise Welsh, p. 37) ; « Nos péchés sont têtus. Nos repentirs sont lâches. Nous nous faisons payer grassement nos aveux. Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux, croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches. » (c.f. la chanson « Au lecteur » de Mylène Farmer, reprenant Charles Baudelaire) ; etc.

 

La croyance (et même la adhésion à la croyance) au désir homosexuel en tant qu’« identité pécheresse » (je ne parle pas ici des actes homosexuels, qui eux sont clairement peccamineux : le désir homosexuel, n’ayant pas visiblement fait l’objet d’un choix, peut tout au plus être considéré comme un « signe de péché », mais jamais comme un « péché » : le péché présuppose la liberté et la décision de se couper sciemment de Dieu) peut traduire chez le héros homosexuel une homophobie extérieure intériorisée : « Polly dit que le sida n’est pas une fatalité, que les pédés doivent arrêter de penser qu’ils le méritent. ‘C’est faux, c’est même archi-faux, affirme-t-elle, c’est comme quand vous pensez que vous méritez de vous faire agresser. Faut arrêter avec tout ça, on ne mérite pas le sida ni de se faire agresser quand on est pédé. Par contre, on peut se demander si cette propension des pédés à croire ça ne cache pas plutôt une forme d’auto-homophobie intériorisée. ’ Elle a tort. » (Mike, le narrateur homosexuel parlant de son amie lesbienne Polly, dans le roman Des chiens (2011) de Mike Nietomertz, pp. 72-73)

 

Son entourage amical homosexuel ou gay friendly ou homophobe conforte le héros homosexuel dans ce « choix » qu’il aurait fait d’être condamné au péché : « Brûlez en enfer. » (cf. un écriteau d’une passante face au défilé de la première Gay Pride londonienne de 1984, dans le film « Pride » (2014) de Matthew Warchus) ; « Elle va aller en enfer ! » (une des paroissiennes protestantes évangéliques parlant d’Elena après avoir découvert l’homosexualité de cette dernière, dans le film « Elena » (2010) de Nicole Conn) ; « C’est péché. » (Kevin dans la pièce Ma Double Vie (2009) de Stéphane Mitchell) ; « Le seul intérêt de l’homosexualité, c’est le péché. » (le père de Claire, l’héroïne lesbienne de la pièce Le Mariage (2014) de Jean-Luc Jeener) ; « C’est un péché. Dieu ne te le pardonnera pas. » (Rana s’adressant à Adineh l’héroïne transsexuelle F to M, dans le film « Facing Mirrors : Aynehaye Rooberoo », « Une Femme iranienne » (2014) de Negar Azarbayjani) ; « Ils ont envoyé Evaristo au Yucatan. Comme ça, il pourra expier tous ses péchés. » (Amada concernant le héros gay, dans le film « Le Bal des 41 », « El Baile de los 41 » (2020) de David Pablos) ; etc.
 
 

b) Le péché est nulle part puisque j’aime et je suis homo !

Contrebalancement impressionnant. Cette focalisation homosexuelle sur le péché est souvent suivie immédiatement après d’une censure : parce que j’ai culpabilisé, c’est vous qui m’avez jugé ! et pour rien, en plus ! Régulièrement, le héros homosexuel se focalise sur le péché, mais par mauvaise foi, va soutenir que cette focalisation vient des autres et pas de lui : « Tu es la personne la plus immorale que je connaisse ! » (Larry s’adressant à son pote gay Emory qui lui renvoie son infidélité, dans le film « The Boys In The Band », « Les Garçons de la bande » (1970) de William Friedkin) ; « Ils ont commis le péché original. Ils n’auront pas d’héritiers. Mais quel amour est idéal ? Qui est normal ? » (cf. la chanson « Adam et Yves » de Zazie) ; « Ça ne peut pas être péché que d’aimer. Jamais je ne goûterai le regret, plutôt se haïr, se rendre, mourir à la guerre sainte. Ça suffit ! Et alors ? La foi sèchera mes larmes. Sûrement que le soleil s’éteint et que Lucifer me guide, et je serai une ombre comme la Tour de Babel… et ton amour, Père rappelle-toi !! L’Église promulgue que je suis une pédale de merde, si c’est ça mon péché, je suis coupable, comme une infâme Inquisition. Mais je n’ai tué personne. Je me sens coupable d’être seulement moi. Je ne douterai, je ne douterai pas de moi. Non. Je ne douterai pas de moi. » (cf. la chanson « Madre Amadísima » de Haze et Gala Evora) ; « J’ai pris ce que tu m’as donné, de mon plein gré. Ce n’est pas de ta faute, Thérèse. » (Carol, l’héroïne lesbienne consolant son amante Thérèse en pleurs, culpabilisant d’avoir couché avec elle, dans le film « Carol » (2016) de Todd Haynes) ; etc.

 

À la croyance que le péché serait partout, le héros homosexuel va opposer celle que le péché n’est nulle part à partir du moment où il y a la sincérité que le péché n’existe pas, où il est considéré que les personnes « aiment » et n’ont « pas choisi » leur désir homosexuel : cf. le roman Ser Gay No Es Un Pecado (1994) d’Óscar Hermes Villordo, le film « W imie… » (« Aime… et fais ce que tu veux », 2014) de Malgorzata Szumowska, etc. « Allons bâtir ce nouveau monde où l’on ignore le péché. » (cf. la chanson « Au commencement » d’Étienne Daho) ; « La ‘faute’ n’existe pas. » (Aaron, l’un des héros homosexuels du film « Tu n’aimeras point » (2009) de Haim Tabakman) ; « Nous ne cherchons pas de faute. » (le fiancé de Gatal s’adressant à son amant, dans la pièce Hétéro (2014) de Denis Lachaud) ; « Ben, tu penses que tout ça est de ma faute ? » (Ben s’adressant à son amant George, dans le film « Love Is Strange » (2014) d’Ira Sachs) ; « De là à dire que nous les homos nous vivons dans le péché… Nous suivons bien mieux les Dix Commandements : Aimez-vous les uns les autres, Tu ne convoiteras pas la femme de ton voisin, etc. » (Fabien Tucci, homosexuel, dans son one-man-show Fabien Tucci fait son coming-outch, 2015) ; etc. Par exemple, dans le film « Children Of God » (« Enfants de Dieu », 2011) de Kareem J. Mortimer, Johnny, le héros homosexuel, range arbitrairement son homosexualité du côté de l’évidence, de la censure, du chantage aux sentiments, et à l’abri de la culpabilité : « Je ne peux pas changer ce que je suis. Est-ce que c’est vraiment de ma faute ? » dira-t-il en pleurs au révérend Ritchie. Plus tard, lors d’une prêche caricaturalement homophobe de Lena, la femme du pasteur Ralph (secrètement homosexuel), dans un temple protestant, il s’insurgera encore plus radicalement devant toute l’assemblée en rejetant sur la prédicatrice sa propre culpabilité (« Pourquoi cette question [de l’homosexualité] vous intéresse tant ? ») et en lui tenant le discours de l’anti-jugement soi-disant « déculpabilisateur » : « Que celui qui n’a pas péché jette la première pierre. »

 

La procréation (et donc l’enfant) est parfois invoquée par le personnage ou le « couple » homosexuel fictionnel pour cacher la réalité du péché de la pratique homosexuelle. Au fond, le péché d’Adam (homosexualisé/bisexualisé) ou d’Ève (féministe/lesbianisée), c’est de s’auto-créer, c’est de chercher à avoir un enfant et à l’élever tout seul, sans former un couple avec quelqu’un d’autre, sans amour, sans différence des sexes : « Elle a fait un bébé toute seule, elle a fait un bébé toute seule, c’était dans ces années un peu folles où les papas n’étaient plus à la mode, hou hou, elle a fait un bébé toute seule. » (cf. la chanson « Elle a fait un bébé toute seule » de Jean-Jacques Goldman) ; « Je deviens mère mais je reste une femme libre. » (Isabelle, la postulante au titre de mère porteuse, auprès du héros homosexuel Pierre, qui lui répond « Moi aussi. », dans la pièce Le Fils du comique (2013) de Pierre Palmade) ; « Oh femme unique, péché, désir, pour un serpent de Bible, a brisé son Empire. » (cf. la chanson « Ève lève-toi » de Julie Piétri) C’est d’incarner l’Amour à soi seul, sans la différence des sexes.
 
 

FRONTIÈRE À FRANCHIR AVEC PRÉCAUTION

 

PARFOIS RÉALITÉ

 

La fiction peut renvoyer à une certaine réalité, même si ce n’est pas automatique :

 
 

a) Le péché est partout et je suis un damné du Jardin d’Éden :

Quand l’individu homosexuel a l’humilité de reconnaître son désir homosexuel comme un « signe de péché », et l’acte homosexuel comme un péché, c’est-à-dire une action qui rejette la différence des sexes et Dieu, il parle ouvertement de « péché »… et ce n’est pas si rare, surtout chez les personnes homosexuelles croyantes : « Clermont-Ferrand, ce 20 octobre 1968. J’accuse aujourd’hui ma mère d’avoir fait de moi le monstre que je suis et de n’avoir pas su me retenir au bord de mon premier péché. Tout enfant, elle me considère comme une petite fille et me préfère à ma sœur, morte aujourd’hui. De mon père, j’ai le souvenir lointain d’un officier pâle, doux, presque timide, perpétuellement en butte aux sarcasmes de son épouse. » (Jean-Luc, 27 ans, homosexuel, dans l’essai Histoire et anthologie de l’homosexualité (1970) de Jean-Louis Chardans, p. 75) ; « J’ai désobéi à la totalité des Dix Commandements. » (Paul, racontant sa première visite au confessionnal après des années de débauche homosexuelle, dans le documentaire « Desire Of The Everlasting Hills » (2014) de Paul Check) ; « Je pense que les homosexuels éprouvent, peut-être inconsciemment, un tel poids d’opprobre sur leur être, au simple énoncé de ce mot, alors qu’il ne devrait s’agir que d’une lucidité sur leur vie, que la notion de péché est brouillée pour eux comme la surface d’une mare frôlée par les ailes d’un martin-pêcheur. » (Henry Creyx, Propos décousus, propos à coudre et propos à découdre d’un chrétien homosexuel (2005), p. 69) ; « La confession est dévalorisée par une sorte de contre-tabou, et très particulièrement chez beaucoup, beaucoup trop d’homosexuels même chrétiens, qui gèrent mal l’idée de péché qui lui est nécessairement associée. » (Idem (2005), pp. 71-72) ; « Ça n’a pas été facile de le dire. Surtout avec tout ce nuage noir de sida, de péché, de tout ce qui était interdit. » (Olivier, agriculteur homosexuel, dans le documentaire « Coming In » (2015) de Marlies Demeulandre) ; « Le seul problème que ça m’a posé était religieux. J’ai été chrétien. J’avais le sens du péché. Et donc ça m’a posé problème à cet égard. Jamais à l’égard de la société qui ne me paraît pas mériter tant de révérence. » (Pierre Démeron, homosexuel de 37 ans, au micro de Jacques Chancel, dans l’émission Radioscopie sur France Inter, 3 avril 1969) ; etc. Par exemple, dans le documentaire « Tellement gay ! Homosexualité et Pop Culture », « Inside » (2014) de Maxime Donzel, Rich Juzwiak, homosexuel, face à ses proches à qui il cachait ses actes homos, développe l’étrange sensation de « se sentir étrangement coupable alors qu’on n’a rien fait de mal ».

 

Très jeunes, les personnes homosexuelles, par superstition, peur ou haine d’elles-mêmes, ou sous l’influence de films d’épouvante qui les ont traumatisées, se sont identifiées au mal (cinématographique) qu’elles ont vu ou imaginé en comprenant la Vérité biblique de manière très approximative : « J’ai peur. La même peur qu’enfant, lorsque je pénétrais dans des églises, et que je me sentais pointé du doigt par toutes les statues, accusé de choses que j’étais incapable d’avouer, n’ayant aucune éducation catholique, ni baptême, ni catéchisme, pourtant ne doutant pas que mes fautes étaient terribles. » (Christophe Honoré, Le Livre pour enfants (2005), p. 107)

 
FOCALISATION Adam et eve
 

Certaines se sont même crispées sur la scène primitive du péché dit « originel » de la Genèse, autrement dit, ont considéré leur origine sexuée, existentielle, comme un péché : cf. le documentaire « Forbidden Fruit » (2000) de Sue Maluwa Bruce, Beate Kunath et Yvonne Zuckmantel. « C’est par un chemin bien long que je choisis de rejoindre la vie primitive. Il me faut d’abord la condamnation de ma race. » (Jean Genet, Journal du voleur (1949), p. 33) Certains auteurs gays se sont beaucoup intéressés au péché des origines d’Adam et Ève : Walt Whitman, Oscar Wilde, Pier Paolo Pasolini, Julien Green, John Cheever, Francis Bacon, etc. « L’attraction qu’a pour moi le sens du péché originel, c’est qu’il s’agit, je crois, d’une expérience universelle. » (John Cheever, cité dans le site La Isla de la Ternura, consulté en janvier 2003) Dans son article « Cuba, El Sexo Y El Puente De Plata » (1986) compris dans son essai Prosa Plebeya (1997), le poète homosexuel argentin Néstor Perlongher parle de la « nostalgie ironique d’une perte » (p. 120). Le dessinateur homosexuel Ralf König, qui parle beaucoup du récit de la Genèse de manière parodique, a même un serpent chez lui ! Or, comme l’explique très bien Jean-Pierre Winter, cette obsession homosexuelle ou transgenre pour l’origine de l’existence humaine et finalement pour être sa propre origine, cache un péché d’orgueil, que le psychiatre associe à un mouvement paranoïaque destructeur : « Les personnes préoccupées de façon trop exclusive par la question de leur origine, ou des origines en général, ont tendance à se sentir exclues et persécutées. » (Jean-Pierre Winter, Homoparenté (2010), p. 94)

 

Dans les cas où l’individu homosexuel parle du péché en tant que découverte de son homosexualité ou en tant qu’expérience sexuelle concrète, l’auditeur ne sait pas s’il cite (ironiquement) les gens de son entourage, ou les pensées qu’il leur prête, ou les propos qu’il aurait entendus, ou même s’il dit ce qu’il est le seul à penser (tout semble mélangé) : « J’étais dans le péché. » (Pierre, homosexuel, né dans une famille très catholique, témoignant dans le documentaire « Les Invisibles » (2012) de Sébastien Lifshitz) ; « Ma famille est très catho ; nous allions à l’église tous les dimanches. Au début, quand mes parents ont été au courant de mon homosexualité, ils ont flippé. Ils ont voulu me faire exorciser ! Ils ne comprenaient pas. C’était le mal, le diable. » (Cécile, témoin lesbienne dans la revue Têtu, n°69, juillet-août 2002) ; « Je voyais toujours le péché. Mes parents étaient très croyants. Pour eux, l’homosexualité c’était condamné, Dieu rejetait et haïssait les gais. Un dieu d’amour y paraît. Mes parents voulaient toujours me changer. J’étais coupable, j’étais pas bon, si je ne voulais pas, si je ne pouvais changer. Ils me faisaient lire des livres de témoignages de gais qui avaient réussi à changer et s’étaient mariés. J’étais un gros monstre, un déchet de la société. Si la religion n’avait pas été là, j’aurais peut-être pas essayé de me suicider. C’était super-opprimant cette idée du péché, de l’anormalité, de la faute, avec tout le monde qui y croit autour. » (un témoin homosexuel dans l’essai Mort ou Fif (2001) de Michel Dorais, p. 75) ; « Son mal-être rebondissait instinctivement parce que, dans son for intérieur, il avait commis l’irréparable en s’abandonnant aux bras de son copain Dylan. […]Après les grands secrets de mes six, dix et treize ans, à ma vie s’ajoutait maintenant le ‘péché’ qui n’aurait jamais dû être. » (Ednar, le narrateur homosexuel parlant des viols pédophiles qu’il a subis, et les mélangeant avec la découverte de son homosexualité puis la pratique homosexuelle, dans le roman autobiographique Un Fils différent (2011) de Jean-Claude Janvier-Modeste, pp. 19-20) ; « Dans le train, il y a quelques jours, une religieuse aux yeux brillants, protubérants, fixait le monde. C’était le visage de l’Inquisition. » (Annie Ernaux, Je ne suis pas sortie de ma nuit (1997), p. 44) ; « Tout se passe comme si, par ses déambulations quasi somnambuliques, le pédéraste cherchait à troquer sa solitude contre la participation à une malédiction collective. » (Roger Stéphane, Parce que c’était lui (2005), pp. 77-78) ; « Chaque fois que j’ai un orgasme, je ressens un très fort sentiment de culpabilité après coup. C’est normal, ils l’ont bien dit au catéchisme : se masturber, ce n’est pas bien. Il faut se retenir jusqu’au mariage, sinon on va en enfer. » (Alexandre Delmar, Prélude à une vie heureuse (2004), p. 23) ; « Un des procédés les plus utilisés par les médias pour discréditer le combat des défenseurs de l’amour vrai et de la vie est de leur attribuer cette pensée plus ou moins secrète à l’égard des sidéens : ‘C’est bien fait, Dieu les a punis ! ’ Propos malveillants qui n’ont jamais été tenus que dans l’imagination désordonnée de journalistes en mal de calomnie ou, peut-être, par quelque chrétien égaré, en contradiction radicale avec les exigences de la charité. » (Thomas Montfort, Sida, le vaccin de la vérité (1995), p. 15) ; « S’ils savaient que je suis homo, j’crois qu’ils m’enverraient bouler, parce que l’homosexualité à la campagne, c’est considéré comme quelque chose de mal. » (Sacha, jeune Allemand homo, dans le documentaire « Homo et alors ?!? » (2015) de Peter Gehardt) ; « J’ai l’impression que je serai mort bien avant la diffusion de ce film. Je ne sais pas pourquoi je vous parle. J’ai l’impression d’un retour de ce vieux poison. Je le ressens comme une punition. Parce que je donne une mauvaise image de ces pauvres chrétiens. » (Thomas, homosexuel, dans le documentaire « Du Sollst Nicht Schwul Sein », « Tu ne seras pas gay » (2015) de Marco Giacopuzzi) ; « J’ai peur d’être un mauvais sujet, peur de ne pas être un homme bon. Et cette peur est tellement intense que je sens bien qu’elle m’éloigne de Dieu. » (Alexander, en couple avec Sven un pasteur, idem) ; « Enfant, le réalisateur allemand Rosa Von Prauheim éprouvait une vive crainte de la damnation. » (la , idem) ; « C’était un péché d’avoir des pensées impudiques et bien sûr de se masturber. Je tenais le compte du nombre de fois où je me masturbais et je me sentais horriblement coupable. Plus j’essayais de réprimer mes pulsions, plus ça m’excitait. Tout ça était vraiment terrible. » (Rosa Von Prauheim, le réalisateur homosexuel, idem) ; etc.

 

Par exemple, dans son essai L’Homosexualité au cinéma (2007), Didier Roth-Bettoni fait lui-même l’association entre Sida et péché quand il parle du film « Mensonge » (1991) de François Margolin : « Mensonge’ fait sans hésiter porter le poids du péché (le VIH) sur les homosexuels. » (p. 594). Dans la biopic « Ma Vie avec Liberace » (2013) de Steven Soderbergh, le pianiste virtuose gay Liberace avoue à la fois qu’il a la Foi et qu’il a toujours été catholique, et en même temps qu’il finira en enfer : « J’étais damné d’une manière ou d’une autre… »

 

La croyance (et même l’adhésion à la croyance) au désir homosexuel en tant qu’« identité pécheresse » (je ne parle pas ici des actes homosexuels, qui eux sont clairement peccamineux : le désir homosexuel, n’ayant pas visiblement fait l’objet d’un choix, peut tout au plus être considéré comme un « signe de péché », mais jamais comme un « péché » : le péché présuppose la liberté et la décision de se couper sciemment de Dieu) peut traduire chez l’individu homosexuel une homophobie extérieure intériorisée. « Je lui répétais sans arrêt que l’homosexualité était quelque chose de dégoûtant, de ‘carrément dégueulasse’, qui pouvait mener à la damnation, à l’enfer ou à la maladie. » (Eddy Bellegueule parlant de son petit frère Rudy qu’il veut transformer en « hétérosexuel », dans le roman autobiographique En finir avec Eddy Bellegueule (2014) d’Édouard Louis, p. 53) Par provocation et par instrumentalisation de ce qui est considéré comme une blague, une grande part de la communauté homosexuelle va clamer haut et fort son attachement pour les « péchés » et son étiquette de « foyer de pécheurs qui ne se repentiront jamais », juste pour se rendre intéressante et donner une consistance à « l’homophobie » qu’elle est la première à s’infliger.

 
Focalisation Péché
 

L’entourage amical homosexuel ou gay friendly ou homophobe conforte parfois l’individu homosexuel dans ce choix qu’il aurait fait d’être condamné au péché. Par exemple, lors de l’enterrement du jeune Matthew Shepard en 1998 dans le Wyoming, des militants de la Westboro Baptist Church, emmenés par leur pasteur protestant Fred Phelps, ont manifesté avec des pancartes « God Hates Fags » (« Dieu déteste les pédés ») ou « Matt In Hell » (« Matthew en enfer »). On peut également penser au fameux écriteau « Les Pédés au bûcher » de la Manifestation Anti-PaCS à Paris en 1998 – écriteau dont on ne sait pas trop d’où il est sorti tellement il ne correspondait pas à l’esprit paisible de la Manif (il est même fort possible qu’il ait été élaboré par une personne homosexuelle soucieuse de se faire passer pour une personne du cortège afin de discréditer l’événement).
 
 

b) Le péché est nulle part puisque j’aime et je suis homo !

Contrebalancement impressionnant. En général, la focalisation homosexuelle ou transgenre sur le péché est suivie immédiatement après d’une censure : parce que j’ai culpabilisé, c’est vous qui m’avez jugé ! et pour rien, en plus ! « Ralf König a choisi d’ignorer la culpabilité. » (la du documentaire « Du Sollst Nicht Schwul Sein », « Tu ne seras pas gay » (2015) de Marco Giacopuzzi) L’individu homosexuel se focalise régulièrement sur le péché, mais par mauvaise foi, va dire que cette focalisation vient des autres et pas de lui : « Rien qu’une soirée, j’ai embrassé deux mecs. Certes, c’était un jeu stupide et les deux mecs sont hétéros, mais ça m’a plu. Pendant cette soirée, j’ai oublié mes parents et leur point de vue satanique sur l’homosexualité. » (Simon, un témoin homosexuel cité dans la revue Têtu, juin 2002) ; « Aux yeux des chrétiens, je suis un sataniste. De mon point de vue, bien sûr, je ne le suis pas. Satan n’est pas au cœur de ma vision des choses. Ce n’est pas un dieu. Il incarne la rébellion. Si je pouvais être mon propre dieu, tout cela lui serait égal. » (Gaalh, la star norvégienne de death metal, ouvertement homosexuel, dans le documentaire « Du Sollst Nicht Schwul Sein », « Tu ne seras pas gay », 2015) de Marco Giacopuzzi) ; etc.

 
FOCALISATION Trans
 

À la croyance que le péché serait partout, le sujet homosexuel va opposer celle que le péché n’est nulle part à partir du moment où il y a la sincérité que le péché n’existe pas, où il est considéré que les personnes « aiment » et n’ont « pas choisi » leur désir homosexuel. La procréation (et donc l’enfant) est parfois invoquée pour cacher la réalité du péché. Le péché d’Adam (homosexualisé/bisexualisé) ou d’Ève (féministe/lesbianisée), c’est de chercher à s’auto-créer, c’est de chercher à avoir un enfant et à l’élever tout seul, sans former un couple avec quelqu’un d’autre, sans amour, sans différence des sexes. C’est se définir comme un clone ou un « co-parent ». Et malheureusement, on y est !

 

Par exemple, dans le documentaire « Deux hommes et un couffin » de l’émission 13h15 le dimanche diffusé sur la chaîne France 2 le dimanche 26 juillet 2015 montre la mère porteuse (Veronica) au volant de sa voiture, en train de croquer une pomme tout en disant sa satisfaction d’offrir les deux bébés qu’elle porte à un « couple » homo. Incroyablement signifiant concernant le péché d’Ève. Tous les éléments y sont, et ce n’est même pas une mise en scène calculée. Satan se grille tout seul !
 

Pierre et Gilles

Pierre et Gilles

 

Aussi étonnant que celui puisse paraître à nos contemporains athées et laïcistes, le climat social relativiste fortement gay friendly en Occident, tendant à banaliser et à idéaliser les actes homosexuels pour leur retirer toute négativité et culpabilité, tout caractère peccamineux, renforce paradoxalement la force du péché homosexuel (et le sentiment de culpabilité qui va avec). Dans bien des cas, surtout quand il s’agit d’homosexualité, c’est le bannissement systématique de cette bonne gêne, de ces appels intérieurs de la conscience, qui est vraiment perturbant, et non la gêne en elle-même. Beaucoup de personnes homosexuelles se matraquent à elles-mêmes « C’est pas de ta faute ! C’est pas de ta faute ! » (cf. le film « Will Hunting » (1997) de Gus Van Sant), parce que précisément elles s’infligent souvent la culpabilité de ne plus se reconnaître coupables pour des actes qui parfois la mériteraient. L’encouragement à renier ses erreurs n’a jamais été une preuve d’amour de soi. La phobie de la culpabilité demeure le plus sûr moyen d’expérimenter de vieux réveils de conscience inexpliqués et coûteux. Ce n’est pas pour rien si, par exemple, la scène d’aveux déchirés de Marthe, l’héroïne lesbienne du film « La Rumeur » (1961) de William Wyler, émeut autant certaines personnes homosexuelles encore aujourd’hui : « La répugnance et le dégoût d’elle-même qu’elle éprouve me bouleverse quand je revois le film. Et je pleure en me demandant pourquoi. Pourquoi est-ce que cela me bouleverse ?!? Ce n’est qu’un vieux film idiot… Les gens ne réagissent pas comme ça aujourd’hui… Mais je ne crois pas que ce soit le cas. Les gens éprouvent toujours un sentiment de culpabilité que je partage, même si on prétend assumer sa condition en s’écriant : ‘Je suis heureuse, bien dans ma peau, bisexuelle, homo’, on a beau dire ‘Je suis homo et fière de l’être’, on se pose toujours la question de savoir ‘Comment est-ce que je suis devenu comme je suis ? ’. » (Susie Bright citée dans le documentaire « The Celluloïd Closet » (1981) de Rob Epstein et Jeffrey Friedman) L’embarras des sujets homosexuels face à leur désir ou à leur couple dit une part de la culpabilité justifiée qu’engendrent certains actes homosexuels. Loin d’être inquiétante, cette juste culpabilité est salutaire : elle dit que la conscience personnelle s’anime et se révolte à bon droit. Les personnes homosexuelles devraient s’accrocher à leurs gênes intérieures : elles sont de l’or en barre, des signes que leur conscience est encore en vie et qu’elle les appelle à se réveiller !
 

Vidéo-clip de la chanson "Such A Shame" de Talk Talk

Vidéo-clip de la chanson « Such A Shame » de Talk Talk


 
 

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